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JUST
ICE P O U R L E S S AVOYARDS
PACTA SUNT SERVANDA
PACTA SUNT SERVANDALes conventions doivent ĂȘtre respectĂ©es
ĂditĂ© par les barreaux dâAlbertville, Annecy, Bonneville, ChambĂ©ry et Thonon-les-BainsJanvier 2018Recherches, conception, rĂ©daction : ComitĂ© de vigiesConception Ă©ditoriale et introduction : AjusteCrĂ©ation et mise en page : MarksonImpression en 200 exemplaires : Photoplan
p. 3
Introduction
Une position et des principes fermesĂ lâoccasion des discussions et des con idences recueil-lies dans le cadre de la rĂ©forme de lâorganisation territo-riale de la justice lancĂ©e par Madame Belloubet, Garde des Sceaux en octobre 2017, une inquiĂ©tude forte est nĂ©e sur le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry de plein exercice comme sur lâavenir dâautres Cours dâAppel et juri-dictions en France.
Lâensemble des barreaux de Savoie et Haute-Savoie est attachĂ© au maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry en raison de la mission quâils assignent Ă la justice : dĂ©fendre les droits des citoyens et leur garantir dâĂȘtre une justice rĂ©ellement accessible. Cela passe par une modernisation nĂ©cessaire de la justice et des procĂ©dures, mais Ă©gale-ment par un maillage territorial qui nâexclue personne et ne dresse pas, sous couvert de simpli ication ou de « numĂ©-risation », dâobstacles supplĂ©mentaires aux justiciables pour faire valoir leurs droits.
Une recherche historique et juridiqueAu-delĂ de cette pĂ©tition de principe, les cinq barreaux font valoir un argument historique et juridique Ă ce maintien. Ils jugent que le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry est garanti par le traitĂ© dâAnnexion de la Savoie de 1860.
Le prĂ©sent ouvrage est une version condensĂ©e du rĂ©sul-tat des recherches menĂ©es par dâĂ©minents juristes pas-sionnĂ©s par lâhistoire de la Savoie et particuliĂšrement im-pliquĂ©s dans la dĂ©fense de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry. Ces rĂ©sultats ont Ă©tĂ© transmis Ă lâĂlysĂ©e, Ă Matignon et Ă la Chancellerie le 10 janvier 2018.
Toutes ces recherches convergent vers une conclusion qui sâimpose : lâexistence de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry de plein exercice, fille de la Cour ImpĂ©riale, est directement liĂ©e au traitĂ© dâAnnexion de la Savoie Ă la France en 1860 et aux engagements pris Ă cette occasion par la France.
DĂ©cisions, piĂšces et constitution de 1958 Ă lâappuiCe dĂ©bat nâest pas nouveau. Par quatre fois au cours de lâhistoire, alors que des rĂ©formes envisageaient la dispari-tion de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry en 1870, 1876, 1882 et 1924, le gouvernement français rejeta cette hypothĂšse en arguant des engagements pris vis-Ă -vis de la dĂ©puta-tion de Savoie.
Outre cet argument, la prĂ©sente recherche confirme par de nombreux tĂ©moignages et piĂšces historiques dĂ»ment rĂ©pertoriĂ©es, dâune part le droit fait par lâEmpereur Ă la demande de la Savoie de conserver son organisation ju-diciaire, dâautre part, le caractĂšre de validitĂ© permanente de ce traitĂ© international dont la remise en vigueur a Ă©tĂ© confirmĂ©e en 1948 entre la France et lâItalie.
Le Conseil Constitutionnel ayant statuĂ© sur la supĂ©rioritĂ© des traitĂ©s sur les lois, sous condition des engagements rĂ©ciproques tenus, et le Conseil dâĂtat ayant toujours veil-lĂ© Ă ce que les projets de loi respectent les engagements internationaux souscrits par la France, la conclusion des juristes impliquĂ©s dans cette recherche est bien lâobligation faite Ă la France de conserver la Cour dâAppel de ChambĂ©ry de plein exercice.
p. 4
Recherches concernant Les actes préparatoires ayant conduit à la création de La Cour Impériale de Chambéry suite au traité du 24 mars 1860.
