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le shofar REVUE MENSUELLE DE LA COMMUNAUTÉ ISRAÉLITE LIBÉRALE DE BELGIQUE SYNAGOGUE BETH HILLEL BRUXELLES N° d’agréation P401059 DÉCEMBRE 2008— N°298 / KISLEV 5769 Hanoukka, la droiture et le courage La déontologie en crise Yossel de Rosheim

le shofar · 2013. 8. 13. · traverser l’enfer de la Shoa. Il me semble que ces histoires devraient être racontées devant les bougies, dans la chaleur de nos foyers, avec le

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le shofarr e v u e m e n s u e l l e d e l a c o m m u n a u t é i s r a é l i t e l i b é r a l e d e b e l g i q u e

s y n a g o g u e b e t h h i l l e l

b r u x e l l e s

N° d’agréation P401059 DÉCEMBRE 2008— n°298 / Kislev 5769

Hanoukka, la droiture et le courage

La déontologie en crise

Yossel de Rosheim

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revue mensuelle de la communauté israélite libérale de belgique

EDITEUR RESPONSABLE :

Rabbin Floriane Chinsky

RéDACTRICE EN ChEF :

Jacqueline Wiener - henrion

COMITé DE RéDACTION :

Rabbi Abraham Dahan, Rabbi

Floriane Chinsky, Ralph Bisschops,

Gilbert Lederman, Philippe

Lewkowicz, Serge Weinber,

Jacqueline Wiener, Emmanuel Wolf

ONT EGALEMENT COLLABORé A

CETTE LIvRAISON :

Nathan Azzizolahof, Tobias Bisschops,

Monique Ebstein et François Moyse

MISE EN PAGE :

www.inextremis.be

n°298 DÉCeMBRe 2008/Kislev 5769

N° d’agréation P401059

Le Shofar est édité par la

COMMUNAUTé ISRAéLITE LIBéRALE

DE BELGIQUE A.S.B.L.

N° d’entreprise : 408.710.191

Synagogue Beth hillel

80, rue des Primeurs,

B-1190 Bruxelles

Tél. 02 332 25 28

Fax 02 376 72 19

www.beth-hillel.org

[email protected]

CBC 192-5133742-59

RABBINS : Abraham Dahan

et Floriane Chinsky

PRéSIDENT ExéCUTIF :

Philippe Lewkowicz

CONSEIL D’ADMINISTRATION :

Président : Gilbert Lederman

Avishaï Ben David, Ralph Bisschops,

Patrick Ebstein, Paul-Gérard Ebstein,

Ephraïm Fischgrund, Josiane

Goldschmidt, Gilbert Lederman, Willy

Pomeranc, Elie vulfs, Serge Weinber,

Jacqueline Wiener, Emmanuel Wolf.

Les textes publiés n’engagent que

leurs auteurs.

Photo de couverture :

Yossel (peinture murale de l’Office

du Tourisme de Rosheim)

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Sommaire 05 eDiTORiAlpar Jacqueline Wiener

le MOT Du PRÉsiDeNT transmission et pérennité du judaïsme par Gilbert Lederman

JuDAÏsMehanoukka, la droiture et le couragepar Rabbi Floriane Chinsky

la déontologie en crisepar Jacqueline Wiener

dracha de Kippour par Rabbi Floriane Chinsky

Leo Baeck : l’essence du judaïsme par Monique Ebstein

Nos bné mitsvapar nathan Azzizolahoff et Tobias Bisschops

AgeNDA

Carnet

vie COMMuNAuTAiRe

La “World Union for Progressive Judaism”, c’est quoi exactement ? par Ralph Bisschops, Dr. phil.

L’avenir des communautés est-il à peindre en rose ou en gris ? par François Moyse

Lectures

Yossel de Rosheimpar Monique Ebstein

Nouvelles d’Israël et d’ailleurs

Un peu d’humour

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Pour l’organisation de vos Simhot

Un nom : Solange !

Un numéro : 0497.57.47.27 !

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le shofar

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Hanoukka, c’est cette jolie fête des Lumières où se reflètent les rires joyeux de nos enfants allumant les hanoukkiot aux rebords des fenêtres. C’est aussi la fête de la mobilisa-tion, de l’éducation à l’indépendance de la pensée et à la capacité de se battre pour les valeurs juives qui nous portent.

A propos de celles-ci justement, il y a un an, à l’occasion de Hanoukka, nous évoquions dans ces colonnes la crise communautaire belge et le nationalisme exacerbé de l’extrême droite flamingante minoritaire qui était parvenu à contaminer de son intolérante vision d’un monde mono culturel contraire aux spécifi-cités belges, l’esprit de nombre de nos com-patriotes. Une crise en estompe une autre. Celle d’aujourd’hui, financière, nous inter-pelle à son tour par l’absence d’éthique qui en a été l’origine et qui nous permet de rappeler que voici longtemps déjà, le Judaïsme mit en place une éthique de l’argent qui n’a pas pris une ride.

Hanoukka, c’est aussi un moment, comme tant d’autres du calendrier hébraïque, pro-pice à la réflexion sur ce qu’est le monde juif d’aujourd’hui, quelles contradictions l’ani-ment, quelles menaces éventuelles pèsent sur lui et quelles sont les voies qui lui permet-traient de s’affirmer comme entité porteuse d’espoir pour les générations futures.

Cet espoir d’un judaïsme pérenne nonobs-tant les défis démographique, sociologique, géo-politique qui se dessinent, le judaïsme libéral y œuvre dans toutes les parties du monde, à l’instar de notre Communauté Israélite Libérale de Belgique - synagogue Beth Hillel qui, par son affiliation à la « World Union for Progressive Judaism », fait partie de la plus grande mouvance juive actuelle. Il nous a semblé bon de le dire, à un moment de la réalité du Judaïsme belge où quelques uns doutent encore de notre légitimité à en faire partie intégrante.

La mémoire de l’extraordinaire Yossel de Rosheim, Commandeur des Juifs du Saint Empire Romain Germanique, n’a pas été oubliée dans nos colonnes, pas plus que la suite de l’analyse de l’Essence du Judaïsme chère au rabbin Leo Baeck.

Et si Benoît XVI est ouvertement favorable à la béatification de Pie XII, d’autres nouvelles plus réjouissantes attendent le lecteur, en fin de ce Shofar, dont la naissance d’une nouvelle communauté juive libérale au Grand Duché de Luxembourg n’est pas la moindre.

Bonne lecture et haag sameach ! ■

Editorial Par Jacqueline Wiener

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Par Gilbert Lederman

De tout temps s’est posée la question cen-trale de la transmission du judaïsme. Dérivé du latin transmissio, le mot “transmission” se compose de deux locutions. “Trans” évo-que l’idée de mouvement et de passage. “Mis-sion” définit la tâche et le projet. La trans-mission est donc l’opération par laquelle la connaissance relevant d’un groupe d’indi-vidus est partagée avec d’autres individus intégrant ce groupe. La réussite de la trans-mission assure ainsi la pérennité d’une tra-dition. Dans une époque en pleine mutation comme la nôtre, le thème de la transmission du judaïsme est devenu crucial.

Une récente publication1 traite de la trans-mission en y proposant plus de 50 témoigna-ges de personnalités du yichouv français. Ces témoignages portent notamment sur la définition et sur des expériences personnel-les de la transmission. Est-on surpris qu’il n’y ait pas deux témoignages identiques, chacun d’entre eux portant en son sein sa vérité et sa substance propre ? Quoique nous ne transmettions jamais à l’identique, de nombreuses similitudes se recoupent. Rele-vons certaines pistes évoquées dans cette brillante enquête.

La transmission mérite une méthode : le verbe (la Torah, l’histoire du peuple Juif) et le geste (les rites). Ce qui se transmet le mieux : l’événement, la fête. Ainsi, les rites tels que le shabbat, la bat/bar mitsva,

les fêtes austères et Pessah représentent un solide socle commun. Chaque rite est porteur de sens et le rite pratiqué pour lui-même ne participe pas à la transmission. La répétition du rite est également essentielle. Le judaïsme passe aussi par les sens : enten-dre la parole, dire la prière, de même, respi-rer, voir, toucher… Mais pour transmettre, il faut inscrire son discours dans un projet. Transmettre est un acte de dépassement car on transmet quelque chose de vivant et non de figé.

Etant une affaire du cadre intime, la ques-tion de la croyance n’est pas centrale. Le rite est indépendant de la croyance. Une idée proche de celle d’Abraham Heschel qui voit dans le judaïsme une grammaire de vie et une philosophie de l’action sans sépara-tion entre le monde matériel et le monde spirituel. Rôle de pilier, la famille est un creuset privilégié pour la transmission du judaïsme. Nous transmettons ce que nous sommes. L’exemplarité est dès lors un mes-sage. Comme le proclame si joliment un pro-verbe africain, nous ne pouvons donner que deux choses aux enfants : des racines et des ailes.

L’essentiel est l’esprit de la Torah, le Talmud, l’étude. La véritable sagesse consiste alors à savoir poser des questions. Finalement, le personnage principal des écrits est le lec-teur car ceux-ci suscitent son interactivité.

le MOT Du PRÉsiDeNT

Transmission et pérennité du judaïsme

1 Transmettre le judaïsme… - Témoignages d’aujourd’hui, Etienne Gotschaux, Editions du Palio

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La réussite d’une transmission, c’est donc être capable de capter une parole ances-trale, la nourrir de son présent et d’en faire ensuite écho pour le futur. Les principes de base du judaïsme sont donc parfaits pour une transmission aux générations suivan-tes car finalement un juif est un passeur (en hébreu, un juif signifie passeur) qui ne cesse jamais de transmettre…

La vigilance de chaque communauté juive pour lutter contre l’assimilation est indis-pensable. Dans ce cadre, la Communauté Israélite Libérale de Belgique assume plei-nement ses responsabilités. ■

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JuDAÏsMe

Hanoukka, la droiture et le courage

Par Rabbi Floriane Chinsky

Hanoukka, une belle célébration, pleine d’un sens accessible à tous…Le judaïsme, cette façon particulière d’être humain. Nos fêtes, notre façon à nous de plonger nos racines dans le passé pour nous projeter vers l’ave-nir. Nos racines, elles remontent à un passé plus ou moins récent, de l’anti-que époque du don de la Torah à l’épo-que moderne. Les fêtes de Tichri, de Roch Hachana à SimHat Torah nous viennent de l’époque biblique. Des commémorations comme celles de la Nuit de Cristal prennent source dans des évènements récents. Les uns comme les autres prouvent notre capacité à nous mobiliser.

Hanoukka, enseigner la droiture et le courage dans la lumière et la joie Hanoukka fut fixée à l’époque du Deuxième Temple.

Cette fête mobilise toute la communauté autour du spectacle magique des petites bougies au nombre grandissant qui viennent illuminer nos nuits d’hiver et parer le rebord de nos fenêtres. Plus beau encore que la beauté des bougies, celle du sourire de nos enfants.Pourtant, la beauté de Hanoukka ne s’arrête pas là. L’Histoire nous a enseigné à nous

mobiliser, et Hanoukka est justement une fête de mobilisation et d’éducation à l’indé-pendance de la pensée et à la capacité de se battre pour ses valeurs. Le sourire de nos enfants compte pour nous, mais nous savons que ce sourire dépend pour l’avenir de leur capacité à diriger leurs vies dans une direc-tion pleine de sens, et à avoir le courage de résister lorsque des obstacles se dresseront sur leur chemin. Enseigner le courage devant des bougies et des cadeaux, c’est le meilleur moyen pour qu’ils conservent l’espoir et la joie au cours des luttes de la vie.

L’histoire de HanoukkaLe courage se puise dans l’exemple de nos parents et de nos ancêtres. Hanoukka est l’oc-casion de rappeler non seulement celui des maccabim mais aussi celui de nos ancêtres, qui ont su nous garder en vie et nous faire traverser l’enfer de la Shoa. Il me semble que ces histoires devraient être racontées devant

les bougies, dans la chaleur de nos foyers, avec le réconfort des latkes et des beignets à l’huile. Toute la dif-ficulté est de créer un climat de sérieux et de fierté qui ne soit pas écrasant mais invite à l’exemple.

L’histoire de Hanoukka, quant à elle, com-mence avec les conquêtes alexandrines, à partir de l’an 333 avant le compte chrétien.

« Enseigner le courage devant des bougies et des cadeaux, c’est le meilleur moyen pour que les enfants conservent

l’espoir et la joie au cours des luttes de la vie »

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Le processus d’hellénisation commence alors, avec le développement de l’indivi-dualisme, des théâtres, des stades sportifs, d’une éducation grecque pour les familles aisées. Beaucoup de Cohanim (prêtres du Temple) font partie de l’élite et se laissent séduire par cette culture. Ils acquièrent ainsi la confiance des dirigeants et se retrou-vent en charge du service du Temple, qu’ils délaissent au profit des loisirs grecs. Ils se détachent du peuple pour tenter de se ratta-cher aux détenteurs du pouvoir. Le peuple réagit et des tensions naissent. Le Temple n’est plus un lieu de rassemblement.

En 164, Antiochus Epiphane arrive au pou-voir. Il décrète l’interdiction de pratiquer les commandements, l’obligation d’adopter un culte idolâtre ainsi que la peine de mort pour ceux qui pratiqueraient la brit mila (cir-concision) et le shabbat ; il dédie le temple à Zeus. Son analyse est juste : le Dieu un et son alliance sont la source de la force de notre engagement, le Temple comme le shabbat, nos moyens de nous mobi-liser et de nous fédé-rer. Laisser passer ces décrets, c’est accepter la désagrégation progressive du peuple juif et de sa culture. Ce n’est pas pour rien que les Nazis s’attaqueront aux synagogues lors de la Nuit de Cristal. Ils détruisent la possi-bilité du rassemblement, de la mobilisation et de la régénération. Sans Temple, sans shabbat, il n’y aura plus de façon de nous ressourcer, les blessures s’infecteront irré-médiablement.

Matatiahou le prêtre comprend cela très bien, il arrive à mobiliser et entreprend immédiatement la lutte, avant que les for-ces et les courages ne s’épuisent. A sa mort, Yéhouda, Juda, prendra sa suite. Le 25 kislev -164, Jérusalem est reconquise et le Temple inauguré; son service est confié à des prêtres restés fidèles à nos traditions. Encore une épreuve traversée, encore une occasion de réjouissance. La fête de Soukot, qui n’avait pu être célébrée, devient notre Hanoukka hivernal où les bougies s’opposant à l’obs-curité remplacent une verdure disparue jusqu’au printemps.

Hanoukka, pour nous, évoque bien le mira-cle de la persistance de la lumière en dépit des épreuves. Alors que la Nuit de Cristal que nous avons commémorée le 9 novembre devrait trouver un nom en rapport avec l’hor-reur qu’elle évoque, Hanoukka nous permet

de ranimer une vraie lumière, physique, familiale, communau-taire, spirituelle, qui a persisté du temps des maccabim et qui per-siste encore, grâce à chacun d’entre nous. Puisque ce mot signi-fie inauguration, que la

fête nous encourage à inaugurer des belles choses dans nos vies, grâce à ces huit jours de joie et de réconfort.

Alors à tous, Hag Ourim SaméaH, bonne fête des lumières… ■

« Le Dieu un et son alliance sont la source de la force de

notre engagement, le Temple comme le shabbat, nos

moyens de nous mobiliser et de nous fédérer »

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JuDAÏsMe

1 S = (A0 + Nq)n, les plus puristes d’entre-nous pourraient se contenter d’une bougie par famille et par jour, 2 comme le prévoit initialement la michna… 2 L’essentiel est que le nombre de bougies soit clairement identifiable, de façon à ce que la vue des bougies permettent clairement de

savoir qu’il s’agit de bougies de Hanoukka. Si on n’a pas de bougeoir, on peut fabriquer soi-même sa Hanoukkia, et même aligner simplement des bougies sur un support non inflammable.

3 « Ici » et « là-bas » se rapportent à la terre d’Israël selon qu’on y réside ou qu’on se trouve en galout.

Comment célébrer Hanouka ?La célébration de la fête est facile, convi-viale, consensuelle.

Le matériel nécessaire est :Des bougies : Il en faut une pour le pre-mier jour, deux pour le deuxième, etc… avec en plus une bougie par jour qui doit servir de chamach, de « serviteur », pour allumer les autres bougies et nous éclai-rer de sa lumière. Ce qui nous fait 44 bou-gies1.

Un chandelier à 9 branches nommé Hanoukkia2.Des toupies, qui permettent de se livrer à divers jeux sans limites de créativité ! Le dreidel traditionnel comprend 4 faces ornées des lettres Noun נ , Guimel ג , Hey ה , Chin ש (ou Pé פ ) pour nes gadol haya cham (po), un miracle grand était là-bas3 (ici). On peut l’utiliser pour faire des paris, des jeux d’adresse ou considérer que le noun est mis pour nichts (rien, tu ne mets ni ne prends rien dans la caisse), ganz (tout, tu prends tout de la caisse), Halb (moitié, tu en prends la moitié), stell ein (mets un dans la caisse). L’important

reste de passer un bon moment en famille près des bougies.

Des friandises à l’huile (en souvenir du miracle de la fiole d’huile), latkes, soufga-niot, etc… ou au fromage salé (en souve-nir de Judith qui vainquit Holopherne en l’assoiffant puis en l’abreuvant de vin).

