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Cancérologie 2006 - A.I.M. 117 Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006 Pr Michel Marty (Paris) E n 2006, ce sont les inhibiteurs multi-cibles qui ont le vent en poupe. Ces agents, nommés par les Américains « dirty targetting agents », élargissent les spectres des tumeurs traitables mais augmentent la complexité des associations thérapeu- tiques possibles, avec des modèles pré- cliniques faiblement prédictifs. Une des gageures des années à venir sera d’augmenter la prédictivité des mo- dèles expérimentaux. Recherche fondamentale La carcinogenèse multi-étapes La recherche sur les cellules souches tumorales se poursuit : l’identification des mécanismes par lequels une cellule souche acquiert les propriétés d’une cellule tumorale et reste une cellule souche sont un des leitmotiv de la recherche fondamentale en cancé- rologie. En effet, ces cellules encore mystérieuses conditionnent l’évolution tumorale. La naissance d’une cellule tumorale nécessite une étape de transcription et de réplication pour que des mutations puissent s’exprimer. Ce phénomène n’est pas simple et l’étude de telles cellules est complexe, du fait notamment de leur rareté : la transcription de cellules souches exige une étape de division cellulaire, qui souvent fait sortir les cellules souches de leur statut de cellules totipotentes pour entrer dans celui de cellules souches non auto-renouve- lables, dites cellules souches « dédiées ». Etonnamment, de nombreux travaux ont permis de montrer que certaines modifications de l’expression des gènes n’étaient pas codées génétiquement mais liées à des modifications épigénétiques : elles ne résultent pas de mu- tations, mais à de régulations de l’expression de certains gènes, liées no- tamment à la méthylation du gène ou de son promoteur (l’ajout de rési- dus méthyl sur certaines séquences de promoteurs inactivant le fonctionnement des gènes). D’autres régulations géniques peuvent aussi être liées à la ma- nière dont le gène est enveloppé par la chromatine : s’il est complètement « en- veloppé » et inaccessible, il ne peut évidemment pas être traduit ni répliqué. Un phénomène comparable est observé dans la carcinogenèse virale : des mo- difications portant non pas sur les gènes mais sur les protéines conditionnent le devenir (tumoral ou non) d’une cellule donnée; on observe tardivement une étape d’intégration d’un gène viral dans le génome, entraînant une mutation qui devient définitive. Les études actuelles montrent que ces phénomènes épigénétiques (mo- dification de l’expression de gènes non codés génétiquement) sont assez fré- quents et surviennent très précocement dans les cellules. Ils favorisent l’émergence de cellules qui ont muté. Ainsi, l’inactivation des systèmes de réparation de l’ADN par des modifications épigénétiques augmente sensi- blement la probabilité qu’une mutation puisse s’exprimer et favorise très pro- bablement l’apparition de cellules souches tumorales. Les cellules souches présentent peu de propriétés permettant de les dis- tinguer : elles n’ont pas ou peu d’antigènes spécifiques; et la régulation de leur division cellulaire n’est pas connue, pas plus que les mécanismes qui les engagent dans une différenciation. La construction de modèles expérimentaux in vitro est faiblement représentative de ce qui se passe chez l’homme. On peut certes disposer de modèles de carcinogenèse expérimentale chez le petit animal. Mais on sait que généralement, il y a moins d’étapes de carcinogenèse chez le petit ani- mal : ce modèle est également peu représentatif de ce qui se passe chez l’homme. Et chez le gros animal, la réalisation de tels modèles n’est pas réa- lisable. L’ autre solution serait d’essayer d’identifier très en amont des lésions humaines qui ont un potentiel de trans- formation : par exemple, on sait que les cellules des cancers intraépithé- liaux possèdent tout l’arsenal de la cellule cancéreuse. Il faut donc « se placer » très en amont, avec la diffi- culté d’observer des phénomènes as- sez divers sans pouver déterminer les- quels vont conduire à la transformation cellulaire. Ce travail a été effectué sur des lésions à risque évolutif modéré, notamment du sein (hyperplasie épithéliale atypique), des adénomes et des dysplasies du colon et du col utérin. Ce démem- brement des différentes lésions tu- morales se réalise lentement. Ce chapitre est extrêmement dif- ficile : en effet, des années d’évolu- tion séparent les premières anomalies des cellules souches et l’apparition d’un cancer. C’est le cas des tumeurs desmoïdes (tumeurs essentiellement des muscles et des aponévroses) : un certain nombre de ces tumeurs sur- viennent chez des individus porteurs de mutations germinales les prédis- posant au cancer du côlon – la majorité des mutations germinales prédis- posant au cancer concerne la réparation de l’ADN : il s’agit d’anti-oncogènes (gènes suppresseurs de tumeurs), dont le non-fonctionnement prédispose à des mutations supplémentaires. Tout porte à penser que la mutation est l’élément déterminant dans l’apparition des tumeurs desmoïdes ; cepen- dant ces dernières ont aussi une évolution localement agressive et un très faible pourcentage deviendra cancéreux très tardivement (sous forme de sarcome). Ce modèle existe donc mais expérimentalement, il est très dif- ficile de faire pousser ces lignées cellulaires de tumeurs desmoïdes, ce qui en limite l’étude. Au total, la première mutation acquise ou les premières anomalies ne font pas une cellule cancéreuse, mais elles prédisposent aux événe- ments ultérieurs. La connaissance des cellules souches normales servira à l’étude de ces cellules souches pré-cancéreuses. L’étude du processus de cancérisation en amont représente donc un enjeu important. Traitements moléculaires ciblés Davantage de produits disponibles Le foisonnement de nouveaux agents moléculaires ciblés crée une sorte « d’embouteillage » car certains de ces agents ont des activités com- parables. C’est le cas d’un anticorps monoclonal humain anti-récepteur de l’EGF (Epidermal Growth factor) et du cetuximab (Erbitux), anticorps mo- noclonal chimérique : ces deux molécules diffèrent par leur structure et par leur mode de production mais elles ciblent le même récepteur exactement de la même façon. Il n’apparaît donc pas de différence importante d’acti- vité et de tolérance entre ces deux produits. Autre thérapie ciblée : les molécules chimiques inhibitrices de la trans- duction du signal (les inhibiteurs des kinases). On recense 500 kinases dans l’organisme humain : elles constituent le « kinome ». Ces kinases sont toutes caractérisées : on peut donc aujourd’hui cribler l’ensemble de ces molécules sur le kinome humain. Ces kinases ont des structures moléculaires assez sem- blables : notamment, elles ont toutes un site dans lequel elles logent l’ATP, qu’elles vont transformer en ADP tout en fixant le phosphate pris à l’ATP sur une autre molécule. La tendance a été de développer des inhibiteurs extrê- mement spécifiques, qui ciblent une seule kinase dont l’activité était claire- ment identifiée dans la transduction du signal. Toutefois, ces molécules inhi- bitrices ne sont pas 100 % spécifiques. Parmi ces inhibiteurs, on peut citer les inhibiteurs de l’EGF-R pour le géfitinib et l’erlotinib. © SOVEREIGN - ISM. Cancer du sein droit. Mammographie, incidence de face, fausses couleurs.

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Cancérologie

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Michel Marty (Paris)

En 2006, ce sont les inhibiteursmulti-cibles qui ont le vent enpoupe. Ces agents, nommés par

les Américains « dirty targettingagents », élargissent les spectres destumeurs traitables mais augmentent lacomplexité des associations thérapeu-tiques possibles, avec des modèles pré-cliniques faiblement prédictifs. Unedes gageures des années à venir serad’augmenter la prédictivité des mo-dèles expérimentaux.

Recherche fondamentale

La carcinogenèse multi-étapes

● La recherche sur les cellulessouches tumorales se poursuit : l’identification des mécanismes par lequelsune cellule souche acquiert les propriétés d’une cellule tumorale et reste unecellule souche sont un des leitmotiv de la recherche fondamentale en cancé-rologie. En effet, ces cellules encore mystérieuses conditionnent l’évolutiontumorale.

La naissance d’une cellule tumorale nécessite une étape de transcriptionet de réplication pour que des mutations puissent s’exprimer. Ce phénomènen’est pas simple et l’étude de telles cellules est complexe, du fait notammentde leur rareté : la transcription de cellules souches exige une étape de divisioncellulaire, qui souvent fait sortir les cellules souches de leur statut de cellulestotipotentes pour entrer dans celui de cellules souches non auto-renouve-lables, dites cellules souches « dédiées ».

Etonnamment, de nombreux travaux ont permis de montrer que certainesmodifications de l’expression des gènes n’étaient pas codées génétiquementmais liées à des modifications épigénétiques : elles ne résultent pas de mu-tations, mais à de régulations de l’expression de certains gènes, liées no-tamment à la méthylation du gène ou de son promoteur (l’ajout de rési-dus méthyl sur certaines séquences de promoteurs inactivant le fonctionnementdes gènes). D’autres régulations géniques peuvent aussi être liées à la ma-nière dont le gène est enveloppé par la chromatine: s’il est complètement « en-veloppé » et inaccessible, il ne peut évidemment pas être traduit ni répliqué.Un phénomène comparable est observé dans la carcinogenèse virale : des mo-difications portant non pas sur les gènes mais sur les protéines conditionnentle devenir (tumoral ou non) d’une cellule donnée; on observe tardivement uneétape d’intégration d’un gène viral dans le génome, entraînant une mutationqui devient définitive.

