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Des salariées à la nation, l'indépendanceest l'un des maîtres-mots de l'illusion deliberté en milieu hiérarchique.L'indépendance de «la France» n'assureen rien l'indépendance des dits Français, quoi quepuissent prétendre madame Le Pen et tous ses collèguesde l'ensemble des partis politiques. L'indépendance de«la France» n'est du reste qu'un mythe éculé à l'usaged'éditorialistes et commentateurs que la course au pou-voir d'achat livre à la crétinisation étatique. De quoi «laFrance», dont les habitants du territoire sont enchaî-nés à la tutelle de l'État qui l'administre, le gouverne etle domine, ne dépend-elle pas? La plupart de ses res-sources énergétiques proviennent de lointaines contrées.Son économie est telle que ses représentants sont sou-mis à de honteuses compromissions avec la plupart desdictatures en place, à la quasi exception dans le mo-ment présent de celle du Vénézuéla. Cette dernièren'étant condamnée qu'en raison d'intérêts identiquesà ceux là même qui conduisent les «grandes démocraties»à se commettre avec d'autres tyrannies, à les soutenirquand ce n'est à les installer. Les USA, qui demeurentsur l'heure la puissance économique et militaire domi-nante, n'en dépendent pas moins du reste du monde,à minima de leur zone d'influence, comme le maîtredépend de l'esclave puisque sans le second le premiers'effondre et disparaît.

Les indépendances nationales des «ex» colonies afri-caines n'offrent pas grand-chose de mieux à leurs res-sortissants que la noyade en Méditerranée ou desamputations de membres, pour cause de gel lors defranchissements de hautes frontières dans les mon-tagnes d'Europe. C'est afin de pouvoir nous étoufferd'ennui de stress et de médiocrités sous un amas d'in-utiles et nocives accumulations de dérisoires richesses,que les puissances occidentales «ne peuvent accueillirtoute la misère du monde».

Succédant à l'esclavage et au servage,le salariat revêt à première vue les de-hors d'une certaine indépendance éco-nomique. C'est au point que l'on a pu,

que l'on peut encore, lire ou entendre que par le travailsalarié les femmes accèderaient à leur émancipation.Elles n'accèdent par là, bien sûr, qu'à un état de servi-tude certes rémunéré mais règlementé par le lien desubordination qui soumet tout travailleur à son em-ployeur. Pour les plus mal loties, elles ne bénéficienten passant du foyer à l'usine, ou au bureau, que d'unchangement de maître. Il s'agit même pour beaucoupd'entre elles de l'ajout d'un second maître, tant nom-breuses sont-elles semble-t-il à assurer à peu près seulesles tâches ménagères en plus du travail extérieur. Enconclure qu'il vaut mieux que les femmes restent, le caséchéant, au foyer serait évidemment une ineptie. Onfait, avec bien des difficultés, ce que l'on peut mais ilfaut pour autant se méfier de certaines «évidences» oùse tiennent embusquées les illusions répandues par lapensée contaminante de l'idéologie dominante. Ce n'estque par la plus totale solidarité que nous pourrons al-ler au-delà de «ce que l'on peut».Où l'obéissance est la règle, la liberté « n'est qu'un vainfantôme ».

12 avril 1871 : La Commune de Paris, considérant que la colonne impériale de la place Vendôme est unmonument de barbarie, un symbole de force brute et de fausse gloire, une affirmation du militarisme, unenégation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuelà l'un des trois grands principes de la république française, la fraternité, décrète : «Article unique : Lacolonne Vendôme sera démolie».

NUMÉRO 27 - PRINTEMPS 2019

éditorial.Indépendances

et Illusions

Participaion aux frais : libre, mais toujours nécessaire

Mai 1917 : Ouvrières de la couture, les midinettes,à l'issue de leur grève joyeuse et victorieuse.

14 JUILLET 1789La prise de la Bastille, date mémorable d'une grande de casse.

Par ses répercussions dans l'espace et dans le temps elledemande à déborder les étroitesses d'une fête nationale. Seuleune fête internationale des casseurs est à même de reconnaître àcette journée la grandeur qui fut la sienne.