Peut-être des livres d’histoires juives, histoires d’intelligence, de courage et d’entraide, pour raconter une histoire par soir devant les bougies…

Une guitare, un livre de chants de Hanoukka…

Les enfants vous diront qu’il faut aussi des cadeaux ; bien malin celui qui y échappe…

De toute façon, pour fêter dignement Hanoukka, le plus important reste…

Les amis ! … que vous pourrez retrouver à la synagogue le premier soir de la fête, samedi soir, le 20 décembre …

HANOUCCA Le dimanche 21 décembre 2008

à partir de 16h00Pour les enfants : jeux et contes

à 17h30Pour tout le monde :

Allumage de la 1ère bougie dans le jardin et petit office de Hanoucca

Après l’office :Collation pour tous (Merci d’apporter des soufganiot et des latkes)

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La déontologie en crise Par Jacqueline Wiener

Il y a juste un an, nous évoquions, à l’occa-sion des fêtes de Hanoukka, le nationalisme exacerbé de l’extrême droite flamingante minoritaire qui était parvenu à faire trembler les rouages fondamentaux de l’Etat belge et à contaminer de son intolérante vision d’un monde linguistique, voire pseudo ethnique mono culturel contraire aux spécificités belges, nombre de nos compatriotes.

Une crise en estompe une autre. Celle d’aujourd’hui, financière, qui depuis des semaines, n’a de cesse de faire plonger les bourses mondiales, se double d’une autre, économique, aux conséquences sociales iné-luctables.

Le clash bancaire international de cette année 2008 met en exergue de manière remarquable le fait que les banques ne peuvent plus avoir comme seul objectif de poursuive un but de lucre, comme elles l’ont très géné-ralement retenu ces vingt dernières années, dès lors qu’à côté des actionnaires, censés assumer les risques de la spéculation boursière en connaissance de cause, existent d’autres catégories de personnes auxquelles elles ont à rendre compte.

Les banques ont des devoirs à l’égard des déposants. Elles ont également à faire

preuve de rectitude vis-à-vis des emprun-teurs. Mais pas seulement : car actrices clefs de l’économie, leurs activités bancaires sont indissociablement liées à la notion de ser-vice public, les obligeant à une indéfectible déontologie, dans la conduite de leurs affai-res.Or il apparaît que les banques semblent avoir complètement oublié celle-ci.

On le sait, après le premier choc pétrolier et les années septante de décrédibilisation du système keynésien qui ne produisait plus pour l’heure de manière jugée satisfaisante, la Bourse prit possession des lieux : les managers, jusqu’alors des salariés comme les autres, virent leur destin accroché au cours des actions de leur entreprise et

leurs rémunérations indexées au gré des cotations. Sommés de produire du ren-dement rapide autant que concurrentiel, ils devinrent partie pre-nante à la Bourse.

La « révolution financière » était en marge et avec elle, la fameuse « auto-régulation » des marchés aux funestes conséquences.

Car les banques n’échappèrent guère à ce changement de gouvernance, désormais soumise aux sollicitations de la Bourse : leurs cadres recherchèrent le profit immé-diat et à très court terme, faisant l’impasse

Mieux vaut compter sur les lois que sur une improbable évolution de la nature humaine pour régler le destin des Nations.

Spinoza

« Actrices clefs de l’économie, les activités bancaires sont indissociablement liées à la

notion de service public »

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sur l’essence même de leur activité de ser-vice public.

Au lendemain du 11-septembre, la FED insuffla des masses inconsidérées de liquidités dans l’économie américaine, en même temps qu’elle maintint un taux direc-teur extrêmement bas, incitant volontaire-ment les Américains à consommer toujours plus. Des crédits au logement affranchis des règles essentielles de prise de risque en la matière foisonnèrent, rétribués à coup d’opérations financières juteusement essaimées jusque dans les institutions bancaires d’ici et d’ailleurs censées les plus fiables.Cette recherche du prompt profit a donc incité les banques ayant pignon sur rue hors les frontières des Etats-Unis à prendre des risques irresponsables, au prix de la mise en péril de leur solvabilité et liquidité sur le moyen et long terme, jetant aux orties la loyauté légitimement attendue d’elles par les déposants.

L’octroi de crédit à une population de clients dits « ninja » (no income, no job/assets) repris à leur compte par ces banques constitua lui aussi un déni d’éthique bancaire : car basé uniquement sur la possible, l’hypothétique hausse du marché immobilier, ces fameux subprime faisaient fi du devenir des emprunteurs, obligeant ceux-ci à s’endetter bien au-delà de leurs ressources, de leurs capacités financières1.

Ces fautes éthiques ont attendu le 15 septembre dernier, pour être conscien-tisées et voir tout un chacun découvrir et s’offusquer de telles pratiques. On a vu, jusqu’alors, l’argent spéculé, engrais des booms immobiliers de Londres, Knokke-le-

Zoute, Moscou ou Mar-rakech s’accoquiner aux bonus colossaux2, para-chutes dorés et autres rémunérations injusti-fiées des traders s’étaler à la une de reportages télévisés grand public où nouveaux riches à la louche se complaisaient dans leur irresponsa-

ble contentement. Depuis, d’ailleurs, ce navrant spectacle-là s’est modifié en une curieuse sarabande où derrière les aides étatiques s’additionnant en montants verti-gineux dansent des ombres : celles de ces acteurs d’hier, conseillers d’aujourd’hui et impunis sans doute de demain, qui actuel-lement encore, comme le décrivait si bien Le Nouvel Observateur l’autre jour, s’enri-chissent à coup de dizaines de millions de dollars d’actions empruntées à la baisse

et remboursées à cours bien plus effondrés encore, précipitant par là même encore un peu plus la crise financière dans son clash…

Mais revenons en aux banques et à la déontologie, à l’éthique ban-caire, puisque là se situe notre propos.

L’éthique, dans le monde de la banque, pos-sède sa propre histoire : citons les dirigeants des grandes banques allemandes, telles la Deutsche Bank, la Kommerzial Bank ou la

« L’octroi de crédit à une population de clients dits « ninja » (no income, no job/assets) constitue un

déni d’éthique bancaire »

« Le Judaïsme peut parler de l’éthique dans le commerce puisqu’il l’a mise en place très tôt »

1 En Belgique, l’usage, appliqué dans tous les services crédits des institutions bancaires, veut que le montant correspondant au taux d’intérêt des sommes prêtées dans le cadre d’un crédit hypothécaire ne soit pas supérieur à un tiers des revenus de l’emprunteur.

2 un chiffre parmi d’autres : sur les 3 dernières années, 95 milliards de dollars de rémunération ont été alloués aux grands dirigeants d’établissements financiers internationaux, pour 1.000 milliards de pertes – source : Financial Times

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Dresdner Bank qui en manquèrent cruel-lement, d’éthique, à l’époque où ces trois institutions finançaient la politique anti-sémite du IIIème Reich en assurant le fond de roulement de l’en-treprise Topf3 chargée de la construction des fours crématoires ou en gagnant de plantureux bénéfices résultant de l’aryanisation des entreprises juives…

Les victimes du crash financier actuel ne sont bien évidemment pas les victimes de la Shoah.

Il n’empêche : aujourd’hui pas moins qu’hier, il devrait impérativement exister un ancrage normatif de la bonne attitude morale à

adopter là où elle ne s’impose manifeste-ment guère d’elle-même aux banques. Cette « bonne attitude morale » relève de l’ingré-dient fondamental de l’éthique universelle : le respect de la personne humaine.

L’éthique dans le commerce, le Judaïsme pourrait en parler puisqu’il l’a mise en place très tôt. Outre les passages de la Torah4, la Tradition regorge de textes qui y font tantôt allusion5, tantôt nommément appel. Ainsi, par exemple, le Talmud se penche sur la question de la spéculation, en interdisant de faire des réserves, lorsque les prix montent, et oblige à vendre pour faire baisser ceux-ci.

Pourquoi cette présence précoce de l’éthique dans les questions d’argent ? Parce que pour le Judaïsme dès son origine, il n’y a aucune honte à être riche dès lors que l’abondance financière a un sens : l’argent6 est un moyen

d’établir la justice sociale. La pensée juive part du postulat que la pauvreté est quelque chose d’abso-

lument intolérable7, et non la richesse. Mais qui dit richesse, dit devoirs de l’homme riche envers l’Autre.

C’est ainsi que chez Maïmonide, il y a huit degrés dans la charité : le premier degré est de donner à manger au pauvre ; le der-nier degré – dont on voit le principe retenu depuis peu de temps seulement par les Etats les plus industrialisés du globe afin de venir

« L’argent est un moyen d’établir la justice sociale »

3 La direction de Topf und Söhne, les ingénieurs et les monteurs non seulement livrèrent les fours crématoires pour faire disparaître les personnes assassinées, conformément aux exigences de la SS , mais en plus, ils perfectionnèrent également les chambres à gaz. Pour ce faire, ils observèrent les premiers massacres et incinérations dans les crématoires. Les employés en question se servirent de leurs observations pour optimiser les installations d’extermination…

4 Ex.22 :25, Lev.25 :35 et suiv.5 « Rabbi Eléazar ben Azaria enseigne : […] Sans farine pas de Torah, sans Torah pas de farine. Rabbi Obadia de Barténouro :

Sans farine pas de Torah: celui qui ne peut manger comment s’occupera-t-il de la Torah ? Sans Torah pas de farine : à quoi lui sert la farine qu’il possède, puisqu’il ne possède pas la Torah, il y eût mieux valu qu’il mourût de faim », Mishna Avoth ch.3. Le Talmud propose ici un équilibre de vie entre « Torah », d’une part, que l’on peut comprendre comme étant l’étude qui conduit à réfléchir et à tendre vers la perfectibilité de soi et « farine », d’autre part, c’est à dire l’engagement dans la vie économique

6 Voyez notamment Gen.13 :2, Gen.24 :35, Rois 1,3,137 L’argent n’appartient pas à l’Homme : il n’en est que dépositaire.

On demanda à Rabbi Hiya : que doit faire l’homme pour s’enrichir ? Il doit s’investir dans le commerce et agir avec honnêteté. On lui dit: beaucoup ont agit de la sorte et ils n’ont pas réussi ! En fait : il faut demander miséricorde à Celui à qui appartient la richesse, comme il est dit (Aggée II) : « A Moi l’argent et à Moi l’or. » Talmud de Babylone traité Nidda

“La pendaison du banquier Joseph Süss Oppenheimer” à Stuttgart le 4 février 1738. Joseph Oppenheimer (1689- 1738), banquier du duc Alexandre du Wurtemberg, fit notamment l’objet d’une biographie rédigée par Selma Stern (l’auteure de « Yossel de Rosheim »)

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8 Voyez not. Deut.15,1 ; Exode Rabba $31 ; Git.36a ; Mechilta sur 22,24 9 Lev.19 :14

en aide aux pays en voie de développement à travers notamment le système des micro-crédits- est de prêter au pauvre pour qu’il puisse créer son propre travail. Le respect de l’Autre, fondement essen-tiel de la Loi et une de ces interdictions corollaires suivant laquelle ne places pas d’obstacle sur le che-min d’un aveugle8 aurait trouvé matière remarquable à attirer l’attention des institu-tions de crédit américaines sur sa signifi-cation profonde, avant de consentir à des prêts à ces clients qui n’avaient pas néces-sairement les connaissances adéquates ni suffisantes que pour bien mesurer les rouages techniques qui allaient aboutir à ce que tôt ou tard, au moment où les taux

d’intérêts allaient être inévitablement rele-vés, ils allaient se retrouver endettés bien au-delà de leurs capacités financières…

Et s’agissant de la multitude de banques ayant pignon sur rue hors les frontières des Etats-Unis qui ont pris tant de risques irres-

ponsables et auxquel-les les interventions financières étatiques massives sont provi-dentiellement venues

à la rescousse, leur rappeler ce vieux pro-verbe attribué au Roi Salomon n’aurait sans doute rien d’incongru :

« les projets de l’homme actif tournent à son avantage ; être impatient de s’enrichir, c’est aboutir au dénuement »9… ■

« Ne places pas d’obstacle sur le chemin d’un aveugle »

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Au fil de notre expérience de la vie et de notre compréhension du monde, nous saisissons de mieux en mieux la sagesse de l’enseignement de notre tradition.

Le Talmud Kidouchin nous livre un ensei-gnement critique en ce jour de Kippour, en ce jour de compte rendu et de jugement : « Toujours l’homme doit se considérer comme moitié méritant et moitié fautif, «  לעולם יראה אדם עצמו כאילו חציו חייב וחציו זכאיPour quelle raison ? S’il accomplit un com-mandement, il est heureux d’avoir basculé du côté du mérite ; s’il commet une trans-gression, « « Oï » lo » tant pis pour lui d’avoir basculé du côté de la « redevance ».

Que nous enseigne cette attitude ? 1. « Toujours l’homme doit se considérer… » .

C’est la façon dont nous nous considérons nous-mêmes qui compte avant tout.

2. « …moitié méritant et moitié fautif » : Comme le dit le poète, rien n’est jamais acquis à l’homme, ni sa force, ni sa fai-blesse, ni son cœur (et quand il croit ouvrir ses bras, son ombre est celle d’une croix et quand il veut serrer son bonheur, il le broie…). Nous ne pouvons pas nous endor-mir sur nos lauriers : tout reste toujours à faire ; cette image nous appelle à l’action.

3. Nos actes sont potentiellement posés sur les plateaux d’une balance : kaf. Cette vision a l’avantage d’être évocatrice et l’in-convénient d’être un peu simpliste. Rap-

Dracha de Kippour

pelons donc que kaf n’est pas seulement le plateau, c’est également la paume de la main. Cela pose une question fondamen-tale : dans les mains de qui sommes nous ? Nous voulons garder notre destin dans nos propres mains.

4. Nous ne sommes pas prisonniers du passé, on ne peut pas dire : j’ai fait tellement de fautes, à quoi bon me corriger. Non, tout se passe comme si nous étions en équilibre, ce que l’on fait continue de compter.

5. Nous ne sommes pas prisonniers d’une image figée de l’avenir, nous ne som-mes pas enfermés dans les horoscopes ou la voyance, nous nous attachons à la pré-voyance et mieux encore, à la vision comme un visionnaire, ein mazal léisrael ! Ce texte constitue donc un exemple de la façon dont notre tradition soutient notre moralité et notre libre arbitre personnel. Mais le jugement de Yom Kippour ne s’ar-rête pas à nos simples personnes.

Le traité Kidouchin poursuit :« Rabbi Elazar dit au nom de Rabbi Chimon : puisque le monde est jugé d’après la majorité et que l’individu est jugé d’après la majorité, s’il accomplit un commandement, il se réjouit car il a fait pencher lui-même et le monde entier du côté du mérite, et s’il commet une transgression, « « Oï » lo » « Oï » pour lui, puisqu’il se fait pencher lui-même et le monde entier du côté de la redevance. »Nous constatons de façon récurrente ce fait terrible : une personne et un acte peuvent détruire de nombreux efforts. Un terroriste

Par Rabbi Floriane Chinsky

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dans un autobus, une personne avec un bou-ton atomique… C’est le jeu de domino, une chute entraîne l’autre et le phénomène est irréversible ; c’est ce qu’on voit actuellement avec la crise économi-que qui se répand à tous les pays et à tous les secteurs.Le phénomène « domino » serait irréversible, puis-que la loi de la pesanteur voudrait que les petits morceaux d’ivoire ou de plastique ne se relèvent pas. Il existe pourtant d’autres jeux où la pose d’un pion peut renverser totalement la situation, dans un sens, puis dans l’autre. Les équilibres des balan-ces en font partie. Ainsi, les idées, comme les bienfaits, se répan-dent et s’affirment, les slogans se font une place au soleil au même titre que les dictons ou les mélodies publicitaires qui s’insinuent en nous et se « reproduisent » par notre intermédiaire. Richard Dawkins en parle avec le vocabulaire de l’évolution darwinienne. Le Rabbin Steinsalz en parle avec celui de la kabbale.Chaque action a un effet immédiat, certes, mais également un effet différé et potentiel-lement éternel par la dynamique de « conta-mination » qu’il met en place, à travers l’exemple qu’il donne, les idées qu’il inspire, les actes que d’autres agiront en consé-quence du nôtre. Yom Kippour est l’occasion d’une introspec-tion et d’un tri, d’une recherche des origines et des effets de ces pensées, de ces modes de pensées et de ces habitudes qui nous sont devenues naturelles au cours de l’année sans que nous n’en ayons conscience. Nous ne devons pas être le réceptacle passif d’idées imposées à nous.

En ce jour du jugement, nous faisons défiler devant notre conscience tous ces éléments pour déterminer « d’où ils viennent » et « où ils nous emmènent » et faire le tri (à la façon de l’hymne ountané tokef).Cette exigence du Juif se poursuit même au-

delà de sa pratique. Voyez Franz Rosen-zweig. Prêt à se conver-tir au christianisme, il a voulu d’abord respirer un instant le parfum du judaïsme qu’il allait quit-ter. Il est venu à la syna-gogue, pour Kol Nidré, et a été touché si profondé-ment par la ferveur des prières qu’il est revenu à sa propre tradition, il est devenu ce penseur, inspi-rant des générations de Juifs.Pour nous, les dominos peuvent se redresser contre la loi de la gravité, car il existe d’autres lois plus fortes qu’elles. La loi de l’identité en fait partie.

