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Innovations Agronomiques 40 (2014), 1-24 Les processus de complémentarité de niche et de facilitation déterminent le fonctionnement des associations végétales et leur efficacité pour l’acquisition des ressources abiotiques. Justes E. 1 , Bedoussac L. 1,2 , Corre-Hellou G. 3 , Fustec J. 3 , Hinsinger P. 4 , Jeuffroy M.H. 5 , Journet E.P. 1,6 , Louarn G. 7 , Naudin C. 3 , Pelzer E. 5 1 INRA, UMR INRA-INPT 1248 AGIR (Agroécologies-Innovations-Territoire), Chemin de Borde Rouge, Auzeville, CS 52627, F-31326 Castanet-Tolosan 2 ENFA, UMR 1248 AGIR, Auzeville, 2 route de Narbonne, F-31326 Castanet-Tolosan 3 LUNAM Université, Groupe ESA, UR LEVA, 55 rue Rabelais, F- 49007 Angers 4 INRA, UMR Eco&Sols, 2 Place Viala, F-34060 Montpellier 5 INRA-AgroParisTech, UMR 211 Agronomie, Avenue Lucien Brétignières, F-78850 Thiverval-Grignon 6 CNRS, UMR 2594 LIPM, Auzeville, CS 52627, F-31326 Castanet-Tolosan 7 INRA, UR4 (Recherche Pluridisciplinaire Prairies et Plantes Fourragères), BP 80006, F-86600 Lusignan Correspondance : [email protected] Résumé Dans les peuplements monospécifiques constituant la majorité des écosystèmes cultivés, les plantes sont en compétition pour les ressources abiotiques car elles exploitent les mêmes niches écologiques. A contrario, dans les peuplements plurispécifiques, deux processus majeurs ont été mis en évidence pour expliquer les meilleures performances de ces systèmes, à savoir la complémentarité de niche et la facilitation. Les interactions entre espèces ont lieu à la fois au niveau aérien pour l’interception du rayonnement, et au niveau racinaire pour le prélèvement de l’eau et des nutriments. La partition spatiale d'une ressource du sol entre deux espèces associées se produit particulièrement lorsque ces dernières présentent des vitesses et des profondeurs d'enracinement différenciées. Il en va de même pour l’utilisation de la lumière lorsque les espèces associées présentent des architectures et/ou des dynamiques de croissance complémentaires. La complémentarité de niche sur un plan biogéochimique s’applique typiquement aux cas d'associations entre une légumineuse et une espèce non fixatrice d'azote ; elle est liée à la capacité de la légumineuse à fixer l’azote de l’air. Cette complémentarité est d’autant plus forte que les espèces sont cultivées en situation de faible disponibilité d’intrants azotés. Ainsi dans ces situations, les cultures associées ont montré de meilleures performances en termes de production de biomasse et de rendement, mais aussi de statut azoté et in fine de teneur en protéines de la céréale. La facilitation se produit lorsqu'une espèce peut mobiliser dans le sol un pool initialement non disponible par l'intermédiaire de processus rhizosphériques engendrés par l’autre espèce comme cela a été récemment mis en évidence dans le cas du phosphore. Mots-clés : compétition, complémentarité de niche, facilitation, lumière, eau, azote, phosphore Abstract: The complementarity for the acquisition of abiotic resources in intercrops and species mixtures: what processes explain their performances? Crop stands are generally composed of monospecific communities in modern agro-ecosystems. Consequently, in such situations, plants compete for the same abiotic resources as they exploit the same ecological niches. Conversely, in multi-species communities, two major processes have been

Les processus de complémentarité de niche et de ... · récolte, il dépendrait de la dynamique relative des espèces associées (Sivakumar et Virmani, 1984 ; Natarajan et Willey,

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Les processus de complémentarité de niche et de facilitation déterminent le fonctionnement des associations végétales et leur efficacité pour l’acquisition

des ressources abiotiques.

Justes E.1, Bedoussac L.1,2, Corre-Hellou G.3, Fustec J.3, Hinsinger P.4, Jeuffroy M.H.5, Journet E.P.1,6, Louarn G.7, Naudin C.3, Pelzer E.5

1 INRA, UMR INRA-INPT 1248 AGIR (Agroécologies-Innovations-Territoire), Chemin de Borde Rouge, Auzeville, CS 52627, F-31326 Castanet-Tolosan 2 ENFA, UMR 1248 AGIR, Auzeville, 2 route de Narbonne, F-31326 Castanet-Tolosan 3 LUNAM Université, Groupe ESA, UR LEVA, 55 rue Rabelais, F- 49007 Angers 4 INRA, UMR Eco&Sols, 2 Place Viala, F-34060 Montpellier 5 INRA-AgroParisTech, UMR 211 Agronomie, Avenue Lucien Brétignières, F-78850 Thiverval-Grignon 6 CNRS, UMR 2594 LIPM, Auzeville, CS 52627, F-31326 Castanet-Tolosan 7 INRA, UR4 (Recherche Pluridisciplinaire Prairies et Plantes Fourragères), BP 80006, F-86600 Lusignan

Correspondance : [email protected]

Résumé Dans les peuplements monospécifiques constituant la majorité des écosystèmes cultivés, les plantes sont en compétition pour les ressources abiotiques car elles exploitent les mêmes niches écologiques. A contrario, dans les peuplements plurispécifiques, deux processus majeurs ont été mis en évidence pour expliquer les meilleures performances de ces systèmes, à savoir la complémentarité de niche et la facilitation. Les interactions entre espèces ont lieu à la fois au niveau aérien pour l’interception du rayonnement, et au niveau racinaire pour le prélèvement de l’eau et des nutriments. La partition spatiale d'une ressource du sol entre deux espèces associées se produit particulièrement lorsque ces dernières présentent des vitesses et des profondeurs d'enracinement différenciées. Il en va de même pour l’utilisation de la lumière lorsque les espèces associées présentent des architectures et/ou des dynamiques de croissance complémentaires. La complémentarité de niche sur un plan biogéochimique s’applique typiquement aux cas d'associations entre une légumineuse et une espèce non fixatrice d'azote ; elle est liée à la capacité de la légumineuse à fixer l’azote de l’air. Cette complémentarité est d’autant plus forte que les espèces sont cultivées en situation de faible disponibilité d’intrants azotés. Ainsi dans ces situations, les cultures associées ont montré de meilleures performances en termes de production de biomasse et de rendement, mais aussi de statut azoté et in fine de teneur en protéines de la céréale. La facilitation se produit lorsqu'une espèce peut mobiliser dans le sol un pool initialement non disponible par l'intermédiaire de processus rhizosphériques engendrés par l’autre espèce comme cela a été récemment mis en évidence dans le cas du phosphore.

Mots-clés : compétition, complémentarité de niche, facilitation, lumière, eau, azote, phosphore

Abstract: The complementarity for the acquisition of abiotic resources in intercrops and species mixtures: what processes explain their performances? Crop stands are generally composed of monospecific communities in modern agro-ecosystems. Consequently, in such situations, plants compete for the same abiotic resources as they exploit the same ecological niches. Conversely, in multi-species communities, two major processes have been

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highlighted to explain their better performance compared to sole crops: niche complementarity and facilitation. In these systems, species interactions occur both at the aerial level for radiation interception and at root level for water and nutrient uptake from the soil. Thus, spatial partition of a soil resource operates particularly when intercropped species have different rooting depths and dynamics. Similarly, complementarity between species for light use occurs when species architecture and/or dynamics strongly differ. Biogeochemical niche complementarity is typically observed when intercropping a legume with a non-nitrogen fixing species. Indeed, while species are competing for the pool of soil mineral nitrogen, niche complementarity occurs due to the legume's ability to access the unlimited pool of atmospheric N2 through symbiotic nitrogen fixation. This process has been well documented for cereal-legume intercrops and its magnitude is higher in situations of low nitrogen inputs. Therefore, under such low nitrogen availability, intercrops have shown better performances than sole crops in terms of biomass production and yield but also of nitrogen status ultimately leading to higher protein concentration in cereal grains. Facilitation occurs when one specie is able to mobilize a pool in the soil that is initially non available through rhizosphere processes created by the other intercropped specie which have been recently demonstrated for phosphorus. Keywords: competition, niche complementarity, facilitation, light, water, nitrogen, phosphorus

Introduction Dans la plupart des écosystèmes cultivés conventionnels européens, une seule espèce végétale, et, le plus souvent, une seule variété, est cultivée dans le même champ. Dès lors, tous les individus du peuplement, ayant les mêmes traits fonctionnels, entrent nécessairement en compétition pour l'ensemble des ressources abiotiques. Toutefois, l'utilisation intensive d'intrants tels que les engrais minéraux ou l'eau dans les systèmes irrigués permet de minimiser ces compétitions intra-spécifiques en couvrant les besoins du peuplement et in fine de maximiser le rendement de la culture. A l'opposé, les peuplements plurispécifiques associant des espèces végétales ayant des traits fonctionnels contrastés, constituent une alternative agro-écologique intéressante visant à réduire l'usage des intrants et leurs impacts négatifs sur l'environnement. En effet, de tels systèmes permettraient de mettre en œuvre des mécanismes d'interactions positives entre les espèces afin d’utiliser plus efficacement les ressources disponibles, comme cela a pu être décrit pour les communautés végétales naturelles. Notons que dans les agroécosystèmes, lorsque l’on parle de cultures associées, on pense généralement à l’association entre une (ou des) espèce(s) de légumineuse(s) avec une (ou des) espèce(s) de non-légumineuse(s) de type graminée ou céréale. Cela correspond effectivement à des associations bispécifiques ou plurispécifiques courantes et généralement cultivées pour réduire la dépendance de l’agriculture aux engrais azotés. Cependant, les cultures associées ne sauraient être réduites à ce seul type d’association d’espèces annuelles. Par ailleurs les associations peuvent être annuelles ou pérennes et dans les deux cas les mêmes processus se produisent. Nous présentons dans cette synthèse des illustrations issues d’une diversité d’exemples de couverts plurispécifiques.

