Transcript

Stabilisation des mouvements de terrainMthodes et dfinitions

Prpar par A. Adel Ingnieur gologue Dessau Maghreb

Stabilisation des mouvements de terrain

Les mouvements qui affectent les versants sont extrmement varis par leur dimension, leur morphologie, leur ptrographie et leur volution cinmatique. De nombreuses classifications ont t proposes, fondes sur diffrents critres qui sont : la morphologie, la cinmatique et la vitesse du mouvement, la nature des matriaux et la cause de la rupture, Selon le volume et mode de dplacement des matriaux sur les talus et versants, trois familles principales peuvent tre distingues : Les glissements en terrain meuble, caractriss par la formation dune surface de rupture le long de laquelle se produisent les dplacements ; Ces mouvements de variables volumes se manifestent par le dplacement dune masse de matriaux le long dune (ou plusieurs) surface(s) de rupture. La forme de cette dernire dpend en partie de la structure gologique du site. Les formations complexes donnent gnralement lieu des surfaces de ruptures qui suivent les contacts entre couches et qui se dveloppent au sein de zones de plus faible rsistance. Ces surfaces peuvent tre de forme quelconque. Les facteurs dclenchants sont gnralement : - Les modifications du rgime hydraulique (saturation du matriau) ; - Les terrassements ; - Lrosion naturelle (ruissellements, rosion des berges); - Les acclrations produites par les sismes.

Fig. 1: Typologie des glissements

boulements et croulement en terrain rocheux, engendrs par le dtachement rapide, en gnral le long de discontinuits prexistantes, dune masse de rocher qui se disloque lors de sa propagation vers le pied du versant. Les volumes des matriaux varient entre une dizaine de milliers de mtre de cubes (cas dcroulement) et une centaine de milliers de mtres de cubes (cas dboulement). Les facteurs dclenchants sont les apports deau, les cycles de gel-dgel, lrosion, le sous-cavage et les sismes.

Fig. 2: Instabilits en terrains rocheux

Les coules boueuses et laves torrentielles, assimilables lcoulement dun fluide visqueux charriant des lments de tailles diverses (depuis les fines jusquaux blocs) sur des distances parfois importantes. Ces phnomnes se produisent en prsence de grandes quantits deau. Cest le cas pendant de fortes prcipitations ou lors de rupture des digues ou de barrages.

Fig. 3: Les coules boueuses

Techniques de stabilisation : Face un problme de stabilit, deux types de solutions sont possibles : Implanter ou dplacer le btiment, louvrage dart ou la route en dehors de la zone en mouvement, dans un secteur reconnu comme stable ;

Concevoir louvrage de telle sorte quil ne soit pas endommag par le mouvement de terrain : soit en rsistant aux efforts apports par le mouvement de terrain (solution rserve aux petits glissements), soit en adaptant le mode de construction de sorte que les fondations soient dissocies du sol en mouvement. Si ce type de solution nest pas retenu, on est amen conforter la pente avec une ou plusieurs techniques de stabilisation. Le choix de la mthode de stabilisation devra rsulter dun compromis entre les aspects suivants : Lanalyse des paramtres techniques du site ; La connaissance des techniques de stabilisation ; Les impratifs technico-conomiques. Lensemble des donnes gologiques, morphologiques et gotechniques recueillies fait lobjet, en gnral, dune reprsentation sur un fond de plan et sur une ou plusieurs coupes longitudinales du site en question, et qui sert la construction dun modle gotechnique pour le calcul de stabilit, dans lequel la surface topographique, les diffrentes couches de sol et les hypothses hydrauliques sont dfinies. Les diffrentes techniques de stabilisations sont : 1. Terrassements Les conditions de stabilit tant directement lies la pente du terrain, le terrassement reste le moyen daction le plus naturel. On peut distinguer trois groupes de mthodes de stabilisation par terrassement : les actions sur lquilibre des masses : allgement en tte, remblai en pied ; les actions sur la gomtrie de la pente : purge et reprofilage ; les substitutions partielles ou totales de la masse instable. 1.1 Remblai de pied Le chargement en pied dun glissement est une technique souvent utilise, gnralement efficace. Louvrage, galement appel banquette, berme ou bute, agit par contrebalancement des forces Motrices et il permet de contenir les dplacements de la masse instable. Pour plus defficacit, il est recommand de raliser un ancrage dans les formations sous-jacentes en place. Les ouvrages ainsi dimensionns, en plus de leur fonction du poid, peuvent assurer un drainage du massif en utilisant un matriau drainant. La stabilit au grand glissement suppose que : louvrage limite les risques de reprise du glissement en amont ; louvrage ne dclenche pas dautre glissement, par exemple laval.

