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Structures caténaires tendues ARC-2007 Conception de structures R. Pleau École d’architecture, Université Laval

18 caténaires comprimées

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Structures caténaires

tendues

ARC-2007 Conception de structures

R. Pleau

École d’architecture, Université Laval

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Stabilité des structures caténaires

comprimées

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Lorsqu'elle adopte une forme caténaire, une arche est sollicitée uniquement en compression et elle peut donc être dimensionnée c o m m e u n p o t e a u . M a i s , contrairement au câble suspendu, l'arche est rigide et, si le profil de charge est modifié, elle ne peut pas se dé fo rmer l i b rement pour conserver une forme caténaire. Lorsque le profil de charge s'écarte de la forme caténaire, il induit dans la structure des efforts de flexion qui s ' a j o u t e n t a u x e f f o r t s d e compression que l'arche doit supporter et la structure doit alors être dimensionnée comme un poteau-poutre pour résister à l'action combinée des forces de compression et de flexion. Une seconde alternative consiste à u t i l i s e r u n e s t r u c t u r e d i t e stabilisatrice qui, en s'opposant au déplacement latéral de l’arche, élimine (ou réduit substantiellement) les efforts de flexion.

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Pour illustrer les stratégies de stabil isation, on peut prendre l'exemple d'un pont routier où le tablier est supporté par une arche. L'arche peut être placée au-dessus, en dessous ou au milieu du tablier. On peut décider que le tablier sera simplement suspendu ou déposé sur l'arche et que celle-ci sera suffisamment rigide pour résister aux efforts de flexion. Elle agit alors comme un poteau-poutre. On peut aussi choisir de rigidifier le tablier pour qu'il résiste aux efforts de flexion et que l'arche ne soit sollicitée qu'en compression pure. Enfin, il est possible de retenir une solution intermédiaire où l'arche et le tablier contribuent tous deux à résister aux efforts de flexion. Une dern ière so lut ion cons iste à trianguler l'espace entre le tablier et l'arche pour former un treill is capable de résister aux efforts de flexion. Cette stratégie permet de réduire à la fois la taille de l'arche et celle du tablier.

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Pour calculer la résistance à la compression d'une arche on doit déterminer sa longueur libre de flambement (Le). Lorsque le déplacement latéral de l'arche est empêché à certains endroits de son profil, la longueur de flambement est égale à la distance entre deux points de retenue. Si, au contraire, l'arche est libre de se déplacer latéralement sur toute sa longueur, le calcul de Le est plus complexe mais, en première approximation, on peut considérer que la longueur de flambement est égale à la distance linéaire entre son sommet et l'un des points d'appui. Les lignes pointillées sur les schémas ci-dessous représentent la déformation de l'arche au moment de la rupture par flambement.

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Considérons maintenant la poussée horizontale que l'arche exerce à ses points d'appui. La solution idéale consiste à assoir l'arche directement sur le roc ce qui n'exige que des fondations de petite dimension. La seconde option consiste à déposer l'arche sur des contreforts massifs en béton armé qui transmettent les efforts verticaux et horizontaux au sol de fondation. Une troisième possibilité consiste à déposer l'arche sur des semelles de fondation enfouies dans le sol. Ces semelles devront être de grandes dimensions pour résister à l'action combinée des forces verticales et horizontales.

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Une dernière solution, très efficace, consiste à relier les deux points d'appui par un tirant en acier qui peut être placé au-dessus ou au-dessous du niveau du sol. Le tirant reprend les efforts horizontaux de sorte que seules les forces verticales sont transmises aux semelles de fondation.

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Exemple 1

Toiture recouvrant un stade de soccer

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La toiture d'un stade de soccer intérieur construit à Chicoutimi est consti-tuée d'une série d’arches en bois lamel lé-col lé espacée de 8 m c/c. L'arche f ranchi t une portée libre de 70 m; l'un des points d'appui est déposé au sol alors que le second est appuyé sur une structure triangulaire en acier à 6 m au-dessus de la fondat ion. On souhaite que, au centre de la portée, l'arche soit située à 18 m au-dessus des points d'appui. Il faut donc tracer le profil exact de l'arche et dimen-sionner les profilés en bois lamellé-collé qui seront utilisés.