Les végétaux supérieurs interceptent le rayonnement par l’intermédiaire de leurs feuilles et des autres organes chlorophylliens et utilisent l’énergie lumineuse pour la photosynthèse et les assimilats carbonés pour la production de biomasse. Lorsque les facteurs tels que l’eau, les nutriments (éléments minéraux), les maladies, les ravageurs et les mauvaises herbes ne limitent pas le rendement et la quantité de matière sèche produite par une culture, la production dépend essentiellement de la quantité du rayonnement absorbé (Loomis et Williams, 1963) et ceci aussi bien en culture monospécifique (Shibles et Weber, 1966 ; Monteith, 1977 ; Kiniry et al., 1989) qu’en association plurispécifique (Natarajan et Willey, 1980a,b ; Sivakumar et Virmani, 1980 ; Sivakumar et Virmani, 1984).

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Dans les associations d’espèces, l’efficience d’interception du rayonnement pourrait être accrue dès lors que les espèces présentent des caractéristiques architecturales et/ou des dynamiques de croissance complémentaires. En effet, dans ces systèmes complexes et hétérogènes, l’interception du rayonnement par chaque espèce ne dépendrait pas uniquement de leur indice foliaire et de leur coefficient d’extinction (Sinoquet et Caldwell, 1995,) mais également de la hauteur relative et de la dynamique de croissance de chacune des espèces associées (Corre-Hellou, 2005). Plus précisément, la compétitivité d’une espèce pour l’acquisition de la lumière et donc pour la production de biomasse dépendrait de son IF (IF = Indice Foliaire : m2 de feuilles par m2 de sol), de son architecture foliaire et de sa hauteur relativement à celle de l’autre espèce associée (Fukai, 1993 ; Midmore, 1993 ; Biscoe et Gallagher, 1977). Par ailleurs, le rayonnement absorbé ou intercepté variant de l’émergence à la récolte, il dépendrait de la dynamique relative des espèces associées (Sivakumar et Virmani, 1984 ; Natarajan et Willey, 1980ab ; Watiki et al., 1993). Ainsi, il a été observé qu’en raison de l’hétérogénéité spatiale du couvert, l’énergie lumineuse est avant tout disponible pour l’espèce dominante favorisant sa production de biomasse au détriment de celle de l’espèce dominée.

Dans les mélanges plurispécifiques, les interactions indirectes entre espèces peuvent être représentées comme les effets d’une espèce sur le milieu et la réponse d’une seconde espèce à ces changements (Vandermeer, 1989 ; Goldberg, 1990). Vandermeer (1989) distingue ainsi deux types d'interactions : 1) la compétition qui intervient quand une espèce modifie l’environnement de façon négative pour la seconde, comme par exemple lorsqu’elle extrait une ressource qui devient limitante ou qu’elle génère un ombrage défavorable, et 2) la facilitation, lorsque ce changement est positif pour la seconde espèce, comme par exemple pour l’acquisition du phosphore. Cependant, la compétition peut être réduite par le phénomène de complémentarité de niche, lorsque par exemple une espèce a accès à une ressource non disponible pour la seconde. Une telle situation permet de limiter les compétitions et se produit par exemple en associant une plante non fixatrice d’azote et une plante fixatrice, du fait que cette dernière peut utiliser l’azote de l’air via la fixation symbiotique contrairement à la première. Il en est de même lorsque les espèces associées présentent des enracinements contrastés en profondeur de prospection. Dans ce cas les deux espèces sont à la fois en compétition pour les ressources présentes dans les horizons supérieurs mais également complémentaires du fait que les ressources situées en profondeur ne sont accessibles que pour celle ayant l’enracinement le plus profond. Il n’en reste pas moins que ces différentes interactions sont complexes du fait qu’elles se produisent en dynamique et qu’elles dépendent entre autres de la disponibilité en nutriments, du contexte pédo-climatique, des espèces et des cultivars associés (Connolly et al., 1990) et de leur plasticité d'utilisation des ressources en réponse à la compétition (Ashton, 2010).

1. Processus et interactions entre espèces pour l’acquisition des ressources abiotiques Dans les peuplements monospécifiques largement répandus en agriculture conventionnelle européenne, les plantes entrent en compétition pour l'ensemble des ressources abiotiques du fait qu’elles prospectent les mêmes niches écologiques (Figure 1a). A contrario, dans les écosystèmes naturels ou cultivés présentant une diversité d’espèces, deux processus majeurs supplémentaires ont été mis en évidence pour expliquer les meilleures performances des peuplements plurispécifiques relativement aux peuplements monospécifiques, en termes d'utilisation des ressources abiotiques et de production de biomasse. Il s’agit des processus de complémentarité de niche (Figures 1b et 1c) et de facilitation (Figure 1d) (Fridley, 2001; Hinsinger et al., 2011a), bien qu’en pratique, il soit très difficile de distinguer ces deux processus (Loreau et Hector, 2001).

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Figure 1 : Les diverses situations d'interactions entre espèces et processus écologiques sous-jacents (a : compétition ; b : complémentarité de niche ; c : compétition et complémentarité de niche; d : compétition et facilitation) pour l’acquisition des ressources abiotiques en peuplements plurispécifiques (schéma issu de Hinsinger et al., 2011a) et leur déclinaison en exemples concrets pour : (a) la compétition pour l’azote minéral, (b) la complémentarité de niche pour l’eau, (c) la compétition et complémentarité de niche pour l’azote et (d) la compétition et facilitation pour le phosphore.

1.1 La complémentarité de niche : accéder à des ressources différentes La complémentarité de niche correspond à l'exploitation de ressources différentes (Garnier et Navas, 2011) se traduisant par une réduction de la compétition interspécifique (Figures 1b et 1c). Cette partition de la ressource abiotique entre les espèces associées a lieu lorsqu'elles utilisent des pools (formes biogéochimiques) différents d’une même ressource ou lorsqu'elles utilisent le même pool de façon différée dans le temps ou dans l'espace (Chesson, 2000 ; Fridley, 2001).

1.1.1 Différenciation d’accès à un pool de nutriments et d’eau du sol La partition de niche sur un plan biogéochimique s'applique typiquement aux associations entre une légumineuse et une espèce non fixatrice d'azote. En effet, bien que ces espèces soient en compétition pour utiliser le pool d'azote minéral du sol (pool 1 de la Figure 1c), seule la légumineuse a la capacité

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d’accéder au pool d'azote atmosphérique (pool 2 de la Figure 1c) via la fixation symbiotique. Ce processus a été largement documenté pour les associations graminées-trèfle (Gylfadottir et al. 2007 ; Pirhofer-Walzl et al., 2012) et pour les cultures associées céréales-légumineuses, et il apparait comme déterminant pour expliquer les meilleures performances de ces types de peuplements plurispécifiques, non seulement en termes de production de biomasse et de rendement mais aussi du point de vue du statut azoté et de la teneur en protéine de la céréale (e.g. Bedoussac et al., 2010 ; Corre-Hellou et al., 2006 ; Naudin et al., 2010 ; Hauggard-Nielsen et al., 2009). En effet, ces travaux ont montré que les légumineuses fixent une proportion plus grande d'azote atmosphérique (N2) lorsqu'elles sont cultivées en association (e.g. Bedoussac et al., 2010b ; Naudin et al., 2010, 2011). Ce phénomène s’explique par le fait que la céréale épuise rapidement l’azote minéral disponible dans l’horizon superficiel en raison d’une croissance (notamment racinaire) souvent plus rapide et plus précoce que la légumineuse. Ainsi, cette dernière est forcée à recourir à la fixation symbiotique pour répondre à ses besoins en azote. Notons également que si le prélèvement d’azote minéral du sol par la céréale est suffisamment important, il permet même d’éviter l'inhibition de la fixation symbiotique qui se produit lorsque la disponibilité en nitrate est élevée dans l’horizon superficiel. Par ailleurs, du fait de cette complémentarité, les céréales en culture associée ont accès à une plus grande quantité d'azote minéral par plante. Plus précisément, cela s’explique par deux phénomènes : 1) une densité de plantes de céréale souvent moindre en association qu'en peuplements monospécifiques (cas des peuplements substitutifs : semis à la moitié de la densité du peuplement monospécifique) et 2) le fait que la légumineuse utilise essentiellement l’azote atmosphérique, laissant ainsi la majorité de l’azote minéral du sol à la céréale.