Fig. 4: Dimensionnement dune bute (remblais) de pied

1.2 Allgement en tte Lallgement en tte de glissement consiste terrasser dans la partie suprieure. Il en rsulte une diminution du poids moteur et, par consquent, une augmentation du coefficient de scurit. La mthode de dimensionnement consiste en un calcul de stabilit le long de la surface de rupture dclare en prenant en compte la modification de gomtrie en tte. Le matriau terrass peut tre substitu par un matriau lger (polystyrne ou matriau structure alvolaire). Le dchargement par terrassent du sommet de la masse glisse peut crer des risques de rgression des dsordres vers lamont court ou long terme.

Fig. 5: Dimensionnement dun allgement en tte.

1.3 Reprofilage Les conditions de stabilit dun talus tant directement lies sa pente, on peut assez simplement augmenter la scurit par retalutage du terrain naturel. Dans ce sens, le procd sapparente lallgement en tte : il consiste en un adoucissement de la pente moyenne. Ce type de traitement est particulirement bien adapt aux talus de dblais, et il est de pratique courante. Notons que lexcution de risbermes a lavantage damliorer la stabilit par rapport une pente unique et de crer des voies daccs pour lentretien ou des travaux complmentaires. Ladoucissement de la pente est gnralement mal adapt aux versants naturels instables car il met en jeu des volumes de sol trs importants.

1.4 Purge Les techniques de terrassement saccompagnent frquemment de purges du matriau dplac par le glissement. Cette solution est gnralement limite aux glissements de taille modeste. On peut, dans certains cas, purger lensemble du matriau gliss, condition que la surface mise nu soit stable. 1.5 Substitution totale ou partielle La substitution totale consiste venir purger lensemble des matriaux glisss ou susceptibles de glisser, et les remplacer par un matriau de meilleure qualit. Cela permet de reconstituer le profil du talus initial. Il importe de vrifier la stabilit au cours des phases de travaux et celle du talus dfinitif dans lequel il faut prendre en compte les caractristiques du matriau de substitution et du matriau en place. La substitution de matriaux glisss suppose que lon connaisse le volume de matriaux concern, que lon excave plus profondment que la surface de rupture, et que lon ralise des redans afin dassurer un bon accrochage entre le substratum et le sol dapport. La tenue des talus provisoires de la purge dpend des conditions de terrassement, de la mtorologie, des htrognits locales.

Fig. 6: Substitution totale des matriaux glisss.

Des substitutions partielles sont souvent employes, sous forme de bches, de masque, de contreforts ou dperons

Fig. 6: Les diffrentes mthodes de la substitution partielle.

2 Dispositifs de drainage Dans la plupart des cas de glissement, leau joue un rle moteur dterminant. La technique de drainage pour but de rduire les pressions interstitielles au niveau de la surface de rupture lorsque celle-ci existe et ainsi daugmenter la rsistance au cisaillement du terrain. Les diffrentes techniques qui peuvent tre mises en oeuvre pour atteindre cet objectif relvent de deux options fondamentales : viter lalimentation en eau du site ; expulser leau prsente dans le massif instable. De nombreux paramtres conditionnent lefficacit dun systme de drainage, en particulier la nature et lhtrognit des terrains, la gomtrie des couches aquifres, la permabilit et lanisotropie des sols, les alimentations et les exutoires. Comme la plupart des ouvrages, les dispositifs de drainage ncessitent un entretien rgulier qui, sil nest pas ralis, peut leur enlever toute efficacit. On distingue : les drainages de surface et les ouvrages de collecte des eaux, les tranches drainantes, les drains subhorizontaux, les masques et perons drainants, les drains verticaux, et enfin les galeries et autres ouvrages profonds. Toutes ces techniques peuvent tre utilises seules ou associes, ou en complment dautres techniques de stabilisation. 2.1 Collecte et canalisation des eaux de surface Lobjectif est de limiter les infiltrations dans le massif en mouvement. Les eaux peuvent provenir de zones de sources, dun dfaut dtanchit sur un rseau ou un bassin de stockage lamont ou plus simplement de limpluvium et des eaux de ruissellement.

En effet, les eaux de surface ont tendance sinfiltrer dans les fissures, stagner dans les zones de faible pente ou en contre pente, mettant ainsi en pression la surface de rupture et aggravent linstabilit amorce. Il est recommand de faon gnrale dviter dimplanter des ouvrages rigides sur les fissures provoques par les mouvements.

Fig. 7: Rseau de drainage de surface.