Nous sommes réunis ce soir pour Kol Nidré et nous comprenons l’ampleur de notre res-ponsabilité. Que penserait Rosenzweig s’il était avec nous ce soir ? Que ressentiraient d’autres que lui ? C’est la question que je me pose, pour cha-cun d’entre nous. Ces offices nous portent-ils comme c’est mon plus cher désir ? Et vous-mêmes, qui êtes la voix première et puissante de ces offices, êtes-vous suffisam-ment portés pour porter les autres ? Nos offices sont à l’image de notre commu-nauté. Un patchwork. Une belle tapisserie avec des motifs de nature différente, dont nous essayons qu’ils s’accordent et s’harmonisent. Mon vœu le plus cher est que chacun puisse y trouver un élément qui le charme et qui l’inspire, qui le porte pour l’année à venir. Que les magnifiques morceaux musicaux nous portent ;

« Nous constatons de façon récurrente ce fait

terrible : une personne et un acte peuvent détruire

de nombreux efforts. C’est le jeu de domino,

une chute entraîne l’autre et le phénomène est

irréversible ; c’est ce qu’on voit actuellement avec la crise économique qui se

répand à tous les pays et à tous les secteurs »

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Que les morceaux plus simples et plus sobres nous inspirent ; Que l’hébreu nous parle, que nous le com-prenions ou non ; Que les mélodies nous transportent comme une main tendue et une invitation à s’y joindre ; Que nos textes guident ceux qui sont en quête de sens et interrogent ceux qui aiment le questionnement. Je formule un vœu encore plus osé : que cha-cun soit porté par ce qui lui plait, et inter-rogé par ce qui a priori pourrait l’éloigner. Cela nous permettrait de paraphraser le philoso-phe et, tout en assumant nos préférences, de pou-voir affirmer : « rien de ce qui est juif ne m’est étran-ger ».

Beth Hillel ne sera jamais la synagogue idéale d’aucun d’entre-nous. Pourtant, à sa façon, Beth Hillel est parfaite. Sa per-fection réside dans notre capacité d’inclure, de rassembler, de faire vivre ensemble la tradition et la modernité et de faire vivre ensemble des personnes qui intègrent la tradition dans leur quotidien de manières diverses, mais toujours avec une volonté de transmission et d’intelligence.Nous proposons une autre voix. Elle doit pouvoir s’élever et porter loin.Dans notre voyage de Kol Nidré à Néila, de ce soir à demain soir, c’est aussi notre voyage en tant que communauté qui est symbolisé. Mon espoir est que notre Yom Kippour soit de ceux qui construisent la communauté, qui font pencher les balances du bon côté. Cela dépend de chacun d’entre-nous, de la façon dont nous mêlons nos voix, de ce que percevrait un Rosenzweig de l’esprit de nos prières. Nos missions sont innombrables :

Éduquer nos jeunes ; Accueillir les Juifs en recherche, de toutes origines et aux histoires les plus diverses et parfois les plus douloureuses ; Enseigner à l’extérieur ce qu’est notre tradi-tion, pour faire vaincre la connaissance de l’autre et préparer le terrain contre les cam-pagnes de dénigrements qui nous attaquent ; Soutenir les personnes en difficulté morale, en difficulté de santé et en difficulté financière ;Et nous occuper de nous-mêmes, de notre développement personnel, étudier et gran-dir.

Il faudrait peut-être un miracle pour que cela fonctionne, mais jus-tement, nous croyons au miracle car nous en connaissons la recette, nous, Abraham, Moïse, YoHanan ben Zakai, Eliézer ben Yéhouda, Théodore Herzl, et cha-cun de nous dans les petits-grands actes d’hé-roïsme que nous accom-plissons au quotidien et

qui font pencher la balance du bon côté. La recette du miracle, c’est de ne jamais s’avouer vaincu, de considérer qu’il faut agir pour rééquilibrer notre balance individuelle et la grande balance collective.Que ce jour de Kippour nous porte ensem-ble dans cette direction, qu’il nous renforce dans une identité forte et fière, que cette identité forte et fière nous permette d’être ouverts à l’autre, ouvert au nouveau, actifs et constructifs, que cet esprit de construc-tion se mette en œuvre dans nos vies per-sonnelles et dans notre communauté, et qu’elle inspire, peu à peu, toutes les commu-nautés d’Israël ;Que les autres nous jugent avec prudence, et que nous soyons nous-même prudents dans notre jugement d’autrui.

Amen, Gmar Hatima tova. ■

« Nos offices sont à l’image de notre communauté.

Un patchwork. Une belle tapisserie avec des motifs

de nature différente, dont nous essayons qu’ils s’accordent et

s’harmonisent. »

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Nous continuons ici notre analyse de la pensée et de l’enseignement de Leo Baeck, exposés dans la 4ème édition de « L’Essence du Judaïsme », parue en 1926, son premier livre et aussi le plus connu. Ce long chapitre expose les raisons de la foi profonde de Leo Baeck, et mérite une réflexion attentive de la part d’un lec-teur qui désirerait se familiariser avec la pensée d’un des premiers et des plus grands rabbins libéraux. De longues par-ties du texte original, dont cet article se veut un condensé, méritent la quali-fication qu’un membre d’une des commu-nautés dirigées par Leo Baeck attribuait aux homélies de son rabbin : « des conver-sations entre Leo Baeck et Dieu ».

La pensée de Leo Baeck est d’autant plus précieuse qu’elle l’a guidé tout au long de sa vie, jusque dans les heures les plus som-bres de sa déportation à Theresienstadt.

Le fondement de la religion réside dans les notions de « bien » et de « mal », ainsi que dans la question : l’existence a-t-elle un sens ? L’or-dre et le sens dans l’existence représentent le bien intégral, l’éthique qui se manifeste dans les choix et les décisions de la conscience personnelle. Le bien est universel, il repré-sente une obligation pour chaque homme, il est la réalité véritable, le sens même de l’uni-vers. Croire au sens de l’univers, c’est avant tout croire au bien.

Leo Baeck : « L’ Essence du Judaïsme »Croire en Dieu

Ce n’est pas dans l’homme, qui est une créa-ture limitée, que se trouve la source du bien éthique. Ce bien éthique ne peut se fonder que dans l’absolu, dans le Dieu unique dont émane la Loi.

La spécificité du judaïsme est l’acceptation éthique de l’univers. Elle n’est pas un opti-misme égoïste qui se réjouit d’un univers bon lorsque tout va bien pour soi. Le judaïsme a trop souvent connu le malheur pour croire à un bonheur facile. Bien au contraire, il considère le monde comme inachevé, le rôle de chaque homme étant de parfaire l’œuvre de la création. Dans ce sens, l’homme, tout en étant créature, est également créateur et réalisateur. L’histoire du monde en transfor-mation nous est racontée par la Bible. Elle dénonce le mal qui se trouve dans le coeur de l’homme ; en effet aucun personnage des Ecritures n’est présenté comme un héros parfait. A cette constatation répond lakhen « et pourtant » par lequel les prophètes inci-tent celui qui est tombé à se relever après chaque chute, et à se remette en route.

Pour Leo Baeck, la foi en l’homme tire sa force et sa légitimité de la foi en Dieu. C’est elle qui justifie que l’on croie en la valeur uni-que de chaque âme, de chaque être humain, et aussi en la valeur de l’humanité toute entière. D’où la triple responsabilité du Juif envers Dieu : responsabilité vis-à-vis de soi, c’est à dire être saint, car saint est l’Eternel ;

par Monique Ebstein

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responsabilité vis-à-vis du prochain qui doit vivre auprès de nous et nous auprès de lui, car il est ce que nous sommes ; et enfin res-ponsabilité vis-à-vis de l’humanité, car nous devons être les témoins de Dieu sur terre, et sanctifier son nom dans le monde où il nous a placés. Chaque être humain doit mettre à profit les jours qui lui sont donnés pour sui-vre les voies indiquées par Dieu au nom de la conscience morale. La foi juive ne prétend pas connaître la nature de Dieu, mais sa Loi, ses commandements, et sa volonté qui, en se manifestant, donnent un sens à la vie de l’homme et à la marche de l’univers.

L’histoire de la religion emprunte le langage des hom-mes. Ceux-ci ont toujours essayé de trouver de nouvel-les comparaisons et de nou-velles correspondances pour définir l’indéfinissable et pour exprimer l’inexprima-ble. Pour traduire le lointain innommable, la mystique se signale par une abondance de mots concrets, d’images proches, elle recourt aux symboles. La poésie et la force de la parabole que nous trouvons dans la Haggada1, la puissance de ses récits prouve la vie et le dynamisme de la religion. Mais lorsque celle-ci se sclérose dans des règles ou des lois figées, elle perd ce qu’il y a de meilleur en elle.

Les prophètes n’ont jamais voulu définir l’essence divine, mais seulement indiquer la place de l’homme vis-à-vis de Dieu. Ils ensei-gnent un Dieu vivant dont aucun homme ne pourra jamais saisir la nature, mais dont la Loi donne sens à l’existence humaine. Tant

pour les philosophes que pour les mystiques juifs, Dieu transcende les conceptions et les jugements humains, de sorte que toute spé-culation nous est interdite. La volonté divine, dans sa manifestation au sein de l’ordre éthi-que universel, se révèle à l’homme, et celui-ci peut répondre à Dieu par son action libre et bonne. C’est au plus profond de son être, dans ce qu’il a de plus personnel, que l’homme se sent appelé et conduit par le Dieu Un. Or Dieu est bien au-dessus du monde et de la terre entière, absolument différent du naturel et du terrestre, il est « Celui qui vit dans les hau-

teurs » (Is. 33, 5).

Le judaïsme, plus qu’une religion est un mono-théisme éthique qui ne peut mieux s’exprimer que par cette prière fondamentale : « Ecoute Israël l’Eternel notre Dieu l’Eternel est Un » et par le commandement qui suit : « Tu aimeras l’Eternel ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir ». Le judaïsme est la relation de l’homme à Dieu, il est essentiellement la conscience d’avoir été créé. Le Juif se sait créa-

ture, il fait partie de la création. Pour lui, la révélation et la création ne font qu’un. C’est cette conscience même d’être une créature qui permet à l’existence finie et périssable de l’homme d’éprouver un sentiment d’infini et d’éternité.

Un des maîtres du Talmud a attiré l’attention sur le fait que la Bible réunit toujours deux sujets, souvent antithétiques, qu’elle place côte à côte : « Ainsi parle le Dieu grand et sublime ....Je trône en haut, je suis le Saint ;

1 Par opposition à la Halakha (Loi), la Haggada (récit) est un ensemble littéraire non prescriptif, que l’on trouve dans le Talmud et le Midrach : contes, récits homilétiques, légendes, allégories, folklore, anecdotes ou maximes, commentaires à propos de héros de la Bible et d’autres figures juives historiques, paraboles, aphorismes et homélies

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don confiant : « Je me tais, je n’ouvre point la bouche car c’est toi qui as agi » (Ps. 39,10).

Le terme hébreu « émouna » est traduit à tort par « foi » en français. En effet, la foi, le dogme, l’obligation de croire en des vérités édictées n’existent pas dans le judaïsme. L’ « émouna » est le lien entre Dieu et l’homme, elle repré-sente une relation de confiance et de fidélité. L’amour divin soutient et entoure, cependant la justice divine ordonne, elle place le devoir absolu au centre de l’existence humaine. Tous deux, l’amour et la justice révèlent le Dieu uni-que et témoignent du sens de la vie humaine. Le Juif se sait créature, et en tant que telle il a reçu sa vie comme un don. A lui maintenant de la remplir, de lui donner le sens qui sera sa justification au sein de la création. C’est pour-quoi il conclut ses prières en disant « amen » « qu’il en soit ainsi ». L’homme qui vit sa condi-tion humaine au sein du judaïsme, doit décider, en sa qualité de créature de Dieu, de l’orienta-tion qu’il donnera à son action. Se fera-t-elle en conformité avec les commandements ou en s’opposant à eux ? Il a la liberté de se déci-der pour Dieu ou contre Lui. La Bible qualifie souvent le libre choix de l’homme en faveur de l’acte bon, de « avoda », c’est à dire de « service de Dieu ». Et c’est ainsi que l’homme devient « un auxiliaire dans la réalisation de l’œuvre de la création » (Berachot II, 2). Par son choix, l’homme fait advenir ici-bas le « royaume de Dieu », permettant ainsi au créateur de rési-der au sein de sa création. Le sentiment que l’homme éprouve d’être à la fois créature et créateur, traduit cet infini qui pénètre son âme. C’est « la crainte révérencielle » qui se situe aux antipodes mêmes de la crainte du « destin ».

Tout commandement renferme l’injonction de se détourner de ce qui est différent du bien, c’est à dire du mal : « Vois, j’ai placé devant toi aujourd’hui la vie et le bien, la mort et le mal ». Le commandement divin est l’opposition durable et éternelle au mal qui est l’ennemi de Dieu. L’homme qui choisit le mal, c’est à dire d’agir contre l’éthique, pro-

je suis aux côtés de celui qui est opprimé et dont l’âme est brisée... » (Is. 57,15). Il en résulte une tension dans laquelle le Juif se sent à la fois uni et séparé. Sa nostalgie de Dieu se manifeste dans le paradoxe de l’éloi-gnement transcendantal du « Il » et dans la proximité immanente du « Tu ». Cet « Il » finit pourtant toujours par devenir un « Tu » pour le « Je » qui l’interpelle. Car si Dieu est le roi, il est en même temps le père ; il est sublime tout en demeurant proche.

Un lien affectif existe entre le Créateur et sa créature. Un amour pater/maternel, plein de mansuétude : « De même qu’un père a pitié de ses enfants, ainsi l’Eternel aura pitié de ceux qui le craignent » (Ps. 103,13), « Est-ce qu’une femme peut oublier son nourris-son, ne plus aimer le fruit de ses entrailles ? Le ferait-elle que moi je ne t’oublierai pas » (Is. 49,15). Dans chacune de ces phrases, et dans bien d’autres, le terme employé en hébreu est « rehem » (entrailles), dont dérive « rahamim » que l’on traduit généralement par « miséricordieux ». En hébreu ce terme n’a pas la connotation condescendante qu’elle a dans d’autres langues, il exprime l’amour le plus naturel qui soit, celui que porte la mère à son enfant.

La relation du Juif à Dieu est celle de la créa-ture qui se sait aimée par son créateur. Elle est faite d’humilité, car l’homme reconnaît sa petitesse au sein de l’éternité et de l’infini, tout en ayant conscience de sa dignité : « Qu’est-ce que l’homme pour que tu t’en souviennes, et l’humain pour que tu en tiennes compte ; et pourtant tu l’as fait tout juste inférieur aux dieux et tu l’as couronné de splendeur et de magnificence » (Is. 8,5). La relation du Juif à Dieu n’est pas seulement l’objet d’une philo-sophie ni d’une contemplation. Elle est une tension nostalgique entre l’éloignement et la proximité. Elle est questionnement et interro-gation, ce « pourquoi ? » qui à lui seul est une prière, « Pourquoi m’as-tu tiré du sein qui me portait ? » (Job, 10,18). Elle est également aban-

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voque sa colère et sa jalousie. Cette méta-phore anthropomorphique vise à démontrer que si l’homme a choisi d’adhérer à Dieu et à ses commandements, il ressentira néces-sairement en son âme la colère, le courroux même de Dieu contre le mal. Non seulement contre tel ou tel aspect du mal, mais contre tout mal. C’est ainsi que l’adhésion à Dieu ne va de pair avec aucune neutralité morale, aucune indifférence, aucune paresse vis-à-vis d’une injustice sur terre. Le Dieu bon et paternel a souvent servi d’alibi pour faire oublier le Dieu souverain et jaloux qui a en horreur tout ce qui est injuste, immoral et blasphématoire. Un sentiment religieux dépouillé de crainte révérencielle et qui ferait abstraction de la « jalousie divine » serait moralement atrophié. Un sentiment religieux auquel ne correspondrait pas une vie conforme à la volonté et aux commande-ments de Dieu serait vain et mauvais. La souffrance humaine trouve aussi une réponse neuve. Il y a une harmonie même au sein de la souffrance, entre la prière et le commandement, entre le sentiment de trouver asile en Dieu et la volonté de suivre sa voie. Aux yeux des maîtres anciens, le commandement « Tu aimeras l’Eternel ton Dieu de toutes tes forces » signifiait : « Aime ton Dieu avec tout ce qu’il t’a donné dans le bonheur comme dans la souffrance ». Dans les jours bons comme dans les jours mau-vais, l’homme doit se conduire comme un être libre et créateur et, dans la souffrance, aimer Dieu de « toutes ses forces ». La langue des temps anciens avait forgé une expression spécifique pour parler de la prière de l’homme qui souffre : tsidduq ha din, « la justification du jugement ». Dans les prières qui sont des « louanges de Dieu » comme dans celles qui représentent « la justification du jugement », l’accent est souvent mis sur cette souffrance que représente la mort. La mort qui semble annihiler la valeur et la dignité de la vie, est la souffrance suprême pour l’homme qui est cependant appelé à librement « justifier le jugement ». La souffrance cesse ainsi d’être

« un destin » elle est acceptée comme faisant partie de la vie. Elle devient une épreuve pour l’homme, une éducation censée l’aider à sur-monter l’adversité. La tradition juive les dési-gne comme étant des « épreuves d’amour » : « Celui que l’Eternel aime, il le châtie comme un père punit son fils auquel il veut du bien » (Prov.3, 12). Cette idée est reprise par le Tal-mud : « C’est sur celui qu’il aime que le Sei-gneur précipite de dures épreuves afin qu’il en sorte purifié » (Sifré sur Deut.6, 5).

En Dieu la vie trouve son fondement et sa signification. Nous ne pouvons pas avoir notre fondement en Dieu sans prendre conscience du sens de notre vie et de la voie que nous devons suivre pour répondre à son comman-dement. La vie est donc une tension entre ce qui est donné et ce qui est exigé. Cette ten-sion est inhérente au judaïsme, elle le distin-gue à la fois du rationalisme intégral et de la mystique pure. En d’autres termes, notre vie ne trouve sa valeur éternelle qu’à travers Dieu, cependant sans l’action humaine elle est dépourvue de valeur. L’optimisme du judaïsme est de croire au sens de l’existence qui fait de la vie humaine autre chose qu’une simple succession de jours et d’années. Il en fait un tout unique.