Les dĂ©cisions du Conseil Constitutionnel et du Conseil dâĂtat sur lâautoritĂ© supĂ©rieure des traitĂ©s Ă celle des lois.
Ce document est produit sous lâautoritĂ© des cinq BĂątonniers des Pays de Savoie Mont-Blanc :
Catherine ANXIONNAZ du Barreau de CHAMBĂRY, rĂ©fĂ©rente
Jean-NoĂ«l CHEVASSUS du Barreau dâALBERTVILLE
Myriam QUĂRĂ du Barreau dâANNECY
Isabelle BOGGIO du Barreau de BONNEVILLE
Laurence JOLY du Barreau de THONON-LES-BAINS
Chambéry, le 10 Janvier 2018
p. 5
p. 6
Madame la Garde des Sceaux a lancé le 5 octobre 2017 cinq grands chantiers pour la justice :
Transformation numérique
Simplification de la procédure civile
Simplification de la procédure pénale
Efficacité de la peine
Organisation judiciaire
Ce dernier point fait lâobjet dâune interrogation sur la situation des Cours dâAppel et des juridictions.
(Cf. Libération 6 octobre 2017)
Réponse Ministérielle de la chancellerie sur la réforme de la carte judiciaire.
Question de Mme Isabelle RAUCH au JO le 19.09.2017 p. 4425
La RĂ©publique en Marche â Moselle
Réponse publiée au JO le 21.11.2017 p. 5754 (extrait)
« Cette rĂ©forme se fera en conservant le maillage ac-tuel des juridictions et en maintenant les implantations judiciaires actuelles. Ces adaptations ne se traduiront par la fermeture dâaucun lieu de justice, et elles rĂ©sulte-ront de la concertation engagĂ©e. »
Le Dauphiné Libéré, mardi 24 octobre 2017. (extrait)
Grenoble â La Ministre de la Justice et Garde des Sceaux Ă©tait en visite, hier, au Palais de Justice de Grenoble.
« Il nây aura aucune fermeture dâaucun lieu de justice. »
« Il est certain que si lâon parle de numĂ©risation et de simpli-fication des procĂ©dures, tout cela aura des incidences sur la maniĂšre dont nous travaillons et, ces incidences nous devons en mesurer lâimpact en matiĂšre de collĂ©gialitĂ© dans le travail des magistrats, de rapiditĂ© de la rĂ©ponse, de proxi-mitĂ© ou de spĂ©cialisation.
Câest cette rĂ©flexion collective que nous aurons Ă conduire ensemble et nous ne pourrons pas en faire lâĂ©conomie. »
Propos recueillis par BenoĂźt BOUY.
p. 7
Le débat sur la future organisation territoriale de la justice
p. 8
La Cour des Comptes dans son rapport 2015 prĂ©conise un alignement de la carte des Cours dâAppel « au moins sur la carte des rĂ©gions administratives, voire sur la carte interrĂ©gionale du MinistĂšre. »
(Article du Figaro â 11.02.2015)
Les barreaux du ressort Ă©tant trĂšs attachĂ©s au maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry ainsi que des associa-tions qui militent pour la conservation du patrimoine de la Savoie, il paraissait nĂ©cessaire dâeffectuer des recherches historiques afin de vĂ©rifier une Ă©ventuelle protection de la juridiction.
Le sujet nâest pas nouveau, plusieurs tentatives de sup-pression de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry entre 1870 et 2008 ont Ă©tĂ© abandonnĂ©es en raison de lâexistence du TraitĂ©.
(Article du n° 14 de la VDA (2007) - J.P. LANTAZ)
Le Traité de Turin du 24 mars 1860.
ComposĂ© de huit articles, ce document ne mentionne pas exactement lâexistence de la future Cour ImpĂ©riale.