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La charge morte de la toiture est estimée à 1,6 kN/m2 et la charge de neige à Chicoutimi est égale à 3,2 kN/m2 (voir tableau 2.5). La charge totale majorée (wF) est donc égale à:

La charge totale (W) que supporte une arche est donnée par:

On peut subdiviser la toiture en 10 intervalles de 7 m de largeur (10 x 7 m = 70 m) et, au centre de chacun de ces intervalles, placer une charge concentrée 380,8 kN (i.e. 3808kN/10). Sur le diagramme de forme, on indique la position des trois points par lesquels doit passer l'arche, on place les 10 charges concentrées et on trace la corde de fermeture entre les deux points d'appui.

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Puisque la charge est uniformément répartie, on sait que le point z se situe à mi-hauteur de l 'axe vert ical représentant les forces externes i.e. superposé au point f. À partir de ce point, on trace une ligne parallèle à la corde de fermeture sur le polygone de force. On sait que le point o se trouve sur cette ligne mais il nous est pour l'instant impossible de trouver sa localisation exacte. On place donc le point o arbitrairement sur cette ligne et, après avoir compléter le polygone de forces on trace le profil de l'arche sur se diagramme de forme. Sur ce même diagramme on trace deux cordes qui relient le sommet de l'arche à ses deux point d'appui (ce sont les lignes pointillées en rouge). Sur le polygone de forces, on trace deux droites qui sont parallèles à ces cordes et qui passent par le point o. Ces droites croisent l'axe vertical des forces externes en deux points identifiés x et y.

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Sur le diagramme de forme on peut alors tracer deux cordes qui relient le point recherché au sommet de l'arche et les deux points d'appui. Ce sont les lignes pointillées en vert sur la figure ci-contre. Sur le polygone de forces, on trace alors deux droites parallèles à ces cordes qui passent par les points x et y. Ces deux droites se croisent au point o. On complète alors le polygone de forces et, à partir de celui-ci, on trace le profil de l'arche sur le diagramme de f o r m e . C e p r o fi l p a s s e maintenant par les trois points pré-identifiés.

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Le polygone de forces nous indique que la force de compression maximale dans l'arche est égale à 2981 kN et qu'elle se situe près de l'appui gauche. Dans l'axe vertical, la longueur de flambement est égale à 39,3 m. Dans l'axe horizontal elle est égale à la distance entre les entretoises, c'est-à-dire les poutres de bois qui sont orientées perpendiculairement entre les arches pour empêcher celles-ci de se déplacer latéralement. La valeur du coefficient de retenue est égal à 1 dans les deux directions (kx = ky = 1). En consultant le tableau 2,8 on trouve que la contrainte admissible en compression (Fc) et le module élastique (E) du bois lamellé-collé sont respectivement égaux à 30,2 MPa et 12,4 GPa si on utilise du sapin Douglass. En utilisant la feuille EXCEL conçue pour le dimensionnement des poteaux en bois, on fait varier les dimensions du profilé (b et h) ainsi que la longueur de flambement selon l'axe faible (Ly) pour trouver un profilé pour lequel Prx et Pry soient supérieurs à Pf = 2981 kN.

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Après quelques itérations, notre choix s'arrête sur un profilé de 215x1200 mm pour lequel on trouve que Prx = 2999 kN > 2981 kN. On trouve également que la distance maximale entre les entretoises est égale à 7 m (Pry = 3029 kN > 2981 kN).

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Vf = wFL82 = 6,8 kN

m2 × 8m × (70m)2 = 1904kN

Mf = wFL2

8 = 6,8 kNm2 × 8m × (70m)2

8 = 33320kN − m

Pour mieux saisir l'efficacité structurale des arches on peut calculer la taille que devrait posséder les profilés en bois si on remplaçait les arches par des poutres horizontales. Le moment fléchissant (Mf) et l'effort tranchant (Vf) maximaux seraient alors donnés par:

En utilisant la feuille EXCEL prévue à cette fin avec Fb = 25,6 MPa et Fv = 2 MPa (les propriétés du bois lamellé-collé en Sapin Douglass) on choisit, après quelques itérations, un profilé de 315x5300 mm pour lequel on trouve que Mr = 33978 kN-m > 33320 kN-m et Vr = 2003 kN > 1904 kN. On constate que, comparativement à l'arche, la poutre serait presque 4,5 fois plus haute qu'elle nécessiterait un volume de bois 6,5 fois plus important. Il est clair que, pour cet ouvrage, le choix d'une toiture plate reposant sur des poutres en bois ne serait pas une solution envisageable.

