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LE COUSERANS photographies d’Alain Baschenis textes de Jean-Louis Causse, Bertrand Cauvin Pauline Chaboussou, Matthieu Cruège Hélène Florenti, Alain Mangin Jean-François Rummens, Michel Sébastien LOUBATIÈRES Regards sur un pays d’Ariège

Le Couserans, regards sur un pays d'Ariège

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DESCRIPTION

Le Couserans, c'est le nom d’un vieux peuple gaulois, une citadelle épiscopale – Saint-Lizier –, une ville de confluence entre le Lez et le Salat – Saint-Girons. Depuis Toulouse, c’est la chaîne des Pyrénées avec le Valier qui jette ses 2 837 mètres vers des « ciels enneigés » et qui l’été conserve une virgule blanche sur une redoutable paroi noire. C’est un petit païs d'Ariège au caractère bien individualisé.

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LE COUSERANS

photographies d’Alain Baschenis

textes de Jean-Louis Causse, Bertrand Cauvin Pauline Chaboussou, Matthieu Cruège

Hélène Florenti, Alain Mangin Jean-François Rummens, Michel Sébastien

LOUBATIÈRES

Regards sur un pays d’Ariège

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L’eau est une composante essentielle du paysage couserannais, commeen témoigne son aspect très verdoyant où abondent lacs et cours d’eau.La forêt (hêtraies ou sapinières) couvre de très grands espaces, fonde-

ment de toute l’industrialisation qui a fait la fortune de cette région : papete-ries et forges à la catalane, permettant le traitement du minerai de fer très richeet très présent dans la montagne environnante. Les alpages y sont égalementfortement représentés et sont à l’origine du pastoralisme, le deuxième pilier del’économie locale. Les eaux superficielles drainées par quatre rivières impor-tantes, le Salat, le Lez, le Volp et l’Arize, avec leurs nombreux affluents, déve-loppent un chevelu très dense le long duquel ont fleuri de nombreux moulins,vestiges d’une certaine prospérité, hélas aujourd’hui abandonnés dans leurmajorité. Dès 1904, mais surtout à partir des années 1950, techniciens et ingé-nieurs se sont penchés sur les possibilités d’équiper le bassin du Salat pour utili-ser la force de l’eau. N’oublions pas que le père de la « houille blanche », procédépermettant de transformer la puissance générée par l’écoulement de l’eau enénergie électrique, est né à Lorp. L’aménagement hydroélectrique du haut bassindu Lez, prodige d’ingéniosité, ne peut que laisser admiratif. Pêche et canoë-kayak sont des activités qui actuellement utilisent avec bonheur torrents etrivières. En altitude, les lacs et les étangs sont nombreux, attrait des pêcheurset des randonneurs. Mais il ne faudrait pas oublier les eaux souterraines, cellesque l’on ne voit pas, ressources considérables et milieu de vie étonnant et trèsriche, et qui sont à l’origine, avec les grottes qui en résultent, de l’implantationen 1948 du laboratoire du CNRS à Moulis, structure unique au monde. Même

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L’EAU DANS LE COUSERANS

L’étang d’Eychelle dans la vallée de Bethmale.

Page de gauche : La cascade d’Ars.

Pages suivantes : Le couloir ouest du Maubermé.

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les eaux profondes sont présentes en Couserans avec les sources thermalescomme à Aulus et Audinac.

Suivons le cycle de l’eau. Tout commence par la pluie, élément importantdu climat. Dans cette région, il pleut, et il pleut pas mal : 1030 mm par an enmoyenne sur plusieurs années à la station synoptique de la Météorologie natio-nale à Antichan. Mais très vite avec l’altitude, la quantité de précipitationaugmente sans que pour autant on soit capable d’éta-blir un gradient altitudinal qui ne se présente pas defaçon linéaire. Par ailleurs, le réseau d’observation n’estpas assez dense pour traduire la réalité. Par exemple,les mesures effectuées par le laboratoire de Moulis àArbas à la limite du Couserans et du Comminges ontfourni des valeurs de l’ordre de 2 à 3 mètres par an. Quoiqu’il en soit, le pays est bien arrosé ; on le doit essentiel-lement à la position d’un fort relief qui arrête les pertur-bations atlantiques. Avec la montagne les précipitationsde fin d’automne, d’hiver et de printemps sont souventneigeuses, mais l’absence de mesures suffisantes nepermet pas d’avoir une idée sérieuse des quantités et desrépartitions. Le maximum des précipitations a lieu enhiver et au printemps; le minimum en été et en automne,mais il n’y a pas de forte amplitude entre les différentessaisons.

Une partie de ces précipitations est renvoyée dansl’atmosphère directement ou par l’intermédiaire de lavégétation : c’est l’évapotranspiration. Ce paramètre nesaurait être mesuré, il est évalué à partir de modèles, eta été estimé pour ce secteur à des valeurs de l’ordre de530 mm/an.

Page de gauche : Le lac de Bethmale.

Ci-dessous : Une des cascadesdu vallon du Fouillet, près d’Aulus-les-Bains.