Toutefois lâarticle 5 est ainsi libellĂ© :
« Le gouvernement français tiendra compte aux fonction-naires de lâordre civil et aux militaires appartenant par leur
naissance Ă la province de Savoie et Ă lâarrondissement de Nice (circondario de Nizza), et qui deviendront sujets fran-çais, des droits qui leur sont acquis par les services rendus au Gouvernement Sarde ; ils jouiront notamment des bĂ©nĂ©-fices rĂ©sultant de lâinamovibilitĂ© pour la magistrature et de garanties assurĂ©es Ă lâarmĂ©e. »
(Extrait du Traité du Turin, article 5)
Le traitĂ© de Turin et le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry
Pourquoi faire des recherches concernant les actes préparatoires au traité du 24 mars 1860
Histoire de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry avant le traitĂ© de Turin du 24 mars 1860« AprĂšs lâEmpire, lâun des premiers actes du gouvernement de Turin fut le rĂ©tablissement de lâancien SĂ©nat. AprĂšs le TraitĂ© de 1814 son siĂšge avait Ă©tĂ© fixĂ© Ă Conflans ; mais aprĂšs le TraitĂ© de 1815, il fut rĂ©intĂ©grĂ© Ă ChambĂ©ry.
LâĂdit du 4 mars 1848 vint transformer le SĂ©nat en Cour dâAppel.
La Cour dâAppel de Savoie fonctionna sans interruption jusquâĂ lâannexion de 1860 et son dernier acte fut de proclamer en audience solennelle le rĂ©sultat du plĂ©biscite. »
(Extrait du MĂ©moire des Barreaux de Savoie Ă M. le Garde des Sceaux et aux Chambres p. 17 et 18)
Les nĂ©gociations ayant conduit Ă lâannexion de la Savoie
La conspiration de PlombiĂšres (Vosges) le 21 juillet 1858
« Les sympathies de NapolĂ©on III pour le PiĂ©mont et lâunitĂ© italienne dataient de loin. »
« LâEmpereur rencontre alors le Comte Camillo CAVOUR, chef du gouvernement piĂ©montais.
DĂšs le dĂ©but de la conversation, lâEmpereur dĂ©clara « quâil Ă©tait prĂȘt Ă aider le PiĂ©mont Ă expulser les Autrichiens dâItalie⊠»
NapolĂ©on offrait le matĂ©riel de guerre dont son alliĂ© aurait besoin et une armĂ©e de deux cents mille soldatsâŠ
En retour de tant de services, lâEmpereur demanda la Savoie et le ComtĂ© de Nice. »(Extrait de lâAnnexion de la Savoie Ă la France - J. TRESAL, p. 122 Ă 131)
« La campagne dâItalie fut courte. »
« Le 24 juin 1859, les Autrichiens enfoncés au centre et à gauche par les Français, à droite par les Piémontais se retirÚrent avec des pertes énormes. »
« Un armistice était conclu le 8 juillet. »
« Le 20 janvier 1860 le Comte CAVOUR Ă©tait de nouveau premier Ministre ; les nĂ©gociations relatives Ă la Savoie allaient sâouvrir. »
(RĂ©fĂ©rence : La Guerre dâItalie - J. TRESAL, p. 142 Ă 153)
p. 9
NapolĂ©on III chargea en 1860 Armand LAITY SĂ©nateur de la propagande visant lâannexion de la Savoie Ă la France en le nommant « Commissaire ImpĂ©rial extraordinaire »
ParallĂšlement le Comte AmĂ©dĂ©e GREYFIE de BELLE-COMBE, avocat prĂšs la Cour dâAppel de ChambĂ©ry prenait la tĂȘte dâun comitĂ© pour lâannexion de la Savoie Ă la France dont fait partie Charles BERTIER, Directeur du Courrier des Alpes.
François DESCOSTES, dans un rapport de 1901 intitulé « Mémoire au Gouvernement et aux Chambres », relate le déroulement des négociations.(Extrait du rapport de M. François DESCOSTES, p.17 à 24)
Louis DEPOLLIER, membre de la SociĂ©tĂ© FLORIMONTANE a, dans un ouvrage Ă©ditĂ© en 1910 et intitulĂ© lâAnnexion et la Presse Savoisienne, relatĂ© « quâil ne serait pas sans intĂ©rĂȘt dâessayer de montrer Ă lâaide de la presse, reflet de lâesprit public, lâagitation de la Savoie, Ă cette Ă©poque oĂč allait se dĂ©nouer la question Savoisienne ».