À la poubelle le 14 juillet militariste, rendons à cette belle date toute sa civile dignité! Restructurernous mêmes la mémoire historique c’est ouvrir la fenêtre sur le présent pour aérer l’avenir le plusimmédiat. C’est commencer à reprendre en mains le cours des évènements quotidiens comme ontente de le faire contre le Lyon-Turin, le méga transformateur de S. Victor, l’enfouissement desdéchets nucléaires à Bure et l’industrie qui les produit, contre leur monde enfin, qui génèrehorreur, terreur et médiocrité.

Une reproduction de la Bastille faite de palettes estbrûlée en Russie, pour célébrer la fin de l'hiver.Survivance, comme le Carnaval, d'une ancestralecoutume païenne.

Un hommage de la rue, à Rennes.

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2 Régénération n°27 PRINTEMPS 2019 7

Pouvoir d'achat?Pouvoir de vivre?

Du «pain béni» pour le pouvoir, un marteaupilon de la pensée libre destiné à dresser idéologi-quement, encore et encore à la soumission totale,la classe dépossédée.Dans l'union sacrée mondialisée du pouvoir de l'argentse manifeste à nouveau, en grandes pompes et bien audelà des frontières, l'immonde puanteur de «l'Unionnationale».À peine l'incendie s'était-il déclaré que l'obscénité del'exploitation − donnée sociale naturelle pour les pro-priétaires du monde et leurs économistes − faisait unefracassante irruption au milieu de l'outrancière drama-tisation à laquelle nous soumettaient les bouches à feumédiatiques. C'est à coups de millions que tombaientles chèques des grands prédateurs du travail humaintandis que des monceaux de fallacieuses assertionsétaient convoquées pour forcer les malheureuses naï-vetés à la plus solennelle communion de la servitudepopulaire. « Tout un peuple, toute une nation, la France,le monde entier » étaint reputés, plonger dans une in-tense émotion sans commune mesure avec les tartuffe-ries qui suivent les annonces d'énièmes noyades enMéditerranée ou l'effondrement sur ses habitants d'unimmeuble de rapport, pour cause de cupidité proprié-taire, dans un quartier populaire de Marseille! D'oùpeut bien venir la différence de traitement entre ces di-vers évènements si ce n'est que les monuments histo-riques remplissent une précieuse fonction dans lemaintien d'un ordre imposé et de ses dommages cola-téraux en matière culturelle?Dans les mêmes moments, plusieurs hôpitaux pari-siens devaient recourir à la grève pour protester contrel'insuffisance matérielle et la pénurie de personnel, or-ganisées. Il est vrai que les services d'urgence neconcernent pas les grands du monde. Prioritaires entoutes circonstances, ils peuvent considérer avec plusde légèreté ces services que des monuments destinés àinscrire dans les mentalités tout le respect dû aux forces dela domination et à leurs institutions.

Le pouvoir d’achat est l'objet de revendication leplus fréquemment et répétitivement soutenu pargrèves et manifestations. Il figure au premier rangdes plaintes des Gilets jaunes, insistent lesdétenteurs du pouvoir politique bruyammentsecondés par leurs porte-voix médiatiques. Qu'ildoive encore émerger à chaque révolte en dépit defrancs succès passés en dit long sur leur inanité. Lesaugmentations de salaires ne tiennent que le tempsdes colères qui les obtiennent.

Les discussions menées les 27 et 28 mai 1968 auMinistère du Travail, rue de Grenelle, entre legouvernement, les syndicats patronaux et ceux ditsouvriers, aboutirent à une augmentation du SMIGde 35 % et de 10 % pour les autres salaires, ce quiselon les statistiques allait donner uneaugmentation moyenne générale de 12 %. Dansl'année qui suivit les prix augmentèrent de 9 %. Legain en pouvoir d'achat n'était plus que de 3 %. Enquelques mois l'inflation allait suffire à totalementannihiler la « victoire ouvrière » chantée par lesbureaucraties syndicales, lesquelles connurent toutde même quelques difficultés à faire avaler la piluleaux 7 à 8 millions de travailleuses et travailleurs quimenaient la plus grande grève qui se soit dérouléeen France durant le XXè siècle. Grève dont lesmotivations premières étaient d'un tout autre ordre.