2.2 Tranches drainantes Les tranches drainantes, dont une coupe type est prsente sur la figure 08, sont des ouvrages couramment utiliss pour rabattre le niveau de la nappe. Elles sont implantes sur le site de faon venir recouper les filets deau (lignes de courant dans un horizon homogne, couche aquifre et les venues deau ponctuelles). Le choix de limplantation (dans le sens de la plus grande pente ou dans un sens parallle aux lignes de niveau, ou encore en pis), de la profondeur et de lespacement des tranches dpend des rsultats de ltude hydrogologique et conditionne lefficacit du drainage. Ces tranches peuvent tre ralises de plusieurs faons : la pelle mcanique : la profondeur de la tranche peut atteindre 5 6 m sur une largeur de lordre du mtre. Un drain souple est gnralement plac au fond avec un sable propre en protection. Le remplissage est ralis en matriau drainant ; un gotextile est parfois dispos comme filtre ; la trancheuse : les profondeurs atteintes sont du mme ordre de grandeur, ave une largeur rduite de la tranche de lordre de 30 cm. Un dispositif mcanis permet de mettre en place un gotextile, le drain en plastique et le matriau drainant de remplissage ; la haveuse de paroi : les profondeurs atteintes sont plus importantes (jusqu 20 m). La technique de creusement est identique celle utilise pour les parois moules, par panneaux successifs (de 2 3 m). La tenue des parois de la fouille est assure par une boue biodgradable.

Fig. 8: Tranche drainante.

Fig. 9: Coupe type dune tranche drainante.

2.3 Drains subhorizontaux Lorsque les contraintes daccessibilit du site ou les conditions de circulation interdisent la ralisation de tranches, la ralisation de drains subhorizontaux peut permettre de diminuer les pressions interstitielles et de dcharger des aquifres localiss. La technique consiste raliser de nombreux forages avec une faible pente sur lhorizontale (2 5) et y placer des tubes crpins. Ces tubes sont gnralement en PVC (50 80 mm de diamtre), parfois en acier lorsque de grandes dformations sont susceptibles de se produire. Un dispositif de captage des eaux recueillies dans les drains avec un exutoire adapt complte lensemble. Les drains subhorizontaux sont disposs en un ou plusieurs faisceaux ou plus simplement en lignes. Cette technique semploie dans de nombreuses configurations de glissement et dans de nombreuses formations gologiques. Les drains subhorizontaux permettent en particulier de drainer des couches et des poches aquifres, ventuellement en charge, et des circulations deau localises.

Fig. 10: Model des drains subhorizontaux.

2.4 Drains verticaux, puits et galeries drainantes Les puits drainants quips de pompes, installs en ligne, constituent un cran drainant, condition que la maintenance soit correctement assure. Le forage de drains subhorizontaux depuis le fond de puits de gros diamtre permet daccrotre leur rayon daction. Les drains-siphons sont des forages verticaux quips dun systme dvacuation de leau par siphonnage vers un point bas du versant (de cote infrieure celle du fond de forage). Les galeries drainantes constituent un autre type douvrage profond, qui est onreux et efficace, partir du quel il est possible, comme pour les puits, de forer des drains subhorizontaux qui augmente le rayon daction du drainage. 2.5 Masques et perons drainants Les masques drainants sont des ouvrages en matriaux granulaires grossiers mis en place en parement de talus ; leur rle est dannuler la pression interstitielle dans la portion correspondante de terrain, mais leurs caractristiques trs frottantes apportent galement un gain de stabilit. Les perons drainants sont des sortes de masques discontinus ; sil est inutile ou difficile de raliser un masque, on se contente de faire des saignes remplies de matriau drainant rgulirement espaces.