(Note de lâauteur en prĂ©face pages XIII et XIV)
On retrouve page 317 dudit ouvrage :
« 19 mars. Nouvelles de la dĂ©putation envoyĂ©e Ă PARISâŠLes avantages annoncĂ©s sont dĂ©finitivement obtenus : zone pour la Savoie du Nord ; Cour dâAppel de ChambĂ©ry ; division en deux dĂ©partements. »
(Extrait de LâAnnexion et la Presse Savoisienne, L. DEPOLLIER, p. 317 et 318)
Par ailleurs, le rapport de M. François DESCOSTES pages 25 Ă 34 publie les diffĂ©rents articles rĂ©digĂ©s lors de la campagne de presse en faveur de lâannexion :
Courrier des Alpes du 25 février 1860
« NON CHAMBĂRY ne perdra pas sa Cour dâAppel. » (Extrait du rapport de M. François DESCOSTES, p.26)
Courrier des Alpes du 22 mars 1860
« La Cour dâAppel sera conservĂ©e Ă ChambĂ©ry ; La Savoie sera divisĂ©e en deux dĂ©partements et de fortes garnisons y seront envoyĂ©es. »
(Extrait du rapport de M. François DESCOSTES, p.27)
Le rapport précité publie une lettre adressée par M. Charles BERTIER à M. le Comte de BOIGNE en date du 25 juin 1870 (page 35 du rapport).
Entrevue avec S.E. M. BILLAUD Ministre de lâIntĂ©rieur :
« Le mardi⊠mars 1860, S.E. M. BILLAUD Ministre de lâIntĂ©rieur mâannonça que la Savoie serait appelĂ©e Ă voter par le suffrage universel, sur lâĂ©vĂ©nement politique qui se prĂ©parait pour elleâŠ
Il mâinvita en mĂȘme temps Ă lui faire connaitre quelles seraient les circonstances les plus propres Ă rendre ce vote favorable.
Je lui rĂ©pondis que la Savoie Ă©tait française par lâesprit et le cĆur de ses habitants ; que ceux-ci, toutefois ne consenti-raient Ă voter pour la rĂ©union de leur pays Ă la France que sous la rĂ©serve que quelques conditions, dont les trois plus importantes me semblaient ĂȘtre :
1. Que la Savoie passerait toute entiÚre à la France sans aucun démembrement.
2. Quâelle se divisera en deux dĂ©partements correspon-dant aux deux provinces dont elle se composait ; et enfin
p. 10
Les négociations du traité
3. Que la Cour dâAppel de ChambĂ©ry serait conservĂ©e ».(Extrait du rapport de M. François DESCOSTES, Lettre de
M. C. BERTIER Ă M. le Comte de BOIGNE)
Trois jours plus tard, M. Charles BERTIER renouvelait sa demande Ă S.E. M. THOUVENEL Ministre des Affaires ĂtrangĂšres.
« Le samedi⊠mars, M. BILLAUD me fit venir auprÚs de lui et me tint ce langage :
âââOn sâest occupĂ© de vous au Conseil des Ministres : vous ne serez pas dĂ©membrĂ©s, ChambĂ©ry conservera sa Cour dâAppel et je vous ferai deux dĂ©partements.âââ Et comme je demandais Ă M. le Ministre de mâautoriser Ă transmettre par le tĂ©lĂ©graphe, cette importante communication Ă ChambĂ©ry et Ă Annecy oĂč les dĂ©lĂ©guĂ©s de la Savoie atten-daient pour se rendre Ă Paris, le rĂ©sultat des nĂ©gociations prĂ©liminaires qui mâavaient Ă©tĂ© confiĂ©es, il me rĂ©pondit : âââĂcrivez que vous tenez ces assurances dâun membre du gouvernement.ââââ»
(Sources Archives de M. le Comte de BOIGNE selon lâauteur)
Le 21 juillet 1870, M. le SĂ©nateur LAITY rappelait Ă M. le Comte de BOIGNE que dans le cadre dâune rĂ©orga-nisation judiciaire,
« La dĂ©putation de la Savoie, chargĂ©e par les provinces de stipuler les conditions de leur annexion, avait, au nombre de ces conditions, inscrit le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry, cette demande fut accueillie par le gouverne-ment impĂ©rial sans la moindre difficultĂ© ».