Les études actuelles montrent que ces phénomènes épigénétiques (mo-dification de l’expression de gènes non codés génétiquement) sont assez fré-quents et surviennent très précocement dans les cellules. Ils favorisentl’émergence de cellules qui ont muté. Ainsi, l’inactivation des systèmes deréparation de l’ADN par des modifications épigénétiques augmente sensi-blement la probabilité qu’une mutation puisse s’exprimer et favorise très pro-bablement l’apparition de cellules souches tumorales.

Les cellules souches présentent peu de propriétés permettant de les dis-tinguer : elles n’ont pas ou peu d’antigènes spécifiques; et la régulation deleur division cellulaire n’est pas connue, pas plus que les mécanismes qui lesengagent dans une différenciation.

● La construction de modèles expérimentaux in vitro est faiblementreprésentative de ce qui se passe chez l’homme. On peut certes disposer demodèles de carcinogenèse expérimentale chez le petit animal. Mais on saitque généralement, il y a moins d’étapes de carcinogenèse chez le petit ani-mal : ce modèle est également peu représentatif de ce qui se passe chezl’homme. Et chez le gros animal, la réalisation de tels modèles n’est pas réa-lisable.

L’ autre solution serait d’essayerd’identifier très en amont des lésionshumaines qui ont un potentiel de trans-formation : par exemple, on sait queles cellules des cancers intraépithé-liaux possèdent tout l’arsenal de lacellule cancéreuse. Il faut donc « seplacer » très en amont, avec la diffi-culté d’observer des phénomènes as-sez divers sans pouver déterminer les-quels vont conduire à latransformation cellulaire. Ce travaila été effectué sur des lésions à risqueévolutif modéré, notamment du sein(hyperplasie épithéliale atypique),des adénomes et des dysplasies ducolon et du col utérin. Ce démem-brement des différentes lésions tu-morales se réalise lentement.

Ce chapitre est extrêmement dif-ficile : en effet, des années d’évolu-

tion séparent les premières anomalies des cellules souches et l’apparitiond’un cancer. C’est le cas des tumeurs desmoïdes (tumeurs essentiellementdes muscles et des aponévroses) : un certain nombre de ces tumeurs sur-viennent chez des individus porteurs de mutations germinales les prédis-posant au cancer du côlon – la majorité des mutations germinales prédis-posant au cancer concerne la réparation de l’ADN : il s’agit d’anti-oncogènes(gènes suppresseurs de tumeurs), dont le non-fonctionnement prédisposeà des mutations supplémentaires. Tout porte à penser que la mutation estl’élément déterminant dans l’apparition des tumeurs desmoïdes ; cepen-dant ces dernières ont aussi une évolution localement agressive et un trèsfaible pourcentage deviendra cancéreux très tardivement (sous forme desarcome). Ce modèle existe donc mais expérimentalement, il est très dif-ficile de faire pousser ces lignées cellulaires de tumeurs desmoïdes, ce quien limite l’étude.

Au total, la première mutation acquise ou les premières anomaliesne font pas une cellule cancéreuse, mais elles prédisposent aux événe-ments ultérieurs. La connaissance des cellules souches normales serviraà l’étude de ces cellules souches pré-cancéreuses. L’étude du processus decancérisation en amont représente donc un enjeu important.

Traitements moléculaires ciblés

Davantage de produits disponibles

● Le foisonnement de nouveaux agents moléculaires ciblés crée unesorte « d’embouteillage » car certains de ces agents ont des activités com-parables. C’est le cas d’un anticorps monoclonal humain anti-récepteur del’EGF (Epidermal Growth factor) et du cetuximab (Erbitux), anticorps mo-noclonal chimérique : ces deux molécules diffèrent par leur structure et parleur mode de production mais elles ciblent le même récepteur exactementde la même façon. Il n’apparaît donc pas de différence importante d’acti-vité et de tolérance entre ces deux produits.

Autre thérapie ciblée : les molécules chimiques inhibitrices de la trans-duction du signal (les inhibiteurs des kinases). On recense 500 kinases dansl’organisme humain : elles constituent le « kinome ». Ces kinases sont toutescaractérisées : on peut donc aujourd’hui cribler l’ensemble de ces moléculessur le kinome humain. Ces kinases ont des structures moléculaires assez sem-blables : notamment, elles ont toutes un site dans lequel elles logent l’ATP,qu’elles vont transformer en ADP tout en fixant le phosphate pris à l’ATP surune autre molécule. La tendance a été de développer des inhibiteurs extrê-mement spécifiques, qui ciblent une seule kinase dont l’activité était claire-ment identifiée dans la transduction du signal. Toutefois, ces molécules inhi-bitrices ne sont pas 100 % spécifiques. Parmi ces inhibiteurs, on peut citer lesinhibiteurs de l’EGF-R pour le géfitinib et l’erlotinib.

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Cancer du sein droit. Mammographie, incidence de face, fausses couleurs.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

A.I.M. 117 - 2006

Il existe aussi des molécules inhibitrices multi-cibles. Ainsi, les kinasespeuvent intervenir sur la même voie de signalisation, par exemple HER, EGF-R ou VEGF-R, mais il existe des inhibiteurs de kinases des récepteurs 1-3 duVEGF-R (Vascular endothelial growth factor receptor), des inhibiteurs trans-groupes de kinases, de EGF-R et de VEGF-R, ou encore des inhibiteurs de ki-nases qui agissent sur des voies de signalisation très différentes.

La conséquence implicite de l’utilisation d’agents très spécifiques est lanécessité de les associer. Ces agents (les pyrimidines, les quinazolines) sonttrès fortement métabolisés et interagissent avec les métabolismes. A contra-rio, l’intérêt d’un agent multicible est qu’il a un seul métabolisme.

L’imatinib (Glivec) inactive le PDGF-R, le c-kit, abl, des tyrosines-ki-nases impliquées dans des voies de signalisation très différentes. C’est unagent de fait assez peu spécifique : il est actif dans des tumeurs très différentes

telles que la leucémie myéloïde chronique (LMC), où ilexiste une activation des tyrosines-kinases abl, les tumeursstromales gastro-intestinales (GIST), où l’on observe uneactivation de la voie de signalisation des kit, et les dermato-fibro-sarcomes protubérances, tumeurs exceptionnelles oùil existe une activation de PDGF-R. D’autes agents (suni-tinib, sorafenib) ont un spectre d’activités très large, etsont pour certains actifs sur des tumeurs devenues résis-tantes à l’imatinib. La relation entre le spectre d’activitéexpérimental et clinique est en voie d’élucidation.

● Des médicaments à spectre plus large et plus puis-sant ont montré une activité dans les GIST devenues ré-sistantes au Glivec, mais également dans les cancers durein métastatiques pour lesquels aucune molécule n’avaitd’activité pour le moment. C’est le cas du sunitinib (Su-tent) qui vient d’être approuvé en Europe et aux Etats-Unis pour le traitement des GIST résistantes au Glivec etdes cancers du rein métastatiques ayant résisté à un trai-tement par des cytokines. C’est également le cas du sora-fenib, molécule également multicible. Des résultats sansdoute imminents vont montrer qu’un inhibiteur mixte deEGF-R et de HER-2, le lapatinib, a une activité addition-nelle par rapport au traztuzumab (Herceptine). Ainsi, en2006, ce sont les inhibiteurs multi-cibles qui ont le venten poupe.

Il est difficile de choisir une cible thérapeutique don-née dans une tumeur. Le plus souvent, ces agents sontactifs lorsqu’existe une mutation activatrice de la cible,c’est-à-dire quand la cible surfonctionne par rapport à lanormale : les cancers broncho-pulmonaires ont une sen-sibilité accrue au géfitinib et à l’erlotinib en raison d’unemutation activatrice de la kinase de EGF-R. Dans lesGIST, le niveau d’activité de ces traitements est très dif-férent selon le type de mutation intéressant c- kit. C’estune étape de complexité de plus.

Ces agents n’ont pas de caractère curatif dans les tu-meurs évoluées. L’arrêt de l’exposition s’accompagne ànouveau d’une croissance tumorale. De plus, on observedes mécanismes d’échappement : notamment l’apparitionvoire la sélection de clones qui portent une autre mutation.Ces agents n’ont une activité détectable et intéressanteque dans les tumeurs où le produit de la mutation ci-blée joue un rôle important dans l’acquisition du main-

tien du phénotype tumoral. Dans le cas contraire, il est sans doute intéres-sant de les associer à des chimiothérapies classiques, à la radiothérapie voireà d’autres de ces agents.

Les anticorps monoclonaux sont rarement utilisés seuls : il convient deles associer de manière additive et synergique à une chimiothérapie. Parconstruction, ils ont une activité spécifique n’intéressant pas nécessairementles modifications intra-cellulaires de la cible (récepteurs tronqués, activationconstitutive).