Le même phénomène de complémentarité de niche s'applique à de nombreux autres nutriments dès lors qu'ils existent dans des pools biogéochimiques différents et que les espèces utilisent ces pools de façon différenciée. C'est par exemple le cas du phosphore pour lequel il est possible de distinguer dans le sol les pools organiques et inorganiques (Hinsinger et al., 2011a) et pour lequel les capacités des espèces végétales à mobiliser le pool organique de phosphore diffèrent sensiblement, pouvant ainsi résulter en une séparation de niche (e.g. Li et al., 2008). Il en va de même concernant l'eau si ce n’est que pour cette dernière il n’existe qu’une seule forme. Dans ce cas la complémentarité de niche vient du fait que les espèces végétales peuvent différer sensiblement dans leur capacité à absorber l’eau en fonction du potentiel hydrique. Ainsi, lorsque le sol se dessèche fortement, le potentiel hydrique descend en dessous de 1,6 MPa ce qui correspond théoriquement au point de flétrissement. Dans une telle situation, seules les espèces (ou génotypes) ayant la faculté à extraire de l'eau très fortement retenue dans les micropores du sol seront alors à même de couvrir une partie de leurs besoins hydriques. Il s'agit donc là d'un autre exemple de séparation de niche considérant qu’il existe deux pools d’eau présents dans le même volume de sol : l’eau fortement liée aux particules de sol à laquelle seule l'espèce la plus performante aura accès (pool 2 de la Figure 1c) et l’eau facilement disponible pour laquelle les deux espèces sont en compétition (pool 1 de la Figure 1c).

1.1.2 Différenciation d’accès aux ressources dans l’espace La partition spatiale d'une ressource du sol se produit particulièrement lorsque les espèces associées présentent des profondeurs d'enracinement très différenciées (Hauggaard-Nielsen et Jensen, 2005). Cela s'applique notamment au cas de l'eau du sol pour laquelle la profondeur d'enracinement détermine la profondeur d’extraction. Par ailleurs, cette complémentarité évolue dans le temps en fonction des dynamiques d’enracinement respectives des deux espèces. Il a été montré que la vitesse d’enracinement est un trait fonctionnel racinaire majeur dans la compétition pour l'eau au sein de communautés végétales prairiales (Violle et al., 2009), on parle alors de stratification verticale de la niche. A titre d’illustration, le pool 1 de la Figure 1c représenterait l’horizon superficiel dans lequel les espèces associées sont en compétition tandis que le pool 2 de la Figure 1c correspondrait aux horizons profonds accessibles seulement à l'espèce ayant l’enracinement le plus profond. Les systèmes agro-forestiers ainsi que les vignes ou vergers enherbés illustrent bien ce processus avec en général des

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espèces herbacées à enracinement superficiel, et d'autre part, des espèces ligneuses pérennes à enracinement profond. Toutefois, cette partition spatiale dépend de la nature des espèces et de leurs systèmes racinaires en interaction avec les caractéristiques pédologiques : dans un sol superficiel, une telle partition sera limitée. Si d’un point de vue théorique une telle stratification existe, il n’en reste pas moins que ces phénomènes sont peu documentés et ce notamment dans le cas des associations de cultures annuelles. En effet, l'acquisition de données sur l'architecture racinaire et la distribution verticale des racines d'espèces associées nécessite des protocoles lourds à mettre en œuvre et posent des difficultés méthodologiques afin de distinguer les différents types de racines. Cependant, dans des associations orge-pois de printemps, il a été montré que l’évolution du front racinaire de l’orge était plus rapide que celui du pois mais avec pour une même espèce peu de différences entre la culture monospécifique et la culture associée. Il a également aussi été montré (en utilisant des méthodes de différenciation des racines en fonction de leur signature isotopique 15N) que la céréale représentait la plus grande part de la biomasse racinaire du mélange (Corre-Hellou et Crozat, 2005). Li et al. (2006) ont quant à eux étudié la distribution verticale et latérale des racines dans diverses cultures associées (de céréales et de légumineuses). Ils sont ainsi parvenus à montrer que le blé associé à du maïs présentait une extension racinaire latérale plus forte qu'en culture monospécifique lui permettant de coloniser les horizons de sol sous les racines des plants de maïs. Par ailleurs, Jamont et al. (2013) ont montré qu’il existait, avant la mise en place des nodosités de la féverole, une complémentarité dans la distribution verticale des racines secondaires du colza et de la féverole (deux espèces ayant un système racinaire pivotant).

Ces phénomènes seraient amplifiés par la plasticité racinaire des espèces comme l'ont montré Laclau et al. (2013) sur des plantations mixtes de ligneux comme par exemple d'acacia et d'eucalyptus au Brésil. Ainsi, dans les horizons superficiels (jusqu’à un mètre de profondeur), l'acacia semble subir une forte compétition de la part de l'eucalyptus en raison d’une densité racinaire plus faible qu'en plantation monospécifique. Toutefois, l'acacia en culture associée développe un système racinaire plus profond conduisant à une relative séparation de niche entre les deux espèces selon l'axe vertical. Une telle stratification verticale peut également se produire pour les nutriments et être amplifiée dès lors qu'il existe un pool important de la ressource en profondeur. C’est le cas par exemple pour l‘ion nitrate qui migre facilement des horizons superficiels vers les horizons profonds du fait de la lixiviation. Il en va de même pour les nutriments issus de l'altération des roches tels que le potassium ou le phosphore dont l'abondance naturelle peut être plus importante dans les horizons profonds. Là encore, seule l'espèce ayant un enracinement profond aura accès à ce pool de nutriments, ce qui se traduira par une complémentarité spatiale de niche.

La stratification verticale de la ressource s'applique enfin aux parties aériennes et au rayonnement lumineux. Dans ce cas, l'effet d'ombrage exercé par l’espèce la plus haute et/ou présentant la plus grande surface foliaire limite l’énergie lumineuse disponible pour la plus petite des espèces. Cela se traduit le plus souvent par un effet dépressif sur la production de la biomasse de cette dernière, de sorte que l'interaction entre les espèces associées est plutôt de nature négative que positive et on parlera donc de compétition pour la lumière. Cependant, cette interaction peut s'avérer positive, comme par exemple dans les systèmes agroforestiers associant, dans les étages inférieurs, des espèces d'ombre. C’est le cas par exemple de la production des caféiers qui est grandement améliorée sur un plan qualitatif lorsqu'ils sont cultivés en association avec des arbres qui leur procurent de l'ombrage comme des Inga densiflora par exemple (Hergoualc'h et al., 2012). De même, dans le cas de l’association lupin blanc-triticale, du fait de la présence de la céréale et de la compétition exercée pour la lumière, il a été observé que le premier étage de gousses était plus haut que dans le cas d’une culture pure de lupin ce qui facilite la récolte (Pinel B., comm. pers., TERRENA). Enfin, du fait toujours de la compétition pour la lumière entre céréale et légumineuse et du rôle de « tuteur » de la céréale pour le pois, il a été observé que les plantes de pois en association étaient moins sensibles à la verse qu’en culture monospécifique

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de légumineuse grâce à l’effet tuteur de la céréale, ce qui peut permettre dans certains cas de réduire le développement des maladies foliaires du pois en fin de cycle

1.1.3 Différenciation d’accès aux ressources dans le temps Enfin, ce processus de partition de niche peut également se produire dans le temps, en particulier lorsqu'il existe un décalage significatif entre les besoins en eau ou nutriments des espèces végétales associées ou lorsque le développement racinaire et/ou aérien est asynchrone entre les deux espèces du fait de différences phénologiques entre les espèces associées. Un autre exemple illustrant ce phénomène est celui des cultures associées installées en bandes parallèles telles qu'elles sont largement pratiquées en Chine (Zhang et Li, 2003) où les agriculteurs associent fréquemment des espèces d'hiver comme du blé, ou des légumineuses à graines, avec des cultures d'été telles que le maïs par exemple. Dans ce cas les premières sont récoltées bien avant les secondes si bien qu’en fin de cycle les cultures d'été exploitent les ressources situées en bordure des bandes occupées par les cultures de printemps que ces dernières n’ont pas exploitées et bénéficient des résidus de la culture de printemps. Un tel processus peut également se produire lorsque les espèces coexistent avec à l’extrême des systèmes comme celui des parcs à Faidherbia aldiba (syn. Acacia albida) très courants au Sahel (Roupsard et al., 1999 ; http://www.zanbal.net). Ces arbres qui sont des légumineuses ont une phénologie inversée, à savoir qu’ils perdent leurs feuilles à la saison humide, ce qui permet aux cultures annuelles de bénéficier d'un accès privilégié à la ressource en eau (pool 1 de la Figure 1b) et à la lumière à cette période. Ensuite, à la saison sèche, l’acacia Faidherbia albida peut se développer du fait qu’il s’agit d’une espèce phréatophyte ayant un enracinement extrêmement profond (plusieurs dizaines de mètres) faisant d’elle la seule capable d’absorber l'eau située dans le sous-sol (pool 2 de la Figure 1b) alors que les cultures annuelles ne pourraient pas se développer à cette période (Roupsard et al., 1999).