(Extrait du MĂ©moire des Barreaux de Savoie p. 58 Ă 63)
Soutien indĂ©fectible de lâAnnexion M. LAITY, sĂ©nateur de lâEmpire et « homme de confiance de NapolĂ©on III », sâĂ©tait rendu en Savoie le 4 avril 1860 chargĂ© dâune mission extraordinaire.
Lâensemble des nĂ©gociations sont rĂ©sumĂ©es dans le Courrier des Alpes du 6 avril 1860.
(Archives dĂ©partementales de la Savoie - Reproduction de documents dâarchives par Pascale DUBOIS)
Il est expressĂ©ment confirmĂ© le maintien de la Cour dâAppel et les diffĂ©rentes demandes avec la rĂ©ponse positive de lâEmpereur.
(Archives départementales de la Savoie)
p. 11
Afin dâasseoir la dĂ©monstration que la Cour dâAppel de ChambĂ©ry Ă©tait lâune des conditions de lâAnnexion, il convient de rechercher le contenu et la publication des travaux de la dĂ©lĂ©gation dirigĂ©e par le Comte AmĂ©dĂ©e GREYFIE de BELLECOMBE.
Juriste Ă©minent, personnalitĂ© hors du commun, il sera nommĂ© PrĂ©sident de la Cour dâAppel en juillet 1866 et PrĂ©sident de lâAcadĂ©mie des Sciences â Belles Lettres et Arts de Savoie (1864-1867).
J. TRESAL, historien auteur dâun remarquable ouvrage publiĂ© en 1913 « LâAnnexion de la Savoie Ă la France (1848-1860) » a eu Ă sa disposition une cinquantaine de documents transmis par M. le Comte François GREYFIE de BELLECOMBE.
Les piÚces inédites sont relatées dans son ouvrage (pages 238 à 255).
Le Comte GREYFIE de BELLECOMBE fut reçu par lâEm-pereur en audience particuliĂšre avant la prĂ©sentation publique du 21 mars 1860.
On retrouve dans le discours public les termes suivants.
« Les ministres de votre MajestĂ© ont bien voulu nous faire espĂ©rer que la Cour dâAppel de Savoie et les deux dĂ©par-tements qui existent aujourdâhui seraient maintenus. Câest une question vitale pour les deux villes chefs-lieux. Et quant Ă la Cour dâAppel, elle nâest pas seulement une des gloires de la Savoie pour la science et lâintĂ©gritĂ© quâelle a toujours possĂ©dĂ©es ; câest encore un besoin pour la lĂ©gislation du pays, qui pour les cas passĂ©s, devra souvent ĂȘtre appliquĂ©e encore⊠».
(Extrait du discours du Comte GREYFIE de BELLE-COMBE dans lâouvrage de J. TRESAL, LâAnnexion de la
Savoie Ă la France p. 242)
Le Comte avait mĂȘme sollicitĂ© de lâempire le maintien des avantages des fonctionnaires et des militaires.
« Une indication, cependant de notre Majesté à cet égard serait accueillie avec reconnaissance par toute la Savoie. »
(Archives GREYFIE de BELLECOMBE citées par J. TRESAL, p. 241 et 242.)
On retrouve ce point statutaire dans lâarticle 5 du TraitĂ© liĂ© Ă lâinamovibilitĂ© de la Magistrature.
Dans sa rĂ©ponse Ă la dĂ©lĂ©gation lâEmpereur NapolĂ©on III dĂ©clare :
« Je tiendrais honneur de rĂ©aliser toutes vos espĂ©rances et lâannexion dâun pays que tant de liens rattachent Ă la France deviendra pour lui une nouvelle cause de prospĂ©ritĂ© et de progrĂšs. »
(Archives départementales de la Savoie)
p. 12
Les rĂ©sultats officiels du plĂ©biscite des 22 et 23 avril 1860 furent proclamĂ©s le 29 avril 1860 par la Cour dâAppel de ChambĂ©ry. Le total des oui est de 99,77 %.
(Tableau des rĂ©sultats en Salle Solennelle de la Cour dâAppel - Extrait DâHistoire de lâAnnexion de Paul GUICHONNET)
Par Décret impérial du 11 juin 1860 promulgué le 12, le Traité conclu le 24 mars 1860 recevait sa pleine et entiÚre exécution.