L’hébreu utilise un seul et même terme pour désigner l’univers et l’éternité. Dans cet « Olam », cette immensité spatiale et tempo-relle, l’homme peut se sentir perdu et soli-taire ; il peut soit se figer dans l’immobilisme, soit se perdre dans un tourbillon étourdis-sant. Il peut aussi se sentir fragile parce que mortel. L’obscurité épaisse et nocturne qui accompagne l’homme dans sa vie est une image fréquente dans la Bible. Or une vie sans Dieu équivaut à une solitude obscure, même au milieu des hommes, de leurs joies, de leurs violences. L’âme ressent un abandon qui provoque le tremblement et le balbutie-ment jusqu’au moment où elle se réveille, interroge et cherche. Et de cette inquiétude, de cette nuit jaillit la nostalgie, l’aspiration à

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la lumière, la nostalgie de l’Un, créateur de l’infini et de l’éternité. L’homme qui vit cette quête est arraché à l’abandon et prie : « Tu es mon luminaire, Eternel, l’Eternel, illumine mes ténèbres » (II Sam. 22,29).

Pour éprouver la proximité de Dieu, il est nécessaire de se réserver dans la vie des périodes où l’on se coupe de la société des hommes. Après avoir vécu au milieu d’eux, jour après jour, nous avons besoin de nous retrouver avec nous-même, afin de nous replonger et de nous ressourcer dans le silence divin. Le Shabbat est ce temps qui accorde à tout Juif des heures de repos pour se couper entièrement du quotidien, s’isoler du monde tout en restant en son sein. C’est un jour d’ « allégresse », le jour où le Juif retrouve un »supplément d’âme ».

Il arrive que l’on se méprenne, même au sein du judaïsme, sur l’importance du Dieu unique, du Dieu des prophètes d’Israël, des psalmistes et des sages. On déplore avec raison que le judaïsme fasse parfois preuve d’un certain « relâchement propre à la libre pensée » vis-à-vis de l’idée de

Dieu. Certains s’imaginent en effet pou-voir enfermer le judaïsme dans les règles éthiques qu’il enseigne, et ne voient dans la croyance en Dieu qu’un ornement inutile. Il serait difficile de porter sur le judaïsme un jugement plus superficiel ! Celui-ci met en effet l’accent sur l’acte moral, et ne se prononce que sur les attributs éthiques de Dieu. Le Dieu de la foi d’Israël, est le Dieu de la loi morale. Cependant, la loi morale n’existerait pas si elle ne se fondait pas sur Dieu. La spécificité du judaïsme réside dans cette foi en Dieu ; celle-ci ne permet aucune ambiguïté, aucune hésitation ni aucune démarche boiteuse. Elle exige une adhésion claire et manifeste. Le critère de notre appartenance intime au judaïsme est déterminé par la conscience plus ou moins profonde que nous en avons. La foi en Dieu confère à l’histoire juive son importance et son sens héroïque. Est véritablement juif celui qui, face à l’éternité, lorsque son âme perçoit l’appel de Dieu est en mesure de proclamer : »Ecoute Israël, L’Eternel est notre Dieu, l’Eternel est un ».

(à suivre) ■

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JuDAÏsMe

Dracha de Nathan Azzizolahof (…) Ma paracha se nomme ki tavo. Ki Tavo signifie : « quand tu viendras ». Mais qui viendra où ? C’est l’entrée des enfants d’Israël en Terre Promise. C’est une tête de chapitre, le cha-pitre comprenant toutes les explications de ce qu’ils devront faire une fois arrivés en Canaan. Tout commence quand Dieu annonce à Moïse ce qu’il doit prescrire au peuple juif pour entrer en Terre Promise, la terre où ruisse-laient le lait et le miel.Moïse leur prescrit donc , premièrement, qu’ils devraient donner, une fois entrés en Terre promise, les prémices de leurs récoltes pour pouvoir les donner au Lévite, à la veuve, à l’étranger, à l’orphelin afin qu’ils soient ras-sasiés. Cette prescription avait pour but de rendre le peuple solidaire, que celui-ci s’entraide. C’est grâce à cette entraide, à cette solidarité que nous avons survécu au cours des âges. Par exemple, au Moyen-Âge, il y avait des impôts spéciaux pour les Juifs. Quand les plus pauvres ne pouvaient pas payer, à cette époque également, la communauté les aidait.Deuxièmement, Moïse leur prescrit de faire une courte déclaration résumant l’histoire du peuple juif depuis l’exil de Jacob chez Lavan. En effet, il ne faut pas que notre histoire tombe dans l’oubli. Je n’oublie pas non plus et je n’oublierai jamais l’histoire de ma famille.La troisième prescription de Moïse est que, lorsqu’ils seront arrivés en Terre Promise, ils dresseront au point de passage du Jourdain des stèles portant le texte de la Torah. Ils amèneront également des offrandes sur un autel de pierre. Pourquoi faut-il inscrire la Torah à la fron-tière ? Pour que chaque arrivant puisse res-pecter les lois en connaissance de cause.

Nos bné mitsva

Ensuite, une partie des tribus devra se ren-dre sur le Mont Garizim pour la bénédiction à donner au peuple. Ces tribus sont Siméon, Lévi, Juda, Issachar, Joseph et Benjamin.L’autre moitié du peuple, Ruben, Gad, Asher, Zabulon, Dan et Nephtali, se rassemblera sur le Mont Ebal pour affirmer la malédiction. Mais pourquoi une partie du peuple doit-elle être spécialement témoin de la bénédiction et une autre de la malédiction ? C’est comme si je séparais cette salle en deux et que cer-tains d’entre-vous devaient être témoins de paroles de bien et d’autres de paroles de mal. Et vous, personnellement, de laquelle de ces deux parties de l’alliance voudriez-vous être les témoins ? Il est toujours plus agréable d’être témoin de la bénédiction, de faire des promesses, de donner des récompenses. Et pourtant, il est important aussi de parler de ce qui dérange, gentiment, calmement mais fermement. (…)Les enfants d’Israël ne pouvaient pas choisir ! Tout le monde aurait choisi de dire du bien (…) Les interdits qui sont soulignés ici rappellent les Dix Commandements. On y ajoute l’inter-diction d’induire l’aveugle en erreur dans son chemin, celle de fausser le droit de l’étranger, de la veuve et de l’orphelin, celle de frapper son prochain dans l’ombre. Ce sont des actes de méchanceté mais aussi de lâcheté, et cette cérémonie permet de faire peur aux lâches.Ces bénédictions et malédictions rappelant les Dix Commandements sont présentes pour que tous les hommes respectent les lois de la Torah et que ceux-ci y restent fidèles. Ma paracha traite donc divers sujets tels la solidarité, l’entraide, le respect, la fidélité et les traditions. Cela fait partie des valeurs devenues aujourd’hui universelles (…).

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le shofar

Dracha de Tobias BisschopsMa parasha s’appelle Noé (Parashat Noach chapitre 11)Elle parle de grands cataclysmes.Premier cataclysme : le déluge. La vie – aussi bien des hommes que des ani-maux- était corrompue. Les rabbis disent que les hommes se mariaient même avec les ani-maux. Dieu a voulu recommencer à partir de zéro – ou presque – et a effacé toute vie de la terre pour reconstruire le monde avec la famille de Noé et les animaux qu’il a sau-vés dans l’arche. Dans la parasha Noé, Dieu conclut une alliance, non seulement avec les hommes et mais aussi avec tous les ani-maux. C’est une alliance de vie avec la terre entière. Cette alliance est symbolisée par

l’arc en ciel. Mais les choses continuaient à tourner mal. Et nous aurons un deuxième cataclysme. C’était un cataclysme culturel, cette fois – ci. Le passage que je vais vous lire en hébreu dans un instant traite de ce deuxième cata-clysme. Il parle de la

Tour de Babel. Tout le monde connaît cette histoire.A cette époque, les hommes parlaient encore une seule langue. Ils venaient de l’est et s’ar-rêtèrent dans une vallée (à Shinear). Ils fabri-quaient des briques pour construire une cité avec une grande tour. Pourquoi faisaient-ils cela ?La Bible dit qu’ils le faisaient « pour se faire un nom », une réputation. Mais Dieu n’aimait pas cela. Il confondit leur langue et les dis-persa sur toute la terre pour qu’ils ne puis-sent plus continuer à construire cette tour. C’est à cause de la confusion de la langue que la cité a été nommée Babel (ce qui veut dire « confusion »).En Néerlandais ce mot a donné : « babbelen ».Pour la petite histoire, au Moyen Âge, il y avait

des savants anver-sois qui croyaient que l’hébreu venait du néerlandais à cause de cela. Ils croyaient vraiment qu’Adam et Eve parlaient l’anver-

sois. Je ferme la parenthese.Mais pourquoi Dieu est-il fâché contre les hommes ? Est-ce un crime de construire une tour ? Est-ce que Dieu est jaloux des hommes ? C’est ce que disent beaucoup de savants. Dans la tradition juive, Dieu est le partenaire de l’homme et il agit pour le bien de l’homme. Mais la Bible ne dit pas ce que les hommes ont fait de mal. Dieu est fâché. Mais nous ne savons pas pourquoi. Voilà le problème. Ici commence le travail de l’inter-prétation. Une partie de la réponse peut être trouvée dans l’archéologie.Je suis allé au Musée du Pays de la Bible à Jérusalem pendant mes dernières vacances. Là, j’ai appris que l’histoire sur la tour de Babel est probablement basée sur les ziggou-rats, les tours pyramidales des SumériensBeaucoup de gens croient que les ziggurats étaient des temples. La Bible ne dit pas cela. Elle dit simplement : une tour. Elle ne dit pas « un temple », ce qui très curieux.Mais, en effet, le ziggurat n’était pas un tem-ple. Ce n’était pas un lieu d’adoration.Les temples Sumériens se trouvaient ailleurs. L’archéologie m’a appris que le ziggurat était une sorte d’escalier qui permettait à Dieu de descendre sur terre. Rien d’autre. Mais est-ce que Dieu a besoin d’un escalier ? Le texte dit littéralement : « Le Seigneur descendit sur la terre pour voir la ville et la tour que bâtis-saient les fils de l’homme. » Donc Dieu est déjà descendu pendant la construction de la tour. Il n’avait pas besoin de cette tour pour venir sur terre. Ce sont les prêtres qui voulaient faire croire cela pour garder leur pouvoir. Mais Dieu n’a pas besoin d’escalier. La tour, c’était beaucoup de travail pour rien.Dans la tradition juive, le travail est impor-tant. Mais pas n’importe quel travail. Il faut

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JuDAÏsMe

que le travail serve à quelque chose. Qu’il nous rende plus humains. Autrement, les hommes seraient des fourmis. Dans notre parasha, les hommes font la tour pour « se faire un nom ». Ils pensaient donc à

leur propre pres-tige. Dieu n’était qu’un prétexte. La tour était un grand projet de prestige. Et nous savons tous ce

que cela veut dire. Dans toute l’histoire, les hauts bâtiments ont servi au prestige des gens (pyramides, gratte-ciels etc.). En travaillant, nous pensons trop souvent à notre réputation et trop rarement au sens de notre travail. Dieu veut que nous nous concentrions sur des projets qui ont du sens, qui humanisent, qui sont nécessaires et non pas des projets inu-tiles. Ce n’est donc pas par jalousie que Dieu était opposé à la tour de Babel. Dire que Dieu serait jaloux, c’est raconter l’histoire comme l’on la raconte à un enfant. Mais si nous vou-lons comprendre le texte comme des adultes, nous devons comprendre que Dieu s’inquiète pour l’homme.Qu’il veut l’aider à sortir de la folie des gran-deurs et de l’inhumanité.

La parasha nous apprend encore autre chose.Nous avons des stéréotypes.Instinctivement, nous croyons que ce qui est grand ou haut est bien et que ce qui est petit ou bas est mauvais. La Bible nous apprend que le contraire est vrai.Au début, Dieu a essayé de changer l’huma-nité par une catastrophe climatique.C’est très intéressant pour CNN, mais cela n’a rien donné.Ensuite, il a essayé de changer l’humanité par une catastrophe géopolitique : disperser les hommes en créant la confusion des lan-gues et la pluralité des nations.C’est toujours très intéressant pour CNN, mais cela n’a toujours rien donné. Car les hommes commençaient à pratiquer l’idolâtrie à grande échelle.Finalement, notre parasha se termine par l’apparition de deux personnes, Abram et Sarai (qui deviendront plus tard AbraHAm et SaraH), des êtres humains comme vous et moi : fragiles et imparfaits.Dieu lui même a appris quelque chose au cours de cette parasha. Il a appris qu’il ne faut pas commencer par le haut, si l’on veut changer les choses, mais par le bas.Qu’il faut commencer par l’individu pour que petit à petit d’autres individus grandissent et que la communauté avance. (…) ■

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AgeNDA

Décembre 2008Lundi 1er décembre 2008 20h00 à 21h30 : Cours Adultes : Notre Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Chinsky : voir Newsletter.

Mardi 2 décembre 200820h00 : Rikoudei Am (danses folkloriques)

Mercredi 3 décembre 200814h00 à 16h45 : TALMIDI

Vendredi 5 décembre 200820h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 6 décembre 2008 9 Kislev 5769 – VAYETSE10h30 : Office Bar Mitsva de François Kozak

Lundi 8 décembre 2008 YOM KIPPOUR20h00 à 21h30 : Cours Adultes : Notre Judaïsme, pensée et pratiques avec Rabbi Chinsky : voir Newsletter

Mardi 9 décembre 200820h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Mercredi 10 décembre 200814h00 à 16h45 : TALMIDI

Jeudi 11 décembre 200820h00 : Midrach dans le texte avec Rabbi Abraham Dahan

Vendredi 12 décembre 2008 20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 13 décembre 2008 16 Kislev 5769 – VAYCHLAKH10h30 : Office

Lundi 15 décembre 2008 20h00 à 21h30 : Pas de Cours Adultes : Notre Judaïsme, pensée et pratiques

Mardi 16 décembre 2008 20h00 : Rikoudei Am (danses folkloriques)

Mercredi 17 décembre 200814h00 à 16h45 : TALMIDI

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le shofar

Vendredi 19 décembre 2008 20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 20 décembre 200823 Kislev 5769 – VAYECHEV10h30 : Office

Dimanche 21 décembre 2008EREV HANOUCCA – 1° bougieDès 16h00 : Fête de Hanoucca et allu-mage de la 1ère bougie (voir annonce)

Lundi 22 décembre 2008HANOUCCA 1 – 2° bougieCHOFTIM20h00 à 21h30 : Pas de Cours Adultes : Notre Judaïsme, pensée et pratiques

Mardi 23 décembre 2008HANOUCCA 2 – 3° bougie20h00 : Rikoudei Am (danses folkloriques)

Mercredi 24 décembre 2008HANOUCCA 3 – 4° bougie14h00 à 16h45 : Pas de TALMIDI

Vendredi 26 décembre 2008 HANOUCCA 5 – 6° bougie 20h00 : Office de Kabbalat Chabbat

Samedi 27 décembre 200830 Kislev 5769 – MIKETS – HANOUCCA 6 – 7° bougie10h30 : Office

Dimanche 28 décembre 2008 Roch Hodech Tevet – HANOUCCA 7 – 8° bougie

Lundi 29 décembre 2008HANOUCCA 820h00 à 21h30 : Pas de Cours Adultes : Notre Judaïsme, pensée et pratiques

Mardi 30 décembre 200820h00 : Rikoudei Am (danses folkloriques)

Mercredi 31 décembre 2008 14h00 à 16h45 : Pas de TALMIDI

KISLEV 5769

HANOUCCA Le dimanche 21 décembre 2008

à partir de 16h00Pour les enfants : jeux et contes

à 17h30Pour tout le monde :

Allumage de la 1ère bougie dans le jardin et petit office de Hanoucca

Après l’office :Collation pour tous (Merci d’apporter des soufganiot et des latkes)

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COMMuNAuTÉ

Naissance

Le 24 octobre dernier, est née la petite Elya, •fille de Julie et Mica Gabay, petite fille de Myriam et Yvan Silvera et arrière petite-fille de nos amis Jeannine et Ernest Moskovic. Bienvenue à Elya et Mazal Tov aux heureux parents, grands parents et arrière grands-parents !

Bné Mitsva

Le 6 décembre 2008 – Paracha Vayetzé : Bar •Mitsva de François Kozak

Le 10 janvier 2009 – Paracha Vayehi : Bar •Mitsva de Elie Starc

CARNET

Vous avez oublié de régler

votre cotisation annuelle pour 5769 ?

Compte C.B.C. 192-5133742-59

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le shofar

Nous ne sommes pas seuls. La synagogue Beth Hillel fait partie

de la plus grande mouvance juive au plan mondial. Mais nous avons encore beaucoup à accomplir sur le plan européen. Malgré nos réussites éclatantes, nous restons des pionniers.

La World Union for Progressive Judaism (Union Mondiale du Judaïsme Progressif) est la fédéra-tion des communautés libérales juives. Elle est active dans 46 pays et comprend 2 millions de membres (dont 1,6 million aux Etats Unis). Elle est une des plus grandes organisations juives dans le monde. Le terme « progressif » signale que pour le Judaïsme libéral, la révélation est un processus interminable, sa manifestation ne s’épuisant pas dans les écrits canonisés tels la Bible hébraïque ou le Talmud.

La “World Union for Progressive Judaism”, c’est quoi exactement ?