1.2 La facilitation : un accès aux ressources permis par l’effet de l’espèce associée

Le second processus qui contribue de façon majeure à améliorer les performances des peuplements plurispécifiques dans l'utilisation des ressources, relativement aux peuplements monospécifiques, est la facilitation. Celle-ci correspond au cas de figure où une espèce augmente la croissance ou la survie de l’espèce qui lui est associée (Callaway, 1995) à travers l'amélioration des conditions environnementales (température, ombre, disponibilité des ressources, etc...). Les mécanismes de facilitation concernent notamment, l’accroissement de la disponibilité pour les ressources telles que la lumière, l’eau et les nutriments, et ce, soit de façon directe (interactions plante-plante au niveau racinaire), soit de façon indirecte en mettant en jeu des interactions via les communautés microbiennes du sol. Dans ce dernier cas de figure, le rôle des réseaux mycéliens des champignons symbiotiques mycorhiziens est essentiel puisqu’il contribue à augmenter la disponibilité des ressources abiotiques d'une espèce végétale à la fois pour son propre bénéfice mais aussi pour celui des espèces végétales qui composent la communauté (Callaway, 2007) ou le peuplement cultivé (Figure 1d). La plupart des travaux qui ont permis d'évaluer ces flux ont été conduits en pots, et ont, pour certains, permis de mettre en évidence qu'une part significative de l'azote était ainsi transférée via les réseaux mycorhiziens partagés par les racines des espèces associées (e.g. Li et al., 2009). La quantification de ces transferts et, plus encore, l'estimation de la part qui transite via les réseaux mycéliens dans les conditions du champ est cependant très difficile à réaliser. Néanmoins, il semblerait que ces réseaux mycorhiziens seraient plus efficaces dans le cas des couverts pérennes pour lesquels le sol n’est pas travaillé alors que leur effet serait probablement plus limité dans le cas des cultures annuelles. De plus, les transferts d’azote entre plantes semblent plus élevés lorsqu’elles sont connectées par des ectomycorhizes comme pour les ectomycorhizes plantes ligneuses plutôt qu’à des endomycorhizes à arbuscules comme pour les cultures annuelles (Teste et al., 2014).

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1.2.1 Transfert d’azote entre espèces Les mécanismes de facilitation dans des peuplements associant espèces fixatrices et espèces non fixatrices d'azote atmosphérique concernent en premier lieu l'azote à travers le « transfert » d'une partie de l'azote fixé par les légumineuses vers les non légumineuses. Dans les communautés prairiales de graminées-légumineuses, mises en place depuis deux ou trois ans, plusieurs auteurs ont montré que les graminées pouvaient bénéficier de l’azote des légumineuses voisines (Pirhofer-Walzl et al., 2012). Ainsi, Oberson et al. (2013) ont montré que dans une association graminée-trèfle, environ 50% de l’azote des graminées provient du trèfle. Dans ces communautés prairiales, des transferts d’azote ont aussi été mesurés de la graminée vers le trèfle mais ils représentent une quantité transférée moindre vers la graminée (Gylfadottir et al., 2007). Ces transferts pourraient s’expliquer par la production de composés riches en azote et relativement labiles libérés dans le sol (ou "rhizodéposés") par les racines des plantes (Fustec et al., 2010). Ces rhizodépôts sont constitués de NH4+ (Brophy et Reichel, 1989), de NO3- (Wacquant et al., 2005), d’exsudats tels que des acides organiques, des sucres, des protéines, des acides aminés (Paynel et al., 2001), des mucilages (Nguyen, 2003), ainsi que des composés résultant de la dégradation des racines consécutive à la croissance et la progression dans le sol du système racinaire. Une espèce annuelle, au cours de son cycle, peut « rhizodéposer » jusqu’à 15% de son azote total (Fustec et al., 2010) et les flux azotés issus de la rhizodéposition sont environ deux fois plus importants chez les légumineuses que chez les graminées (Jones et al., 2009). Ainsi, jusqu’à 40 à 60% de l’azote des graminées prairiales associées à des légumineuses pérennes peuvent provenir de ces processus de rhizodéposition (Hogh-Jensen et Schjoerring, 2001 ; Louarn et al., 2015). Une partie de ces rhizodépôts peut être utilisée directement par la céréale associée (formes minérales) ou après bio-transformation microbienne (formes organiques), et il est à noter qu’ils sont aussi réutilisés en partie par la plante qui les a elle-même produits.

Le bénéfice des transferts d’azote de la légumineuse vers une culture associée non fixatrice d’azote atmosphérique est plus controversé pour les cultures annuelles du fait que la durée de leur cycle semble trop réduite pour que les rhizodépôts puissent subir une bio-transformation rapide et importante. Des expériences marquages de la légumineuse au 15N, réalisées en conditions contrôlées, ont cependant permis de mettre en évidence des transferts d’azote significatifs du pois à l’orge (Jensen, 1996) ou de la féverole au blé associé (Xiao et al., 2004). Toutefois, d’autres essais, dans lesquels les deux espèces annuelles compagnes ont été marquées, ont montré qu’au cours du cycle la quantité d’azote transférée de l’espèce non fixatrice à la légumineuse s’avère peu différente de la quantité d’azote transférée dans le sens inverse, résultant en un bénéfice négligeable pour l’espèce non-fixatrice. De tels résultats ont été obtenus pour des associations colza-féverole (Jamont et al., 2013), ainsi que pour des associations pois-blé dur dans lesquelles il a aussi été montré au moyen d’analyses microbiologiques que les transferts ont eu lieu préférentiellement sous forme de NH4+ (Brauman et al., 2011). Par ailleurs, ces transferts n’ont lieu que si les racines des deux espèces annuelles sont entremêlées (Jensen, 1996, Xiao et al., 2004 ; Brauman et al., 2011). Dans le cas intermédiaire où une espèce annuelle est associée à une espèce pluriannuelle, cette dernière fournit en théorie plus d’azote qu’elle n’en reçoit du fait qu’une partie des transferts d’azote sont liés à la minéralisation de rhizodépôts et plus largement d’organes végétatifs sénescents apportés au sol depuis l’installation du couvert végétal. Des différences significatives entre espèces interviennent pour cette fourniture du fait qu’elle dépend de la dynamique de croissance des racines et de la composition biochimique des litières et des rhizodépots produits (Louarn et al., 2015). Enfin, le turnover des racines et des nodosités diffère selon l’espèce de légumineuse concernée allant par exemple de quelques mois pour le trèfle blanc à une année pour la luzerne.

1.2.2 Facilitation pour l’acquisition de phosphore La facilitation a été plus récemment étudiée dans le cas du phosphore au champ (Li et al., 2007) mais aussi, et le plus souvent, dans des conditions d'expériences en pots (e.g. Betencourt et al., 2012). A la différence de l'azote, le phosphore disponible ne représente qu'une part infime du phosphore total du

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sol qui est lui-même composé de pools inorganiques et organiques (Hinsinger et al., 2011a). Les racines des végétaux et les communautés microbiennes associées mettent en jeu de multiples mécanismes de mobilisation de ces pools non disponibles. Ces processus résultent in fine en une éventuelle augmentation de la quantité de P disponible (pool 1 de la Figure 1d) dans la rhizosphère (Hinsinger et al., 2011b). Il existe cependant de grandes différences fonctionnelles entre les espèces végétales concernant leur aptitude à mobiliser ces différents pools de phosphore qui peuvent être mises à profit dans la conception de peuplements plurispécifiques (Hinsinger et al., 2011a ; Gaba et al., 2014) afin d’accroître la valorisation des différentes sources de P. Parmi ces mécanismes de mobilisation du phosphore non disponible figurent notamment la production d'exsudats racinaires (exemple de la Figure 1d) ou de métabolites microbiens, tels que le citrate, le malate et l’oxalate pour les plus efficaces dans la mobilisation de P inorganique. Il existe d'importantes disparités entres espèces végétales en terme d'efficience et de capacité d'exsudation de ces carboxylates avec des niveaux plus élevés rapportés chez des légumineuses à graines telles que le lupin blanc et le pois chiche (Jones et al., 2009; Hinsinger et al., 2011b). Outre ces phénomènes d'exsudation de carboxylates, il a été observé une modification du pH de la rhizosphère (e.g. Blossfeld et al., 2013) qui permet d’augmenter la disponibilité du phosphore inorganique via la désorption du phosphate adsorbé (Devau et al., 2010) ou via la dissolution de phosphate précipité sous forme de phosphate de calcium (Hinsinger et Gilkes, 1996). Le processus de facilitation est impliqué dès lors qu'une espèce peu efficiente pour mobiliser le P non disponible est associée à une espèce efficiente, du fait de sa capacité d'exsudation (exemple de la Figure 1d appliqué au cas du phosphore inorganique). De même, une augmentation des activités enzymatiques de type phosphatasique permet d’accroître la disponibilité du phosphore disponible pour la plante associée via l'hydrolyse enzymatique du phosphore organique (Li et al., 2004 ; Inal et al., 2007 ; Wang et al., 2007).