Le SENATUS-CONSULTE du 12 juin 1860 promulgué le 14 précisait :
ART. 1er La Savoie et lâarrondissement de Nice font partie intĂ©grante de lâEmpire français â La constitution et les lois françaises y deviendront exĂ©cutoires Ă partir du 1er janvier 1861.
2. La répartition des territoires réunis à la France en res-sorts de cours impériales et en département sera éta-blie par une loi.
3. Les diverses mesures relatives Ă lâassiette des lignes de douanes et toutes dispositions nĂ©cessaires pour lâintroduction de rĂ©gime français dans ces territoires pourront ĂȘtre rĂ©glĂ©es par dĂ©crets impĂ©riaux rendus avant le 1er janvier 1861.Ces dĂ©crets auront force de loi.
DIVISION TERRITORIALE â DĂPARTEMENTS ORGANISATION JUDICIAIRE â COURS IMPĂRIALES.
Loi portant rĂ©partition des territoires de la Savoie et de Nice en ressorts des Cours impĂ©riales et en dĂ©parte-ments (BuII. off. 813 â 23 juin 1860 promulguĂ© le 29).
ART. 1er. Les territoires rĂ©unis Ă lâempire en vertu du
Sénatus-consulte du 12 juin 1860 sont répartis admi-nistrativement de la maniÚre suivante.
Le territoire de la Savoie forme deux dĂ©partements : celui de la Savoie et celui de la Haute-Savoie. Le terri-toire de Nice et lâarrondissement de Grasse, distrait du dĂ©partement du Var, composent le dĂ©partement des Alpes-Maritimes.
2. La dĂ©limitation de ces dĂ©partements et leur subdivi-sion en arrondissement, canton et commune, seront rĂ©glĂ©es par dĂ©cret de lâEmpereur rendus avant le 1er janvier 1861.
3. Les dĂ©partements de la Savoie et Haute-Savoie forment le ressort dâune Cour ImpĂ©riale, dont le siĂšge est Ă ChambĂ©ry.
Le dĂ©partement des Alpes-Maritimes fait partie du ressort de la Cour ImpĂ©riale dâAix.
Le dĂ©cret ImpĂ©rial relatif au service judiciaire en Savoie et dans lâarrondissement de Nice (12 juin 1860 promulguĂ© le 18 fait rĂ©fĂ©rence au TraitĂ© du 24 mars 1860 et du SĂ©natus-consulte du 12 juin 1860.
Le Bulletin Officiel des lois annotées publie les inter-ventions ministérielles.
Le Ministre des Affaires ĂtrangĂšres.
« Le parlement Sarde vient de sanctionner par un vote solennel la cession optĂ©e dâabord par le souverain, et ratifiĂ©e ensuite par le vĆu des populations destinĂ©es Ă devenir françaises.
Jamais la lĂ©gitimitĂ© dâune transaction internationale ne fut plus solidement Ă©tablie. »
p. 13
Le traité et sa promulgation
Autres dĂ©clarations de S.E. le Ministre dâĂtat devant le SĂ©nat.
« Lâincorporation est un acte constitutionnel puisquâelle mo-difie la consistance du territoire français et la constitution du territoire rĂ©uni.
Le dĂ©lai indiquĂ© pour la mise en vigueur de la constitution et des lois françaises vous paraitra nĂ©cessaire pour prĂ©-venir un changement trop brusque et pourvoir Ă un grand nombre dâactes prĂ©paratoires.
Quant Ă la rĂ©partition des territoires rĂ©unis Ă la France en ressorts de cours impĂ©riales et en dĂ©partements, lâarticle 2 vous propose dây faire statuer par une loi⊠»
PrĂ©sentation au corps lĂ©gislatif le 13 juin 1860 « Messieurs, un grand acte vient dâĂȘtre annoncĂ© au nom de lâempereur, au corps lĂ©gislatif. La Savoie et lâarrondisse-ment de Nice font partie de la France. Une loi doit rĂ©partir les territoires rĂ©unis en ressort de Cours ImpĂ©riales et en dĂ©partements.