Le dimanche 13 mai d'immenses cortègesprotestaient contre le déchaînement de la barbareviolence répressive qui s'était abattue sur le quartierlatin de Paris pendant la nuit des barricades, du 10au 11 mai. Ils furent l'occasion pour la classeouvrière de reprendre conscience de sa puissance,en joyeuse fraternité. Dès la reprise du lundi àl'usine Sud-Aviation de Bouguenais, dans labanlieue de Nantes, les équipes de travail cessèrentspontanément l'activité. Les responsables syndicauxaccoururent aussitôt pour s'enquérir de la ou desrevendications de ce mouvement, non prévu auprogramme des représentants professionnels dupersonnel. « Nous ne demandons rien, simplementnous ne voulons plus vivre comme ça » fut le sensde la réponse. À partir de là ce fut comme la mise àfeu d'une traînée de poudre et il fallu toute lascience et la ruse des bureaucrates syndicaux et despartis pour détourner le mouvement de grève de

son objectif de départ. À cet égard, le filmcertainement le plus expressif de cette grève est untrès court métrage sur « La reprise du travail auxusines Wonder » qui montre une jeune ouvrièredésespérée d'avoir à « retourner là dedans » etcriant son refus.

Nous avons vu plus haut ce qu'il en fut en quelquesmois de la « victoire ouvrière ». Il ne s'agit pas demépriser des améliorations immédiates dans lechamp de l'économie, il s'agit de ne pas s'endormirdessus une fois conquises. Le rapport salarial établiun rapport de guerre sociale incessante. De par sonrôle même le patronat développe une irrépressibleboulimie de profits, la maladie permanente ducapitalisme. Les positions ne peuvent jamais êtredéfinitivement acquises, il faut toujours lutter.

Si la grève peut, quand elle est puissante, coûtercher au patronat elle coûte aussi en termeséconomiques aux grévistes. Sabotage et boycott sontpour nous autres des pratiques de bien moindrecoût. Mais pour mener les unes ou les autres il s'agittoujours de s'organiser, d'organiser nous mêmes lavie, les nôtres. C'est sur cette voie que s'avancèrenthardiment les Sans-culottes. Ils réclamaient peu, ilsimposaient tout ce qui leur était possible. Enprocédant par action directe ils imposèrent lemaximum, soit les prix des biens de premièrenécessité à ne pas dépasser.

Audace et solidarité sont les ingrédients de baseindispensables à toute rébellion visant à changer lesconditions de vie.

S.DARSOL

En hommage au journal fondé en 1910 auMexique par Ricardo Flores Magón.Bulletin trimestriel, saisonnier mais asynchrone,

de l'association Germinal :30 rue Didot-75014 Paris.

[email protected]

Ont participé à ce numéro : Sarah LETOUZEY, Pierre JosephPROUDHON, S.DARSOL, Gaston DUFIEF, MichelGARONNE, Nestor MAKHNO, M. L, Michel BAKOUNINE,Toni ROUVEL, et une foule d'anonymes fraternités.

L'incendie deRome sous Néron

ravalé au rangd'archaïque

broutille par celuid'une cathédrale

sous Macron!«Notre Dame de Paris, pierre précieuse de la cultureet de l'histoire de France et de l'Europe».. . Histoirede la Sainte Inquisition, histoire des bûchers pu-rifiant sorcières et hérétiques par le feu, cultureau long des siècles de foules d'enfants victimes deprêtres pédophiles.. .La scandaleuse indécense étalée au grand jour parles gros chèques est révélatrice de l'inconsciencedes réalités sociales dont sont affectés les déten-teurs de capitaux, c'est à dire du travail accumu-lé, volé au prolétariat, à la plèbe, à la partie de lasociété asservie et dépossédée. Sachons utiliserl'avantage que nous donne, sur leur inconscience,notre connaissance par le fait ressenti!

Toni ROUVEL.

Prêtres, monarques, hommes d'État, hommes de guerre,financiers publics et privés, fonctionnaires de toutes sortes,policiers, gendarmes, geôliers et bourreaux, capitalistes,pressureurs, entrepreneurs et propriétaires, avocats, éco-nomistes, politiciens de toutes les couleurs, jusqu'au der-nier vendeur d'épices, tous répèteront à l'unisson cesparoles de Voltaire : «Si Dieu n'existait pas il faudraitl'inventer.» Car vous comprenez, «il faut une religionpour le peuple». C'est la soupape de sûreté.

M.B.

Piquet de grève travaillant.. .à barrer l'accès à l'usine occupée.