Ces mécanismes sont rarement exclusifs et c’est souvent leur conjonction qui permet d'expliquer de façon globale les processus de facilitation, et ce, de façon réciproque pour les deux espèces. En effet, chaque espèce peut contribuer à l'augmentation de la disponibilité de la ressource en phosphore pour l'espèce associée, comme cela a été mis en évidence par Betencourt et al. (2012) dans le cas d'une association entre blé dur et pois chiche. Ces processus rhizosphériques ont lieu à courte distance à la surface des racines du fait de la faible diffusion des exsudats racinaires comme le citrate et des ions phosphate dans le sol, ce qui impose une grande proximité spatiale entre les racines des espèces associées (Raynaud et al. 2008) afin de maximiser la facilitation. Cela a pu être démontré en pots et au champ, grâce à l’utilisation de barrières plus ou moins imperméables interposées entre les racines des deux espèces associées (Li et al., 2007), et complété au travers d'approches théoriques par modélisation (Raynaud et al., 2008).

1.2.3 Facilitation pour l’absorption d’eau Un processus de facilitation pour l'utilisation de la ressource hydrique a pu également être mis en évidence au travers des mécanismes de redistribution hydraulique en peuplements plurispécifiques. De tels mécanismes sont susceptibles de se produire lorsque les horizons superficiels sont desséchés et qu'une des espèces de la communauté végétale dispose de racines profondes. Dans ce cas, l'eau absorbée par ces dernières dans les horizons profonds encore humides peut être délivrée dans les horizons superficiels la nuit en l'absence de transpiration et ainsi bénéficier aux espèces enracinées superficiellement. On parle alors de remontées hydrauliques ou parfois « d’ascenseur hydraulique » (Caldwell et al., 1998 ; Sekiya et al., 2004) ; cet effet est toutefois difficile à quantifier. Ce phénomène de facilitation hydrique peut éventuellement s'accompagner d'une facilitation dans l'utilisation des nutriments contenus dans l'horizon superficiel (Prieto et al., 2012), du fait que ces éléments minéraux deviennent biodisponibles en raison de la présence d’eau.

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1.2.4 Dans quelles situations la facilitation est-t-elle efficace ? Ces différents types d'interactions positives observées au sein de peuplements plurispécifiques, notamment pérennes, sont particulièrement pertinents dans des contextes d'agroécosystèmes à bas niveaux d'intrants ou en conditions de croissance sub-optimales. En effet, les travaux menés sur le partage de la ressource azotée en cultures associées annuelles céréales-légumineuses ont montré que le bénéfice de cette association était particulièrement perceptible à bas niveaux de disponibilité en azote tandis qu'il s'estompe sous l'effet de la fertilisation azotée (Corre-Hellou et al., 2006 ; Bedoussac et Justes, 2010a ; Bedoussac et al., 2014). De façon similaire, Li et al. (2007) ont montré qu’au champ les processus de facilitation au sein de cultures associées céréale-légumineuse tendaient à s'estomper dans les situations de fertilisation phosphatée élevée. De même, il a été mis en évidence en pots que l'augmentation de la disponibilité en phosphore dans la rhizosphère persistait même dans un sol abondamment fertilisé en phosphore, alors qu’en association l'effet bénéfique en terme de croissance n'était significatif que dans le cas d’un sol n'ayant pas reçu de fertilisation phosphatée (Betencourt et al., 2012). Ces résultats sont en accord avec le cadre théorique de l'écologie et notamment l'hypothèse du "gradient de stress". En effet, celle-ci suppose que les interactions positives (facilitation et complémentarité de niche) tendent à prendre le dessus sur les interactions négatives (compétition) lorsque le stress environnemental est plus élevé (Brooker et al., 2005), et donc lorsque la disponibilité des ressources en eau et/ou nutriments est plus limitante.

Toutefois, des travaux récents menés au champ dans le dispositif expérimental de fertilisation phosphatée de longue durée INRA de Toulouse-Auzeville tendent à invalider cette hypothèse (Journet et al., non publié). En effet, lorsque la disponibilité du phosphore est très limitante, du fait de l'absence de fertilisation depuis plus de 40 ans sur l’essai, la fixation symbiotique de la légumineuse est fortement pénalisée, comme cela a pu être constaté sur féverole dans cet essai. In fine, ces conditions limiteraient probablement l’acidification de la rhizosphère et donc la facilitation pour l’acquisition de phosphore du blé dur. Par conséquent, le bénéfice de l'association céréale-légumineuse en termes de performances agronomiques n’a pas été observé dans ces situations de très faible disponibilité en phosphore (P < 5 mg kg-1 selon la méthode Olsen) dans le cas de l'association blé dur-féverole. A contrario, les performances agronomiques des cultures associées ont été supérieures à celles des cultures monospécifiques dans des conditions de disponibilité correcte ou élevée en phosphore du sol (cas d'une association blé dur-féverole de printemps) du fait de la complémentarité de niche pour l’azote (expérimentation avec une faible disponibilité en azote). Ce résultat tend donc à suggérer que la complémentarité de niche pour l’azote prévaut par rapport à celle vis-à-vis du phosphore pour déterminer le niveau de performance des cultures associées par rapport à leurs cultures monospécifiques respectives. Il conviendrait cependant de tester d‘autres associations pour généraliser ce constat ; cela indique également qu’il est souhaitable d’analyser conjointement les états de nutrition N et P pour interpréter correctement le fonctionnement de l’association.

2. Compétition et complémentarité pour l’absorption de la lumière au sein des cultures associées dont les systèmes agro-forestiers

2.1 Processus et interactions dans le couvert

La lumière est une ressource aux caractéristiques singulières pour les végétaux du fait qu’elle est non épuisable, non stockable et disponible de façon très inégale au sein d’un couvert plurispécifique. Dès lors, le rayonnement lumineux doit être capté et utilisé instantanément pour maximiser la photosynthèse et, par voie de conséquence, la production de biomasse, sans quoi cette ressource est définitivement « perdue ». Transmise sur le haut de la canopée par le soleil, l’énergie lumineuse est d’abord captée par les plantes les plus hautes avant d’atteindre les plantes plus basses et les organes situés dans les strates inférieures. La lumière est d’abord une source d’énergie quantitative pour la production d’énergie chimique lors de la photosynthèse, mais également pour la vaporisation de l’eau lors de la

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transpiration. Cette ressource est également qualitative du fait de sa composition spectrale en lien avec le fait que les plantes disposent de photorécepteurs sensibles à l’altération de certaines longueurs d’ondes spécifiques (rouge clair vs rouge sombre notamment). Or cette composition induit des modifications dans croissance et dans l’architecture des plantes si bien que la qualité du rayonnement renseigne indirectement sur la présence de plantes voisines à travers la modification de la signature spectrale. A cela s’ajoute la modification de la quantité d’énergie lumineuse reçue et la combinaison de ces deux éléments permet, dans une certaine mesure, aux plantes d’anticiper la compétition pour la ressource lumineuse par des réponses morphogénétiques adaptatives.

La plupart des auteurs s’accordent sur le fait que le partage du rayonnement dans les associations est en premier lieu influencé par les compétitions verticales (Spitters et Aerts, 1983 ; Caldwell, 1987 ; Cudney et al., 1991 ; Cenpukdee et Fukai, 1992a, b ; Barillot et al., 2011 ; Louarn et al., 2012) et en second lieu par l’orientation des rangs et le coefficient d’extinction des feuilles de chaque espèce. Les principaux éléments déterminant le partage de rayonnement sont la hauteur relative des plantes de chaque espèce, leurs surfaces foliaires (IF) et l’efficacité de ces surfaces à intercepter la lumière dépendant de l’inclinaison moyenne des feuilles et de la distribution verticale de la densité foliaire. Leur importance relative dans l’acquisition du rayonnement dépend donc du type de couvert, et notamment du degré d’ouverture de la canopée (e.g. la hauteur relative devient plus importante dans les couverts fermés) et du dispositif de semis/plantation (rangs, bandes…). De façon générale, les espèces avec une expansion rapide de surface foliaire en début de cycle sont avantagées par rapport à d’autres moins « agressives ». De même, les espèces parvenant à produire une proportion importante de leur surface foliaire dans les strates supérieures du couvert ont un avantage compétitif important lorsque le couvert se ferme. En second ordre, pour une même surface foliaire, les espèces planophiles tendent à être plus efficaces pour capter la lumière que les espèces à feuilles érigées (types céréales/graminées).