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En définitive, la meilleure approche dont nous disposons pour rendrecompte de l’eau arrivant sur les sols est le module spécifique des cours d’eau,car il est possible de le mesurer ; il correspond à la quantité d’eau en moyenneannuelle produite par unité de surface. Ce module, égal à 23 l/s/km2 au niveaudu Plantaurel, atteint 90 l/s/km2 dans le haut bassin du Garbet. Ce résultatmontre le fort gradient qui existe avec le relief. De l’ancienneté des aménage-ments hydroélectriques, il résulte une assez bonne connaissance de la réparti-tion des débits des cours d’eau évalués sur de longues périodes, puisque lespremières mesures datent de 1906. Le Salat à Seix débite en moyenne 10 m3/s,à Kercabanac avant l’apport de l’Arac 16 m3/s et après 24 m3/s ; à Saint-Lizier,c’est devenu une belle rivière avec 36 m3/s. Ses principaux affluents : le Garbetqui possède un débit de 1 m3/s à Aulus et 6 m3/s à Oust, et le Lez à Saint-Girons qui apporte 13 m3/s, toujours en moyenne. Le Volp à Sainte-Croix-Volvestre est certes plus modeste avec 1 m3/s, et l’Arize à Sabarat avec 4,7 m3/squi draine un bassin versant respectable. De l’ensemble de ces chiffres, on retien-dra que le Couserans constitue un véritable château d’eau pour la Garonneexutoire de tout ce ruissellement. Une étude récente sur l’évolution à long termede ces écoulements a montré qu’il n’est pas possible, tout au moins pour l’ins-tant, d’observer une modification significative en liaison avec l’évolution clima-tique actuelle.

En montagne, l’importance du pourcentage de terrains imperméables etle développement d’une morphologie glaciaire bien marquée a favorisé la miseen place de nombreux lacs et étangs. Sur l’ensemble du Couserans, on en compteune quarantaine, allant de 0,2 ha pour le Turon d’Ars par exemple à 14,5 hapour l’étang de Garbet, le plus grand, excepté bien sûr l’étang d’Araing essen-tiellement artificiel. Leur profondeur est variable, allant de 1,50 mètres pourles moins profonds à 61 mètres pour l’étang d’Alet qui fait ainsi partie desrecords pour les Pyrénées. Tous sont localisés en altitude dans une tranche allantde 1074 mètres pour le plus bas, l’étang de Bethmale, à 2580 mètres pour leplus élevé, l’étang du Tuc de Mil près du pic de Barlonguère. Dans des décors

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Page de droite : Le Palais des Vicomtes, le Salat et l’égliseSaint-Valier à Saint-Girons.

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somptueux, ce sont de véritables joyaux qui donnentune identité au paysage couserannais.

Plus bas, les aménageurs ont recherché leszones imperméables, très présentes notamment surle flysch (alternance de bancs de grès à la base etde schistes dans le haut de la formation), pour réali-ser des retenues artificielles dans un but de loisircomme à Sainte-Croix-Volvestre ou pour l’irriga-tion comme à Fillet et à Mondely. Cette dernièreretenue, d’une superficie de 50 hectares, constitueune réserve de quatre millions de mètres cubes, et,bien qu’ayant une vocation agricole, elle voit aussides activités nautiques.

Quant à l’eau cachée, celle qui transite dansle sous-sol, son importance est fondamentalepuisqu’elle représente 98 % des réserves. C’est dansces ressources que les végétaux vont puiser leurbesoin. Elles donnent naissance aux diverses sourcesque l’on rencontre çà et là, tellement appréciéessurtout en été, et qui sont la plupart du temps àl’origine de l’établissement des habitats : hameauxet villages. C’est le domaine de l’hydrogéologie.

L’existence de ces eaux souterraines imposeque les terrains soient aquifères (qu’ils portentl’eau) : c’est l’aspect géologique. Ces terrains sontles alluvions des rivières, les sédiments résultant del’altération superficielle des roches imperméablesconstituant les éboulis, les colluvions, en un mottoutes les altérites (produits de l’érosion des roches

Dans la réserve naturelle du mont Valier.

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continentales). Et puis, dans le Couserans, les calcaires d’âge primaire ou secon-daire, métamorphisés ou non, et qui couvrent 33 % de sa superficie, refermentcertainement les réserves les plus importantes et les plus intéressantes.

Le Salat, le Lez, le Volp, l’Arize…, sont des rivières au bassin versantbeaucoup trop réduit pour pouvoir posséder des alluvions suffisantes pour déve-lopper des nappes importantes. Par ailleurs trop proche de la montagne, lanature de ces alluvions reste peu évoluée et donc très peu perméable. En revanche,les altérites disséminées un peu partout constituent des réservoirs loin d’êtreinsignifiants. Certes, ils sont généralement d’étendue réduite mais suffisantepour abriter des nappes exploitables. L’essentiel des aquifères utilisés en Couse-rans pour l’alimentation en eau potable (de l’ordre de 75 %) se réfère aux forma-tions superficielles. C’est dire que ces ressources sont fondamentales. Elles ontl’inconvénient d’être trop nombreuses et dispersées pour faire face à la demandeet pas toujours capables de supporter les fluctuations climatiques d’une annéesur l’autre.

Ce sont les calcaires qui représentent la richesse aquifère du Couserans.Des sources comme La Tourasse, La Doux à Riverénert, Ladoux à Seix, Bordesde Crue dans la vallée de l’Estours, Bethmale ou encore Le Baget en témoi-gnent. Le système karstique du Baget sur la commune de Balaguères étudié parles équipes du CNRS du laboratoire de Moulis est devenu un système expéri-mental. Toute une méthodologie pour aborder ce type d’aquifère a été mise aupoint sur ce site, elle est désormais universellement employée. Pour un bassinde 13,25 km3, les réserves sont de l’ordre de 4 millions de m3 (l’équivalent dulac de Mondély). Ces études ont montré par ailleurs que ces eaux renfermaienttoutes une faune spécifique au caractère extraordinaire.

Enfin, certaines circulations d’eau souterraine peuvent atteindre des profon-deurs notables, se réchauffer et se minéraliser, c’est le cas d’Audinac où les eauxsourdent à 22 °C ayant atteint des profondeurs de 500 mètres.

Alain Mangin

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À Audinac-les-Bains, au début du XXe siècle, les curistes étaientnombreux à fréquenter la station.

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ISBN 2-86266-546-7

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