Lâarticle 3 vous propose de former des deux dĂ©partements de la Savoie et de la Haute-Savoie le ressort dâune Cour ImpĂ©riale dont le siĂšge est Ă ChambĂ©ry. Sous le gouverne-ment Sarde, ChambĂ©ry Ă©tait le siĂšge dâune Cour de Justice comprenant dans son ressort les deux provinces de Savoie⊠»
« En rĂ©sumĂ©, la commission vous propose Ă lâunanimitĂ© lâadoption du projet de loi⊠»
Références
Décret Impérial du 11 juin 1860 Promulgué le 12
Sénatus-consulte du 12 juin 1860 Promulgué le 14
Loi du 23 juin 1860 Promulguée le 29
Division territoriale
DĂ©partements
Cours impériales
DĂ©cret ImpĂ©rial relatif au Service judiciaireen Savoie et dans lâarrondissement de Nice.(Bull. Off. 807, n° 7750)(12 juin 1860)PromulguĂ©. le 18
p. 14
Certains arguments soulevĂ©s laissent entendre que le non enregistrement auprĂšs du secrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral de lâONU rendrait caduque le TraitĂ©.
Cependant, le MinistÚre des Affaires étrangÚres a répon-du que le Traité figurait dans plusieurs recueils de Traité.
(Question n° 10106 de M. Yves NICOLIN du 13 novembre 2012 - Réponse du 08 janvier 2013)
Le 1er mars 1948 le ChargĂ© dâAffaires Ă Rome, M. Geoffroy DE COURCEL a notifiĂ© aux autoritĂ©s italiennes la liste des conventions franco-italiennes que le gouvernement français souhaitait remettre en vigueur par application de lâarticle 44-1 du TraitĂ© de Paix de 1947.
Le Traité du 24 mars 1860 y figure. (Cf. Journal Officiel du 14 novembre 1948)
Il figure Ă©galement dans la gazette officielle de la RĂ©publique Italienne du 17 septembre 1948 - Remise en vigueur des traitĂ©s entre la France et lâItalie.
La Cour de Cassation - Chambre criminelle, dans un arrĂȘt du 28 fĂ©vrier 2017, confirme la validitĂ© du TraitĂ©.
(ArrĂȘt Cour de Cassation du 28 fĂ©vrier 2017)
(Cf. Ă©galement CA de ChambĂ©ry du 8 dĂ©cembre 2015 â note Bruno BERTHIER)
p. 15
Une discussion juridique qui nâest pas nouvelle
Nos premiĂšres conclusions concernant les recherches sur les actes prĂ©paratoires et le traitĂ©Le mĂ©moire des barreaux de Savoie de 1882 considĂšre que la mention sur lâinamovibilitĂ© de la magistrature figurant dans lâarticle 5 du TraitĂ© « sâapplique non seulement Ă la fonction mais au siĂšge sur lequel la fonction est exercĂ©e. »
(Cf. page 37 dudit mémoire)
Le maintien de la Cour et des tribunaux selon le mĂ©moire a « Ă©tĂ© lâexĂ©cution dâune stipulation du traitĂ© du 24 mars 1860, destinĂ©e Ă assurer sous le rĂ©gime français aux magistrats savoisiens le bĂ©nĂ©fice de lâinamovibilitĂ© ; bĂ©nĂ©fice qui Ă©tait
comme la consĂ©cration et la consĂ©quence nĂ©cessaire de la perpĂ©tuitĂ© et de lâinamovibilitĂ© de lâorganisation judiciaire existant en Savoie au moment de lâannexion. »
(Cf. pages 37 et 38 dudit mémoire)
Le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry a bien Ă©tĂ© une des conditions de la signature du TraitĂ© du 24 mars 1860.
Lâempire a fait droit Ă cette demande par la loi du 23 juin 1860 proposĂ©e par le SĂ©natus-consulte du 12 juin 1860.
Le TraitĂ© du 24 mars 1860 et la Constitution du 4 octobre 1958.Lâarticle 55 de la Constitution stipule que :
« Les TraitĂ©s ou Accords rĂ©guliĂšrement ratifiĂ©s ou approu-vĂ©s ont dĂšs leur publication, une autoritĂ© supĂ©rieure Ă celles des lois, sous rĂ©serve, pour chaque Accord ou TraitĂ©, de son application par lâautre partie ».