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Exemple 2

Le Broadgate Exchange House

à Londres

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n 1990 on inaugurait à Londres le Broadgate Exchange House, un édifice à bureaux de 10 étages (10 planchers + 1 toit) conçu par la firme d'architectes Skidmore, Owings & Merril. Cet édifice est supporté par des arches en acier pour dégager une vaste esplanade au-dessus d'un stationnement et d'une gare de trains souterraine. Chacune des arches est haute de 42 m et franchit une portée de 78 m entre ses points d'appui.

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18A = (18,5 + 15)m

2 × (12 × 6m) = 1206m2

En plan, le bâtiment fait 52 m x 78 m et il est supporté par quatre arches: deux arches extérieures placées devant les façades et deux arches intérieures. La charge morte des planchers et de la toiture est évaluée à 2,8 kN/m2. La charge d’utilisation est égale à 2,4 kN/m2 pur les planchers (bureaux) et 1,0 kN/m2 pour le toit (charge minimale imposée par le C.N.B.). Les deux arches intérieures sont celles qui supportent la plus grand aire tributaire. Pour chacun des étages, cette aire tributaire (A) est égale à:

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F . R . = 0,3 + 9,8A

= 0,3 + 9,810 × 1206m2 = 0,33

WD = 2,8 kNm2 × 1206m2

etage× 11etages = 37145kN

La charge morte totale (WD) supportée par l’arche est donnée par:

Le facteur de réduction de la charge d’utilisation pour l’ensemble des planchers (F.R.) est égal à:

La charge vive totale (WL) est calculée en additionnant la charge minimale d'utilisation sur le toit à la charge d'utilisation des planchers majorée par le facteur de réduction:

WL = Wtoit + Wplanchers

WL = (1 kNm2 × 1206m2) + (2,4 kN

m2 × 1206m2

etage× 10etages × 0,33)

= (1,25 × 37145kN ) + (1,5 × 10757kN )WF = 1,25WD + 1,5WL

= 10757 kNLa charge totale majorée (WF) est donc égale à:

= 62567 kN

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L’arche supporte douze charges concentrées transmises par les poteaux (les deux poteaux d’extrémité transmettent leur charte directement aux points d’appui sans solliciter l’arche). Chacune de ces charges concentrées est égale à 5214 kN (62567kN/12). En utilisant la méthode g raph ique , on peu t t r ace r l e diagramme de forme et le polygone de forces de la structure. On trouve alors que la force de compression maximale dans l’arche est égale à 34940 kN. On remarquera que le polygone de forces est très compact ce qui témoigne de sa grande efficacité structurale.

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L’arche est constituée de deux profilés en C placés dos dos de part et d’autre des membrures verticales ce qui facilite les assemblages. Les deux profilés en C sont liés au niveau de leurs ailes de manière à ce que leur élancement selon l’axe faible soit au moins égal à celui selon l’axe fort. Chacun des profilés en C devra donc résister à une charge de compression de 17470 kN (i.e. 34940kN/2) selon son axe fort. L’arche est retenue par deux membrures inclinées à 45°. La longueur effective de flambement (Le) est égale à 43 m i.e. la distance maximale entre deux points d’appui.

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En utilisant la feuille de calcul EXCEL, notre choix s’arrête, après quelque itérations, sur le profilé illustré ci-dessous (Prx = 17602 kN > 17470 kN) qui fait 1200 mm de hauteur par 300 mm de largeur. La membrure en acier qui forme l’arche est très élancée puisque son épaisseur ne représente qu’environ 1/92ème de sa longueur même si elle supporte un bâtiment de 10 étages. Par comparaison, ce rapport est d’environ 1/24ème pour les poutres usuelles qui ne supportent qu’une toute petite surface de plancher. Cela illustre bien la grande efficacité structurale des structures caténaires comprimées.

