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René BLEUZEN D'Auvergne en Pays Fouesnantais Les LABORY La Bretagne, terre d'accueil des Auvergnats On évoque souvent le départ des bretons vers les marchés extérieurs du travail : vers Paris OU les tâches étaient réputées moins rudes et mieux rémunérées ; les cultivateurs vers la Dordogne où les terres étaient moins chères ; et vers l'Amérique, où l'on espérait faire fortune. On sait moins que la Bretagne, et particulièrement la Cornouaille, a été une terre promise pour les habitants d'autres provinces, voire de pays étrangers limitrophes. Venus exercer leur métier de sabotier, de menuisier, de cimentier ou de carreleur (on en trouve aussi qui sont colporteurs, marchands de drap ambulants), beaucoup de ces ouvriers ne sont pas retournés à leur point de départ. Ils ont rencontré une bretonne, ont fondé un foyer, et ont souvent participé très activement à la vie locale Serge Duigou, l 'historien du Cap Caval, nous révèle comment des Auvergnats, ferblantiers, chaudronniers, sabotiers, menuisiers, arrivent en pays bigouden à la fin du XVIII ème siècle, s'y sont implantés, sont souvent devenus très influents après avoir bifurqué vers la fonction publique, l'ostréiculture, voire l'industrie. Et il cite, entre autres, une famille Labory dont un des descendants a quitté Plogastel-Saint-Gerrnain pour s'éta- blir à Clohars-Fouesnant, d'où a essaimé ensuite une nouvelle branche de Labory. Suivons d'abord son explication sur l'arrivée de l'Auvergnat en Bretagne. De Pers (Cantal) à Clohars-Fouenant Pierre Bories se marie à Carlat (Cantal) à une demoiselle Anne Bassiniac. Ils habitent ensuite à Pers, et ont un fils qu'ils prénomment Géraud. Géraud Bories grandit. En 1790, il a quitté son Auvergne natale. Sabotier de son état, on le trouve à Quimper où le 13 juillet il prend pour épouse Marie Corentine Brélivet, en l'église Saint-Julien : pour le registre des mariages, il est devenu Jérôme Labory ! Il exercera ensuite sa profession à Plogastel-Saint-Gerrnain où il est décédé le II novembre 1826. 1/9

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René BLEUZEN

D'Auvergne en Pays Fouesnantais Les LABORY

La Bretagne, terre d'accueil des Auvergnats On évoque souvent le départ des bretons vers les marchés extérieurs du travail : vers Paris OU les tâches étaient réputées moins rudes et mieux rémunérées ; les cultivateurs vers la Dordogne où les terres étaient moins chères ; et vers l'Amérique, où l'on espérait faire fortune. On sait moins que la Bretagne, et particulièrement la Cornouaille, a été une terre promise pour les habitants d'autres provinces, voire de pays étrangers limitrophes. Venus exercer leur métier de sabotier, de menuisier, de cimentier ou de carreleur (on en trouve aussi qui sont colporteurs, marchands de drap ambulants), beaucoup de ces ouvriers ne sont pas retournés à leur point de départ. Ils ont rencontré une bretonne, ont fondé un foyer, et ont souvent participé très activement à la vie locale Serge Duigou, l 'historien du Cap Caval, nous révèle comment des Auvergnats, ferblantiers, chaudronniers,

sabotiers, menuisiers, arrivent en pays bigouden à la fin du XVIII ème siècle, s'y sont implantés, sont souvent devenus très influents après avoir bifurqué vers la fonction publique, l'ostréiculture, voire l'industrie. Et il cite, entre autres, une famille Labory dont un des descendants a quitté Plogastel-Saint-Gerrnain pour s'éta-blir à Clohars-Fouesnant, d'où a essaimé ensuite une nouvelle branche de Labory. Suivons d'abord son explication sur l'arrivée de l'Auvergnat en Bretagne.