Une précision s’impose. Le terme « progres-sive Judaism » comprend les mouvements appelés en Anglais « liberal », « reform » et « reconstructionist ». En Angleterre, le mou-vement « liberal » se situe à gauche du mouve-ment progressif. Le terme « Liberal Judaism » n’est donc aucunement l’équivalent de ce que nous appelons en français « Judaïsme libé-ral ». Selon la terminologie anglaise, la CILB belge ou le MJLF français appartiennent au courant « reform ». Quant au mouvement Masorti (appelé « conservative » en Anglais), celui-ci fait partie du World Council of Conservative/Masorti Synagogues.

Objectifs de la World UnionLa WUPJ s’engage à fortifier les ten-dances pluralistes, non-exclusivistes et égalitaires du Judaïsme à tra-vers le monde. Elle appelle à la justice sociale dans l’esprit du « tikkun olam » (la réparation du monde) et participe à la construction de l’Etat d’Israël comme Etat juif, démocratique et pluraliste.

par Ralph Bisschops, Dr. phil.

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COMMuNAuTÉ

Plus concrètement, la WUPJ vise les objectifs suivants :

promouvoir une étude et une pratique •du Judaïsme qui s’harmonisent avec la modernité ; éveiller l’intérêt à la tradition juive auprès •de tous ceux qui s’en sont éloignés ; soutenir les communautés libérales nais-•santes ; former des rabbins, hazzanim, professeurs •de religion et leaders communautaires ; élaborer et distribuer des livres de prière •qui correspondent aux besoins d’édifica-tion religieuse, éthique et spirituelle de notre époque ; promouvoir l’enseignement du Judaïsme •libéral par l’élaboration et la mise à dispo-sition de matériel pédagogique ; promouvoir la coopération entre les com-•munautés libérales ; organiser des congrès sur la pensée, la •pratique et le développement du Judaïsme libéral pour les communautés membres.

Aperçu historique La WUPJ a été fondée à Londres en 1926 par Claude Montefiore et Lily Montagu. Son pre-mier président fut le Rabbin Leo Baeck, une personnalité de proue du Judaïsme libéral

allemand. Dans son libéralisme, Baeck ne voulait, cependant, jamais perdre de vue l’ensemble de la communauté juive et de son héritage. Lorsqu’il assuma la présidence de la WUPJ, il déclara : « Nous sommes progres-sifs, non pas par ce que être progressif serait une valeur en elle-même, mais pour le bien du Judaïsme, du Judaïsme dans son entièreté1 ». Pour Leo Baeck, le Juif libéral est avant tout juif, progressif ensuite.2

En 1959, le quartier général de la WUPJ fut transféré à New York. Depuis 1971, il se situe à Jérusalem.

En raison de sa croissance, la WUPJ a créé en 1958 un Bureau américain (American Board) et un Bureau européen (European Board). Ce dernier, appelé actuellement « European Region, » regroupe les communautés libéra-les de l’Europe et s’engage activement dans le soutien des communautés libérales de l’ex-URSS et d’Israël.

La WUPJ est présidée par le Rabbin Uri Regev. L’European Region est dirigée par le Rabbin Dr. Andrew Goldstein.

Réalisations récentes Depuis la fin de l’URSS la WUPJ s’est lar-gement établie en Russie, Biélorussie et en Ukraine.

La WUPJ a accru fortement la présence et la visibilité du Judaïsme libéral en Israël dans tous les domaines - enseignement dans les écoles publiques, accueil des olim, actions judiciaires visant entre autres la discrimina-tion des femmes et la corruption.En 2006, la WUPJ fonda le centre d’études Anita Salz qui permet aux leaders commu-nautaires d’approfondir leur connaissance du Judaïsme libéral et de sa pratique. Une des réalisations les plus impressionnantes

2 ‘We are progressive, liberal Jews, not for the sake of progressive, liberal Judaism, but for the sake of Judaism, of Judaism as a whole.’ cité par Michael A. Meyer, Rabbi Dr Baeck’s Legacy to Progressive Judaism. in : European Judaism, Vol. 39, 2006.

3 Michael A. Meyer., op. cit.

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le shofar

reste la synagogue Beth Daniel à Tel Aviv qui accueille un grand nombre d’Israéliens ainsi que l’auberge de jeunesse « Mishkenot Ruth Daniel » à Yafo.

Depuis 1990, la WUPJ a fortement contri-bué à la renaissance du Judaïsme libéral en Allemagne, qui au 19ème siècle fut le ber-ceau spirituel de ce mouvement. En 1999, la WUPJ fonda le sémi-naire Abraham Geiger (Abraham Geiger Kol-leg) à Potsdam, destiné à former des rabbins et

(depuis 2008) des hazzanim.

Aux Pays Bas, où le mou-vement libéral comprend environ 40 % des Juifs affiliés à une synagogue, la WUPJ a fondé l’Insti-tut Levisson qui forme des rabbins et officiants à vocation tardive, leur permettant de poursuivre leurs études rabbiniques tout en continuant leur carrière professionnelle.

La WUPJ en Europe (l’European Region)Au niveau européen, le Judaïsme libéral est fortement implanté au Royaume Uni, aux

Pays-Bas, en France et en Allemagne. Depuis longtemps, il est également représenté par d’importantes synagogues en Belgique et en Suisse. De nouvelles communautés ont vu le jour en Autriche, en République Tchèque, en Hongrie, en Italie, au Luxembourg, en Pologne, au Danemark, en Espagne et en Slovaquie.

Même si la coexistence sur le même terrain de communautés libérales et orthodoxes a toujours été une source de tensions intercom-munautaires en Europe continentale, il existe néanmoins des pays où ces deux tendances ont fini par coopérer de manière loyale. Ceci est le cas aux Pays Bas et surtout en Allemagne, où, depuis 2004, le mouvement libéral est repré-senté dans le « Zentralrat der Juden in Deuts-chland » (le pendant allemand des Consistoi-res israélites en France et en Belgique).

Le challenge futur du WUPJNe nous gargarisons cependant pas d’un dis-cours triomphaliste. Le budget de la WUPJ ne reflète guère le nombre vertigineux de ses membres. 10 millions de dollars comme budget annuel prévu pour 2010, c’est peu. Les oligarques russes donnent des sommes plus considérables aux ultra-orthodoxes.

En Allemagne, les synagogues libérales sont visitées majoritairement par des immigrants rus-ses à faible budget. Le président d’une synago-gue allemande m’a confié un jour que dans sa com-munauté, la plupart des donateurs étaient des chrétiens sympathisants.

Quant à Israël, même si les synagogues libérales y jouissent d’une popu-larité visible à en juger

par la participation aux offices, les Israéliens n’ont pas l’habitude de payer des cotisations. L’afflux d’argent vient, maintenant comme

« Nous sommes progressifs, non pas

parce que être progressif serait une valeur en elle-même, mais pour le bien du Judaïsme dans son

entièreté » Rabbin Leo Baeck,

1er président de la WUPJ

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jadis, principalement des USA et du Royaume Uni. La suprématie anglo-saxonne, qui résulte iné-vitablement de cet état des choses, a pour consé-quence qu’aucun effort sérieux n’a été fait jusqu’à ce jour pour positionner le Judaïsme libéral auprès de l’Union Européenne. Alors que le « Conference of European Rabbis » qui représente l’orthodoxie classique et le « Rabbinical Centre of Europe » du mouve-ment Chabad sont conviés à des rencontres interreligieuses au plus haut niveau par la Commission européenne, le Judaïsme libéral reste un grand inconnu pour ceux qui font la politique européenne.

Suite à une campagne de sensibilisation lancée par Beth Hillel auprès des leaders de la WUPJ, le Rabbin Joel Oseran, directeur associé, a déclaré lors de la dernière assem-blée générale de la WUPJ3 que par rapport à l’Union Européenne, « nous avons travaillé comme une bande d’amateurs ». Le 16 novem-bre 2008, le Conseil d’Administration de la WUPJ s’est réuni à Beth Hillel pour se pen-cher sur ce déficit.

Le plus dur reste à faireCet état des choses est tout à fait para-doxal : après avoir traversé un long chemin difficile depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le Judaïsme libéral se réjouit d’un afflux considérable en Europe occi-dentale, ce qu’illustre l’émergence actuelle de beaucoup de nouvelles communautés. Nous avons de superbes centres à Paris, Bruxelles, La Haye, Amsterdam et Vienne.

« On ne parle que de vous ! » nous a récem-ment déclaré un visi-teur lors d’une expo-sition organisée par le Magen David Adom à Beth Hillel.Mais dans l’imaginaire de l’Europe, le Judaïsme libéral est absent.Nous avons pourtant

prouvé que grâce au militantisme et à la géné-rosité de nos membres ainsi qu’au charisme et à l’érudition de nos rabbins, nous sommes capables de grandes réussites.

Reste encore la chose apparemment la plus difficile à prouver : le fait que nous existons.

Liens WUPJ (page d’accueil) :

http ://wupj.org/

WUPJ-channel :

http ://www.youtube.com/wupj

WUPJ European Region :

http ://www.europeanregion.org/

Leo Baeck College :

http ://www.lbc.ac.uk/

Abraham Geiger Kolleg :

http ://www.abraham-geiger-kolleg.de/

Institut Levisson :

http ://www.levisson.nl/content/view/235/307/

Centre d’Etudes Anita Salz :

http ://www.saltz-center.org/Eng/Index.asp ■

« Dans l’imaginaire de l’Europe le Judaïsme

libéral est absent »

3 à Vienne en Mars 2008

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L’avenir des communautés juives est-il à peindre en rose ou en gris ?

Par François Moyse, vice-président du Consistoire du Luxembourg1

Parmi toute la documentation et les nouvel-les disponibles sur Internet, je suis tombé sur un rapport de l’Institut de Planification d’une Politique pour le Peuple Juif (traduction de l’anglais), Institut émanant de l’Agence Juive en Israël, pour les années 2005/2006 et inti-tulé : Entre Renaissance et Déclin.

Ce document se veut être une radioscopie du monde juif, un exposé de ses contradictions et des menaces qui pèsent sur lui ainsi que des voies qui pourraient lui permettre de s’af-firmer comme entité por-teuse d’espoir.

Comme tout rapport, on peut bien entendu contes-ter et les méthodes utili-sées et les résultats, basés notamment sur les statis-tiques, mais le rapport est un outil intéressant et semble être cautionné par des personnalités bien connues telles que Dennis Ross (ancien coordinateur du Prési-dent US Clinton au Moyen-Orient) et Sergio Della Pergola (statisticien du peuple juif à Jérusalem).

Le rapport essaie de prendre en compte un scénario optimiste et un autre pessimiste, pour évaluer parmi les deux tendances l’ave-

nir qui peut attendre les communautés juives de par le monde. Il se base sur les prémisses que la Weltanschauug et l’histoire du peuple juif sont uniques et ont traversé les âges. Selon le scénario choisi, l’avenir sera à pein-dre en rose ou bien en gris, voire même en noir, d’où l’hésitation entre la renaissance et le déclin. Selon le scénario pessimiste, en 2050, le peu-ple juif compterait moins de 10 millions de membres, l’aliyah vers Israël aura périclité, le nombre de Juifs en Israël n’étant plus que de

65% et l’assimilation et les mariages mixtes cau-sant des ravages au sein de la diaspora. Israël se dé-judaiserait et se dé-sioniserait. En diaspora, les communautés juives perdraient beaucoup en influence, l’éducation juive toucherait peu la jeunesse happée par la

modernisation, les Juifs étant plus mal per-çus dans le monde et le leadership juif inca-pable d’y remédier.

En revanche, si on prend en compte une personne optimiste, en 2050, le nombre de Juifs serait de 18 millions, avec 2/3 des Juifs habitant en Israël, pays stabilisé notamment dans la sécurité et dans son caractère juif.

« Les Juifs d’aujourd’hui devraient, à l’ère de la mondialisation, avoir

consciemment opté pour leur appartenance à ce

qu’est le judaïsme »

1 Texte original publié dans « Trait D’Union », n°190, octobre 2008, p.31, reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur

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COMMuNAuTÉ

En diaspora, malgré l’affaiblissement en nombre des Juifs, les communautés se ren-forceraient culturelle-ment et matériellement, la connaissance juive aurait progressé et la collectivité juive serait dotée d’expressions mul-tiples. La créativité dans les domaines les plus divers et l’adéquation du leadership juif feraient notamment que l’influence du peuple juif au niveau mondial gagnerait en importance.

Face aux deux hypothèses, le rapport sou-ligne que des initiatives soigneusement élaborées devraient optimiser les potenti-alités offertes au peuple juif et que donc il faudrait se doter dès à présent de structures, de ressources et d’un strict plan d’action per-mettant de voguer vers des horizons meilleurs.

Quelques réflexions me paraissent devoir être reproduites. Ainsi, les Juifs d’aujourd’hui devraient, à l’ère de la mondialisation, avoir consciemment opté pour leur appartenance à ce qu’est le judaïsme, sans pression exté-rieure : ce serait l’expression contemporaine de l’identité juive.

Le rapport souligne l’importance des migra-tions internationales, qui ont d’ailleurs tou-jours existé. L’aliyah aurait profité de facteurs historiques comme de meilleurs conditions économiques en Israël pour les Juifs des divers pays de provenance. Ce mouvement se tarirait de plus en plus.

Il est encore souligné qu’à l’échelle de l’en-semble du peuple juif, on ne compterait qu’une minorité active : ainsi en serait-il de tout engagement, culturel, ou autre dans les

communautés. De multiples raisons préside-raient au désintérêt d’aucun pour la chose

juive. Il est intéressant encore de noter que les enfants du mariage mixte feraient figure de laissé-pour-compte des structu-res éducatives juives exis-tantes. Il est aussi écrit que le leadership juif pour le XXIe siècle, compétent et international, resterait

encore à créer et que très peu serait fait pour intégrer des jeunes cadres dans les organi-sations existantes. D’autre part, les grands donateurs juifs consacreraient moins d’un tiers de leurs dons à des œuvres spécifique-ment juives. Face à cette réalité, non seulement le nou-

veau modèle de relation entre Israël et la diaspora resterait encore à inventer, mais encore, l’absence de tout programme ou ordre du jour collectif au niveau mondial ferait cruellement

défaut, alors qu’au niveau européen, l’absence de planification et de coordination entre les communautés serait problématique.

Qu’en conclure pour notre communauté ? Celle-ci n’échappe pas à la réalité des consta-tations générales faites dans ce rapport. Il y a lieu de réfléchir aux structures et aux pro-jets à développer si l’on veut affronter posi-tivement l’avenir. Mais surtout, la chance du Luxembourg est qu’il attire une migration qualifiée, également juive. L’apport de nou-veaux juifs semble permettre à notre com-munauté d’éviter le déclin constaté aux alen-tours, à condition d’adapter notre façon de fonctionner aux nouvelles réalités.

Voilà un beau projet pour le leadership, comme pour tous les membres de notre com-munauté ! ■

« Les enfants du mariage mixte feraient figure de laissé-pour-compte des structures éducatives

juives existantes »

« Le leadership juif pour le XXIe siècle, compétent et international, resterait

encore à créer »

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Dans la peau de Gisela de David GrossmanEd. du Seuil 2008 par Monique Ebstein

David Grossman est né à Jérusalem en 1954, d’une famille originaire d’Europe centrale. Il est l’auteur de six romans qui ont connu un grand succès, et également de plusieurs essais politiques engagés qui ont ébranlé l’opinion publique tant à l’intérieur qu’à l’ex-térieur d’Israël.

« Dans la peau de Gisela » est un recueil d’es-sais et de conférences données entre 2002 et 2007. Rappelons qu’en automne 2006, il perdit son fils Uri, tombé pendant la guerre du Liban. Ce deuil l’affecta au plus profond de lui-même, et on put lire dans les jours qui suivirent cette mort, des articles qu’il est impossible d’oublier. Ce lourd tribut payé au Pays justifie le respect que le lecteur doit aux opinions exprimées par l’auteur.

Dans une première partie « Les livres qui m’ont fait » (2002), David Grossman, raconte, comment le jeune sabra qu’il était, décou-vre vers huit ans Cholem Aleichem dans une traduction en hébreu que son père lui donne à lire. Il fait ainsi connaissance avec ce monde juif qu’il ignorait jusque là, mais qui lui deviendra très vite familier: « Le shtetl était mon jardin secret que je ne pouvais partager avec personne ». Et vers dix ans, il prit conscience que ce monde-là était « son » monde, et qu’il avait été détruit par la Shoah. A dix ans, il découvrit que « les livres sont l’unique lieu où les choses et leur perte peu-vent cohabiter ». Il comprit que l’écriture était

Lectures

une tentative de mettre la réalité en accord avec la société, avec son identité et sa « voix intérieure », et qu’elle permettait de réconci-lier l’homme avec le juste langage. L’écriture littéraire est le contraire de la langue de bois politique dont les mots trahissent la vérité. Il donne en exemple cette phrase que l’on peut souvent lire dans les journaux: « Un jeune autochtone a été tué à la suite de désor-dres survenus dans les territoires », alors qu’elle peut vouloir dire: « Nous avons tué un gosse palestinien de trois ans. Notre erreur est due aux troubles habituels qui règnent dans les Territoires que nous occupons »

Sa deuxième partie « Réflexions sur une paix improbable » (Colloque des intellec-tuels juifs, Paris 2004) reprend une confé-rence sur le thème «Penser et bâtir la paix au Proche-Orient». Grossman analyse de façon lucide la situation présente dans laquelle se débattent les Israéliens. Pour qu’advienne enfin la paix, Israël doit être profondément convaincu qu’il a un avenir en tant que peu-ple et en tant que nation. Or les Juifs ont actuellement une vision pessimiste de leur existence fragile, aléatoire, hors normes. Aucun Israélien né en Israël n’a jamais vécu en temps de paix, il a donc du mal à s’imagi-ner que l’on puisse vivre sans ennemi ! C’est pourquoi il a toujours dû, et doit encore, être constamment prêt à répondre par la violence à ceux qui mettent en péril sa vie, sa famille, sa patrie. Si la paix devait advenir, il lui fau-drait apprendre à vivre une existence qui ne soit pas marquée du sceau de l’hostilité, de l’angoisse, de la guerre. L’instinct vital, vécu sur le mode agressif, sape les fondements de la société israélienne. Et après un siècle de

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COMMuNAuTÉ

combats militaires et politiques, la méfiance et l’hostilité de l’Israélien envers l’Autre, fût-il un membre de la famille, un proche, voire un frère, sont devenues une sorte de seconde nature. L’on pourrait croire que le refus de reconnaître tant soit peu les souffrances des Palestiniens finisse par fausser le jugement. On constate en effet dans la population une profonde hostilité entre la droite et la gau-che, les religieux et les laïcs, les nouveaux immigrants, ceux qui sont en Israël depuis longtemps et les Israéliens de souche, entre les riches et les pauvres, enfin entre Juifs et Arabes israéliens.