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La figu re c i - con t re mon t re l e dé ta i l d’assemblage de l’arche à son point d’appui. La composante horizontale de la force de compression de 34940 kN à la base de l’arche est reprise par un tirant horizontal qui relie ses deux points d’appui. Cette force horizontale est égale à 15640 kN comme l’indique le polygone de forces de la structure. De cette façon, seule une force verticale de 21283 kN est transmise aux fondations ce qui évite bien des soucis dans la conception des ouvrages sous-terrains. Le tirant est lui-même constitué de la superposition de quatre plaques rectangulaires en acier de 450 mm de hateur. La résistance à la traction de chacune des membrures du tirant est égale à:

Tr = ϕbhFt ≥ Tf

où b et h représente respectivement la largeur et la hauteur de la plaque. La largeur de chacune de ces plaques (b) est donc égale à:

b ≥Tf

ϕhFt≥ 15640000N/4

0,9 × 450 mm × 350N/mm2 ≥ 28mm

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Les deux membrures diagonales qui re l ient l ’arche au t i rant con t r ibuen t à acc ro î t re sa rés is tance en rédu isant sa longueur de flambement (Le). Mais la fonction principale de ces membrures est de servir de pièces de contreventement pour accroître considérable-ment la stabilité de la structure. La figure ci-contre montre la déformation de l’arche lorsqu’elle atteint le point de rupture par flambement avec ou sans membrures diagonales (Iyengar et al., 1993). Cette figure montre bien que la présence des diagonales (l’une sollicité en traction, l’autre en compression) réduisent très considérablement le dép lacement ho r i zon ta l au sommet de l’arche et la longueur de flambement.

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La forme de l’arche a été choisie pour agir comme une structure caténaire lorsqu’elle est soumise à une charge uniformément répartie. Elle peut cependant subir des déformations importantes lorsque la charge n’est pas symétrique. La figure ci-contre montre comment les membrures de contreventement diagonales réduisent considérablement la déformation de la structure lorsqu’on applique la charge vive sur une moitié de la structure et seulement 50% de la charge vive sur l’autre moitié. On constate que la présence des membrures diagonales augmente de façon importante la rigidité de la structure pour lui conférer une bien meilleure rigidité.

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Broadgate Exchange House à Londres

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Broadgate Exchange House à Londres

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Broadgate Exchange House à Londres

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Exemple 3

Le pont Salginatobel

en Suisse

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Robert Maillart est un ingénieur suisse qui, en utilisant les méthodes d’analyse graphique des structures, a conçu et construit de remarquables ponts en béton armé en forme d’arche au début du 20e siècle. Le pont Salginatobel (1930) est l’un des plus célèbres. L’arche principale franchit une portée de 90 m avec une flèche de 13,5 m. Le tablier du pont fait 3,5 m d e l a r g e u r e t e s t légèrement incliné de 3°.

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P = 145,5 kNm

× 90m10 = 1310kN

En supposant que la charge est uniformément répartie, on peut diviser l’arche en 10 intervalles qui supportent chacun une charge P égale à:

En utilisant la méthode graphique, on peut analyser la structure en traçant le diagramme de forme ainsi que le polygone de forces. On trouve alors que la force de compression maximale dans l’arche (Pf) est égale à 9610 kN.

Le poids de l’ouvrage (wD) est égal à 95 kN/m alors que la charge d’utilisation (wL) est de 17,8 kN/m. La charge totale majorée (wF) est donnée par:

= (1,25 × 95kN/m) + (1,5 × 17,8kN/m) = 145,5kN/mWF = 1,25WD + 1,5WL

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L’arche en béton fait 3,6 m de largeur à s o n s o m m e t e t s ’ é l a r g i t progressivement pour atteindre 6 m de large à sa base. Comme le pont est étroit, cela contribue à accroître la résistance à l’égard des charges horizontales exercées par le vent et, d’un point de vue esthétique, cela confère à l’ouvrage un aspect de robustesse et de stabilité. Pour cette raison, la contrainte de compression sera plus élevée au sommet de l’arche qu’à sa base même si la charge y est plus faible d’environ 20%. La présence d’un voi le stabilisateur en béton perpendiculaire à l’arche empêche tout déplacement latéral ce qui fait en sorte que son élancement est pratiquement nul (kL = 0) et que le béton peut développer sa pleine résistance à la compression (F c) qui est égale à 25 MPa.