De Pers (Cantal) à Clohars-Fouenant Pierre Bories se marie à Carlat (Cantal) à une demoiselle Anne Bassiniac. Ils habitent ensuite à Pers, et ont un fils qu'ils prénomment Géraud. Géraud Bories grandit. En 1790, il a quitté son Auvergne natale. Sabotier de son état, on le trouve à Quimper où le 13 juillet il prend pour épouse Marie Corentine Brélivet, en l'église Saint-Julien : pour le registre des mariages, il est devenu Jérôme Labory ! Il exercera ensuite sa profession à Plogastel-Saint-Gerrnain où il est décédé le II novembre 1826.

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Ce premier Jérôme Labory aura plusieurs enfants dont un, né le l er janvier 1794 à Plogastel-Saint-Germain, se prénomme également Jérôme. A son tour, il fonde un foyer en se mariant le 22 décembre 1817, dans la même commune, à Julie Monot. De cette union naît, le 31 août 1830, toujours à Plogastel, Henry Labory. Celui-ci devint menuisier ébéniste: il prend pour épouse MarieJeanne Gloaguen. Ce ménage aura sept enfants, quittera Plogastel-Saint-Germain pour Pont-l'Abbé, puis CloharsFouesnant où Henry Labory est décédé le29novembre 1892. Nous avons volontairement négligé de citer les collatéraux de ces premières générations de Labory en Cornouaille, pour ne retenir que celles qui ont abouti à Henry, point de départ dans le canton de Fouesnant d'une lignée dont la présence a été marquée par des réalisations professionnelles et artistiques qui méritent d'être signalées. Serge Duigou a abordé le sujet dans "Cap Caval" et Louis Le Guennec en parle dans son bel ouvrage "'Choses et Gens de Bretagne". De même, nous ne nous étendrons pas sur toutes les ramifications qui se sont succédé à partir de Kermorvan en Clohars-Follesnant. Précisons cependant que les enfants de Henry Labory et de Marie-Jeanne Gloaguen, à part Alain et Alexis disparus en bas âge, se sont tous mariés et ont contribué à multiplier les Labory dans le canton de Fouesnant et bien au-delà. Les deux aînés, Jérôme et Henri, ne quitteront pas leur commune d'adoption. Jérôme a eu une nombreuse famille dont l'un des garçons porte le prénom de son père. Ce nouveau Jérôme est resté à Clohars-Fouesnant, s'est marié à Marie Marrien. Quatre garçons sont nés de cette

union Louis, décède dans le Nord après une carrière de mineur : André, qui fut navigateur : Jean installé, à Belle-lle-en-Mer, et Jérôme dont il sera question plus loin. Henri, Cultivateur à Lannaouen Vihan en Clohars a également eu plusieurs enfants, dispersés dans les communes voisines. Les deux plus jeunes ont quitté Clohars-Fouesnant : Noël, resté à la terre a fait sa vie entre Fouesnant et Bénodet où ses petits-enfants continuent la lignée; Jean-Louis, dit Louis, est le seul des enfants à n'être pas resté à la terre, il est devenu menuisier ébéniste, ce qui lui a valu une solide réputation à Bénodet et dans les environs. Quant à Marie-jeanne, mariée à Pierre Le Loc'h, elle a choisi de terminer ses jours à Bénodet. Mais revenons aux artistes ...

Henry Labory Il arrive à Clohars-Fouesnant en 1862, exerce son métier de menuisier -ébéniste à Kermorvan, une fermette dépendant de Bodinio. Curieusement et sans qu'il y ait sans doute de rapport entre les faits" c'est également à Kermorvan que se trouve actuellement l"atelier de menuiserie installé par Bertrand Aupècle pour son institution "Le Caillou Blanc". Henry Labory et Marie-Jeanne Gloaguen ont déjà trois enfants à leur arrivée à Clohars - Jérôme, né le 2 juin l856 à Plogastel. Il se marie à Anne Perrine Cornec et décède à Clohars le 11 février 1903.