● L’utilisation des agents multicibles soulève toutefois des questions spé-cifiques. A très court terme, se pose la question de la différenciation des agentsmulti-cibles qui ont en commun plusieurs cibles. La seconde question porte surleur association à différentes chimiothérapies : tester 3 ou 4 associations pourtraiter des cancers bronchiques, des sarcomes ou des cancers coliques est en-core réalisable ; mais, quand les chimiothérapies possibles sont beaucoup plusnombreuses comme celles indiquées dans les cancers du sein, du testicule, deshémopathies, tester de telles associations devient beaucoup plus complexe. Cela,d’autant plus que les modèles pré-cliniques ne sont pas, voire faiblement pré-dictifs de la réponse clinique et des interactions pharmacologiques.

Parmi les défis des années à venir en cancérologie, il faudra augmenter laprédictivité des modèles expérimentaux (il en faudrait davantage) et parvenirà réaliser des prédictions in silico (informatiques), pour disposer de systèmesd’analyse qui contiennent la majorité des variables et permettent de prédirele résultat lorsqu’on touche à une d’entre elles (techniques en réseau). Pourl’instant, leur valeur prédictive n’a pas été démontrée de manière absolue : cesont des systèmes extrêmement complexes.

Propos du Pr Michel Marty (Hôpital St Louis, Paris) recueillis par le Dr Sylvie Le Gac

● Les résultats des essais de phase III évaluant le sunitinib en premièreligne dans le cancer du rein métastatique confirment ceux obtenus dans lesessais de phase II : on observe une réduction de la progression du cancerchez un patient sur deux.

● Les données d’association du lapatinib (inhibiteur de kinases) etd’une chimiothérapie dans les cancers du sein HER2 + montrent l’effet as-sez puissant et inattendu de cette association.

● Les données du thalidomide associé aux traitements de première lignedans les myélomes multiples montrent une activité indiscutable : une amé-lioration de deux ans de la survie des patients de plus de 70 ans.

Actualité à l’ASCO (American Society of Clinical Oncology) 2006

Le VEGF est un facteur clé de l’angiogenèse au cours des cancers. Produit par les cellules tumorales, notammenten réponse à une situation d’hypoxie, le VEGF se lie à ses récepteurs spécifiques (VEGF-R) à la surface des cel-lules endothéliales. Il déclenche alors la migration, la prolifération et la survie de ces cellules, aboutissant à laformation de nouveaux vaisseaux autour de la tumeur. Cette néovascularisation stimule la prolifération des cel-lules tumorales et leur dissémination à distance sous forme de métastases.

1Une premièreprolifération place la

tumeur en état d’hypoxieJ expression de gènespro-angiogéniques (VEGF)

2Le VEGF se fixe sur sonrécepteur endothélial J

sécrétion d’enzymes (MMP)qui dégradent les tissus desoutien juxta-vasculaires

3Stimulées, lescellules endothéliales

se multiplient et migrentvers la tumeur

4Les néovaisseaux seforment, les cellules

endothéliales sécrètentles composants de laparoi vasculaire

5Irriguée, la tumeur engage une croissance

exponentielle et utilise lesnéovaisseaux pour métastaser

Métalloprotéase(MMP)

Celluletumorale

VEGF

Celluleendothéliale

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Cardiologie

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Jean-Paul Bounhoure (Toulouse)

Chaque année, une avalanche d’études, d’essais cliniques, de recom-mandations, de méta-analyses et d’avancées technologiques survien-nent dans le domaine toujours mouvant de la Cardiologie. On ne peut

tout analyser ou citer et pour l’année 2005, très riche d’enseignements, il n’estpas aisé de faire un tri entre les nouveautés d’intérêt pratique et des donnéesde portée plus restreinte. Il paraît cependant possible, sans avoir la prétentiond’être exhaustif, de synthétiser les travaux et les progrès prédominants dansles diverses branches de la discipline.

Athérosclérose

Plus que jamais la prévention

Au cours de l’année 2005, la prévention a été privilégiée dans toutes lespathologies cardiovasculaires.

Les recommandations de l’Afssaps, concernant la prise en charge thé-rapeutique du patient dyslipidémique, fixent un cadre précis d’interven-tion. Elle ont permis de faire une synthèse des connaissances résultant des es-sais cliniques majeurs dans ce domaine et de souligner les deux objectifsessentiels : dépister et traiter de façon optimale les sujets à très haut risquecardiovasculaire ; éviter de surtraiter les sujets à faible risque.

● La prévention secondaire s’adresse à tous les patients atteints de di-verses localisations de l’athérosclérose, et non pas seulement aux cardiopa-thies ischémiques.

● Le bénéfice des hypolipémiants n’est pas seulement coronaire.

● Les patients atteints d’un syndrome coronarien aigu doivent béné-ficier d’un traitement par statine pour abaisser le LDL-cholestérol au-des-sous de 1 g/L.

● Comme on le savait, mais il fallait le préciser, la cible est le cholestérolLDL: plus le LDL est bas, meilleur est le pronostic cardiovasculaire.

● Dans une méta analyse récente, portant sur plus de 9000 sujets inclus dans14 essais thérapeutiques avec des statines, en prévention primaire et secondaire,la réduction de 1 mmol/L de LDL – cholestérol est associée à une réduction de

la mortalité totale de 12 %, de la mortalité coronaire de 19 %, des infarctus nonmortels de 23 % et des AVC, fatals ou non. de 17 % 1. Ces bénéfices sont si-gnificatifs dès la première année et le bénéfice se majore dans les années sui-vantes. Il n’y a pas d’évidence de majoration du risque de cancer.

● L’étude TNT confirme la relation étroite entre le LDL cholestérolet le risque cardiovasculaire 2. Ce grand essai contrôlé en double aveugleportant sur 10 000 patients a comparé deux posologies d’atorvastatine, 10 mgversus 80 mg, chez des patients coronariens stabilisés. Le LDL-cholestérolmoyen obtenu était de 1,01 g/L avec 10 mg/j contre 0,77 g/L avec 80 mg/jd’atorvastatine. Il y a eu un bénéfice significatif sur le critère primaire (évé-nements cardiovasculaires majeurs), critère qui a été réduit de 22 % sous ladose de 80 mg/j d’atorvastatine. Les décès coronaires ont été moins fréquentsavec cette dose d’atorvastatine, qui a cependant été associée à une augmen-tation, non significative, des transaminases. Cette augmentation, quoique rare,est significativement plus fréquente avec de fortes doses d’atorvastatine : 1,2%sous 80 mg, contre 0,2 % sous 10 mg, dans cet essai.

En pratique, l’instauration précoce d’un traitement hypolipidémiantau cours d’un syndrome coronarien s’impose, et en matière de préventionsecondaire, ce sont des patients pratiquement normolipidémiques qui serontainsi traités. Il paraît préférable d’obtenir un cholestérol LDL de l’ordrede 0,70 g/L plutôt que d’1 g/L et de prescrire une statine à fort potentiel hy-pocholestérolémiant.

● L’ézétimibe, nouveau venu dans le traitement des dyslipidémies, doitêtre prescrit en association à une statine et un régime approprié chez lespatients ayant une hypercholestérolémie alimentaire ou génétique, résistantau traitement par une statine. Il peut être prescrit aussi en complément au ré-gime chez les patients ne tolérant pas une statine. En matière de rhabdomyo-lyse et de conséquences hépatiques, les données de pharmacovigilance sontrassurantes mais une surveillance attentive s’impose avec l’association desdeux types d’hypolipidémiants. En début d’année est apparu Inegy, associa-tion de l’ézétimibe et de la simvastatine agissant sur les deux voies de la pro-duction du cholestérol, endogène et intestinal (voir rubrique lipidologie).

Vers la polypill...

En prévention secondaire, au moins quatre grandes classes thérapeutiquessont considérées comme nécessaires, l’ordonnance de prévention devient

Rupture de la plaque d’athérome et thrombose

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

A.I.M. 117 - 2006

longue et on voit de plus en plus des articles proposant la « polypill », ou pi-lule multiple. Cette pilule regroupant plusieurs agents d’efficacité démontrée(antihypertenseur, statine, antiagrégants plaquettaires) pourrait réduire le risqued’accident coronaire de 88 % et celui d’accident vasculaire cérébral de 80 %selon les auteurs de ce concept nouveau, publié dans le BMJ il y a déjà deuxans ! Sans en arriver là, deux laboratoires proposent des associations de classesthérapeutique différentes :

- Bristol-Myers Squibb a mis à la disposition du corps médical et des pa-tients coronariens le premier traitement préventif combiné pravastatine-aspirine, Pravadual, indiqué en prévention secondaire après un infarctus dumyocarde ou un angor instable.

- Pfizer commercialisera bientôt une association d’un anti-hypertenseur,l’amlodipine, et d’une statine, l’atorvastatine, sous le nom de Caduet. Cemédicament a reçu un avis favorable de la Commission de transparence endécembre 2005, et est indiqué dans la prévention des événements cardio-vas-culaires chez des patients hypertendus ayant trois facteurs de risque cardio-vasculaires associés.