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ϕ = 0,6Pr = ϕFcbh ≥ Pf

La charge maximale de compression que l’arche peut supporter (Pr) est donnée par:

où: (coefficient du tenue du béton) Fc = 25 MPa

b = largeur de l’arche h = épaisseur de l’arche En isolant h dans cette équation, on trouve que:

h ≥Pf

ϕFc × b= 10920000N

0,6 × 15 Nmm2 × 3600mm

= 200mm

Cela signifie qu’une mince ruban de béton de 200 mm d’épaisseur peut supporter une charge de 1310 tonnes sur un portée de 90 m.

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Lorsque la charge appliquée est symétrique, l’arche est sollicitée en compression pure. En revanche, lorsque la charge d’utilisation (i.e. le poids des camions) est placée sur la moitié seulement de la portée, elle génère des efforts de flexion significatifs dans la structure. Puisque l’arche ne fait que 200 mm d’épaisseur, sa résistance à la flexion est très faible. C’est donc le voile stabilisateur qui agit comme une poutre pour reprendre les efforts de flexion. Un examen attentif de la structure montre que le voi le stabi l isateur épouse p a r f a i t e m e n t l a f o r m e d u diagramme de moment (figure 3.179c) ce qui permet d’atteindre la performance structurale optimale avec le minimum de matériau.

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Pour s’assurer que l’arche ne soit pas sollicitée en flexion, on a voulu créer des joints rotulés à sa base et à son sommet. La figure ci-dessous montre les assemblages imaginés par Maillart pour que l’arche puisse pivoter librement aux joints rotulés.

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Pont Salginatobel

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Pont Salginatobel

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Pont Salginatobel

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Optimisation des arches

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Dans les exemples précédents, la force de compression dans les arches est variable: elle est minimale au sommet et maximale aux points d’appui. Plus la flèche est élevée, plus la différence est importante entre les forces minimale et maximale. Est-il possible de concevoir une forme caténaire qui fasse en sorte que la force de compression soit uniforme sur toute la longueur de l’arche? La réponse se trouve dans le polygone de forces.

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La figure ci-contre montre une arche caténaire qui supporte un tablier placé au-dessus d’elle. Sur cette figure, les lignes bleues pointillées montrent la forme caténaire et le polygone de forces qui lui sont associés en utilisant l e s t e c h n i q u e s d é c r i t e s précédemment. Pour que la force de compression soit la même sur toute la longueur de l’arche, il faut modifier le polygone de forces en traçant un arc de cercle centré sur le point o et passant par les points a et h. De cette façon, chacun des efforts internes dans l’arche (oa, ob, oc, ...oh) sont égaux car ils correspondent au rayon d’un même cercle.

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T o u t e f o i s , c e l a a p o u r conséquence que les forces externes qui sollicitent l’arche (AB, BC, CD, ...GH) ne sont plus vert icales mais incl inées de manière à épouser la circonférence du cercle sur le polygone de forces. Le corolaire est que les membrures qui transmettent les forces du tablier sur l’arche ne sont plus verticales mais inclinées. On obtient alors la structure optimisée qui est illustrée en traits noir sur le diagramme de forme. On remarque alors que les écarts sont faibles entre le profil de l’arche conventionnelle (traits bleus pointillés) et celui de l’arche optimisée (traits noirs).

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En revanche, les écarts peuvent être plus importants selon la position du tablier. La figure c-contre montre que si on soulève le tablier, l’écart s’accentue entre les deux profil et la profil optimisé se situe au-dessus du profil original. À l’inverse, si on abaisse le tablier, l ’écart entre les deux profils s’accentue à nouveau mais le profil optimisé passe alors en-dessous du tablier. Lorsque le tablier est placé au niveau des points d’appui de l’arche, l’écart entre les deux profils est important puisque, au centre de la portée, l ’arche optimisée est 20% moins haute que l’arche conventionnelle.