Les effets de ces interactions dynamiques sur la croissance et la production des différentes composantes d’une association restent difficiles à prédire. Toutefois, les conditions pour qu’une complémentarité s’installe en terme d’interception ou d’absorption globale de la lumière permettant d’accroitre la productivité globale des associations par rapport à leurs cultures monospécifiques respectives commencent à être mieux comprises. Une analyse énergétique de l’élaboration du rendement permet de révéler que les avantages d'une association sont à attendre dans les phases où une culture monospécifique ne parvient pas à capturer complètement le rayonnement incident (en début ou fin de cycle par exemple).

La complémentarité des espèces au niveau de l’utilisation de l’énergie lumineuse est particulièrement efficace en situation de culture longue comme cela a été mis en évidence dans le cas des associations blé dur – pois d’hiver (Bedoussac et Justes, 2010b) où le mélange d’espèces peut permettre une meilleure acquisition en hiver et au début du printemps par rapport au pois pur et en fin de cycle par rapport à un blé dur non fertilisé. Dans ce cas, la complémentarité entre les espèces liée à des dynamiques de croissance asynchrones s’est traduite par une meilleure valorisation de l’énergie lumineuse sur l’ensemble du cycle comparativement aux cultures monospécifiques (Figure 2a). Dans ce cas précis, on observe que le pois d’hiver se développe plus tardivement que le blé dur, si bien qu’en début de croissance, la culture associée intercepte légèrement moins de rayonnement que le blé seul mais plus que le pois seul, et inversement en fin de cycle. Par conséquent, sur l’ensemble du cycle, la quantité de PAR (rayonnement photosynthétiquement actif) absorbée par l’association est supérieure à celle des cultures monospécifiques et il en va donc de même pour la production de biomasse. De la même façon, dans le cas des associations prairiales, il est possible de réduire le rayonnement perdu au sol ou intercepté par les adventices en cas de complémentarité temporelle dans l’interception de rayonnement des espèces cultivées en mélange (Davies, 2001).

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Figure 2 : Fraction de PAR (rayonnement photosynthétiquement actif) absorbé au cours du temps dans une culture associée blé dur-pois et dans les cultures pures respectives sans fertilisation azotée (gauche) et avec 140 kg N/ha sauf pois pur (droite). Figure d’après Bedoussac (2009).

La complémentarité de ces deux espèces pour l’utilisation de la lumière s’explique également par des architectures aériennes complémentaires qui permettent à l’association de mieux valoriser la ressource lumineuse dans l’espace à la fois verticalement dans la canopée et horizontalement. En effet, alors que l’interception de la lumière par le blé dur se fait essentiellement sur un gradient plutôt vertical du fait de la forme et du port de ses feuilles, celle du pois d’hiver et de la féverole d’hiver se fait également sur un axe horizontal en raison du port moins érigé de leurs feuilles. A ces éléments s’ajoutent les différences de hauteur entre les couverts, à savoir que le plus souvent dans ces conditions expérimentales et avec les variétés testées, le blé dur était plus haut que le pois d’hiver, alors que la féverole d’hiver était plus haute que le blé dur (Bedoussac et Justes, 2010b).

Dès lors, l’optimisation de l’énergie lumineuse par une meilleure captation du rayonnement photosynthétiquement actif tout au long de la croissance des espèces peut être améliorée par l’utilisation d’espèces ayant des cycles de croissance différenciés et des architectures aériennes complémentaires. Par ailleurs, le statut azoté, qui est un indicateur du niveau de satisfaction de la demande en azote de la culture (Lemaire et Gastal, 1997), constitue un facteur déterminant de la croissance foliaire (Gastal et Lemaire, 1988). En effet, la disponibilité en azote influerait sur le partage du rayonnement en modifiant la proportion de chaque espèce dans la surface foliaire totale de l’association. Gastal et Bélanger (1993) ont également montré que l’offre en azote modifiait davantage la surface foliaire que l’efficience de conversion du rayonnement. Par ailleurs, en utilisant un modèle de partition du rayonnement pour des associations maïs–pois, Tsubo et Walker (2002) ont mis en évidence que l’efficience d’utilisation du rayonnement (RUE) de l’espèce dominée était supérieure à celle de l’espèce dominante. Un ombrage partiel pourrait aussi réduire les stress hydriques (Allen et al., 1977) et améliorer la photosynthèse et l’efficience d’utilisation du rayonnement (RUE) de l’espèce dominée (Marshall et Willey, 1983 ; Stirling et al., 1990) comparativement à l’espèce « pure ».

La structure du couvert, et la compétition pour la lumière qui en découle, évoluent en permanence au cours d’un cycle de culture. Contrairement aux cultures pures, la mise en place de la surface foliaire et la croissance en hauteur des plantes cultivées en association ne s’expriment pas comme de simples fonctions du temps. En effet, la compétition pour la lumière induit des modifications et des ajustements permanents de la morphogenèse de chaque espèce, à la fois liés aux effets trophiques et signalétiques du rayonnement. Les plantes soumises à une plus forte compétition présentent une série de modifications caractéristiques d’un syndrome d’évitement de l’ombre. Les phénomènes d’ombrage se traduiraient au niveau des organes photosynthétiques par des feuilles plus fines, une diminution du poids spécifique des feuilles et une augmentation de l’indice foliaire spécifique (Crookston et al., 1975 ;

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Sivakumar et Virmani, 1980 ; Stirling et al., 1990 ; Watiki et al., 1993 ; Tsubo et al., 2001 ; Dong et al., 2008). Enfin, Hang et al. (1984) ou encore Stirling et al. (1990) ont également mis en évidence que la hauteur des plantes était accrue en réponse à la compétition pour la lumière alors que la biomasse par plante était réduite. A l’inverse, certaines espèces peuvent se trouver à des niveaux de compétition plus faible en association qu’en culture pure (e.g. cas de la luzerne associée à des graminées fourragères ; Baldissera et al., 2014).

2.2 Les choix techniques pour améliorer la captation de la lumière

Certains choix techniques sur la gestion du couvert permettent de moduler la valorisation de la lumière afin d’en optimiser l’interception tout en prévenant une compétition excessive pouvant conduire à la disparition ou la moindre production de l’une ou l’autre des espèces associées. Parmi ces éléments, nous pouvons mettre en exergue :

• Le choix d’espèces et de variétés cohérent pour les caractères évoqués précédemment (vitesse d’implantation, surface foliaire maximale, hauteur… Davies, 2001) et/ou ayant des périodes de croissance décalées ;

• Le mode d’implantation : les couverts homogènes horizontalement (semis mélangé sur le rang) défavorisent les espèces ayant une moins bonne aptitude à la compétition pour la lumière contrairement aux semis de chaque espèce sur des zones distinctes (e.g. culture en bandes, haies) (Chamblee et Collins, 1988 ; Monzeglio et Stoll, 2008) ;

• La gestion des trouées (élagage en agroforestrie) et la défoliation (espèces fourragères pérennes) favorisent temporairement les espèces les plus dominées. Toutefois, la compétition pour la lumière réduit la mise en réserve (amidon et protéines de réserves chez la luzerne ; sucres solubles chez les graminées) et donc la capacité de redémarrage des espèces dominées après défoliation si bien que cette technique ne constitue pas une remise à zéro de la compétition (Avice, 1996).

Enfin, la gestion du partage de la lumière ne peut être raisonnée indépendamment des autres facteurs du milieu qui affectent l’expansion foliaire et la croissance (température, ressources du sol, stress abiotiques et biotiques) comme nous l’avons montré pour l’azote dans la Figure 2. Dans ce cas précis qui concerne les associations blé dur-pois d’hiver (Bedoussac et Justes, 2010a), la complémentarité entre les espèces pour l’interception de la lumière dépend de la disponibilité en azote. En effet, la diminution de la production du pois d’hiver par l’apport d’azote en quantité importante et/ou de manière précoce réduit d’autant plus la performance de l’association pour l’utilisation de la lumière puisque cela tend à rapprocher l’association du fonctionnement d’une culture monospécifique de blé dur (Figure 2b). Toutefois, il faut souligner que l’apport d’azote a permis d’accroitre l’interception du rayonnement lumineux par l’association par rapport à la situation non fertilisée, mais dans ce cas, l’association reste néanmoins moins performante qu’un blé « pur » fertilisé. Ce résultat confirme là encore l’intérêt des cultures associées dans les situations à faible disponibilité en azote. In fine, un mélange homogène entre les deux espèces permettrait d’optimiser l’utilisation de l’énergie lumineuse à la fois dans le temps et dans l’espace augmentant de ce fait la performance de ces systèmes comparativement aux couverts monospécifiques. Un travail complémentaire doit être entrepris afin d’identifier les espèces et variétés associer de manière privilégiée, leurs densités respectives, les structures de couvert à implanter, et les modalités de fertilisation azotée permettant, d’une part, d’optimiser l’usage de cette ressource et, d’autre part, de lutter efficacement contre les adventices en réduisant la quantité de lumière à leur disposition. En conclusion, en association, l’interception du rayonnement dépend à la fois des caractéristiques morphogénétiques de chaque espèce, de la structure spatiale du peuplement ainsi que de la réponse de chaque espèce au statut azoté et plus généralement aux compétitions inter- et intraspécifiques.