Toujours l’HTA

Recommandations de l’HAS sur l’HTA, un référentiel actualisé pour optimiser la prise en charge des hypertendusen pratique courante

● Les nouvelles recommandations de l’HAS sur la prise en charge despatients hypertendus ont été publiées et commentées dans un numéro pré-cédent d’AIM (voir AIM 113, p. 20). Elles constituent un référentiel actua-lisé pour optimiser la prise en charge des hypertendus en pratique couranteen France. L’apport de l’automesure et de la mesure ambulatoire de la PA,la nécessaire estimation du risque cardiovasculaire global, l’utilisation des5 classes d’antihypertenseurs validés par les essais contrôlés, constituent lespoints clés de ces recommandations.

L’essai ASCOT-BPLA 3 est un essai important de l’année écoulée. Ilavait pour but de comparer deux stratégies antihypertensives : un inhibi-teur calcique (l’amlodipine 5 puis 10 mg) secondairement associé à un IEC(le périndopril 4 à 8 mg/j) versus un traitement bêtabloquant (aténolol50/100 mg/j et un diurétique), sur la survenue d’événements coronaires,d’issue fatale ou non. Les patients inclus ne devaient pas avoir de maladiecoronaire mais au moins trois facteurs de risque. Un total de 19 257 hy-pertendus d’âge moyen de 63 ans a été inclus dans cet essai. Avec un re-cul de 5 ans, dans le groupe de patients recevant la combinaison amlo-dipine – périndopril, la réduction de mortalité cardiovasculaire est de24 % et celle de la mortalité totale de 11 %, par rapport aux patientsrecevant l’association aténolol-diurétique. Parmi les critères secondairesd’évaluation, il faut noter une réduction de 13 % du risque d’infarctus dumyocarde non fatal et de décès coronaire. L’inhibiteur calcique associé àun IEC parait assurer une meilleure prévention de la maladie coronaire.Pour expliquer la différence de mortalité cardiovasculaire en faveur dugroupe amlodipine – périndopril, il convient de prendre en compte la dif-férence de pression artérielle, avec une réduction significative de la moyennede pression systolique de 2,7mmHg, et de pression diastolique de 1, 9mmHg.L’étude ASCOT, à la suite de l’étude VALUE (comparant l’amlodipine auvalsartan), confirme qu’un inhibiteur calcique, d’action longue et pro-gressive, est un traitement de choix dans l’HTA.

Fait nouveau dans le cadre de l’HTA, il faut souligner l’émergence de lanotion d’HTA masquée, définie comme une tension artérielle normale aucabinet médical et élevée lors de la mesure ambulatoire ou à l’automesuretensionnelle. Cette entité se rencontrerait dans 10 % de la population adulteet 20 % des hypertendus traités. L’évaluation de sa prévalence dépend biensur de la précision de la mesure de la TA au cabinet, de la qualité techniquede l’automesure et de la MAPA. Cette HTA est fréquente chez les fumeurs etles obèses et elle est associée a une majoration du risque d’hypertrophie ven-triculaire gauche.

● Rappelons que la cardiologie n’échappe pas aux phénomènes de modeet le syndrome métabolique ne cesse de susciter une abondante littérature.Cette entité a été d’abord redéfinie par l’International Diabetes Federationau début de l’année faisant de l’obésité abdominale un élément pivot dans ladéfinition : périmètre abdominal > 94 cm chez l’homme, > 80 cm chez lafemme. Deux autres éléments devaient être retrouvés : l’HTA et les troublesdu métabolisme glucidique et l’hypertriglycéridémie ou une réduction duHDL-cholestérol, traduisant un état d’insulino-résistance. Puis deux grandes

Sociétés savantes de diabétologues, américaine et européenne, ont mis endoute la réalité d’un tel syndrome et sa spécificité ! L’augmentation du risquecardiovasculaire est réelle, chacune des composantes, prise individuellement,est un facteur de risque reconnu. Mais existe-t-il un risque accru lorsqueces facteurs sont associés, dans le cadre de cet éventuel syndrome méta-bolique? Mérite t-il d’être individualisé? On attend d’autres prises de posi-tion des endocrinologues et des diabétologues sur ce problème conceptuel.

Encore des progrès en cardiologie interventionnelle

L’essor des endoprothèses actives

La cardiologie interventionnelle a été dominée par l’essor des endopro-thèses actives, dont l’avantage a été mis en évidence par plusieurs travaux.Parallèlement aux succès des prothèses actives dans l’athérosclérose coro-naire, il faut souligner les progrès représentés par le traitement percutanédes valvulopathies, de l’insuffisance mitrale et du rétrécissement aortiquechez l’adulte. L’équipe du Professeur Cribier (CHU de Rouen) a pu traiteravec un succès prometteur une série de 40 patients avec une valve aortiquebiologique, associant un stent métallique et des valves péricardiques animales,le tout ayant été introduit par voie percutanée. Cette avancée technique pourune valvulopathie très fréquente chez le sujet très âgé est en cours d’évalua-tion. En outre, le traitement de certaines insuffisances mitrales par voie per-cutanée, avec la pose de clips sur les valves pour réduire le volume du fluxrégurgitant, est actuellement en évaluation.

● Dans les cardiopathies ischémiques, l’étude REALITY a permis laplus grande comparaison à ce jour des stents actifs CYPHER et TAXUS. Ellea inclus 1353 patients issu de 90 centres mondiaux : aucune différence signi-ficative n’a été montrée sur l’objectif primaire (resténose à 8 mois), ni sur lesobjectifs secondaires cliniques. Par ailleurs, des méta-analyses de toutes lesétudes disponibles pour comparer ces deux types de stents suggèrent que lespatients recevant un stent au sirolimus (CYPHER) ont significativement moinsde risque de resténose ou de revascularisation coronaire que les patients trai-tés au paclitaxel (TAXUS). Toutefois ces conclusions doivent être interpré-tées avec prudence, compte tenu des limitations méthodologiques liées à cesétudes. Quoi qu’il en soit, ces deux stents représentent un progrès certain parrapport aux stents non actifs.

Visualisation d’un stent (3,5x30 mm) en place dans l’artère circonflexe. Traitement d’unesténose serrée (75 %) de l’artère circonflexe. Coronarographie interventionnelle, incidenceoblique antérieure droite (OAD), fausses couleurs.

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Syndromes coronariens aigus (SCA)

L’évaluation du clopidogrel dans les SCA

● Dans le domaine des Syndromes coronariens aigus, le clopidogrelconfirme son efficacité dans le traitement des deux types cliniques, avec ousans sus-décalage de ST/T. Après la démonstration de son bénéfice dans lessyndromes sans sus-décalage de ST (angor instable et infarctus myocardiquesans onde Q), grâce aux études CURE et CREDO, le clopidogrel voit sonefficacité démontrée dans le traitement des SCA avec sus-décalage de ST,c’est-à-dire les infarctus en voie de constitution. Les résultats positifs desétudes COMMIT et CLARITY sont à cet égard concluants.

● COMMIT est une méga-étude ayant inclus plus de 45 000 patientsd’Europe et de Chine dans les 24 premières heures d’un infarctus. Aprèsexclusion des patients traités par une angioplastie primaire et de ceux à hautrisque hémorragique, les patients ont été randomisés en deux groupes, l’unrecevant 75 mg de clopidogrel et l’autre un placebo, en plus de l’aspirine(26 % des patients ayant plus de 70 ans. Résultats : le clopidogral a diminuésignificativement de 9 % le risque de mort, d’infarctus ou d’accident vas-culaire cérébral. Cela se traduit par 10 événements majeurs évités pour 1000patients traités, sans augmentation du risque hémorragique.

● Ces résultats 4 confirment ceux de CLARITY-TIMI 28 4 : 3491 pa-tients ayant subi une thrombolyse pour un infarctus myocardique aigu, dansles 12 heures suivant le début des symptômes, ont été inclus dans cet es-sai. Ces patients ont reçu de façon randomisée, en plus de l’aspirine, soitune dose de charge de clopidogrel de 300 mg suivie de 75 mg/j, soit unplacebo. Résultats : le clopidogrel a réduit de 36 % l’objectif primaire(absence de reperméabilisation du vaisseau occlus, flux coronaire réduit,TIMI 0 ou 1, décès ou récidive d’infarctus). A 30 jours, le clopidogrel aréduit de 20 % l’objectif secondaire (mort ou récidive d’infarctus ou re-vascularisation), sans augmentation du risque hémorragique.