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On pour ra i t rédu i re l es fo rces de compression dans l’arche optimisée en augmentant sa hauteur au centre de la portée pour se rapprocher du profil de l'arche conventionnelle. Pour y parvenir, il n’est pas possible d’utiliser la méthode décrite précédemment pour tracer une forme caténaire passant par trois points prédéfinis parce que cette méthode ne s’applique qu’à une famille de formes caténaires pour un même cas de charge. Or, dans le cas présent, l’inclinaison et l’intensité des charges (AB, BC, ... GH) varient avec le déplacement du point focal o sur le polygone de forces. Après quelques itérations, on arrive toutefois à trouver le profil recherché). On constate alors que le profil de l’arche optimisée (en traits gras) est t r è s p r o c h e d e c e l u i d e l ’ a r c h e conventionnelle (en traits bleus pointillés) mais que la force de compression dans l’arche optimisée ne représente que 70% de la force de compression dans l’arche conventionnelle.

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Exemple 4

La passerelle piétonne Léopold-Sédar-Senghor

à Paris

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La passerelle piétonne Léopold-Sédar-Senghor enjambe la Seine dans le VIe arrondissement de Paris. Conçue par l’architecte-i n g é n i e u r M a rc M i m r a m e t inaugurée en 1999, el le est cons t i t uée de deux t ab l i e r superposés (figure. Le tablier in fér ieur forme une vo ie de circulation centrale de 3 m de largeur supportée par une arche en acier très élancée de 106 m de portée et 6 m de flèche. Quant au tablier supérieur, il est constituée de deux voies de circulation latérales qui s’appuient sur l’arche en acier via une série de traverses verticales en forme de V. Ces traverses sont i n c l i n é e s , d ’ u n e p a r t p o u r u n i f o r m i s e r l e s e f f o r t s d e compression dans l’arche et, d’autre part, pour donner à la passerelle une silhouette plus dynamique et esthétiquement agréable.

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Les charges morte (wD) et vives (wL) sont égales à 6,1 et 4,8 kN/m2. La charge totale majorée (wF) est donc égale à:

WF = 1,25WD + 1,5WL

= (1,25 × 6,1kN/m2) + (1,5 × 4,8kN/m2) = 14,8kN/m2

La largeur de la structure varie légèrement sur toute la longueur de l’arche mais, par souci de simplicité, nous utiliserons la largeur maximale de 15 m. Chacune des deux arches porteuse en acier supporte donc une largeur tributaire de 7,5 m (i.e. 15m/2) ce qui inclut les tabliers supérieur et inférieur. Comme la structure est symétrique, seulement la moitié de l’arche sera analysée pour accroître la lisibilité du polygone de forces qui est très aplati. Dans le même souci de lisibilité, un nombre réduit de traverses sera pris en compte, c’est pourquoi nous considérerons que les traverses sont espacées de 8,83 m c/c alors que, dans la réalité, cet espacement est égal à 3 m c/c. À chaque traverse la charge concentrée (P) qui sera transmise à l’arche est égale à:

P = 14,8 kNm2 × 7,5m × 8,83m = 980kN

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La figure ci-contre présente l’analyse structurale de l’arche porteuse à l’aide de la méthode graphique. On constate que la force maximale de compression dans l’arche atteint 23350 kN ce qui est élevé comparativement à la charge verticale supportée par la structure (2 x 6370kN = 12740kN). On constate par ailleurs que la composante horizontale de la réact ion d’appui qui est transmise aux fondations est presqu’aussi é l e v é e c e q u i n é c e s s i t e d’imposantes culées en béton aux deux extrémités de l’arche pour répartir cette charge sur les r i v e s d e l a S e i n e . Heureusement, ces culées existaient déjà puisque la passerelle remplace un pont routier en fonte construit en 1861, détruit en 1961, et remplacé par une passerelle en acier démolie à son tour en 1992.