Le moral de l’armée s’est affaibli. La pauvreté et l’inégalité sociales vont croissant. « Etre Israélien aujourd’hui signifie être complè-tement déboussolé et vivre dans un état de décomposition générale ». Une enquête menée en 2003 atteste du pessimisme ambiant. La majorité des Israéliens pense que l’avenir de la nouvelle génération ne s’améliorera pas. Un quart des sondés pense sérieusement à émigrer. Des centaines d’Is-raéliens demandent un passeport polonais.

Cependant la responsabilité de cette situa-tion n’incombe pas seulement à Israël. Le Moyen-Orient n’a jamais considéré le pays comme faisant partie de la région, malgré ses remarquables réalisations: instauration d’un régime démocratique, intégration de mil-lions d’immigrants, résurrection de la langue ancienne, agriculture moderne et haute tech-nologie... Depuis la signature des accords d’Oslo, 70 % des Israéliens se sont résignés à la partition en deux Etats, car ils sont bien conscients que la fin de l’occupation signi-fiera la fin du dilemme moral, la fin du sen-timent de commettre une injustice. Actuel-lement, le désenchantement prédomine, le sentiment de ne pas avoir réalisé le rêve de bâtir un pays où vivrait une « société juste, visionnaire, humaniste et spirituelle ». Pour l’heure, l’existence est sans espoir, car « la cause n’est plus juste et il n’y a même plus de cause du tout » !

La fin de l’occupation pourrait permettre une fascinante synthèse du Juif israélien et du Juif universel. La paix et la reconnaissance de frontières permanentes et stables, défenda-bles et reconnues par l’ONU et le monde entier, y compris les pays arabes, permettrait que l’Etat d’Israël accomplisse enfin la vocation historique et morale de son peuple, inscrite de tout temps dans l’histoire de l’humanité.

« Connaître l’Autre de l’intérieur ou dans la peau de Gisela » (Communication au Congrès national des bibliothécaires, Tel Aviv 2006) Dans cette troisième partie, David Grossman nous fait entrer dans la raison même de la création littéraire. En effet, de quelle étoffe l’écrivain est-il fait ? Sa qualité première est le besoin d’inventer des histoires, et sa vocation d’expliquer, par le biais d’un récit, le monde et l’être humain. Par l’écriture, il supprime les barrières qui le séparent d’autrui, il entre dans l’être même de ses personnages (dans la peau de Gisela), jusque dans la peau de ses ennemis. Par l’écriture, il abolit toute cloison de séparation, il refuse les barrières de pro-tection. L’écriture est un acte de protestation contre la « peur de l’Autre ».

Or que peut bien signifier créer de la fiction pour un écrivain israélien qui vit depuis plus d’un siècle dans une région sinistrée ? L’auteur mobilise sa conscience et son sub-conscient pour être à l’écoute des émotions et sentiments qu’éprouvent les héros de son invention. Ecrire un roman signifie avoir l’en-tière responsabilité de quelques dizaines de personnages. Le propre d’une situation vio-lente consiste à faire des hommes des créatu-res sans visage. La littérature, elle, ressuscite l’homme, elle revendique le droit à l’individua-lité. «Elle permet de comprendre que nous pouvons – devons – appréhender toute situa-tion humaine sous différents angles. Alors pourront enfin coexister harmonieusement les différentes histoires contradictoires des individus, des peuples, fussent-ils ennemis jurés. Et à condition que l’ennemi y parvienne

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aussi, nous serons capables de saisir que, dans le cadre de négociations politiques véritables, nos aspirations doivent rejoindre celles de l’ennemi. Cela ne signifie pas qu’il faille «aimer son ennemi», mais il faut chercher sincèrement à le comprendre, à découvrir ses motivations, sa logique intérieure, sa vision du monde et sa propre version de l’histoire, «car ils ne sont en somme que des hommes aussi terrifiés, tortu-rés et désespérés que nous-mêmes» .

«A la mémoire de Yitzhak Rabin» (Discours prononcé le 4 nov 2006, place Rabin, à Tel Aviv, lors de la cérémonie à la mémoire d’Yitzhak Rabin). Ce discours fut prononcé après la guerre du Liban, après la mort d’Uri, fils de l’auteur. Il affirme son amour tourmenté et complexe pour Israël et adopte le style des pro-phètes pour exhorter Israël à suivre le chemin vers la paix, ce chemin sur lequel Rabin s’était engagé avant d’être assassiné. Ecoutons-le: «Le drame qui a frappé ma famille et moi-même avec la disparition de notre fils Uri ne me donne pas forcément le droit de parler en public. Mais j’ai le sentiment que l’expérience de la mort et du deuil implique une sorte de lucidité permettant de distinguer l’essentiel de l’accessoire, l’accessible de l’inaccessible, la réalité du fantasme.»

Or, les hostilités qui durent depuis plus d’un siècle semblent être la seule existence pos-sible, expliquant en partie «l’insensibilité, voire la brutalité d’Israël à l’égard des plus faibles, des pauvres et des malheureux. Son indifférence au sort de ceux qui ont faim, des personnes âgées, des malades et des handicapés,… le racisme exacerbé, insti-tutionnalisé, à l’égard de la minorité arabe. Lorsque cela a l’air d’aller de soi, sans sus-citer de réactions ni de protestations indi-gnées, je commence à craindre que, même si la paix survenait demain et que nous revenions à une certaine normalité, nous ne guérissions jamais totalement».

Et s’adressant à Ehoud Olmert: « Il serait peut-être bon de vous rappeler, monsieur le Pre-mier ministre, que si un dirigeant arabe vous envoie un signe de paix, si timide soit-il, il faut lui répondre, sonder ses intentions sans atten-dre… si le président Assad venait à déclarer que la Syrie veut la paix, faites-vous un devoir de lui ménager un entretien toutes affaires ces-santes ! .......J’en appelle à tous ceux qui m’écou-tent, les citoyens, juifs et arabes: arrêtez-vous, nous sommes au bord du précipice ! »

Pour conclure, dans sa cinquième et dernière partie: «Ecrire dans le noir» l’auteur, citant Kafka, constate avec tristesse: « Le monde, hélas, devient plus étroit chaque jour ». Des mil-lions d’individus de par le monde sont menacés dans leur survie, dans leurs valeurs, dans leur liberté. Cependant une petite note d’espoir se fait entendre, car, penchés sur leur manuscrit ou assis devant leur ordinateur, les écrivains forment à travers le monde un réseau frater-nel, ils tissent une toile d’araignée et possèdent le pouvoir de changer et de recréer le monde: d’accomplir ainsi le tikkoun olam.

Ecoutons encore David Grossman: «J’écris et j’imagine. Le simple fait d’imaginer me res-suscite. Je ne suis plus figé, paralysé devant le prédateur. J’invente des personnages. J’ai quelquefois le sentiment de repêcher mes créatures dans la glace où les a ensevelies l’existence.... Quand j’écris, je redeviens une personne dont les différentes facettes s’inter-pénètrent, un homme capable de s’identifier aux malheurs de l’ennemi et à la légitimité de ses désirs sans renier pour autant le moindre atome de son identité.»

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COMMuNAuTÉ

«L’Avocat des Juifs - Les tribulations de Yossel de Rosheim dans l’Europe de Charles Quint»,de Selma Stern

La rédaction du Shofar ne peut résis-ter au plaisir d’annoncer la parution récente d’un excellent ouvrage intitulé « L’avocat des Juifs – les tribulations de Yossel de Rosheim dans l’Europe de Charles Quint1», écrit par Selma Stern en langue allemande et dont notre amie Monique Ebstein2 a assuré la traduction française conjointement avec Freddy Raphaël, professeur à l’Université de Strasbourg.

L’historienne Selma Stern rédigea, en 1959, cette étude remarqua-blement documentée sur l’Alsacien Yossel de Rosheim, dont la personnalité excep-tionnelle rayonna à travers tout le Saint Empire Romain Ger-manique au temps du règne de Charles Quint, c’est-à-dire à

l’aube des Temps Moderne, seuil d’un moment longtemps considéré comme l’un des plus cruels de l’histoire des Juifs d’Allemagne.

Car, dans le contexte de guerres de religion, révoltes paysannes et autres conflits poli-tiques de l’époque, les Juifs d’alors étaient en proie à d’incessants et infernaux déferle-ments de haine populaire.

Destin remarquable donc, dans ce contexte de violence, que celui de Yossel raconté dans ce livre à vocation scientifique, et dont on suppose qu’il naquit en 1478 à Haguenau.

Durant plus de quarante ans, l’homme par-courut l’Empire d’une extrémité à l’autre pour plaider la cause de son peuple devant l’empereur, les rois, les princes, les évêques, les seigneurs et les magistrats. Avec toujours cette même ardeur à la tâche de démystifier les procès pour meurtre, faire libérer les condamnés à mort, lever les ordres d’expul-sion ou obtenir en faveur de ses coreligion-naires des privilèges et des facilités qui leur permettraient d’exercer le commerce.

Extraordinaire avocat donc que cet infatiga-ble opposant aux accusations injustement portées contre les Juifs, ces abominables profanateurs d’hosties, et qui parvînt à pla-cer ceux-ci sous la protection directe de Charles Quint.

Yossel de Rosheim, c’est également ce coura-geux jurisconsulte qui, en précurseur parmi les réformateurs sociaux des Juifs allemands, réussît à rassembler en assemblées concer-tées des communautés éloignées les unes des autres pour les faire se pencher ensemble sur les bouleversements politiques, économi-ques, sociaux et religieux du jour. Magistral ouvrage de mémoire, ce livre sur « le commandeur » des Juifs de l’Empire que Luther refusa de rencontrer et dont la vieillesse vint s’échouer sur les dernières années de sa vie en tragique évènement auquel seule, la mort, au début du printemps 1554, fit définitivement obstacle.

Merci aux traducteurs Monique Ebstein et Freddy Raphaël, un demi siècle après la parution de cette passionnante biographie rédigée en allemand, d’avoir permis aux lec-teurs francophones de découvrir un travail de référence remarquable sur l’histoire du judaïsme européen.

JWH

1 « L’Avocat des Juifs – Les tribulations de Yossel de Rosheim dans l’Europe de Charles Quint », Selma Stern, traduit de l’allemand par Freddy Raphaël et Monique Ebstein, éd. La nuée Bleue, 2008, 318 pages.

2 Voir son article séparé sur la genèse et la présentation du livre, dans les colonnes du présent Shofar

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«La vie hors la loi- est-il permis de sau-ver une vie»,du Rabin David Meyer

Le rabbin David MEYER, co-auteur des « Versets douloureux » dont nous nous sommes récemment fait l’écho3, publie, au moment de mettre sous presse le présent Shofar, un nouvel ouvrage intitulé « La vie hors la loi – est-il permis de sauver une Vie ?4 » . La présentation de ce livre en présage une lecture, dès sa sortie début de ce mois de décembre dans les librairies, à ne pas manquer :

« Qui sauve une vie sauve le monde » : l’at-tention à la vie humaine, la sauvegarde de la vie se trouve au coeur de l’expérience his-torique du peuple juif ; elle est partout dans les anecdotes et la pratique des sages ; elle est au centre des commentaires des rabbins. Cette primauté de la vie se retrouve au fon-dement de toute éthique et vie en société : s’agit-il d’une révélation contenue dans le Livre ou d’une loi naturelle accessible à notre bon sens ? D’autre part, l’intervention pour la vie peut entrer en concurrence avec d’autres préceptes de la Torah. Sauver une vie le jour du shabbat, c’est faire une exception. La pri-mauté accordée à la vie tournerait-elle en idolâtrie de la vie ? Il faut alors une limite, une exception à l’exception : le martyr juif, au prix de sa vie, refuse l’idolâtrie, le viol, le meurtre. Tout près de nous, la Shoah, néga-tion totale de la vie, relance le débat : l’impé-ratif de la survie serait-il le « 614e commande-ment », le plus urgent ?

À l’heure où le prix de la vie humaine mobi-lise les consciences, à l’heure aussi où les

vies humaines pèsent peu dans les conflits et les ambitions, la tradition juive, faisant entendre une réflexion singulière, rejoint des préoccupations universelles »

En quelques pages complémentaires à ce nouveau livre de Rabbi Meyer, Jean Rader-makers, jésuite enseignant à l’Institut d’Étu-des Théologiques de Bruxelles, situant Jésus dans la tradition juive de son temps, présente les résonances évangéliques du thème.

JWH.

***

« Tu choisiras le rire... », de Moïse Rahmani.5

« Tu étais parti très jeune, à dix-sept ans, au Congo belge. Tu y étais resté de 1928 à 1934. J’ai été stupide de ne jamais m’inté-resser à ton histoire, de ne pas te poser de questions. Que d’échanges aurions-nous pu avoir, toi et moi, et comme je le regrette maintenant ! Tu m’avais confié que tous les jeunes d’Elisabethville, le travail achevé, se retrouvaient dans un café-hôtel tenu par un Grec, Makris. Un jour quelqu’un, était-ce toi ? trouva, au fond de sa tasse, un cafard. Dégoûté, il appela le tenancier : Bré (interjection grecque) Makris, regarde ce qu’il y a dans le café ?Celui-ci, sans se démonter, pince-sans-rire, répondit :Pour cinquante centimes, que veux-tu que je mette : un éléphant ?Quarante ans après, tu en riais encore. En 2005, près de trois quarts de siècle plus tard, elle m’amuse autant. Je t’ai perdu le 22 février 1972. Aujourd’hui, alors que j’ai dépassé ton âge, j’aime à t’imaginer jeune homme, avec tes amis, tous dispa-rus maintenant, attablés à cette terrasse, sous un flamboyant aux fleurs de feu, riant à gorge déployée de la réponse à celui

3 « Une double rencontre en Belgique », Jacqueline Wiener, Shofar n°293, avril 2008, p.45 4 Collection l’Autre et les Autres 10, éd. Lessius, ISBN : 978-2-87299-179-25 Editions Pascal, 253 pages

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qui a retiré ce cancrelat de la tasse...» Ainsi débute ce nouveau livre de Moïse Rah-mani dans lequel s’enchevêtrent histoires, anecdotes, dictons, proverbes, devinettes et perles diverses qu’il a commencé à glaner durant son enfance et dont il espère, à travers la parution, voir cette si précieuse mémoire familiale évoquée dans ses précédents ouvra-ges6 transmise à ses petits-enfants et à leurs futurs descendants.Alain Vincenot, qui préface « Tu choisiras le rire », explique combien Moïse Rahmani

sait la blessure profonde d’être chassé d’un pays « qu’on imaginait être sa patrie » : « Aujourd’hui, quand il pense à ses parents et à leurs amis, il avoue que, parmi les lar-mes, le rire n’est jamais très loin. D’où la tendresse qui imprègne ces pages. Car il ne s’agit pas d’une simple compilation, mais du regard chaleureux que Moïse porte sur le monde. Généreux, il veut partager ce qu’il voit »…

JWH.

6 Moïse Rahmani est l’auteur de: « Rhodes ; Un pan de notre mémoire » ; « Shalom Bwana ;La saga des Juifs du Congo » ; « Les Juifs du Soleil ; Portraits de Sépharades de Belgique » ; « Sépharades 2004, un état des lieux » ; « L’Exode oublié, Juifs des pays arabes » ; « La réponse de Noa » ; « Sous le joug du Croissant, Juifs en terre d’islam » ; « Lettre à un frère » ; « Juifs du Congo »

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Yossel de Rosheim est la personnalité qui représente par excellence la nation juive allemande au début des temps modernes, au seuil d’une période longtemps considé-rée comme l’une des plus « cruelles » de l’histoire des Juifs d’Allemagne. Elle rejoint ainsi directement l’époque contemporaine avec laquelle elle offre des similitudes à la fois historiques et idéologiques1.

Le hasard, mais est-ce bien le hasard, m’a fait rencontrer Yossel de Rosheim, cet homme extraordinaire, tombé dans un oubli tout à fait injustifié. A l’époque où il vécut, temps de querelles et de guerres, il fit usage des seu-les armes dont il disposât, son intelligence, sa foi, sa parole et son courage, non pas pour combattre un ennemi, mais pour défendre ses frères juifs, à travers tout l’Empire, et les sauver des humiliations, des expulsions et bien souvent du bûcher.

Pendant plusieurs années, j’avais effectué des recherches approfondies relatives à la généalogie de ma famille. Ce travail, bien loin d’être terminé, a été interrompu par la pré-sente traduction. Or il se fait qu’une des bran-ches de ma famille vécut à Rosheim à partir

du 17ème siècle. Et lors d’un de mes séjours à Strasbourg, ma ville natale, je m’étais rendue aux Archives du Bas-Rhin, ainsi qu’aux Archi-ves Municipales de Strasbourg, et j’avais pu y photocopier de nombreux articles dans un ancien numéro de « Saisons d’Alsace », consacré aux Juifs de Rosheim.