En 2006, l’administration précoce de clopidogrel doit devenir un traite-ment de prévention secondaire aussi systématique que l’aspirine lors de laprise encharge d’un patient atteint de SCA. En revanche, des incertitudes per-sistent sur la dose initiale optimale et sur la durée de traitement. On attendaitaussi avec intérêt les résultats de l’essai CHARISMA, évaluant l’aspirine et l’as-sociation aspirine –clopidogrel à long terme. Cet essai montre l’absence de bé-néfice de cette association sur la survenue d’événements cardiovasculaires,par rapport à l’aspirine seule : pas de réduction significative de ces événe-ments entre le groupe aspirine – placebo (7,3%) versus le groupe aspirine – clo-pidogrel ( 6,8%).L’analyse en sous-groupe montre qu’en prévention secondaire,l’association tend à faire baisser le critère principal (réduction significative de1% du risque absolu), mais en prévention primaire, elle augmente de 20% cerisque. Cette augmentation est due à un nombre élevé de décès par infarctus, quipourraient être liés à des hémorragies dans les plaques d’athérome (5,8% vs3,8%). On doit donc attendre les résultats d’autres études pour recommander enprévention primaire une telle association d’anti-agrégants. Soulignons qu’en pra-tique, les attitudes des cardiologues interventionnels varient beaucoup à l’égarddes posologies et de la durée des traitements anti-agrégants après pose de stents.

Toujours dans l’infarctus, une étude chinoise a évalué la réviparine, nou-velle HBPM, dans l’infarctus aigu et la mortalité, le réinfarctus et les AVC.Cet essai de plus de 15 000 patients, essentiellement après thrombolyse, per-met de constater que l’administration de réviparine, en sus des anti-agrégantsplaquettaires habituels, réduit la mortalité et les récidives d’infarctus sansaugmenter de manière significative les AVC.

● La prise en charge des SCA, invasive ou conservatrice, suscite en-core des controverses. L’étude ICTUS, menée sur 1200 patients, évaluait deuxoptions thérapeutiques : une coronarographie et si nécessaire une revascula-risation précoce, versus un traitement pharmacologique complet initial et unecoronarographie et une revascularisation différées, en cas de récidive d’is-chémie ou d’instabilité hémodynamique ou rythmique, c'est-à-dire une stra-tégie invasive sélective. Cette étude ne démontre pas la supériorité de lastratégie invasive précoce dans les SCA sans sus-décalage de ST, mais avecélévation de la troponine, par rapport à une stratégie sélective, fondée sur lasurveillance et une exploration sélective. D’autres travaux sont en cours pourpréciser ce point important en pratique clinique.

● L’infarctus du myocarde demeure une cause majeure de mortalité. Ré-cemment un nouveau concept de protection anti-ischémique, le « post-condi-tionnement » a vu le jour (voir AIM 115, pp. 19-22). La réalisation d’épi-sodes d’ischémie de 30 secondes, séparés par des épisodes de 30 secondes,réduit la taille de la nécrose myocardique après une occlusion coronaire. Cephénomène, étudié expérimentalement chez l’animal, est en cours d’évalua-tion chez l’homme. Le post-conditionnement protège le cœur reperfusé parune voie de signalisation spécifique et une protection mitochondriale 6. Il seraessentiel de déterminer par de futures études si cette réduction de la massenécrosée se traduit à distance par une réduction du remodelage ventriculaireet une bonne récupération de la réponse contractile.

Enfin, à la suite de l’étude Europa, le périndopril (Coversyl) a obtenu unenouvelle indication dans la maladie coronaire stable : les résultats de l’étudeont montré une réduction du risque absolu de 2,2%, correspondant à un RRde 22,4% du critère principal (critère combiné associant la mortalité globale,la mortalité cardiovasculaire, l’IDM non fatal et/ou l’arrêt cardiaque récupéré,p<0,001).

Quoi de neuf pour l’insuffisance cardiaque (IC) ?

La resynchronisation cardiaque par stimulation biventriculaire

L’IC est toujours à l’ordre du jour et l’année écoulée a fourni des infor-mations sur l’intérêt des traitements « électriques », qui semblent une avan-cée intéressante. A cet égard, l’étude CARE -HF a confirmé l’intérêt de laresynchronisation cardiaque par stimulation biventriculaire.

● Cette étude a évalué les effets de la resynchronisation sur les compli-cations et la mortalité chez les patients recevant un traitement médical opti-mal, en stade III ou IV de la NYHA, ayant une FeVG < 35 % et présentantun QRS > 120 msec, avec un asynchronisme cardiaque confirmé par l’écho-doppler. Résultats : le critère principal (décès ou ré-hospitalisation pour unévénement cardiaque) a été observé chez 39 % des patients du groupe resyn-chronisé et chez 55 % des patients du groupe médical (HR 0,63, IC 0,51-0,77,p < 0,001). Cela correspond à une réduction de mortalité de 40 % à 36 moisde suivi, et à une diminution de 52 % du taux de réhospitalisations pour IC.De plus, comme l’avaient montré des essais antérieurs, les patients resyn-chronisés ont une réduction des symptômes et une meilleure qualité de vie.

● L’étude CARE -HF fournit une réponse indiscutable à la question ensuspens, concernant le bénéfice sur la mortalité de la resynchronisation 7. Lepoint important est que ces patients, symptomatiques malgré un traitementoptimal, doivent avoir une désynchronisation ventriculaire bien objectivée àl’échocardiographie. L’extension abusive des indications ne peut que se sol-der par des échecs et des coûts très élévés et injustifiés, alors que la techniquese montre efficace pour des patients bien ciblés.

● Dans la prévention de la mort subite des insuffisants cardiaques, l’an-née passée a été marquée par l’élargissement des indications du défibrillateurautomatique implantable (DAI), suite à l’étude SCD- HEFT 8. Cette étude aété menée sur 2521 patients avec une FeVG < 35 % en IC classe II-III, isché-mique ou non. Ils ont été répartis aléatoirement en trois groupes : thérapie conven-tionnelle et placebo, thérapie conventionnelle et amiodarone, thérapie conven-

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Hypertrophie ventriculaire gauche (HVG). Echographie cardiaque, fausses couleurs.

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tionnelle et DAI. Sur un suivi moyen de 45 mois, le DAI a permis de diminuerla mortalité relative de 23 % (p = 0,0007) et la mortalité absolue de 7, 2 %,par rapport aux deux autres bras, dans les deux types d’IC. Les conséquencesmédico-économiques d’une telle étude font encore l’objet d’un important dé-bat : on estime que 50 % des insuffisants cardiaques pourraient être ainsi appa-reillés. Mais l’élargissement important de ce traitement, qui reste utilisé avecmodération, aurait un retentissement économiques majeur!

Pour ce qui est du traitement pharmacologique, il faut se réjouir de l’aug-mentation progressive des prescriptions de bêtabloquants en Europe eten France : les réticences des praticiens s’estompent face aux bons résultatsde leur utilisation précoce et à leur tolérance satisfaisante. Dans ce domaine,les résultats de l’étude SENIORS 9 démontrent le bénéfice de cette classethérapeutique chez les patients insuffisants cardiaques de plus de 70 ans. Grâceaux résultats de cette étude, le nébivolol a obtenu une extension d’indica-tion dans l’insuffisance cardiaque.

● Un fait marquant a aussi été la publication quasi concomitante, en2005, des recommandations de l’ESC, de l’AHA et de l’ACC, tenant comptedes résultats des grands essais contrôlés. Ces recommandations insistent surl’importance de la prévention de l’IC, distinguant 4 graduations chez les su-jets à risque :

– Stade A : présence d’une pathologie représentant une cause potentielled’IC (HTA, athérosclérose, diabète...) sans dysfonction ventriculaire et sansatteinte structurelle cardiaque

– Stade B : patients avec une atteinte structurelle cardiaque et une étiolo-gie mais sans signes d’IC

– Stade C : patients avec atteinte structurelle et signes d’IC– Stade D : IC réfractaire.La prévention implique une stratégie adaptée à chaque stade et le déve-

loppement des dysfonctions ventriculaires peut être prévenu par la prescrip-tion précoce des classes recommandées par les essais contrôlés. En ce quiconcerne les traitements, la place des antagonistes des récepteurs de l’an-giotensine 2 (ARA2) s’élargit : ils sont une alternative reconnue aux IEC,lorsque ces molécules sont mal tolérées. Les ARA2 doivent être associés siles patients restent symptomatiques sous IEC, pour réduire la mortalité et leshospitalisations. Dans l’IC avancée de classe III-IV, les antagonistes des ré-cepteurs à l’aldostérone, qui se sont enrichis d’une nouvelle molécule, l’éplé-rénone (Inspra), sont recommandés, en respectant bien sûr leurs contre-indi-cations dues à une insuffisance rénale. Ils sont aussi recommandés dans lesdysfonctions systoliques post-infarctus du myocarde. En somme, peu de nou-veautés thérapeutiques mais la confirmation de l’intérêt de la resynchronisa-tion, du défibrillateur, des bêtabloquants et des ARA2, et la confirmation desdangers et de l’inefficacité des inhibiteurs de la phosphodiestérase.