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Chacune des arches est constituée de deux profilés en forme de I dont les ailes sont constituées de profilés elliptiques en acier de 600 mm de largeur. Ces ailes sont liées par des membrures verticales et espacées de 1,2 m c/c. Pour être en mesure d’utiliser la feuille EXCEL conçue pour le dimensionnement des poteaux en acier, nous allons remplacer les profilés elliptiques par des plaques rectangulaire dont l’épaisseur (t) est égale au double de l’épaisseur des parois des profilés elliptiques. La charge de compression supportée par chacun des deux profilés en forme de I est égale à 11675 kN (i.e. 23350kN/2). L’arche est retenue latéralement par les traverses verticales ce qui signifie que la longueur de flambement est égale à 3 m, c’est-à-dire la distance entre chacune de ces traverses. En utilisant la feuille EXCEL on trouve que, pour des profilés elliptiques dont la paroi fait 10 mm d’épaisseur, Pr = 11915 kN > Pf = 11675 kN. Cela confirme que la géométrie de l’arche est adéquate pour supporter les charges qui lui sont imposées.

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Passerelle Léopold-Sédar-Senghor

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Passerelle Léopold-Sédar-Senghor

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Exemple 5

La passerelle piétonne Sinone-de-Beauvoir

à Paris

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Plus loin sur la seine à Paris, on retrouve la passerelle Simone-de-Beauvoi r, une réa l isat ion de l’architecte autrichien Dietmar Feichtinger inaugurée en 2006. Elle est constituée de deux structures caténaires - l’une tendue, l’autre comprimée - qui s’entrecroisent pour former trois travées offrant au piéton un parcours insolite. Ces deux structures sont liées l’une à l’autre par une série de suspentes verticales formées de quatre tubes en acier assemblés en triangle. Ces suspentes sont espacées de 7,5 m c/c. Deux minces plaques en acier supportent la structure tendue alors que la structure comprimée est formée de deux rectangles évidés.

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Deux minces plaques en a c i e r s u p p o r t e n t l a structure tendue alors que la structure comprimée est formée de deux rectangles évidés.

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L’emplacement des tabliers a été choisi de tel sorte que la charge se réparti également entre les deux structures caténaires. La charge morte (wD) de l’ouvrage est évaluée à 4,5 kN/m2 alors que la charge d’utilisation (wL) est égale à 4,8 kN/m2. La charge totale majorée (wF) est donnée par:

WF = 1,25WD + 1,5WL

= (1,25 × 4,5kN/m2) + (1,5 × 4,8kN/m2) = 12,8kN/m2

Les deux structures caténaires supportent chacune la moitié du tablier i.e. une largeur tributaire de 6 m. Si on divise la structure en dix sections de largeurs égales (174m/10 = 17,4 m), chacune de ces sections supportera une charge totale (W) égale à:

W = 12,8 kNm2 × 6m × 17,4m = 1336kN

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La figure ci-contre montre le résultat de l’analyse structurale de l’ouvrage à l’aide de la méthode graphique. On constate que l’effort maximal, de tension ou de compression, est égal à 53440 kN.

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La structure caténaire tendue est formée de deux plaques d’acier de 900 mm de largeur chacune. La résistance à la traction des plaques (Tr) est donnée par:

Tr = ϕFtbt > Tf

où b et t représentent respectivement la largeur et l’épaisseur de la plaque d’acier et Ft = 350 MPa pour l’acier doux de charpente. On trouve l’épaisseur de la plaque en isolant la valeur de t dans l’équation précédente. On obtient alors:

t >Tf

ϕFtb= 53440000N/2

0,9 × 350 Nmm2 × 900mm

= 94mm

La structure caténaire comprimée est quant à elle constituée de deux rectangles évidés en acier. Ces rectangles font 900 mm de largeur et leur hauteur varie de 450 mm au centre de la portée à 750 mm aux points d’appui. Les structures tendues et comprimées se stabilisent mutuellement en s’opposant au déplacement vertical de la structure jumelle. Pour cette raison, la longueur de flambement de l’arche n’est que de 7,5 m ce qui correspond à la distance entre les suspentes verticales qui relient les deux structures caténaires.