Le soir, dans ma chambre d’hôtel, je pas-sai en revue les documents récoltés dans la journée, et parmi eux, se trouvait la photo-copie d’un long article du Prof. Francis Rapp, intitulé « Yosselmann de Rosheim ». Jamais encore, je l’avoue à ma grande honte, je n’avais entendu ce nom. Je me mis donc à lire, et me souviens parfaitement bien de l’émotion qui m’envahit au fur et à mesure que progressait ma lecture. Etait-il possible qu’un tel homme eût vraiment existé ? Je n’arrivais pas à le croire. Cette nuit-là, je dormis très mal. Je me souviens même que pendant quelques jours, je ne pus reprendre ce texte, ni en parler à qui que ce soit, ayant bien trop peur que mon rêve ne s’avère être une illusion. Un peu plus tard, je repris l’article, le relus, et commençai à enquêter autour de moi. Je dus bien constater que, si pour la très grande

Yossel de RosheimCommandeur des Juifs du Saint Empire Romain Germanique (1478-1554)

par Monique Ebstein

1 Tous les passages en italique sont des citations de Selma Stern.

Yossel (peinture murale de l’Office du Tourisme de Rosheim)

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majorité des personnes interrogées Yossel était un parfait inconnu, une infime mino-rité en avait certes entendu parler, mais n’en connaissait pratiquement que le nom.

Au printemps dernier, le professeur Raphaël, dont la bibliothèque recèle des trésors, y trouva deux exemplaires d’une biographie de Yossel de Rosheim, écrite par Selma Stern. Il m’offrit un des volumes que je lus d’un trait. Ce livre, paru en 1959, n’avait jamais été tra-duit en français. Ayant travaillé pendant plus de 40 en tant qu’interprète de conférence, je me sentais qualifiée pour cette traduction, et décidai de l’entreprendre. Voilà donc la genèse de ce travail en cours.

La jeunesse de YosselYossel fut toujours très avare de paroles sur lui-même. Ce que nous savons de lui, peut se déduire des informations abondantes qu’il nous donne sur les évènements auxquels il a participé, soit comme observateur, soit le plus souvent comme acteur. Nous ne possédons pas de données détaillées sur ses origines, et ne connaissons même pas avec certitude la date exacte, ni le lieu de sa naissance.

Sa famille paternelle pourrait être d’origine française, venant de la petite ville de Louhans, dans la Bresse, ce qui expliquerait le patro-nyme de « Loans » qu’il ajouta parfois à sa signature. En effet, lors d’une Assemblée des délégués des Communautés juives à Worms, il signa un document « Joseph ben Gerschom de la famille Louans. Son petit-fils, le Rabbin Eliahu Baal Shem de Worms, fut également appelé Elia ben Moses Loanz. Il vient alors naturellement à l’esprit de relier Yossel à Jakob Jehiel Loans, le médecin personnel de l’Empe-reur Frédéric III, non seulement à cause de leur homonymie, mais surtout en vertu de cer-tains traits de caractère qui en firent deux per-sonnages hors du commun. Johann Reuchlin dit de Jakob Jehiel Loans qu’il était « homo ex Judaeis non parum literatus », « humanissi-mus praeceptor », « doctor excellens ». C’est à lui qu’il eut recours pour apprendre l’hébreu.

Cependant les seuls ancêtres paternels de Yossel dont nous soyons certains sont ses trois grands-oncles le rabbin Elias ainsi qu’Eberlin et Mercklin dont les noms sont restés dans les mémoires, car, à la suite d’une accusation mensongère de meurtre rituel, ils moururent en martyrs, durant la 2ème moitié du 15ème s, à Endingen, dans le Kaiserstuhl.

Son père Gerson, alors encore très jeune, ne fut pas inquiété, mais s’enfuit en Alsace. Il s’établit d’abord à Obernai.

La guerre de Bourgogne faisait alors rage et les Juifs subissaient constamment des atta-ques de la soldatesque. Gerson et sa femme s’enfuirent au Haut-Barr et à la Petite-Pierre. Ils se cachèrent dans deux forteresses, « où ils passèrent une année entière souffrant de faim et de soif. » Puis ils s’établirent à Hague-nau, le lieu d’origine de Reislin, la mère de Yossel. Peut-être est-ce là que Yossel naquit. Il est certain qu’il y passa sa jeunesse.

Sa mère descendait du Gaon Shlomo Spira, l’ancêtre d’une lignée d’érudits. Il est possi-ble que Yossel ait étudié sous la direction du rabbin Johanan Luria, qui était son lointain parent, mais ce n’est pas certain. Ce qui est certain, c’est qu’il possédait une connais-sance approfondie de la Bible, du Talmud et de la spiritualité juive.

Il s’établit à Mittelbergheim, après s’être marié (nous ne savons rien de précis de sa femme), et après y avoir fondé une famille. Malgré ses études rabbiniques, il dut gagner sa vie, c’est pourquoi « comme les autres Juifs, il prêtait de l’argent aux citoyens des villes avoisinantes et aux paysans des villages proches, soit au taux d’intérêt autorisé, soit en échange de gages ou de lettres d’obligation. A plusieurs reprises, il dut aussi faire appel à l’aide du Magistrat de la ville ou du Bailli pour que justice lui soit rendue, et que l’argent prêté lui soit restitué. Une fois, en 1504, lors de la Guerre de Succes-sion de Landshut, il perdit toutes ses lettres de créance, et ne put sauver « des dents des mal-

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faiteurs » que quelque cent florins, si bien qu’il eut du mal à nourrir sa famille »

Sa vie activeL’Alsace était fractionnée à l’infini. Les nombreux mini-états adoptaient des poli-tiques différentes vis-à-vis des Juifs. Pen-dant cette période de guerre et de troubles, la haine envers les Juifs explosait de toute part. Mais s’ils étaient expulsés d’une ville ou d’un territoire, ils pouvaient espérer être accueillis dans un état voisin, dont le seigneur ou le Magistrat avait besoin d’emprunter leur argent. Obernai était une des villes les plus hostiles à leur égard. En 1507, ses habitants convainquirent l’empe-reur Maximilien I de les expulser sans leur permettre d’emporter leurs biens. Les Juifs d’Obernai s’adressèrent à Yossel, alors âgé d’environ 30 ans.

« En l’an 1506/07, rapporte Yossel, les citoyens d’Obernai s’adressèrent à l’Empereur pour lui demander de chasser les Juifs. Ils obtinrent un décret selon lequel aucun Juif priant le Dieu vivant, n’avait le droit de pénétrer ni dans leur ville, ni sur leur territoire. Il furent expulsés sans merci de leurs maisons et de leurs demeu-res, et chassés misérablement dans les champs. Le mal qu’on leur fit, fut bien grand » ... Cette douleur partagée... pénétra dans son coeur plus profondément que chez d’autres. Elle fut la cause de sa première apparition sur la scène politique. Jusqu’à présent il avait vécu, tranquille et retiré, dans la petite ville de Mit-telbergheim, se consacrant entièrement à son métier et à la famille qu’il avait entre-temps fon-dée. Lorsqu’en cette année 1507, les expulsés d’Obernai lui demandèrent aide et réconfort, il répondit immédiatement à leur appel. Avec eux, il s’adressa au Vice-Bailli provincial qui était leur protecteur depuis longtemps.Yossel ne se présenta jamais comme un sup-pliant, implorant mansuétude et clémence. Il ressemblait bien plus à un avocat passionné défendant la cause difficile de son client devant une cour d’assises. Il ressemblait

aussi à un procureur froid et réfléchi por-tant officiellement plainte contre un coupa-ble. L’accusée en l’occurrence était la ville d’Obernai. Il l’accusa d’avoir rompu le contrat de façon indigne. Car lors de leur admission, les Juifs avaient signé un contrat, et avaient solennellement juré de le respecter. Ils le respectèrent, par contre la ville, en infrac-tion de tout droit, le viola ignominieusement. Par allusions prudentes, Yossel fit remarquer que, depuis des temps très anciens, l’un après l’autre, tous les empereurs, avaient promis leur protection aux Juifs du Reich, en s’ap-puyant sur l’ordre et la coutume. Or, dans le cas de la ville d’Obernai, cette promesse de protection était double. L’Empereur n’était en effet pas seulement l’Autorité suprême du Reich, il était aussi le Bailli principal de l’Alsace. C’est pourquoi les Juifs, expulsés d’Obernai, refusèrent de se soumettre à un ordre inique. Ils exigèrent un procès au cours duquel ils pourraient se défendre.Le langage hardi de Yossel ne manqua pas d’avoir de l’effet tant sur le Bailli que sur Maximilien. L’Empereur rédigea une lettre d’accompagnement pour un certain Phal de Dambach, il ordonna au Magistrat d’Ober-nai d’admettre ce Juif et toute sa famille dans la ville, et de mettre deux maisons à sa disposition en guise d’habitation.Cette première action politique de Yos-sel eut des conséquences déterminantes pour lui, elles allaient changer sa vie. Car les Juifs de Basse-Alsace lui furent recon-naissants, et l’élirent alors pour être leur Préposé et leur Chef, ou pour reprendre ses propres termes, leur « Parnas u Manhig» ». Et désormais, Yossel ne s’appartint plus, ce suc-cès le rendit célèbre. A travers tout l’Empire, les Juifs eurent recours à lui chaque fois qu’ils avaient besoin de secours. Un épisode tout à fait extraordinaire eut lieu à Rosheim même, au moment de la cruelle guerre des Paysans.

« Ces brigands commirent également beau-coup d’actes barbares contre les Juifs », rap-

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porte Yossel dans ses Mémoires en 1525. « Ils avaient l’intention de nous engloutir vivants, et ils avaient déjà commencé à le faire ».Les rebelles avaient leur lieu de rassemble-ment, en Basse-Alsace, près de Rosheim, Ville d’Empire située au pied du Mont Sainte Odile. Un homme passionné, assez habile, Erasme Gerber de Molsheim, avait pris la direction des bandes de paysans. D’après l’estimation de Yossel, elles étaient composées de 15.000 hommes. .....Le Bailli, Jean-Jacques de Moersberg, tenta de négo-cier avec les chefs des paysans, afin de gagner du temps, jusqu’à ce que lui par-vienne une aide militaire, mais ce fut un échec. Erasme Gerber ne lui accorda même pas l’audience demandée. Les délégués de la Ville de Strasbourg, parmi lesquels se trouvait le conseiller Martin Herlin, l’inter-locuteur de Yossel lors de fréquentes négo-ciations, ne reçurent aucune réponse, bien qu’ils eussent demandé à plusieurs repri-ses de pouvoir le rencontrer. Les trois Réformateurs strasbourgeois, Martin Bucer, Wolfgang Capiton et Mat-thäus Zell se rendirent au camp d’Altorf pour convaincre les paysans, respectueux de l’Evangile, que leur insurrection ne pou-vait être justifiée par les Saintes Ecritu-res. Eux aussi durent se retirer sans avoir obtenu la moindre concession.Telle était la situation, lorsqu’au printemps 1525, tard dans l’après-midi, Yossel fut informé que les bandes de paysans avaient l’intention d’attaquer la ville de Rosheim le lendemain. Yossel gardait toujours son sang-froid. Il demeurait calme et réfléchi lorsque des décisions d’une importance majeure devai-ent être prises. Celle qu’il prit alors fut auda-cieuse.... : « se rendre à Altorf « avec l’aide de Dieu » et parler aux chefs. Nous ne pou-vons faire que des suppositions sur ce dont il discuta avec Erasme Gerber et ses deux acolytes, au cours de ces longues heures, et sur la façon dont il réussit à disposer favo-rablement « les chefs de la conjuration »... Il est rapporté à plusieurs reprises que son

éloquence était irrésistible, qu’un adver-saire pouvait rarement lui faire front, et qu’il avait un don qui séduisait des person-nes de classes et de rangs très différents, si bien que tout le monde se ralliait à lui avec vénération et dévouement. En tout cas, bien que le Vice-Bailli fût versé dans les intri-gues politiques, que le bourgmestre Martin Herlin fût réputé pour son esprit pratique, et les trois Réformateurs pour leur connais-sance de l’âme humaine, ils échouèrent. Yossel, lui, réussit. Contre un pot de vin de quatre-vingts florins d’or, les chefs conju-rés lui firent par écrit la promesse de ne pas attaquer la ville de Rosheim, à moins que toutes les Villes d’Empire ne se ralliassent aux paysans. « Et ils tinrent la promesse qu’ils me firent ». Dans la joie de ce succès, le bourgmestre de Rosheim, Jakob Wagner, lui promit que jamais cet acte ne serait oublié, et qu’on lui en serait toujours recon-naissant, ainsi qu’à ses enfants.

La plus grande partie de sa vie fut consacrée à la politique et à la diplomatie. Il participa à de très nombreuses Diètes impériales. Pour s’y rendre, il dut entreprendre de longs et périlleux voyages. Les principales Diètes furent : en 1521, Worms ; en 1530, Augsbourg ; en 1532, Ratisbonne ; en 1542, Spire ; en 1548, Augsbourg ; en 1551, de nouveau Augsbourg. Le problème principal traité par Yossel lors de ces Diètes, était celui du prêt d’argent.

Yossel ne fut pas seulement un diplomate, mais aussi un avocat passionné qui plaidait l’innocence de ses frères, menacés d’expul-sion, et accusés de crimes rituels ou de pro-fanations d’hosties. Pendant près de 40 ans, il ne se passa presque aucune année sans qu’il dût quitter Rosheim pour les défendre. Cha-que fois, la peine encourue par les accusés était la mort.

Il serait trop long de citer tous ses voyages ; en voici les plus importants, ceux où il essaya, en traversant l’Empire d’un bout à l’autre, de

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sauver des Juifs :- 1529, Pösing, en Moravie, un enfant avait

disparu. On le retrouva vivant, à peine les accusés eurent-ils été brûlés. Mais les Juifs de Marchegg, accusés de complicité, furent sauvés.

- 1535, en Silésie. Pour discréditer le chef de la Communauté juive, celui-ci fut impliqué dans un procès pour sorcellerie et brûlé. Son martyre fut suivi d’arrestations en masse. Yossel, chargé de défendre les accu-sés, parvint à les faire acquitter

- 1541, il gagna le procès intenté par les sires de Pappenheim et le comte Palatin de Neu-bourg aux Juifs de Tittingen, soupçonnés d’avoir mis à mort un jeune paysan. Yossel put prouver leur innocence, et ils furent relâchés.

- 1543, à Würzbourg, il subit un échec dans une affaire où, une jeune juive avait été accusée, sans doute par des amoureux éconduits, d’avoir provoqué la mort d’un enfant. Il ne put la sauver, ni elle, ni ses 4 coaccusés. Toutefois il sut les réconforter, et tous subirent courageusement le sup-plice du feu.L’appareil judiciaire agissait avec une grande rapidité, et très souvent, Yossel était dans l’impossibilité de voyager assez vite pour éviter que le jugement ne soit rendu avant qu’il n’arrivât à destination. Par contre l’ad-ministration était plus lente, ce qui explique ses nombreux succès, lorsqu’il s’agissait d’arrêter des ordonnances d’expulsion :

- en 1519, il se rendit à Coblence, parce que les habitants d’Obernai tracassaient de nou-veau les Juifs, il réussit dans son entreprise, et put convaincre Maximilien, mais l’année suivante,

- en 1520, tout fut à recommencer, car entre temps Maximilien était mort, et il fallut négocier avec son successeur Charles Quint. Ces négociations traînèrent jusqu’

- en 1524. Le succès ne fut pas complet, car le Magistrat d’Obernai accorda aux Juifs seulement quelques facilités en matière de commerce, sans pour autant leur permettre de résider dans la ville.

- la même année, à Ratisbonne, toutes les maisons des Juifs furent rasées.Yossel effectuait la plupart de ses voyages à cheval, mais, en 1528, il fit le trajet de Rosheim à Prague à pied, pour implorer le ciel, lorsqu’il se rendit auprès de Ferdinand, après que celui-ci eut décidé de l’expulsion des Juifs de Basse-Alsace. C’est au ciel qu’il attribua son succès.

En 1534, Strasbourg s’apprêtait à prendre des mesures hostiles aux Juifs. Yossel s’in-terposa, négocia, et établit un Règlement obligeant les Juifs à porter leurs litiges uni-quement devant la juridiction de Strasbourg, et non devant celle de Rottweil.

En 1539, Mélanchthon révéla une accusa-tion calomnieuse de profanation d’hosties, qui, en 1510, avait été portée par un certain Paul Fromm contre 38 Juifs à Berlin. Ceux-ci furent condamnés à mourir par le feu. Fort de cette terrible injustice, Yossel obtint que le Margrave de Brandebourg et le duc de Saxe réadmissent sur leurs terres les Juifs qui en avaient été expulsés, en violation de leurs anciens privilèges. En 1542, les Juifs de Prague furent attaqués de toutes parts, et Ferdinand n’eut plus le courage de les protéger. La plupart d’entre eux s’exilèrent.De 1541 à 1548, après avoir essayé de régler un conflit concernant l’accès à Colmar Yos-

Judensau datant de 1470 reproduite p.269 dans la biographie de Yossel

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sel intenta un procès à la ville. Nous n’en connaissons pas l’issue.