Rythmologie

AC/FA: Intérêt de la technique ablative

Enfin en rythmologie, les techniques ablatives sont toujours à l’ordre dujour. La fibrillation auriculaire est un thème inépuisable et de nombreux

travaux ont été publiés sur son traitement radical : l’ablation par isolementdes veines pulmonaires, aux mains d’équipes entraînées. Au prix de com-plications exceptionnelles, mais hélas gravissimes, cette technique s’em-ploie plus fréquemment, au fil des ans, par des équipes très spécialisées.Dans la fibrillation associée à l’insuffisance cardiaque, l’équipe bordelaised’Haissaguère a montré, chez une série de patients sélectionnés, une amé-lioration de la fonction ventriculaire, de la capacité d’effort et des symp-tômes. Ces résultats bénéfiques montrent l’intérêt de cette technique danscette population rencontrée fréquemment. Son indication et sa pratique doi-vent cependant être évaluées par des études contrôlées et randomisées, ver-sus les seuls traitements pharmacologiques.

Les techniques d’exploration non sanglantesprogressent

L’imagerie bouleverse et bouleversera notre quotidien

Dans les techniques d’explorations cardiologiques, il faut souligner l’in-térêt du scanner et de l’écho tridimensionnelle. Le scanner 64 barettes(qui est un progrès sur le scanner 16 barettes très répandu) donne des imagestrès précises de la lumière artérielle coronaire des plaques athéromateuseset de leur morphologie et de la masse myocardique. Ces appareillages per-mettent des examens non invasifs et rapides pour la détection des plaquesd’athérome, chez les patients cumulant plusieurs facteurs de risque. Leurgénéralisation, dans un avenir que l’on espère proche, sera un progrès re-marquable dans l’exploration de la maladie coronaire. Parmi les avancéesde l’échocardiographie, il faut insister sur l’intérêt de l’écho tridimen-sionnelle qui permet une évaluation précise des valves mitrales, de l’anneauet de la zone de coaptation des valves. L’échographie de contraste donnedes informations précieuses dans les domaines de l’insuffisance coronaireaiguë et de l’insuffisance cardiaque ischémique. L’échographie de stressoccupe une place majeure dans la recherche de la viabilité et l’échographietransœsophagienne (ETO) est essentielle en per-opératoire pour contrôlerles résultats de la chirurgie des insuffisances mitrales.

En conclusion, dans tous les domaines de la cardiologie, l’année écouléea vu des progrès intéressants, susceptibles d’améliorer la prise en charge denos malades. Ces progrès continus sont liés aux avancées technologiques etpharmacologiques qui rendent la recherche en cardiologie très active, privi-lège de notre spécialité. Espérons que des questions économiques, dans lesannées à venir, ne viendront pas freiner cette progression ! ■

Pr Jean-Paul Bounhoure (Toulouse).

1. Lancet 2005 ; 366 : 1267-78 - 2. N Engl L Med 2005352 1425 -35 - 3. Lancet 2005 ;366 : 907-13 - 4. N Engl J Med 2005 ; 352 : 1779-89 - 5. N Engl J Med 2006 ; 354 : 1-7. -6. Circulation 2005 ; 112 : 143-8 - 7. N Engl J Med 2005 ; 352 : 1539-42 - 8. N Engl J Med2005 ; 352 : 225-37. - 9. Eur Heart J 2005 ; 26 215-25

Le scanner 64 barrettes effectue 64 coupes en rotation. Cet équipement est le 1er en France à visée cardiologique. Ses images en 3D de très haute défini-tion, délivrées en moins de 10 secondes, sont un atout appréciable surtout pour un organe mobile comme le cœur. Cet équipement de pointe marque unevéritable révolution dans l’imagerie coronaire et dans les applications diagnostiques et thérapeutiques de la radiologie.

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Lipidologie

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Pascale Benlian (Paris)

Les études en lipidologie ne faiblissent pas et utilisent dorénavant unenouvelle approche d’évaluation thérapeutique, les mesures physiquesde la plaque d’athérome par échographie endo-vasculaire. Bilan d’une

année encore pleine d’enseignements.

Dyslipidémies

Des recommandations aux grandes études…

● 2005-2006 aura été l’année de l’actualisation* des Recommandationsde Bonne Pratique de la prise en charge thérapeutique d’un patient dys-lipidémique publiées par l’Afssaps en septembre 2000 et des modalités dedépistage et de diagnostic biologique des dyslipidémies en prévention pri-maire de l’Anaes en janvier 2000.

Ces nouvelles recommandations sont cohérentes avec les enseignementsdes grandes études d’intervention et ne sont pas si compliquées. Elles souli-gnent qu’en matière de dépistage et d’évaluation du risque cardio-vasculaire,la mesure du taux de LDL-cholestérol, à côté des autres données lipi-diques (paramètres obtenus par la prescription de l’EAL (explorationd’une anomalie Lipidique) effectuée d’emblée : aspect du sérum, HDL-cholestérol, triglycéridémie, cholestérol total…), est indispensable pourévaluer les niveaux de risque d’accident mortel et non mortel dans la pro-chaine décennie, quelle que soit la localisation vasculaire de l’athérosclé-rose. Aussi, l’abaissement des concentrations sériques de LDL-cholesté-rol est le meilleur indicateur d’efficacité de la prévention cardio-vasculairepar les hypolipémiants.

La prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique intègre la cor-rection de l’ensemble des facteurs de risque afin de prévenir l’apparition (pré-vention primaire) ou la récidive (prévention secondaire) des complicationscliniques de l’athérosclérose.

Grâce à une simple addition du nombre de facteurs de risque présents chezun individu donné, ces recommandations permettent de définir trois niveauxde risque cardio-vasculaire :

- le risque faible : aucun facteur de risque majeur associé à la dyslipidé-mie (cible LDL-cholestérol < 2,20 g/L). En pratique, le bien-fondé d’une prise

en charge médicamenteuse chez ces patients si leur LDL est supérieur à 2,20 g/Ldoit être étudié ;

- le risque intermédiaire : un, deux ou trois facteurs de risque majeursassociés à la dyslipidémie. Il s’agit dans le cadre de la prévention primaired’évaluer la réponse aux mesures hygiéno-diététiques et ensuite d’ajuster letraitement en fonction du contexte clinique ;

- le risque élevé: le patient coronarien appartient à ce groupe à risque élevémais également les patients ayant une maladie vasculaire avérée. Le patientdiabétique notamment celui qui cumule plusieurs facteurs de risque, ou le dia-bète compliqué d’insuffisance rénale définissant les sujets à très haut risque.

● L’étude FIELD 1, randomisée, évaluant le fénofibrate versus placebochez près de 10 000 patients diabétiques de type 2 modérément dyslipidé-miques, n’a pas montré, après une durée médiane de suivi de 5 ans, de diffé-rence en ce qui concerne le critère d’évaluation primaire (critère combiné as-sociant la mortalité coronarienne et de l’infarctus du myocarde non fatal) entrele groupe traité par le fénofibrate et le groupe placebo (p = 0,16) Toutefois,une diminution à la limite de la significativité statistique de l’un des critèressecondaires (critère combiné associant la mortalité cardio-vasculaire, l’infarc-tus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral et la revascularisation) a étéobservée en faveur du fénofibrate. Il est à souligner que le design de l’étudeétait très ambitieux eu égard aux patients sélectionnés : patients diabé-tiques « en bonne santé », à faible risque.

Cependant, FIELD a prouvé que la cible PPAR pourrait s’avérer uneexcellente cible pour prévenir les complications microvasculaires chez lediabétique de type 2. En effet, la progression de la microalbuminurie a été ra-lentie sous fénofibrate : on a pu observer davantage de régressions et moins deprogressions de la microalbuminurie dans le groupe fénofibrate que dans legroupe placebo (p = 0,002) et moins de patients évoluant vers la dialyse. Le

L’étude SPARCL (Stroke Prevention by Agressive Reduction of Cho-lesterol Level) est la première étude menée spécifiquement chez des sujets(n = 4 731) avec des antécédents d’AVC constitués ou d’AIT dont les tauxde LDL-cholestérol ne justifiaient pas de traitement systématique par statine(1 à 1,9 g/l). Pendant cinq ans, ces patients ont reçu, en plus, des traitementshabituels, 80 mg/j d’atorvastatine ou un placebo.

Après 5 ans, la baisse de LDL-cholestérol était de 38 % dans le groupeatorvastatine et de 7 % dans le groupe placebo. Le risque d’AVC fatal etnon fatal a été significativement réduit de 16 % (p = 0,003). Les accidentsischémiques ont régressé de 22 % tandis que les accidents hémorragiquesont augmenté légèrement mais significativement (RR = 1,66 ; p = 0,02). Ladifférence a été non significative pour les accidents hémorragiques fatals.De plus, les auteurs de cette étude dont le Pr Pierre Amarenco (hôpital Bi-chat, Paris), ont constaté un bénéfice additionnel sur la maladie coronaireavec une diminution significative des événements coronaires majeursde 35 %. Des résultats jamais démontrés auparavant avec une statine dansce type de population. En outre, suivant ces résultats, il apparaît qu’il fauttraiter 46 patients pour éviter un AVC, 29 ptients pour éviter un événementcoronarien majeur et 32 patients pour éviter la revascularisation.

Dans SPARCL, atorvastatine 80 mg a été bien toléré. Il n’a pas été ob-servé de différence entre le groupe atorvastatine 80 mg et le placebo, concer-nant les effets indésirables graves.