Le salaire du travailleur ne dépasse guère sa consommationcourante et ne lui assure pas le salaire du lendemain;tandis que le capitalisme trouve dans l'instrument produitpar le travailleur un gage d'indépendance et de sécuritépour l'avenir. P.J.P

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3Régénération n°276

Souvenirs de prison pour son abolition.(Suite des N° 23 et 24)

PRINTEMPS 2019

Comme souvent dans les mouvements populairesspontanés, le mouvement des gilets jaunes présenteune nébuleuse assez complexe de revendications ettendances, répondant à des intérêts divers, voirecontadictoires en certains cas.

S'en dégagent cependant, bien sensiblement, un cer-tain nombre de pratiques révolutionnaires qui nesont pas sans faire songer, entre autres moments, àce qui fut à l'oeuvre, sans parvenir à l'emporter, pen-dant la Révolution française. Sont présents les élémentsde la démocratie directe : autonomie, méfiance et re-fus des représentants et dirigeants, action directe,organisation en assemblées locales et, avec l'appari-tion d'embryons de réunions d'assemblées, de vi-sibles aspirations au fédéralisme libertaire, intégralde l'individu à l'ensemble social en continu, sansaucun saut de représentation dans l'exercice des sou-verainetés.

Malgré une belle résistance à la répression, aux dé-nigrements de tous ordres pratiqués par des médiasau service de la classe capitaliste, et par là mêmegouvernante, ainsi qu'au miroir aux alouettes du«Grand débat», ce mouvement piétine et tourne enrond dans la répétition. À cela deux raisons princi-pales. L'une est que ce mouvement porte et formule

les revendications de couches de population, de deuxclasses, aux intérêts opposés : travailleurs d'une part,de l'autre petits patrons exploiteurs du travail bienqu'exploités à leur tour par plus gros qu'eux. La syn-thèse est impossible, sauf à dériver vers une faussecommunauté idéologique de type nationaliste, oupour le moins fortement teintée de xénophobie, parexemple. L'autre raison, qui de surcroît porte en ellele danger de l'éventuelle dérive évoquée plus haut,réside dans le manque d'innervation dans la sociétécontemporaine de solidarités ordinaires de base,résultant de l'atomisation sociale opérée par lesmoeurs quotidiennes sous le rouleau compresseurde la marchandisation de tout ce qui devrait être lavie. Cette perte de basiques réflexes solidaires estparfaitement lisible dans le fait que n'a pas surgi,dès les premières condamnations, l'exigeance d'am-nistie pour les compagnes et compagnons de luttevictimes de la répression judiciaire. L'un des méritesdu mouvement est précisément d'avoir favorisé surles ronds-points des redécouvertes de rapports devoisinage et de liens humains.Pour avancer vers un monde exempt de dominationset d'asservissements, sans frontières et constitué delibres associations, oeuvrer à la reconstitution d'untissu social tramé d'entraide au quotidien est uneabsolue priorité.

Vers un Premier Mai en Gilets Jaunes?

Les prétendus discours intellectuels sur le racisme secantonnent la plupart du temps à en rechercher l’origineà l’époque de la conquête de terres nouvelles, quandles conquérants rencontraient des populationslointaines, ni blanches ni chrétiennes, qu'ils allaientpouvoir massacrer allègrement ou soumettre à cegénocide de l’intelligence qu’est la conversion. Jusqu’àune époque récente, ce type de discours, empreintd’un évolutionnisme condescendant, était fondé surdes différences de caractéristiques physiques ouculturelles.

Mais si l’on remonte plus loin dans le temps, on peutse remémorer la crasse noblesse qui prétendant avoirle sang bleu, affirmait ainsi une caractéristique physiquela différenciant des misérables. Ce qui n’interdisaitnullement à un noble qui se mariait et se reproduisaitdans un entre-soi de bon aloi, de trousser à l’occasion,tel un vulgaire Strauss-Kahn, une domestique ou unepaysanne. On peut noter également que les canonsde la beauté allaient vers la blancheur d’une peaulaiteuse, le teint hâlé dénonçant la vie au grand air desgueux.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les besoins demain-d’œuvre ont, dès avant ce qu’il est convenud’appeler la révolution industrielle, attiré des massesde populations vers les centres d’activité, par contrainteéconomique, législative ou armée. Les régionsdéshéritées de France furent les premières à fournircette chair à bourgeois. On connaît l’histoire de cesvagues successives de maçons creusois, de ramoneurs

savoyards ou de bonnes bretonnes, qui ont peuplé lesfaubourgs parisiens, avant que des humains de peine,européens puis issus des territoires colonisés, viennentgrossir les rangs de la classe laborieuse.

