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Sirine_Fattouh_Errance

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À chaque ville un état de corps. La chaleur de Beyrouth l’enveloppe, la rassure, la calme et l’apaise. Son corps se déploie à l’infini, s’émancipe et s’exalte. C’est à Beyrouth que se trame le désir, que son corps s’éveille et que les odeurs et les sons la pénètrent. À Paris, son corps se fige, elle en arrive même à oublier qu’elle a un corps. Paris lui rappelle qu’elle a un corps.

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À chaque départ, elle ressent de nouveau une rupture en elle, comme si on l’arra-chait par la force à sa matrice ou à un être aimé. À chaque départ, une douleur accrue lui noue l’estomac et la fige dans la peur.Et pourtant, Paris est cette ville qui préserve son équilibre intellectuel. C’est à Paris qu’elle se ressource sur un plan humain, artistique et intellectuel. Paris est sa condition de survie, de son existence, de son acharnement.

À chaque ville un état de corps. La chaleur de Beyrouth l’enveloppe, la rassure, la calme et l’apaise. Son corps se déploie à l’infini, s’émancipe et s’exalte. C’est à Beyrouth que se trame le désir, que son corps s’éveille et que les odeurs et les sons la pénètrent. À Paris, son corps se fige, elle en arrive même à oublier qu’elle a un corps. Paris lui rappelle qu’elle a un corps.

L’angoisse du retour l’habite dès les premiers jours de son arrivée dans sa ville natale. Lorsqu’elle se trouve à Beyrouth l’angoisse commence à se faire sentir lorsqu’elle se met à penser à Paris. Une angoisse qui ne la lâche plus et qui exor-bite son regard en le figeant dans le néant et la terreur.

De quelle angoisse s’agit-il ? Est-ce réellement la peur d’un futur retour ? Cette peur du départ n’est-elle pas une peur d’un abandon ? Sa ville l’abandonnerait à chaque fois qu’elle la quitte. Et pourtant à chaque retour, elle l’accueille les bras ouverts. C’est alors peut être à Paris que cette peur réside et qu’elle se sent menacée, apeurée comme un animal en danger. Paris nourrit en elle un sentiment de contradiction, Paris la rend schizophrène, double. Forte d’apparence et solide, faible et vulnérable de l’intérieur. À Paris, elle vit, à Beyrouth elle existe ou bien je devrais plutôt dire le contraire ? À Paris, elle existe car la ville la rappelle à elle et à Beyrouth elle vit car enveloppée par la douce volupté de sa chaleur. À Beyrouth elle se sent exister, elle se sent sentir, elle sent son corps et exprime ses désirs. À Beyrouth, son corps n’est plus en souffrance, mais existe dans une forme d’extase constante.

C’est dans un pays où la morale a le plus de poids que son corps se détache de toute morale. À Beyrouth, elle existe en exhibant son corps. À Paris, son corps se résigne.

Beyrouth, ville de toutes les tentations et de toutes les contradictions.

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