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- Henri, né le 2 juin 1859 à Plogastel. Il épouse Anne Le Coz le 10 férier 1884 à Clohars. - Marie-Jeanne, née le 19 octobre 1861 à Pont-l'Abbé. Veuve de Pierre Le Lorc'h, elle décède le 31 .janvier 1938. Quatre autres enfants naîtront à Clohars-Fouesnant : - Alain, né le 28 novembre 1863 ; - Alexis, né en 1865 et décédé le 6 août 1867 à l'âge de deux ans ; - Jean-Louis, dit louis, né le 30 mars 1866. Marié à Anne-Marie Louédec, il est décédé à Bénodet le 30 mai 1937; - Noël, né le 25 mars 1870, marié à Marie l' Haridon, disparaîtra le 15 octobre 1909. Nous ne sommes pas renseignés sur ce que fut la vie de Henry Labory avant son arrivée à CloharsFouesnant. La seule certitude, est qu'il était marié et père de trois enfants. Sa petite-fille, Marie-louise Labory, veuve Traon, qui va sur ses 93 ans,

croit qu'il était passé par le séminaire. Son père, Jean-Louis, lui disait que le grand-père était un poète et qu'il allait chanter et vendre des chansons sur les foires et les pardons. L'une d'elles commençait ainsi : "Pa wan dimet me sonjaz d'ing..." (Quand je me suis marié je pensais que.. ) Vers les années 30, Louis Le Guennec nous dit qu'il traduisait en vers bretons les "Géorgiques" de Virgile, et qu'il composa des chansons mordantes, en breton, comme "Ar Vevierez" (la chanson de l'ivrognesse), ou encore "Ar chanson nevez var sujet ar superstitionnou ... témoignage d'anciennes croyances encore vivaces en Basse Bretagne. Sont-ce ces ballades qu'il chantait et vendait sur les places publiques? "Curieux tout de même, ajoute Marie-Louise, en vous regardant dans les yeux : ce grand-père instruit n'a fait scolariser aucun de ses enfants ! Mais en a-t-il eu la possibilité ?

La signature d'Henry Labory, "menuisier", sur le soubassement de la tribune dans l'église de Clohars-Fouesnant

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Lorsqu'il déclarait la naissance d'un de ses enfants à la mairie de Clohars-Fouesnant, Henry Labory se présentait comme menuisier. Nous savons aussi que les menuisiers d'alors s'occupaient aussi bien de charpente que de fenêtres ou de meubles. Les plus doués auraient mérité la qualification d'ébénistes, et Henry Labory était de ceux-là. Nombre de lits clos et d'armoires bretonnes sont sortis de son atelier; on en trouve chez ses descendants, avec une date en clous dorés correspondant le plus souvent à l'année du mariage de la bénéficiaire, pour qui c'était un cadeau irremplaçable. Tous ces meubles sont fabriqués en chêne ou en châtaignier, et soigneusement entretenus par leurs détenteurs. Solides, cela va sans dire, et artistement décorés de sculptures en arabesques, de fleurs, feuillages et oiseaux. L'artiste fut remarqué par Hélène Hernio, une demoiselle de la haute bourgeoisie, et personnalité de Clohars -Fouesnant: elle le chargea de construire une tribune pour l'église de Clohars, à l'usage des nobles ou châtelains assistant aux offices. Cette tribune est datée de 1878. La balustrade est faite de fuseaux et colonnettes avec, à la base des carrés de sculptures diverses partant du centre où l'auteur a sculpté l'effigie de la donatrice. Henry Labory a également fabriqué la chaire à prêcher de sa commune d'origine, Plogastel-Saint Germain, et peut-être celle de Bénodet, aujourd'hui disparue. Cet artiste avait aussi un côté "patriarcal". Ainsi, accompagnant son fils Henri qui déclarait la naissance de sa fille Anne-Marie, le 25 avril 1891, sa signature, Labory, précédée de sa qualité, "aïeul", figure sur le registre, ce qui est rare à Clohars-Fouesnant. Peut-être doiton

rapprocher ce fait d'un propos de sa petite fille : "Grand-père a été secrétaire de la mairie de Clohars", qui expliquerait son habitude des registres.

Jean-Louis Labory Il est né à Kermorvan, en Clohars-Fouesnant, le 30 mars 1866. Il a appris avec son père le métier de menuisier, puis il est allé à Bénodet où il aurait d'abord travaillé dans l'atelier Corporeau.

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