Car le racisme est avant tout social. Un Le Pen peutaisément fréquenter un Bongo, car tous deuxappartiennent à la même classe, celle des exploiteurs,et détestent également les pauvres de leurs paysrespectifs. Dans la guerre permanente qui oppose leCapital et le Travail, tout ce qui affaiblit l’un renforcel’autre. Et c’est le Capital qui est à la manœuvre depuisles années soixante-dix. L’importation de main-d’œuvresous-payée dans les pays où la classe ouvrière étaitfortement organisée, affaiblissait celle-ci doublement,par la concurrence à la baisse sur les fiches de paye etpar l'introduction d’une division supplémentaire ausein de la classe potentiellement la plus forte car laplus nombreuse.

Alors qu’aujourd’hui continuent de s’accumuler lesmotifs de révolte et que s’additionnent les manifestationséparses dans les villes, qu’on invoque la «convergencedes luttes» et qu’on espère se faire entendre en ordresdispersés, il est plus que nécessaire de revenir à laracine du mal, l’existence de deux classesirrémédiablement opposées : celle des possédants etcelle des gueux. La première est organisée et unie pourdéfendre ses intérêts. À nous de nous organiser !

GastonDUFIEF

Notre ennemi c'est notre maître!

À la centrale de Melun plusieurs actionsde contestation se développent et par-viennent à se répercuter à l’extérieur, dé-nonçant les conditions de travail et lescandale des rétributions sans communemesure avec les plus insignes de celles àl’extérieur. Pourtant dans cette geôle lesprisonniers pratiquent avec compétencetous les métiers de l’imprimerie. Reven-dications basées donc sur les conditionsde travail plus en phase pour éveiller laconscience publique.Quelques uns de ceux engagés dans ce

combat sont libérés, l’un deux peut faireparaître un bouquin préfacé par MichelFoucault « De la prison à la révolte » etcomme le travail du GIP a attiré des cen-taines de soutiens, des prisons des voixsont portées par la presse, il n’est plus in-dispensable de monter sur les toits pourdire l’intolérable, l’ineptie des geôles. C’estdans ce contexte que le GIP passe la mainaux prisonniers « libérés » ou non et le 11décembre 1972 sort le numéro 1 du « Co-mité d’Action des Prisonniers » journalcréé par des prisonniers et leurs familles.Aussi dans l’ours sont cités nominative-ment un certain nombre de ceux ayantcollaboré à ce premier numéro, Foucaultet Defert s’y trouvent. Ils le seront encoredans quelques numéros, bien que non pri-sonniers, pour illustrer cette citation qu’onretrouve avec le titre dans tous les numé-ros «Les chaînes des prisonniers sont lesmêmes que celles de tous les hommes sanspouvoir sur leur vie, elles sont simple-ment plus visibles». Le journal est habi-tuellement mensuel, il va paraître à 5.000exemplaires au prix de 2 francs de no-vembre 75 à octobre 1976. Puis il tirera à50.000 exemplaires pendant quelques moisau prix de 3 francs lui permettant d’êtredistribué dans tous les points de vente dela presse. Les kiosquiers et autres ven-deurs de la presse seront réticents à le pro-poser à leurs acheteurs, comme toutepresse qui tente de s’imposer contre l’ordredominant.

La responsabilité de la publication estassurée par les unes et les autres, d’un nu-méro à l’autre les noms se succèdent. Ce-la dérange. Il a fallu donc se rappeler àl’ordre et désigner « un responsable de lapublication» avec un casier vierge, quellepudeur ! Dans une série de numéros JeanLapeyrie sera responsable de la publica-tion à la place des unes et des autres, « res-ponsable » fantoche destiné à déplaireaux censeurs de la liberté de la presse.« L’accès aux responsabilités doit se fairepar roulement... Ce mois ci, responsablede publication : Serge Livrozet. Jean La-peyrie n’est qu’un responsable bidon,symbole de la stupidité bourgeoise. » CAPn°11 nov. 73. Dans les numéros suivantsparaît dans l’ours le responsable bidonde la publication à la place de noms departicipants de ce journal «...conçu, misen page, composé et imprimé entièrementpar des militants, journal de tous les pri-sonniers et leurs familles...Nous devonsperdre cette notion d’efficacité qui pousseà utiliser les gens selon des « critères » de

compétence et à faire de chacun de nousdes robots d’une tâche précise.» Le CAPtente d’abolir les séparations, les limita-tions du pouvoir en brisant le jeu des hié-rarchies sociales.