Enfin, en 1553, les habitants de Dangolsheim, en Alsace, revinrent sur ce qui avait été convenu 34 ans plus tôt, et firent pression sur le Prince Electeur pour qu’il chassât les Juifs de leur village. Dans cette dernière affaire, Yossel n’eut plus le temps d’empêcher l’exé-cution de cet arrêt, il mourut peu avant le 6 avril 1554, jour que l’Electeur palatin, Bailli de Basse-Alsace, avait retenu pour examiner l’affaire. Sa personnalitéYossel, contrairement à nombre d’hommes politiques de tous les temps, n’aurait certai-nement jamais brigué la fonction qu’il a rem-plie. Avant lui, des « Reichsrabbiner » avaient été nommés par l’Empereur, et leur autorité imposée aux Juifs. Ils étaient en quelque sorte des porte-parole entre leurs coreli-gionnaires et l’autorité, ainsi que des arbi-tres dans les conflits entre Juifs. Ils avaient, entre autre comme fonction, de percevoir les taxes et les impôts dus au souverain. A notre connaissance, Yossel n’a jamais exercé cette dernière fonction.

Il fut le premier « Chef des Juifs d’Allema-gne », choisi librement par les Juifs de toutes les Communautés de l’Empire. Son autorité était due à la seule force de sa personnalité. Il n’agit jamais seul, mais pour toutes les déci-sions importantes, il consulta toujours les Assemblées de Préposés. Cependant, il exi-gea, et obtint sans difficulté, d’être reconnu comme négociateur unique et incontesté, représentant tous les Juifs d’Allemagne Un des titres sous lequel il est le plus connu est « Befehlshaber der deutschen Judenschaft » (Commandeur des Juifs d’Allemagne).

Les aspirations personnelles de Yossel étaient cependant toutes différentes. Spi-rituellement, il s’intéressait aux différents courants mystiques, qu’ils soient rhénans ou

espagnols. Il aimait se recueillir pour médi-ter et écrire, dès qu’il en avait le temps. Il le faisait, soit au cours de ses étapes de voyage, soit par exemple, lorsqu’en 1528, il fut gardé en « résidence surveillée », à Bruxelles, où il dut attendre que l’Empereur lui accordât une audience. Il écrivit alors : « Au cours de ces trois mois, étant donné que je n’avais aucune affaire en cours, et que j’étais seul dans ma chambre, j’ai rédigé un petit ouvrage que j’ai intitulé « la Voie de Sainteté (Derekh ha qodech). Combien j’appréciai ces jours de solitude ! Je me dis en moi-même : Comme ils furent heureux, les grands hommes des temps anciens, qui purent concentrer leur esprit et leurs idées, afin de s’éloigner de la vanité du monde, et de ne s’occuper que des choses de Dieu ».

Selon Selma Stern :« Yossel n’était ni un penseur spéculatif, ni un philosophe construisant un système. Il était un homme éclectique. Il essayait de reprendre la pensée des grands hommes qui avaient réfléchi avant lui, pour ensuite transmettre le résultat de ses recherches aux esprits les plus éclairés et les plus ouverts de son peuple. »

S’il a écrit ses Mémoires, il ne nous y livre aucune donnée personnelle, ou alors il nous parle de lui en tant qu’acteur d’évènements politiques. Nous ne savons rien de sa femme, rien de ses enfants, rien de ses sentiments personnels. Aussi est-ce par déduction, en se basant sur l’étude de sa vie et de son œuvre, que Selma Stern put tracer de lui le portrait suivant.

« Par la fierté de son maintien, la distinction de ses manières, la liberté de ses contacts avec son entourage, il ne ressemblait plus à l’humble érudit, au saint des temps anciens qui étaient prêts à tous les renoncements. Il était le patricien d’une Ville d’Empire alle-mande, marchant le front haut, conscient de sa valeur… » ■

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le shofarLe dimanche 18 janvier 2009

A l’occasion de la sortie, en français, du livre de Selma Stern

L’avocat des juifsLes tribulations de Yossel de Rosheim

dans l’Europe de Charles Quint

Après-midi judéo-alsacienneà Beth Hillel

Dès 15h00

Pâtisseries judéo-alsaciennes Dégustation et vente de vins alsaciens

-oOo-

À 17h00

Conférence - débatde Monique Ebstein et Freddy Raphaël - Traducteurs du livre

(P.A.F. : 5.00 € - étudiants 3.00 € )

-oOo-Comptoir de livres sur le Judaïsme ashkenaze et judéo-alsacien

Séance de dédicaces

-oOo-Dîner judéo-alsacien

(e.a. choucroute cacher, etc…) Réservation pour le dîner indispensable dès le 15 décembre 2008

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COMMuNAuTÉ

Le 9 octobre dernier, le pape Benoît XVI a défendu la mémoire de Pie XII dans une messe célébrée à la basilique Saint-Pierre à Rome, à l’occasion du cinquantième anniver-saire de sa mort. Persuadé de la sainteté de cet homme aux « vertus héroïques » (sic), le Pape, on le sait, réfléchit à l’opportunité de le faire béatifier. « Réfléchit » car si Benoît XVI est ouvertement favorable à la béatification de Pie XII, il est bien forcé, compte tenu de la réalité des faits reprochés à ce dernier et qui sont historiquement établis, de douter de l’opportunité d’un tel acte. À deux reprises en trois semaines avant cette fameuse messe déjà, Benoît XVI avait publiquement évoqué les incommensurables vertus de ce prédé-cesseur de sinistre mémoire.

Eugenio Pacelli, décédé le 9 octobre 1958, qui avait été élu pape le 2 mars 1939 et dont « le silence » pendant la Shoah n’a malheureuse-ment gêné aucun des treize membres du Tri-bunal de la Congrégation pour la Cause des Saints…

Pour l’heure, ce « silence », Benoît XVI le jus-tifie en terme de « prudence de Pie XII face à la Shoah » dont le message de Noël 1942 fut « une claire référence à la déportation et à l’extermination perpétrée envers les Juifs » ! Pour Benoît XVI, Pie XII « a agi souvent sur un mode secret et silencieux justement parce que, à la lumière des situations concrètes de ce moment historique complexe, il avait l’in-tuition que c’est seulement de cette manière qu’il pouvait éviter le pire, et sauver le plus grand nombre de Juifs ».

Durant ce même mois d’octobre 2008 se tenait à Rome un synode des évêques réunis pour

réfléchir sur l’usage de la Parole de Dieu dans la Bible, synode auquel le rabbin de Haïfa Shear-Yashuv Cohen avait été convié. Celui-ci, devant le Pape et les trois cents évêques et experts présents, interpella l’Eglise en ces termes : « Nous ne pouvons pas oublier le fait douloureux que de nombreuses person-nes, y compris des grands dirigeants reli-gieux, ne se soient pas élevées pour sauver nos frères et qu’ils aient choisi de garder le silence. (…) Nous ne pouvons pas pardon-ner et oublier cela et j’espère que vous le comprenez ».

Depuis le début de son pontificat en 2005, Benoît XVI a, à plusieurs reprises déjà, mar-qué son respect et une certaine amitié pour le Judaïsme, suivant en cela le nouveau che-min tracé par son prédécesseur le pape Jean-Paul II. On ne peut qu’ardemment souhaiter que nonobstant le fait que l’étape décisive du dossier de béatification de Pie XII soit consi-déré comme achevée depuis un an et demi et n’attende plus que le nihil obstat de Benoît XVI, celui-ci enterre cette dernière péripétie concernant Pie XII en un magistral et défi-nitif feu rouge qui marquerait d’une pierre blanche l’honneur d’une Eglise catholique qui a encore des comptes à rendre à propos de l’extermination de six millions d’êtres humains.

***

Sur le même sujet, Yad Vashem entend résis-ter aux pressions actuelles du Vatican pour changer la légende qui figure sous la photo du pape Pie XII au mémorial de la Shoa Yad Vashem. Le texte stipule que Pie XII n’a pas assez agi pour sauver les Juifs pendant la

Nouvelles d’Israël et d’ailleurs

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Seconde Guerre Mondiale. Pour la papauté, le musée doit réécrive une légende « objec-tive et corrigée ».

Face aux démarches politiques et diploma-tiques insistantes de l’Eglise catholique, la direction de Yad Vashem s’est vue contrainte de rappeler que le rôle de Pie XII durant la Shoa avait été établi sur base de recherches historiques sérieuses et qu’il ne pouvait être adapté au gré de telles pressions.

La photo de Pie XII avec sa légende est expo-sée au mémorial depuis 2005.

***

Des archéologues ont découvert un frag-ment de 15 cm sur 15 constitué de cérami-que et datant, d’après une analyse effectuée au carbone 14, de 1000 à 975 ans avant l’ère commune, soit à la période où le roi David régnait sur Jérusalem, dans les ruines d’une ville antique, sur une colline située au sud de Jérusalem. Le site de la découverte est, plus précisément, situé entre Beit Shemesh et les collines de Judée, à l’ancienne frontière qui séparait les Hébreux des Philistins, dans la région qui accueilli, selon le récit biblique, les combat entre David et le géant Goliath. Le fragment pourrait porter la plus ancienne trace d’écriture hébraïque jamais trouvée à ce jour et offre une perspective inédite sur la culture et le langage existant à l’époque bibli-que sur le territoire d’Israël.

Selon Yossi Garfinkel, archéologue à l’Uni-versité Hébraïque de Jérusalem et respon-sable des fouilles du site Hirbeit Qeiyafa, les cinq lignes de caractères écrites il y a trois millénaires découvertes sur ce fragment de céramique ainsi que les ruines de la fortifi-cation où elles ont été retrouvées, indiquent l’existence d’un royaume israélite puissant, à l’époque du roi David.

Certains chercheurs hésitent à accepter son interprétation sur ces découvertes, arguant

qu’il ne faut pas prendre les événements et la géographie décrits dans la Bible au pied de la lettre.

D’autres spécialistes jugent qu’il est prématuré de qualifier ce langage d’hébreu, jugeant qu’il s’agit vraisemblablement d’une écriture proto-canaanite, précurseur de l’alphabet hébreu.

***

Heureuse nouvelle : le rabbin Nathan Alfred vient d’être nommé rabbin de la communauté libérale de Esch sur Alzette, au Grand Duché du Luxembourg.

Il y exercera son rabbinat à mi temps et consacrera l’autre moitié à la poursuite de ses activités en Belgique auprès de l’ « Inter-national Jewish Center », communauté libé-rale anglophone installée à Bruxelles dont il était déjà le rabbin en exercice depuis quel-ques mois.

Le rabbin Nathan Alfred, est diplômé du King’s College de Cambridge et a poursuivi sa formation rabbinique au Leo Baeck Col-lege à Londres. Né à Coventry d’une famille paternelle juive russe immigrée au Royaume Uni voici une centaine d’années, son édu-cation religieuse s’est construite autour du Judaïsme libéral selon un équilibre jugé approprié à ses parents, eux dont le père était un Juif orthodoxe et la mère, une jeune gal-loise convertie au Judaïsme il y a 35 ans.

Le rabbin Nathan Alfred est également un excellent joueur d’échec et participe, à ce titre, à de nombreux tournois internationaux.

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Dans un de ses récents numéros, le journal allemand Bild publie les plans architecturaux du camp d’extermination d’Auschwitz. Com-mentant les 28 documents dévoilés au grand public, le quotidien apprend à ses lecteurs que toutes les personnes impliquées dans les

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opérations d’Auschwitz avaient parfaitement conscience que le camp était destiné à l’ex-termination systématique d’être humains. Ces cartes et dessins, rédigés entre 1941 et 1943, ont été trouvés dans un appartement abandonné de Berlin.

Tout y est : l’entrée du camp et sa rame où arrivaient les trains, les baraques des pri-sonniers, les inscriptions « blanchisserie », « salle de douche », « salle d’habillage », « Gas-kammer ». L’une des feuilles porte l’écriture du chef de la Gestapo Heinrich Himmler.

Le Dr Hans-Dieter Kreikam, directeur des Bundesarchivs, - les archives fédérales de Berlin -, jugeant cette découverte d’une « importance extraordinaire », a estimé utile de préciser au quotidien Bild que « les plans étaient une preuve authentique du génocide planifié des Juifs d’Europe ». On n’en doute pas un instant…

***

Une importante représentation musulmane s’est rendue au Parlement Européen de Bruxelles commémorant les 70 ans de la Nuit de cristal.

Des représentants de Libye, des Emirats arabes unis, d’Arabie Saoudite, d’Egypte, du Pakistan, du Maroc, de Turquie et de Malaisie notamment étaient, en effet, attendus à l’évé-

nement promouvant la tolérance en Europe, auquel participaient également le Congrès juif européen et la présidence du Parlement. Une « convention de la tolérance » a été présentée par l’ancien président polonais Alexander Kwasniewski, président du Conseil européen sur la Tolérance et la Réconciliation.

« L’anniversaire de la Nuit de cristal est une bonne occasion de parler de tolérance, parce qu’il commémore un autre type de tolérance, la tolérance du monde pour le mal », a déclaré le président du Congrès juif européen Moshé Kantor. « Celle d’aujourd’hui concerne les ambitions nucléaires actuel-les », a-t-il ajouté. « Aujourd’hui, le président d’un pays très problématique se rend à l’assemblée géné-rale des Nations Unies et prononce un dis-cours sur la destruction d’Israël et la mort des Juifs », explique Kantor. « Et personne ne sort de la salle. Nous sommes toujours dans la même situation que lors de la Nuit de Cristal quand le monde a préféré ignorer le danger », dit-il. « Tout en luttant contre l’intolérance, le monde ne peut pas continuer d’être crimi-nellement tolérant envers l’Iran» poursuit-il, en précisant que 5 000 entreprises euro-péennes continuent à faire des affaires avec l’Iran, parmi lesquelles certaines contribuant à développer des technologies nucléaires…

***

Il y a quelques semaines, le collègue Abra-ham Geiger à Berlin a inauguré l’Institut Israélite d’Art Cantorial, la première acadé-mie en Europe, depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, de hazanout adaptée au judaïsme libéral.

Celle-ci possède une histoire d’une remarqua-ble richesse, spécialement en Allemagne où, après la Shoa et durant de longues années, peu de Juifs retournèrent vivre. Depuis la chute du Mur de Berlin, en 1989, les choses

L’arche sacrée de la synagogue de la rue Seitenstette

saccagée, Vienne, 9 novembre 1938.

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ont changé, avec l’immigration des Juifs de l’ex-Union Soviétique. Aujourd’hui, il existe, en Allemagne, environ 120 synagogues, dont quelque 80 n’ont pas de rabbin ou hazan. Cette nouvelle académie musicale débute modestement, avec seulement trois étudiants dans sa classe inaugurale. Mais pour mar-quer l’évènement, neuf hazan formés au rite libéral se sont spécialement déplacés depuis l’Amérique du Nord

***

Pour la première fois dans l’histoire du Judaïsme libéral, des rabbins libéraux for-més au Robert A. Levisson Institute ont été ordonnés aux Pays-Bas. L’évènement s’est déroulé à la Synagogue Espagnole et Portugaise de Den Haag. Le rabbin David Lilienthal, fondateur de l’Institut Levisson en 2004, a béni cinq rabbins, tous résidents hollandais : Tamarah Benima, Marianne van Praag, Albert Ringer, Navah-Tehila Shmuelit-Livingstone et Kineret Sittig.

Le rabbin Lilienthal renonça, voici cinq ans, à ses fonctions de rabbin débutées en 1971 pour mettre en œuvre, grâce à l’existence de son Institut, un vieux rêve : celui de permettre aux Juifs hollandais qui y aspire mais ne peuvent se permettre de partir à l’étranger de poursui-vre des études rabbiniques dans leur pays.

Bien évidemment, le Robert A. Levisson Institute est reconnu par les principales ins-titutions libérales, et notamment le Hebrew Union College en Israël, l’Abraham Geiger College en Allemagne, le Central Conference of American Rabbis ainsi que le Leo Baeck College à Londres, où le rabbin Lilienthal reçut sa propre smiHa en 1971.

D’après celui-ci, la communauté juive hol-landaise serait aujourd’hui forte de quelque 40.000 personnes, parmi lesquelles 4.000 membres d’une synagogue libérale.

JWH.

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Quelques années plus tard, le rabbin Sch-muel rencontre Jess et aussitôt s’enquiert de sa famille : « Alors ? Et ces bambins ? » « Oh, Rabbi, vous n’imaginez pas ! Nous avons été gratifiés de huit enfants : des jumeaux et deux paires de triplés »« Mazal tov ! Je souhaiterais féliciter votre mari. Où est-il ? »« Au Kotel pour la journée, comme tous les jours… » soupire Jess.« Au Kotel tous les jours !? Mais que fait-il donc là ? »« Il essaie de retrouver ce fichu papier que vous avez glissé dans le Mur… »

Un peu d’humour

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VIE COMMUNAUTAIRE

OFFICES DE CHABBAT

Vendredi à 20h et samedi à 10h30

TAlmuD TOrA ET prEpArATIOn A lA BAr/BAT mITSvA

Tous les mercredis après-midi. Voir calendrier.

COurS ADulTES ET CErClES D’ETuDE

Contactez Rabbi Abraham Dahan ou Rabbi Floriane Chinsky

YISkOr

Si vous voulez être tenus au courant des dates de Yiskorpour des membres de votre famille, contactez Giny ( 02.332.25.28

iNfORMATiONs uTiles

SOCIÉTÉ D’INHUMATION

A.S.B.l. GAn HASHAlOm

En cas de nécessité, téléphonez aux numéros suivants :Le jour A Beth Hillel ( 02.332.25.28

Le soir Rabbi Floriane Chinsky ( 0485.428.490Rabbi Abraham Dahan ( 02.374.94.80 ou 0495.268.260

Si vous désirez souscrire à Gan Hashalom,téléphonez à Willy Pomeranc

Le jour ( 02.522.10.24•Le soir ( 02.374.13.76

Gan Hashalom est réservé aux membres de la CILB en règle de cotisation et ayant adhéré à la société d’Inhumation

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