3 Introduction dlments rsistants On entend par lments rsistants les structures telles que : murs de soutnement ; tirants dancrage et murs ancrs ; clouages par des barres, des micropieux ; ranges de pieux, de barrettes ou de profils mtalliques. Ces techniques ne sattaquent pas la cause des mouvements mais visent rduire ou arrter les dformations. Elles sont intressantes dans les cas o les solutions curatives (terrassements et drainages) ne peuvent pas tre techniquement ou conomiquement mises en oeuvre. On peut galement introduire des lments rsistants titre prventif, de faon viter les dplacements, dont une consquence serait de diminuer la rsistance au cisaillement des sols. La compatibilit des dplacements du sol et des structures doit tre prise en compte lors du choix de ce type de technique. En effet, dans le cadre de travaux de stabilisation de glissements de terrain trs actifs, lexcution douvrages rigides tels que des tirants prcontraints nest pas envisageable puisque les dplacements du sol conduiraient la rupture des tirants. Il est prfrable de construire, dans ces conditions, des ouvrages qui supportent mieux les dformations. 3.1 Ouvrages de soutnement On trouve dans cette catgorie deux types douvrage : les ouvrages rigides (murs poids ou ancr) et les ouvrages souples (murs cellulaires, gabions, remblais renforcs par armatures). Les ouvrages rigides ne sont pas les mieux adapts la stabilisation des glissements de terrain, du fait de leur incompatibilit avec toute dformation ; en outre, le dimensionnement doit prendre en compte les efforts trs importants engendrs par le glissement. Louvrage sera considr fixe lorsquil est correctement ancr et suffisamment rsistant vis--vis des efforts qui lui sont appliqus. La pratique est de dimensionner louvrage en prenant en compte un effort limite de bute du sol en amont, qui est leffort maximal apport par les masses en mouvement (la dformation du sol tant une compression). Les ouvrages souples sont des structures obtenues partir de gabions, de murs cellulaires, ou de sol renforc par fils, par armatures synthtiques ou mtalliques, par nappes de gotextiles, par grilles mtalliques ou synthtiques. Ces ouvrages fonctionnent comme les massifs poids dcrits ci-dessus. Ils sont dimensionns en deux phases : vis--vis de la stabilit interne selon une mthode propre chacune des techniques, et vis--vis de la stabilit externe ainsi que dcrit prcdemment. Ces techniques, qui admettent les dformations du sol, sont utilises nettement plus couramment que les murs rigides.

3.2 Tirants dancrages Le principe consiste rduire les forces actives du glissement et accrotre les contraintes normales effectives sur la surface de rupture. Pour ce faire, on ancre des tirants constitus de cbles dacier multitorons dans le terrain stable situ sous la surface de rupture, et on applique en tte un effort de traction. Cet effort peut tre rparti sur la surface du terrain par lintermdiaire de plaques ou de petits massifs en bton arm. Dans de nombreux cas, les tirants sont combins un mur ou des longrines. Lutilisation de tirants prcontraints suppose : La dtermination dune force dancrage ncessaire par mtre linaire de glissement pour assurer une valeur suffisante du coefficient de scurit ; La justification du choix et des caractristiques des tirants.

Fig. 11: Exemple dun renforcement par tirants dencrage.

3.3 Clous et micro-pieux La stabilisation dun glissement de terrain par clouage est base sur le principe que la partie suprieure du massif en mouvement engendre une dformation des clous ; les efforts qui en rsultent sont transmis par les clous au substratum, qui soppose alors au mouvement. Lefficacit du clouage rside dans la mobilisation defforts de traction et de cisaillement dans le clou. Pour que ces efforts stabilisateurs soient mobiliss, il est ncessaire quil se produise des dplacements relatifs sol/clou. Le clouage a donc un effet progressif et des mouvements rsiduels se produisent encore aprs le clouage. Par ailleurs, on ne peut pas stabiliser par cette technique des glissements de grande ampleur, qui ncessiteraient lintroduction defforts considrables.

Le dimensionnement dun ouvrage de confortement par clouage se fera en justifiant une scurit suffisante vis--vis des risques de rupture, qui se situent : dans le clou (barre ou tube dacier) par traction et /ou cisaillement ; au contact sol/clou, dans la partie infrieure dancrage (arrachement du clou) ; dans le sol, le long de la surface de rupture par insuffisance defforts apports par les clous ; dans le sol, pour des glissements en profondeur sous louvrage (insuffisance de fiche des clous), ou en aval si le clouage est plac trop en amont sur le versant, ou en amont si le clouage est plac trop en aval sur le versant.

Fig. 12: Exemple de clouage dun glissement.

3.4 Pieux et barrettes La stabilisation dun glissement par des pieux ou des barrettes procde du mme principe que prcdemment. Mais, compte tenu de leur inertie importante, les pieux travaillent principalement en flexion/cisaillement quand les clous de faible inertie travaillent en traction/flexion. Gnralement, on dispose deux ou trois ranges de pieux (tubes mtalliques ou pieux en bton arm) dans le tiers central de la pente instable. Les risques de rupture dun confortement par pieux ou barrettes se situent : dans le pieu par flexion/cisaillement ; au contact sol/pieu, en sollicitation latrale du sol par le ft du pieu (plastification du sol) ; dans le sol, le long de la surface de rupture, par insuffisance defforts apports par les pieux ;

dans le sol, si un glissement se produit en profondeur sous louvrage (insuffisance de fiche des pieux), en aval si le clouage est plac trop en amont sur le versant, en amont si le clouage est plac trop en aval sur le versant.

Fig. 13: Exemple de stabilisation par pieux.

Bibliographie Stabilit des pentes (glissement en terrain meuble), Jean-Louis Durville et Gilles Sve, Doc. C 254. Guide technique, Stabilisation des glissements de terrains, LCPC, Fvrier 1998.


Recommended