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3. L’azote, une ressource clé déterminant les performances des cultures associées : l’exemple des associations annuelles céréale - légimuneuse

3.1 Compétitions et complémentarités de niche pour l’azote

Wilson (1988) a pu montrer, à partir d’expérimentations utilisant des techniques de compartimentation des systèmes racinaire et/ou aérien, que dans de nombreux cas la compétition racinaire avait un effet plus important que la compétition aérienne. Toutefois, les compétitions pour les ressources du sol et en particulier pour l’azote ne peuvent pas être étudiées séparément des compétitions pour la lumière. En effet, l’offre en azote du sol, son acquisition par les plantes et leur croissance aérienne sont en permanente interaction, comme cela a été montré par exemple sur des associations céréale-légumineuse de façon dynamique tout au long du cycle (Corre-Hellou et al., 2006). A cela s’ajoute le fait que l’accès à l’azote dépend fortement des conditions du milieu et en particulier de l'accès à l'eau.

Or, la mise en place des nodosités et de leur activité se fait progressivement chez les légumineuses (Tricot et al., 1997 ; Voisin et al., 2002). Ainsi, en début de cycle, céréale et légumineuse sont en compétition directe pour l’azote minéral du sol à travers leurs systèmes racinaires à une période où il s’agit de la seule source d’azote disponible. Par conséquent, en début de croissance, le partage de l’azote minéral du sol serait déterminé par des écarts d’enracinement et de demande entre espèces (Corre-Hellou et al., 2007). Or, céréales et légumineuses auraient des comportements contrastés du point de vue de la vitesse de progression de leur front racinaire (Hamblin et Tennant, 1987 ; Corre-Hellou et al., 2005 ) mais également du point de vue de leur demande en azote en début du cycle. En particulier la vitesse de croissance de la céréale est souvent plus rapide en début de cycle (Bellostas et al., 2003 ; Andersen et al., 2004). Ainsi, la céréale est plus compétitive que le pois pour prélever l’azote du sol en raison de cette progression racinaire plus rapide et plus dense et surtout en raison d’une demande en azote en début de cycle plus forte (Corre-Hellou et al., 2007). Cela donnerait à la céréale un avantage dans la compétition précoce pour l’azote du sol, se traduisant par une diminution rapide de la quantité d’azote minéral disponible dans l’horizon superficiel (zone de la fixation symbiotique). De ce fait, l’activité fixatrice de la légumineuse est augmentée, comparativement à une culture monospécifique, afin de répondre à ses besoins en azote. Ainsi le pourcentage de l’azote acquis par le pois issu de la fixation symbiotique (%Ndfa) en association est plus élevé que lorsqu’il est cultivé en culture monospécifique (Corre-Hellou et al., 2006 ; Naudin et al., 2010 ; Bedoussac et Justes, 2010b) (Figure 3).

Figure 3 : Comparaison du taux de fixation symbiotique du pois entre culture associée et culture monospécifique (Corre-Hellou, 2012).

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3.2 Comment la production est-elle améliorée en association ?

Du fait d’un taux de fixation symbiotique élevé, la quantité d’azote minéral prélevée dans le sol par la légumineuse est faible, ce qui se traduit pour la céréale en association par une disponibilité en azote plus ou moins identique à celle en culture monospécifique (Bedoussac et Justes, 2010a,b). Or, si parallèlement le rendement de la céréale en association est inférieur à celui de la culture pure comme cela est quasi systématiquement le cas, alors la disponibilité en azote par plante, épi et grain de céréale est supérieure en association par rapport à la culture pure. In fine, cette plus grande quantité d’azote remobilisable dans les grains (Ofori et Stern, 1987 ; Jensen, 1996) a pour conséquence une amélioration de la teneur en protéines de la céréale, par rapport à une céréale conduite dans les mêmes conditions de fertilisation azotée. A ce processus aujourd’hui largement documenté pourrait s’ajouter le fait d’un meilleur ajustement dynamique de la disponibilité en azote. En effet, la demande en azote d’une céréale n’est pas linéaire mais dépend de son stade de développement et de son niveau de production et la culture en association pourrait modifier cet équilibre. Toutefois, seul un écart de disponibilité en azote à un stade où les besoins de la culture sont forts permet de réduire la carence azotée de la céréale comparativement à la culture pure et donc d’accroître sa qualité et sa production relative. Ainsi, tandis que les cultures associées permettent un meilleur ajustement entre fourniture et demande en azote, il n’en reste pas moins que dans le cas de disponibilités en azote non limitantes, cet effet est faible voire nul, soulignant l’intérêt des associations dans les systèmes à faible disponibilité en azote.

Les gains de rendement observés dans les associations céréale-légumineuse sont souvent attribués en premier lieu à la complémentarité des deux espèces dans l’utilisation des ressources azotées, sans pour autant négliger les autres formes de complémentarité et de facilitation évoqués précédemment. Le LER (Land Equivalent Ratio) est un indicateur largement utilisé pour évaluer la performance relative des cultures associées par rapport aux cultures pures. Lorsque le LER peut être calculé à partir de la quantité d’N accumulé dans les parties aériennes, il a été observé des valeurs pouvant atteindre 1,5 pour des situations de faible disponibilité en N minéral dans le cas d’associations orge-pois de printemps et blé tendre-pois d’hiver (Corre-Hellou et al., 2006) (Figure 4). Cela signifie que, dans ces conditions, l’acquisition des ressources en azote de l’association est accrue de l’ordre de 50% en comparaison avec les cultures monospécifiques. De façon comparable, Bedoussac et Justes (2010a) ont montré dans le cas d’associations blé dur-pois que les LER calculés sur la base des rendements étaient d’autant plus élevés que la disponibilité en azote minéral était faible. Cette meilleure utilisation globale de l’azote minéral contribue aussi à la réduction potentielle du risque de lixiviation de nitrate par rapport à des peuplements monospécifiques de légumineuses, et limite également la disponibilité en azote pour la croissance des adventices (Bedoussac et al., 2014 ; Corre-Hellou et al., 2011 ; Corre-Hellou et al., 2014).

Figure 4 : Effet de la disponibilité en azote minéral du sol sur la performance global de l’acquisition de l’azote (LER N accumulé) en association céréale-pois (Corre-Hellou et al., 2006)

y = 1,004 x-0,14

R2 = 0,86

y = 0,7153x-0,24

R2 = 0,68

0,6

0,8

1,0

1,2

1,4

1,6

1,8

0 0,2 0,4 0,6

printemps

hiver

LER

N a

ccum

ulé

Disponibilité en N minéral (g par plante de céréale)

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E. Justes et al.

16 Innovations Agronomiques 40 (2014), 1-24

Dans le cas des associations pérennes, outre la complémentarité pour l’azote qui est également dominante lors de l’année d’implantation, des transferts nets d’azote significatifs se mettent en place au cours du temps, de façon plus ou moins efficace selon les espèces de légumineuses (Louarn et al., 2015). La dynamique de l’azote est ainsi très différente dans des associations à base de trèfle blanc par rapport à des associations avec de la luzerne qui, bien que fixant davantage d’azote atmosphérique, génèrent des transferts d’azote vers l’espèce associée moins rapides et en quantité moindre. Ceci s’explique en partie par des stratégies de survie et d’enracinement différentes (développement d’un pivot à durée de vie longue chez la luzerne par rapport aux racines nodales fines chez le trèfle) et à des qualités de litières organiques plus favorables à une minéralisation rapide chez le trèfle.

3.3 Conditions favorisant ou non la fixation symbiotique de la légumineuse et donc la complémentarité de niche

En cultures pures, la fixation symbiotique est très affectée par la disponibilité en nitrate du milieu (Voisin et al., 2002). En cultures associées, des forts pourcentages de fixation sont observés même quand le milieu est riche en N puisque la céréale tend à réduire le pool de nitrate du sol. Au-delà de leur capacité à fixer l’azote atmosphérique, ce qui est intéressant chez les légumineuses, c’est leur capacité à basculer d’une voie à l’autre en fonction des conditions du milieu. Les conditions de réversibilité ont été étudiées dans le cadre d’associations blé-pois en fonction de différentes dynamiques de disponibilité en nitrate au cours du cycle.

Des expérimentations de plein champ (Naudin et al., 2010), comme des expérimentations en conditions contrôlées (Naudin et al., 2011), ont démontré que la fixation symbiotique du pois était un processus plus ou moins réversible. En effet, après une courte phase d'inhibition liée à la présence de nitrate, la fixation symbiotique peut reprendre son activité après quelques semaines, mais uniquement lorsque l’exposition au nitrate intervient avant le stade de début du remplissage des grains. Par contre, la fonction de fixation, caractérisée par l'activité spécifique des nodosités, est diminuée quel que soit le stade d'exposition. De façon plus détaillée, des expérimentations conduites en serre ont permis de mettre en évidence que l’effet inhibiteur du nitrate sur la structure et la fonction des nodosités dépendait des dates d’exposition. Ainsi, une exposition en tout début de cycle pénalise la croissance des nodosités et ralentit leur vitesse d'apparition. A contrario, une exposition pendant les stades reproducteurs (floraison et remplissage du grain) ne pénalise que la croissance des nodosités du fait que ces dernières sont déjà en place car issues d’une vague de nodulation antérieure.