Les résultats de cette étude corroborent ceux des études précédentesévaluant la stratégie intensive de l’atorvastatine: MIRACL, TNT, ASCOT. L’ori-ginalité de SPARCL est liée à la population concernée : patients présentantun antécédent d’AVC ou AIT sans antécédent de maladie coronaire.

Dr S.L.G.

Etude SPARCL

A.I.M. 117 - 2006

Pour la 1ère fois, un essai, ASTEROID, montre non pas un ralentissement ou une sta-bilisation des lésions, mais une véritable régression de la plaque visualisée grâce àl’IVUS ou imagerie par échographie endo-vasculaire.

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nombre d’hospitalisations pour angor et amputations a été significa-tivement moindre dans le groupe fénofibrate que dans le groupe pla-cebo. De la même façon dans le groupe traitement actif, moins de pa-tients ont recouru à un traitement laser de leur rétinopathie que dansle groupe placebo (3,6 % contre 5,2 %; p = 0,0003). La cible PPARn’est donc pas une cible à négliger chez les diabétiques encor in-demnes d’e complications cardiovasculaires.

L’association d’une statine et du fénofibrate (étude ACCORD) esten cours d’évaluation. Les résultats sont attendus pour 2010.

● L’étude ASTEROID 2 (A Study to Evaluate the Effect of Ro-suvastatine on Intravascular Ultrasound Derived Coronary Athe-roma Burden) présentée à l’American College of Cardiology a dé-montré que des doses élevées de statine (40 mg/j de rosuvastatine)réduisent significativement le volume de la plaque d’athérome.En effet, grâce à l’échographie endovasculaire ou IVUS (Intra-Vas-cular Ultra-Sonography), Steven E. Nissen et collaborateurs ont pudémontré une régression des plaques coronaires instables dans un dé-lai de 24 mois, ce qui est une échelle de temps assez réduite poursuivre l’évolution de l’athérome.

La cible reste le LDL-cholestérol : après 2 ans de traitement, uneréduction moyenne de 53,2 % du taux moyen du LDL-cholestérol aété obtenue. A contrario, dans le même temps, le HDL-cholestérol aaugmenté de 14,7 % (p < 0,001). Parallèlement, à 24 mois, une di-minution moyenne de 2,15 % du volume de la plaque d’athérome surl’ensemble du vaisseau a été observée et de 10,1 % sur le segmentartériel le plus athéromateux ; le volume total d’athérome de l’ar-tère a été ainsi réduit en moyenne de 6,8 % (p < 0,001).

L’adage « lower is better » vérifié notamment dans PROVE-IT etTNT se vérifie à nouveau, ASTEROID a ciblé le LDL-cholestérol defaçon précoce chez des patients porteurs de plaques d’athérome in-stables, à très haut risque de récidive ; l’évaluation s’est appuyéesur une nouvelle approche physique : la preuve physique de larégression anatomique de la plaque.

Propos du Dr Pascale Benlian (hôpital Saint-Antoine, Paris) recueillis par le Dr Sylvie Le Gac

*www.afssaps.sante.fr1. Foger B. Lancet 2006 ; 367 : 1141-2.2. Steven E. Nissen. JAMA 2006 ; 295 : 1556-65.

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● Crestor 5 mg (Rosuvastatine 5 mg), nouveau dosage rem-boursé d’emblée, est mis sur le marché et indiqué en premièreintention, après 3 mois de mesures hygiéno-diététiques bienconduites dans le traitement :

- des hypercholestérolémies pures (type IIa incluant leshypercholestérolémies familiales hétérozygotes) ou des dyslipidé-mies mixtes (type IIb) en complément d’un régime lorsque la réponseaux mesures hygiéno-diététiques n’ont pas été suffisantes et,

- de l’hypercholestérolémie familiale homozygote, en complé-ment du régime et d’autres traitements hypolipémiants ou lorsqueces traitements ne sont pas appropriés.

● Inegy, première association fixe d’ézétimibe 10 mg et desimvastatine 20 mg ou 40 mg, a été mis sur le marché cette an-née. Inegy est indiqué comme traitement adjuvant au régimechez des patients ayant une hypercholestérolémie primaire(familiale hétérozygote et non familiale) ou une dyslipidémiemixte lorsque l’utilisation d’une association est appropriée : pa-tient non contrôlé par une statine seule ou patient recevant déjàune statine et de l’ézétimibe. Inegy réduit efficacement l’excèsde cholestérol en ayant un double impact : la simvastatine inhi-bant l’enzyme HMG-CoA réductase nécessaire au foie pour pro-duire le cholestérol ; l’ézétimibe inhibe l’absorption intestinale ducholestérol d’origine biliaire et alimentaire.

● Tahor 10 mg (atorvastatine 10 mg) a reçu une ASMR 1 dela Haute Autorité de Santé (HAS) signifiant une Amélioration duService Médical Rendu majeure pour son indication dans la pré-vention des événements coronaires et cérébrovasculaires chezles patients diabétiques de type 2, avec un facteur de risque, avecou sans hyperlipidémie associée.

Dr S.L.G.

Nouveautés dans la pharmacopée

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

A suivre…

Cardiologie

Nébivolol : extension d’AMMdans l’insuffisance cardiaque

B êta-bloquant cardiosélectif doté de propriétés vasodilatatrices modé-rées, le nébivolol (Temerit) est commercialisé depuis mai 2004dans l’hypertension artérielle essentielle. Il vient d’obtenir une

extension d’AMM dans l’insuffisance cardiaque, suite aux résultats del’étude SENIORS (Study of the Effects of Nebivolol Intervention on Outcomesand Rehospitalisation in Seniors with heart failure) 1.

L’étude SENIORS a inclus 2135 patients issus de 11 pays d’Europe, âgés de70 ans et plus (moyenne d’âge:76,1 ans).Tous étaient atteints d’insuffisance car-diaque chronique,diagnostiquée cliniquement avec une FEVG ≤ 35 % et/ou unehospitalisation avec un diagnostic d’insuffisance cardiaque congestive au coursdes 12 mois précédents. Ils ont été randomisés en deux bras : un bras nébivolol(1,25 mg/j, augmenté toutes les 2 semaines à 2,5 puis 5 puis 10 mg sur une pé-riode maximale de 16 semaines) et un bras placebo, suivis durant 21 mois.

Résultats 1 : le nébivolol a permis une réduction significative (p = 0,039) de14 % sur le critère principal « mortalité toutes causes ou hospitalisation pourune cause cardiovasculaire ». Il a réduit la mort subite de plus de 35 %. Ce bé-néfice est identique quels que soient la fraction d‘éjection, le sexe et l’âge deces patients ; il devient significatif après 6 mois de traitement.

« Le nébivolol permet d’éviter un décès ou une hospitalisation pour causecardiovasculaire pour 24 patients traités pendant 21 mois », souligne le PrAlain Cohen-Solal (Hôpital Lariboisière, Paris).Par ailleurs, « il y a eu signi-ficativement plus de bradycardie dans le groupe nébivolol (11,1 % vs 2,6 %),mais celle-ci n’a nécessité l’arrêt du traitement que dans 1,2 % des cas. »

Le nébivolol est ainsi le premier bêta-bloquant à avoir montré une ré-duction significative de la morbi-mortalité chez les insuffisants cardiaquesâges de 70 ans et plus, quelle que soit leur FEVG. Suite à ces résultats, l’ESC aintroduit dans ses recommandations le nébivolol parmi les bêta-bloquants pré-conisés dans le traitement de l’insuffisance cardiaque 2.■ F.R.

1. Flather M.D. et al. Eur Heart J Feb 2005 ; 26 : 215-225.2. ESC Guidelines. Guidelines for the diagnosis and treatment of chronic heart failure.

Eur Heart J 2005.

Conférence de Presse Menarini

Neurologie

Maladie d’Alzheimer : une galantamineà libération prolongée

U ne nouvelle forme de galantamine est disponible dans le trai-tement des formes légères à modérément sévères de la mala-die d’Alzheimer : la galantamine à libération prolongée (Remi-

nyl LP), sous forme de gélules. Elle permet une administration quotidienneunique, le matin de préférence avec la nourriture (au lieu d’une administrationbiquotidienne pour la galantamine à libération immédiate).

Premier avantage : cette forme à LP réduit le risque d’oubli. Second avan-tage : elle diminue « l’effet pic » lié à la concentration plasmatique de galanta-mine, limitant les effets indésirables digestifs et permettant une inhibition stablede l’acétylcholinestérase (ACE) dans le temps.

Comme Reminyl à libération immédiate,Reminyl LP a montré, dans uneétude randomisée, en double aveugle, contrôlée vs placebo, une améliora-tion significative à 6 mois : des performances cognitives (évaluées surl’échelle ADS-cog/11 ; p < 0,001) et des activités de base de la vie quoti-dienne (évaluées sur l’échelle ADCS/ADL ; p < 0,001). Son profil de tolérances’est montré comparable à celui de Reminyl à libération immédiate, avec uneincidence moindre des événements gastro-intestinaux.