Le Conseil Constitutionnel par dĂ©cision du 5 janvier 1975 prĂ©cise que « la supĂ©rioritĂ© des TraitĂ©s sur les lois, dont le principe est posĂ© Ă lâarticle 55 prĂ©citĂ© prĂ©sente un caractĂšre Ă la fois relatif et contingent, tenant dâune part, Ă ce quâelle est limitĂ©e au champ dâapplication du TraitĂ© et, dâautre part Ă ce quâelle est subordonnĂ©e Ă une condition de rĂ©cipro-citĂ© dont la rĂ©alisation peut varier selon le comportement du ou des Ătats signataires du traitĂ© et le moment oĂč doit sâapprĂ©cier le respect de cette condition⊠quâune loi contraire Ă un traitĂ© ne serait pas, pour autant contraire Ă la constitutionâŠâ» DĂ©cision n° 74-54 DC du 15 janvier 1975
(Note de M. Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE sur le contrÎle de conventionalité et contrÎle
de constitutionnalité en France publiée en 2009)
Le Conseil Constitutionnel a toutefois prĂ©cisĂ© dans une dĂ©cision du 29 dĂ©cembre 1989 DC n° 89-268« que dans le cadre de leurs compĂ©tences respectives, il incombe aux divers organes de lâĂtat de veiller Ă lâapplication des conventions internationales »âŠ
Le Conseil Constitutionnel confirme dans cette dĂ©cision du 29 dĂ©cembre 1989 quâaux termes de lâarticle 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 :
« Les traitĂ©s ou accords rĂ©guliĂšrement ratifiĂ©s ou approu-vĂ©s ont, dĂšs leur publication, une autoritĂ© supĂ©rieure Ă celle des lois, sous rĂ©serve, pour chaque accord ou traitĂ© de son application par lâautre partie⊠»
La position du Conseil dâĂtat.« Dans ses formations consultatives, le Conseil dâĂtat a toujours veillĂ© Ă ce que les projets de loi respectent les engagements internationaux souscrits par la France. »(Cf. note de M. Bastien LIGNEREUX, MaĂźtre des requĂȘtes.
Le rapport du droit international et du droit interne)
Le Conseil dâĂtat confirme lâautoritĂ© supĂ©rieure des traitĂ©s Ă celle des lois. Il introduit lors du contrĂŽle rĂšglementaire la notion de difficultĂ© sĂ©rieuse.
« Il y a lieu pour le juge administratif, afin de sâassurer de la constitutionnalitĂ© du dĂ©cret de rechercher si la directive que ce dĂ©cret transpose est conforme Ă cette rĂšgle⊠quâil lui appartient en lâabsence de difficultĂ© sĂ©rieuse dâĂ©carter le moyen invoqué⊠»
(Conseil dâĂtat du 8 fĂ©vrier 2017 â ArrĂȘt ARCELOR)
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CONCLUSION
Le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry Ă©tait une des conditions de la signature du TraitĂ©.
Le Conseil Constitutionnel nâexamine pas la conformitĂ© de la loi aux stipulations dâun traitĂ© ou dâun accord international.
Il incombe aux divers organes de lâĂtat de veiller Ă lâapplication des conventions internationales, selon le Conseil Constitutionnel.
Le principe de la supériorité des traités par rapport à la loi est réaffirmé par les deux juridictions.
Le gouvernement français doit respecter les décisions et les engagements pris par la France en 1860 vis-à -vis de la Savoie Mont-blanc.
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TABLE DES MATIĂRES
Introduction
Le débat sur la future organisation territoriale de la justice
Pourquoi faire des recherches concernant les actes préparatoires au traité du 24 mars 1860
Le traitĂ© de Turin et le maintien de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry
Histoire de la Cour dâAppel de ChambĂ©ry avant le traitĂ© de Turin du 24 mars 1860
Les nĂ©gociations ayant conduit Ă lâannexion de la Savoie
Les négociations du traité
Le traité et sa promulgation
Une discussion juridique qui nâest pas nouvelle
Nos premiÚres conclusions concernant les recherches sur les actes préparatoires et le traité
CONCLUSION
p. 3
p. 7
p. 8
p. 8
p. 9
p. 9
p. 10
p. 13
p. 15
p. 15
p. 17
p. 19
JUST
ICE P O U R L E S S AVOYARDS PACTA SUNT SERVAND
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