D’essence incontestablement anarchiste,il est là pour tailler de larges croupières àdeux symboles de l’État bourgeois : le ju-diciaire et les lieux d’enfermement, par-ticulièrement les prisons tout en restantpartie prenante des combats contre la psy-chiatrie asilaire et autres lieux d'éviction.La majorité des prisonniers (95%) étaientouvriers avant d'entrer en prison et ilscontinuent à l'être derrière les barreaux.Ce n’est pas l’infraction banale ou quali-fiée plus encore par le judiciaire qui vousfourre en geôle, mais être de la classe desopprimés par la bourgeoisie capitaliste,elle même productrice de crimes et délitsen nombre sans qu’elle ait à encourir laprison. Les geôles sont de ce fait une inep-tie foncière, elles ne sont point là poursauvegarder la tranquillité sociale ! Quandtous les opprimés l’auront compris, toutceci sera aboli. Le CAP s’inscrit radicale-ment dans cette perspective. Le but c’estla suppression de la prison, de toutes lesprisons que la société bourgeoise génèreen grand nombre ! Les collaborateurs duCAP estiment indispensable d'obtenir sa-tisfaction sur les 11 points suivants :

SUPPRESSIONS : 1) du casier judiciaire.2)de l'interdiction de séjour. 3) de lapeine de mort. 4) de la prison à vie. 5) dela tutelle pénale (relégation). 6) de lacontrainte par corps;aménagement desfrais de justice.

DROITS NOUVEAUX : 7) Réorganisa-tion du travail en prison : Salaire mini-mum égal au SMIC, Sécurité Socialepour la famille, Certificat de travail à lasortie, Généralisation de la formationprofessionnelle durant la détention. 8)Droit au parloir et à la correspondancelibres. 9) Droit à des soins médicaux etdentaires corrects. 10) Droit de recourset défense des détenus devant l'admi-nistration pénitentiaire (prétoire, libéra-tion conditionnelle, mesures de grâce etc.)11) Droit d'association à l'intérieur desprisons (moyen essentiel de faire valoirles revendications).

Le CAP répercutera dans la mesure deses moyens les luttes des prisonniers , ilse fera l’écho des luttes et leur apporteraun fort soutien contre l’institution judi-ciaire souvent fomentatrice d’erreurs, ba-fouant aisément même ses propres règles,règles prétendant garantir à tout justi-ciable d’être préservé d’abus de « droit »de la part des tenanciers de cette matière !Quelle berlue ! Combien d’emprisonnésà tort ! Combien d’innocents judiciairesen geôle ! La proportion est énorme bienque dans l’opinion c’est l’inverse qui estla pensée commune! Pourtant près de45 % parfois et communément de l’ordrede 20 % sont jetés en prison sans procèspar la seule volonté d’un magistrat ins-

tructeur pour « la bonne administrationde son instruction » Faut oser pondre unetelle formule ! Ou cette autre, alors quejudiciairement innocent, « pour éviter lerenouvellement de l’infraction ».. .

Le CAP tout au long de ses parutionsdonne la parole à l’intérieur des geôles,participe par ses militants en liberté à ladistribution du journal, occasion de ren-contres avec les familles de prisonniers.Il s’invite dans les débats institutionnelspour apporter les mots des emprisonnés.Dans les geôles les prisonniers trouventdes moyens pour faire parvenir à l’exté-rieur les abus constants dépassant large-ment le fait de la privation de liberté, quidéjà est en soi une ignominie.Les prisons ne sont point encore mises

au rebut, pire la bourgeoisie en construitde plus en plus sous prétexte de surpo-pulation. Depuis que la prison existe, cequi est assez récent, elles ont toujours étésurpeuplées ! Logique ! Elles visent lespauvres, les opprimés. Si par hasardquelques déviants bourgeois viennent às’y fourvoyer, un régime « spécial » leurest assuré.