Par ailleurs, dans le cas d'une exposition aux ions nitrate en tout début de cycle ou pendant la floraison du pois, on observe l'apparition d'une deuxième vague de nodosités contrairement à des pois n’ayant jamais été exposés au nitrate, à des pois exposés pendant le remplissage du grain ou encore à des pois cultivés sous ombrage après une exposition précoce au nitrate (Naudin et al., 2011). Ainsi, contrairement aux observations faites en plein champ par Tricot (1993) ou Voisin et al. (2002), le pois semble capable de fabriquer de nouvelles nodosités après l’initiation de la floraison. Toutefois, cette deuxième vague ne dispose que de peu de carbone pour assurer la croissance des nodosités. Or, la réversibilité de la fixation symbiotique après une courte exposition aux ions nitrate est fonction du niveau de nutrition carbonée des nodosités. En effet, l’allocation carbonée aux nodosités décroît tout au long du cycle du pois et les parties aériennes deviennent prioritaires pendant la phase de remplissage des grains (Voisin et al., 2003). Ainsi, la réversibilité du fonctionnement de l’appareil fixateur n’est observée que dans les cas où le ratio nodosités/racines nodulées augmente à nouveau après l’exposition aux ions nitrate (Naudin et al., 2011). Par ailleurs comme le délai entre l’apparition de nodosités et la mise en place de leur activité fixatrice peut être long, cette deuxième vague de nodulation n’est probablement pas efficace avant la maturité physiologique de la légumineuse. Par conséquent, malgré cette seconde vague de nodulation, la quantité d’azote accumulée par des plantes

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exposées aux ions nitrate avant la floraison et cultivés sous lumière naturelle est comparable à celui des plantes n’ayant jamais été exposés à l’azote nitrique.

La capacité des légumineuses à exploiter les deux voies de nutrition azotée en fonction de la disponibilité en azote minéral du sol permet donc d'accroître l’efficience d'utilisation de l'azote, et ce en particulier dans le cas d’apports tardifs, ce qui a été confirmé par différents auteurs (Jensen, 1986 ; Bedoussac et Justes, 2010a ; Naudin et al., 2010). Par ailleurs, cette optimisation de l’utilisation de l’azote minéral du sol diminue les risques de lixiviation nitrique comparativement à une céréale sur-fertilisée ou à une légumineuse monospécifique non suivies par l'implantation de cultures intermédiaires pièges à nitrate par exemple, capables de capter le reliquat de nitrate post-récolte. Toutefois, de nombreux travaux tendent à montrer que le reliquat post-récolte d’une association est comparable à celui d’une céréale pure ayant reçu la même fertilisation et inférieur à celui d’une légumineuse pure non fertilisée (e.g. Bedoussac, 2009). Enfin, Naudin et al. (2010) ont montré que les reliquats d’azote minéral du sol observés à la récolte d’une association ne variaient pas significativement en fonction de sa conduite azotée, confirmant la capacité d’ajustement de ces systèmes à des niveaux de disponibilité en azote contrastés.

Conclusion Bien que traduisant un effet négatif d’une espèce sur l’autre, les phénomènes de compétition interspécifique peuvent induire un gain de rendement lorsque les espèces associées se complètent et utilisent plus efficacement les ressources que les cultures monospécifiques correspondantes (Willey, 1979ab). Cela se produit notamment lorsque les composantes ne sont pas en forte compétition pour les mêmes ressources (dans le temps, l’espace ou la forme chimique), ce qui se traduit par des compétitions interspécifiques inférieures aux compétitions intraspécifiques.

Par exemple, dans le cas des associations céréale - légumineuse à graines, les deux espèces sont en compétition pour l’azote du sol mais celle-ci peut s’avérer négligeable. En effet, les légumineuses ont la capacité d’utiliser l’azote de l’air pour lequel elles ne sont pas en compétition avec la céréale, ce qui leur permet de compenser la compétition exercée par la céréale pour l’azote minéral du sol, à ceci près que la fixation symbiotique a un certain coût énergétique. Les avantages des associations sont donc souvent considérés comme étant positivement corrélés avec le niveau de complémentarité entre les deux espèces associées pour l’utilisation des ressources en azote (Ofori et Stern, 1987 ; Snaydon et Satorre, 1989 ; Jensen, 1996 ; Hauggaard-Nielsen et al., 2001a,b). Ceci confirme donc l’intérêt de ces systèmes dans les situations à bas niveaux d’intrants azotés dans lesquels l’azote est une ressource limitante mais également pour les cultures ayant des besoins importants en azote comme le blé dur par exemple.

Par ailleurs, dans les situations de faible disponibilité en azote, les associations permettent également d'améliorer la teneur en protéines de la céréale. La principale raison est que la disponibilité en azote minéral par plante de céréale est plus importante et aussi mieux ajustée aux besoins de la céréale, du fait, d’une part, d’un rendement moindre de la céréale en association par rapport à sa culture pure, et d’autre part, de la faible utilisation de l’azote minéral du sol par la légumineuse compensée par un taux de fixation accru. Ainsi, dans le cas des cultures annuelles, contrairement aux systèmes incluant au moins une espèce pérenne de légumineuse, ce n’est pas l’effet des transferts d’azote entre la légumineuse et la céréale qui peut expliquer l’amélioration des performances, car ces transferts semblent faibles et existent aussi dans l’autre sens. C’est donc bien l’équilibre entre la fixation symbiotique et l’absorption d’azote minéral du sol par les deux espèces du fait qu’elles utilisent des sources d’azote différentes qui explique la performance de ce système (Fujita et al., 1992 ; Tofinga et al., 1993 ; Hauggaard-Nielsen et al., 2001a,b ; Corre-Hellou 2005 ; Corre-Hellou et al., 2006 ; Hauggaard-Nielsen et al., 2003 ; Corre-Hellou et Crozat 2004, Naudin et al., 2010), et le fait que cette complémentarité de niche s’exprime d’autant plus que l’on est en situation de faible disponibilité en

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azote (Bedoussac et Justes, 2010a), ce qui est particulièrement efficace en situation d’agriculture biologique (Bedoussac et al., 2014). Dans le cas des pérennes en revanche, des transferts d’azote significatifs entre légumineuses et graminées se mettent progressivement en place relativement à la durée du couvert et accentuent le simple effet des complémentarités de niche (Louarn et al. 2015).

Par ailleurs, des processus similaires sont en jeu pour l’utilisation de la lumière (Berntsen et al., 2004 ; Jahansooz et al., 2007) dans le cas où les espèces associées présentent des architectures aériennes ou des dynamiques de croissance différentes et complémentaires (Trenbath 1986 ; Tsubo et al., 2001 ; Tsubo et Walker, 2004 ; Poggio 2005), à ceci près qu’il n’existe qu’une source de lumière disponible, contrairement à l’azote. Ces différences et complémentarités interspécifiques, lorsqu’elles sont optimisées par un choix adapté des espèces et variétés, permettent en particulier une meilleure occupation dynamique de l’espace et donc une augmentation de l’interception du rayonnement solaire incident tout au long de la croissance de l’association.

Or ces deux processus, que sont l’acquisition de l’azote et l’interception du rayonnement, sont intimement liés sous la dépendance des dynamiques de croissance des systèmes aérien et racinaire (Dreccer et al., 2000, Naudin, 2009). Cela pourrait donc expliquer à la fois le gain de rendement et la réduction des adventices souvent observés (Vasilakoglou et al., 2005 ; Banik et al., 2006). Enfin, au-delà des compétitions qui interviennent presque toujours dans les associations, les phénomènes de facilitation pour les ressources abiotiques peuvent également jouer un rôle important et induire des gains de rendement (Vandermeer, 1989 ; Hauggaard-Nielsen et Jensen, 2005). Ainsi, le cas le plus illustratif est l’augmentation de la disponibilité du phosphore pour la céréale permise par l'acidification de la rhizosphère consécutive à la fixation symbiotique de la légumineuse (Hinsinger, 2001; Hinsinger et al., 2011a), mais cela se produit à condition de ne pas se trouver en condition de trop faible disponibilité en phosphore qui limiterait trop, dans un premier temps, la fixation symbiotique et donc l’expression de la facilitation (Betencourt et al., 2012). Les mécanismes de facilitation peuvent toutefois prendre des formes très variées aussi bien pour les ressources abiotiques comme explicité dans cette synthèse, que pour les interactions biotiques conduisant à la réduction des attaques de maladies (Trenbath, 1993) ou des adventices (Hauggaard-Nielsen et al., 2001b ; Corre-Hellou et al., 2011 ; Bedoussac et al., 2014), processus explicités dans la synthèse suivante (Hellou et al., 2014).

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