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L’effort de compression maximal dans chacun des triangles évidés qui forment l’arche (Tf) est égal à 26720 kN (i.e. 53440kN/2). En utilisant la feuille EXCEL servant au dimensionnement des profilés en acier, on trouve que, pour un tube de 750x900 mm, l’épaisseur des parois doit être égale à 28 mm. On constate alors que Tr = 26859 kN > Tf.Si la structure tendue n’existait pas, l’arche aurait une longueur de flambement de 87 m (i.e. 174m/2) ce qui nécessiterait des profilés rectangulaires de 2500 mm de hauteur (figure 3.197) ce qui représente plus de triple de la hauteur du profilé choisi par le concepteur de la passerelle (750 mm). Cela montre bien que la présence de la structure tendue accroît considérablement l’efficacité structurale de la structure comprimée.

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Si la structure tendue n’existait pas, l’arche aurait une longueur de flambement de 87 m (i.e. 174m/2) ce qui nécessiterait des profilés rectangulaires de 2500 mm de hauteur ce qui représente plus de triple de la hauteur du profilé choisi par le concepteur de la passerelle (750 mm). Cela montre bien que la présence de la structure tendue accroît considérablement l’efficacité structurale de la structure comprimée.L’usage combiné d’une structure tendue et d’une structure comprimée offre un autre avantage important: aucun effort horizontal n’est transmis aux fondations. Ainsi, si la structure tendue n’existait pas, la structure comprimée devrait transmettre une force horizontale d’environ 50000 kN aux fondations de béton (cela représente environ le double la force horizontale imposée aux culées de la passerelle Léopold-Sédar-Senghor que nous avons évoquée précédemment) ce qui nécessiterait la construction de culées volumineuses en béton.

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Pour calculer les efforts qui seront transmis aux fondations, on trace d’abord le diagramme de corps libre d’une portion de la structure située près de son point d’appui. Ce diagramme indique que cette portion de structure est soumise à quatre forces: les efforts de tension et de compression dans les structures tendues et comprimées (26 720 kN), ainsi qu’un effort de compression (C) et un effort de tens ion (T ) t ransmis à deux fondations distinctes. Les structures tendues et comprimées sont liées par une bielle en acier (c’est la membrure inclinée). Les forces verticales sont transmises aux appuis par un poteau en acier placé au point de jonction entre l’arche et la bielle et un plaque en acier qui est le prolongement de la plaque qui soutient la structure tendue.

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En faisant l’équilibre des trois forces qui convergent vers le point a, on trouve que la bielle subit un effort de compression de 33 890 kN ( i l es t donc supérieur, d’environ 25% à la force de compression dans l ’arche) et que l’effort d’arrachement (T) transmis aux fondations est égal à 19 620 kN. L’équilibre des forces qui convergent vers le point b indique pour sa part que la force de compression ( C ) t r a n s m i s a u x fondations est égal à 25 230 kN.

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La géométrie reproduite à la figure de la page précédente est adéquate puisque les polygones de forces sont compacts ce qui témoigne d’une bonne efficacité s t r u c t u r a l e . M a l g r é t o u t , l’architecte a choisi de modifier légèrement la géométrie de la structure en inclinant légèrement le poteau qui unit le point a à la semelle de fondation afin de c o n f é r e r u n e a l l u r e p l u s dynamique à l’ensemble qui se trouve très exposé à la vue des piétons. En faisant l’équilibre statique des forces au point b, on constate que cette modification géométrique augmente d’environ 25% l’effort de compression au point d’appui (32 570 kN vs 25 230 kN) et double presque l’effort dans la bielle (56 080 kN vs 33 890 kN).

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L’équilibre statique des forces au point a révèle pour sa part que l’effort d’arrachement au sol est aussi presque doublé (29 310 kN vs 19620 kN) et que, pour fermer le polygone de forces, il faut ajouter une réaction d’appui horizontale (R) au sommet de la bielle. Ainsi, la bielle vient se buter sur la passerelle d’accès qui sera comprimée pour acheminer la force R jusqu’à la culée de béton. L’intensité de cette force - 7500 kN selon la figure 3200c - est faible comparativement aux autres forces impliquées (26 720 kN à 56 080 kN).

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