De par ces luttes soutenues par le Co-mité d’Action des Prisonniers, la tutellepénale est effacée des codes. La guillotinefut supprimée ! Mais la prison à vie se dé-veloppe fortement avec des condamna-tions incompressibles de 20 et même 30ans! «Aménagement» d’espaces d’isola-tion sensorielle : QHS, QSR et tutti quan-ti dans toutes les geôles. Délirant ! Aboliela correspondance réduite à la seule fa-mille directe d’une lettre brève par se-maine mais pour les prévenus – pourtantprésumés innocents- elle reste au bon vou-loir du fonctionnaire judiciaire de l’ins-truction. Le casier judiciaire et l’interdictionde séjour, indispensables outils d’une po-lice servile et cossarde restent en place.Le travail en prison, quand il y en a, estréglementé : fiche de paye, assurance so-ciale souscrite et assurée pour les familles.Ce n’est pas le régime général mais unchangement, alors qu’avant pas de fichede paye, pas de participation aux régimesde retraite etc. Les congés payés sont en-core ignorés et le travail possible que parla bonne volonté des employeurs qu’ilssoient administratifs ou négriers privés.Les droits aux soins, les recours contrel’administration, si quelques «avancées»,restent de l’ordre de l’arbitraire.

Mais surtout de toutes ces luttes aucours de l’existence du CAP il demeureque la voix des prisonniers passe les mursdénonçant à leur manière tous les lieuxd’enfermement. C’est en quoi le CAP, fon-damentalement anarchiste, a ouvert uneporte vers le changement radical de so-ciété, elle reste ouverte. A nous anarchistesde la tenir ouverte même si ce n’est quedu bout de la godasse. Toujours mieuxque rien. Grain de sable foutu dans les en-grenages bourgeois. Que la lutte continue!

M.L.

Michel GARONNE

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PRINTEMPS 2019Régénération n°27 54

La journée du premier Mai est considéréedans le monde socialiste comme la fête du Tra-vail. C’est une fausse définition du 1er Mai qui atellement pénétré la vie des travailleurs qu’ef-fectivement dans beaucoup de pays, ils le cé-lèbrent ainsi. En fait, le premier mai n’est pas unjour de fête pour les travailleurs. Non, les tra-vailleurs ne doivent pas, ce jour là rester dansleurs ateliers ou dans les champs. Ce jour là, lestravailleurs de tous pays doivent se réunir danschaque village, dans chaque ville, pour organi-ser des réunions de masse, non pour fêter ce jourainsi que le conçoivent les socialistes étatistes eten particulier les bolcheviks, mais pour faire lecompte de leurs forces, pour déterminer les pos-sibilités de lutte directe contre l’ordre pourri,lâche esclavagiste, fondé sur la violence et lemensonge. En ce jour historique déjà institué, ilest plus facile à tous les travailleurs de se ras-sembler et plus commode de manifester leur vo-lonté collective, ainsi que de discuter en communde tout ce qui concerne les questions essentiellesdu présent et de l’avenir.Il y a plus de quarante ans les travailleurs amé-ricains de Chicago et des environs se rassem-blaient le premier Mai. Ils écoutèrent là desdiscours de nombreux orateurs socialistes, etplus particulièrement ceux des orateurs anar-chistes, car ils assimilaient parfaitement les idéeslibertaires et se mettaient franchement du côtédes anarchistes.Les travailleurs américains tentèrent ce jour là,en s’organisant, d’exprimer leur protestationcontre l’infâme ordre de l’Etat et du Capital despossédants. C’est sur cela qu’interviennent leslibertaires américains Spiess, Parsons et d’autres.C’est alors que ce meeting fut interrompu pardes provocations de mercenaires du Capital ets’acheva par le massacre de travailleurs désar-més, suivi de l’arrestation et de l’assassinat deSpiess, Parsons et d’autres camarades.Les travailleurs de Chicago et des environs ne se

rassemblaient pas pour fêter la journée du pre-mier Mai. Ils s’étaient rassemblés pour résoudreen commun les problèmes de leur vie et de leursluttes.Actuellement aussi, partout où les travailleursse sont libérés de la tutelle de la bourgeoisie etde la social démocratie liée à elle (indifférem-ment menchévique ou bolchevique) ou biententent de le faire, ils considèrent le 1er Mai commel’occasion d’une rencontre pour s’occuper deleurs affaires directes et se préoccuper de leurémancipation. Ils expriment, à travers ces aspi-rations, leur solidarité et leur estime à l’égard dela mémoire des martyrs de Chicago. Ils sententdonc que cela ne peut être pour eux un jour defête. Ainsi, le premier Mai, en dépit des affirma-tions des "socialistes professionnels" tendant àle présenter comme la fête du travail, ne peut pasl’être pour les travailleurs conscients.Le premier Mai, c’est le symbole d’une ère nou-velle dans la vie et la lutte des travailleurs, uneère qui présente chaque année pour les travail-leurs, de nouvelles, de plus en plus difficiles etdécisives batailles contre la bourgeoisie, pour laliberté et l’indépendance qui leur sont arrachées,pour leur idéal social.

Le samedi 1er mai 1886, à Chicago, date fixéepar les syndicats américains et le journalanarchiste "The Alarm" afin d'organiser unmouvement revendicatif pour la journée de 8heures, aura des conséquences inattendue pourla classe ouvrière internationale. Quelque 200000 travailleurs ont obtenu la réduction de lajournée de travail à 8 heures, mais quelque 340000 autres salariés doivent par la grève forcer lepatronat à céder. Le mouvement paralyse prèsde 12 000 usines à travers les USA et se poursuitles jours suivants. Le 3 mai, le meeting qui setient près des usines McCormick donne lieu àdes affrontements avec les vigiles privés quiprotègent les briseurs de grève. La policeappelée en renfort tire sur la foule, provoquantla mort de deux ouvriers.Le lendemain 4 mai,tout Chicago est en grève et un grandrassemblement est prévu à Haymarket dans lasoirée. Alors que la foule se retire, la policecharge les derniers manifestants. C'est à cemoment-là qu'une bombe est jetée sur lespoliciers, qui ripostent en tirant. Le bilan sesolde par une douzaine de morts, dont septpoliciers. Cela déclenche l'hystérie de la pressebourgeoise et la proclamation de la loi martiale.La police arrête huit anarchistes, dont deuxseulement étaient présents au moment del'explosion. Mais qu'importe l'innocence ; unprocès, commencé le 21 juin 1886, se clôt le 20août par sept condamnations à mort. Malgré lamobilisation internationale, quatre serontpendus le 11 novembre 1887 (Louis Linggs'étant suicidé la veille, dans sa cellule).Troisans plus tard, en juillet 1889, le congrès del'Internationale Socialiste réuni à Paris, déciderade consacrer chaque année la date du 1er mai àune journée de lutte à travers le monde. LePremier mai sera d'abord récupéré par lesbolchéviques, puis par les nazis, et enfin par lerégime de Vichy (en France), qui letransformera en «Fête du travail», sans jamaisréussir totalement à lui enlever son originelibertaire.

Le 1er mai 1890, à Vienne (département de l'Isère), lapopulation ouvrière répondant à l'appel des anarchistesLouise Michel, Eugène Thennevin, et Pierre Martindescend dans les rues pour inciter ceux qui travaillent àse mettre en grève. Le cortège arborant drapeaux rougeset drapeaux noirs et chantant La Carmagnole ne tardepas à se heurter aux «forces de l'ordre». Des barricadessont érigées, l'usine d'un patron du textile est pillée,mais les meneurs sont arrêtés. Des grèves spontanées sepoursuivront durant une semaine. Trois militantsanarchistes seront lourdement condamnés à Grenobledevant la Cour d'assises de l'Isère en août 1890, pour cesévènements.

LE 1er MAI : SYMBOLE D’UNE ÈRENOUVELLE DANS LA VIE ET LA LUTTE DES

TRAVAILLEURSArticle de Nestor Makhno, publié en 1928 dans le Numéro 36 du journal Dielo truda (Causeouvrière), fondé à Paris en 1925 par des réfugiés anarchistes polonais, russes et ukrainiens quiavaient pu fuir la répression instaurée par le pouvoir bolchévique sur la Russie soit disantsoviétique.

À Barcelone l'effervescence du 1er mai 1890 provoqua la proliférationdes sociétés ouvrières, dont La société autonome des ouvrièresde Barcelone, association résolument anarchiste, enregistrée le18 mars 1891, vingt ans jour pour jour après le début de La Communede Paris.

Le premier mai, journée deluttes contre l'asservissement et

l'exploitation!