Rappelons que la galantamine à libération immédiate, lancée en 2001, agitpar un double mécanisme :une inhibition spécifique,compétitive et réversiblede l’ACE,enzyme responsable de la dégradation de l’acétylcholine dans la fentesynaptique ; et une modulation allostérique des récepteurs nicotiniques, quipotentialise l’action de l’acétylcholine. ■ F.R.

Conférence de Presse de Janssen-Cilag

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Diabétologie

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Marie Virally (Paris)

En attendant les nouvelles recommandations de l’HAS concernant laprise en charge thérapeutique du patient diabétique, la recherche etl’évaluation de nouvelles molécules en diabétologie s’accélèrent. Les

toutes récentes communications tenues au dernier congrès américain de laspécialité le prouvent…

Les incrétines

La grande attente en diabétologie

Qu’il s’agisse du congrès de l’Association européenne pour l’étude du dia-bète (EASD) en novembre 2005, de celui de l’Association de Langue Fran-çaise pour l’Etude du Diabète et des Maladies Métaboliques (ALFEDIAM)en mars 2006, ou la très récente réunion de l’American Diabetes Association(ADA) ce mois de juin à Washington, le monde de la diabétologie a vécucette année sous le signe des « incrétines ». Cette nouvelle classe théra-peutique qui relève encore d’études cliniques est en effet particulièrementprometteuse. Les « incrétines » ont été découvertes lorsque les scientifiquesont remarqué que la sécrétion d’insuline était plus importante après une chargeorale en glucose, comparé à une charge intra-veineuse. Dès lors, il devait seproduire un mécanisme au niveau digestif qui permettait de potentialiser lasécrétion d’insuline. C’est ainsi qu’ont été définies et identifiées les incrétinesdont deux hormones particulières, le GLP-1 (glucagon like peptide-1) et leGIP (glucose-dependent insulinotropic polypeptide). Le GLP 1 est très ra-pidement détruit dans le sang par l’enzyme Dipeptidyl- Peptidase-4 (DPP 4).Les rôles physiologiques (chez le sujet sain) du GLP-1 sont intéressants à plusd’un titre. Les « incrétines » ont en effet la capacité de sensibiliser la cel-lule bêta-pancréatique au glucose, d’une part en favorisant la sécrétiond’insuline et d’autre part en favorisant l’inhibition du glucagon (qui n’estpas suffisamment freiné en cas de diabète de type 2 et entraîne une augmen-tation de la production hépatique de glucose). Cette action bénéfique sur lasécrétion d’insuline se différencie de celle des sulfamides car elle est glucose-dépendante, c’est à dire que la sécrétion d’insuline s’arrête lorsque la gly-cémie s’abaisse en dessous des valeurs normales, ce qui diminue le risqued’hypoglycémie.

Par ailleurs, le GLP1 ralentit la vidange gastrique et augmente lasensation de satiété. Enfin, les données chez l’animal montrent que leGLP1 augmente la masse bêta cellulaire. Ce type de molécules est évi-demment très intéressant dans le traitement du diabète de type 2, qui as-socie un déficit de l’insulinosécrétion, un défaut d’inhibition du glucagonet une perte inexorable de la masse bêta-pancréatique au cours du temps.Les recherches de l’industrie se sont ainsi concentrées sur le potentiel duGLP1. Deux voies de recherche ont développé le concept des « incrétino-mimétiques » : la reproduction des analogues du GLP1 ou les inhibiteursde l’enzyme de dégradation, la DPP-4. Les analogues du GLP1 sont in-jectables, alors que les inhibiteurs du DPP-4 s’utilisent par voie orale. L’exe-natide, un analogue de l’exendine-4, extrait de la salive de lézard, (ago-niste du récepteur GLP-1R) est le premier né de cette nouvelle classethérapeutique, commercialisé depuis cette année aux Etats-Unis. L’ar-rivée des inhibiteurs des DPP-4 est attendue pour 2008. Si les incrétinessuscitent aujourd’hui un tel enthousiasme, c’est en raison des nombreuxavantages qu’elles représentent en pratique clinique. En effet, au-delà ducontrôle glycémique, cette nouvelle classe thérapeutique présenterait desavantages majeurs concernant les effets secondaires et/ou les restrictionsde prescriptions : pas d’hypoglycémie, pas d’œdème, neutralité pondérale(voire perte de poids pour les analogues injectables). Si les données d’aug-mentation de masse bêta cellulaire chez l’animal se confirmaient chezl’homme, cette classe thérapeutique contribuerait en outre à limiter l’échap-pement thérapeutique et offrirait la garantie d’un effet plus durable du trai-tement, ce qui se révèle particulièrement intéressant à l’heure où l’inci-dence du diabète augmente, la durée de vie s’allonge, et les objectifsglycémiques imposés de plus en plus bas. Les américains parlent mêmed’une possible modification de l’évolution de la maladie ( « modifying di-sease »). Ainsi, les « incrétines » représentent sans conteste aujourd’hui lagrande attente en diabétologie.

L’insuline inhalée ? Un nouveau confort pour les malades

L’insuline inhalée doit permettre le contrôle des glycémies post-pran-diales agissant comme un analogue de l’insuline à action rapide. Chez les pa-tients diabétiques de type 1, elle pourra remplacer le « bolus » d’insuline ul-tra-rapide fait avant chaque repas, tandis que chez les diabétiques de type 2,elle pourrait remplacer les insulinosécréteurs rapides ou les molécules contrô-lant les excursions glycémiques prandiales. Néanmoins, en pratique clinique,certains points restent encore à déterminer, en ce qui concerne notammentl’effet dose. Cette dernière se révèle en effet moins facilement reproductibleet plus variable en comparaison avec l’injection. En outre, pour l’heure, lespremiers inhalateurs restent d’un format beaucoup plus volumineux que lesinhalateurs bronchodilatateurs. Pour la qualité de vie des malades, il est entout état de cause certain que cette formulation d’insuline sera particulière-ment remarquable pour limiter ou éviter les injections.

Dyslipidémie et HTA du patient diabétique

Les nouvelles recommandations

La prise en charge globale du patient diabétique est plus que jamais né-cessaire comme en ont témoigné les recommandations de la Haute Autoritéde Santé (HAS) sur la prise en charge de la dyslipidémie (mars 2005) et l’hy-pertension artérielle (novembre 2005). En matière de LDL cholestérol, unecatégorie supplémentaire de patients est dessinée, pour laquelle le taux de LDLcholestérol doit être inférieur à 1g/l. Cette catégorie englobe les patients souf-frant de diabète de type 2 à haut risque cardiovasculaire ; c'est-à-dire présentantsoit une atteinte rénale soit deux facteurs de risque supplémentaires (âge [hommede 50 ans ou plus, femme de 60 ans ou plus], antécédents familiaux, tabagisme,hypertension artérielle, HDL-cholestérol inférieur à 0,40 g/l, microalbuminurie).En pratique clinique, il apparaît qu’il s’agit d’une grande majorité des patients.Dans la perspective d’une réduction du taux de LDL chez les patients diabé-tiques, les résultats des essais de morbi-mortalité menés avec des statines (étudeCARDS) ont été fondamentaux, démontrant l’efficacité des statines chez ces pa-tients pour diminuer les événements cardiovasculaires majeurs. Les récents ré-sultats de l’étude FIELD étaient pour leur part particulièrement attendus quantà l’efficacité d’un fibrate chez les diabétiques. Les résultats se révèlent aujour-d’hui négatifs en ce qui concerne les critères primaires choisis :la réduction del’incidence de l’infarctus du myocarde et celle de la mortalité. Au-delà de cesconclusions décevantes, on pourra remarquer que ces résultats concernent unepopulation de patients peu représentative de la majorité des diabétiques de type2. Les patients de l’étude présentaient en effet des taux de triglycérides prochede 1,5 g/l, quand le profil habituel est plus fréquemment marqué par un taux avoi-sinant les 2g/l. Il reste désormais à connaître les résultats de l’association sta-tine/fibrate. Enfin, il faut insister sur l’importance du contrôle tensionnel. Quelque soit le niveau tensionnel, le fait d’être diabétique place le patient dans la ca-tégorie des patients « à haut risque ». Les objectifs sont donc plus stricts < 130/80 mmHg, et encore plus stricts en cas d’atteinte rénale < 120/75 mmHg.

Un objectif glycémique prochainement revu à la baisse

Il semble enfin important de noter que notre prise en charge quotidiennepourrait être marquée par la définition de nouveaux objectifs de suivi. LaHaute Autorité de Santé devrait très prochainement émettre de nouvelles re-commandations. Les objectifs glycémiques sont revus à la baisse, avec untaux d’HbA1c < à 6,5 % et un objectif optimal proche de 6 %. L’intro-duction d’une monothérapie, puis d’une bithérapie dès que l’HbA1c dépasse6.5 %, et d’une trithérapie dès que l’HbA1c dépasse 7 % devrait égalementfigurer dans ces futures recommandations.

Dr Marie Virally (Praticien hospitalier, service de médecine interne Professeur Pierre-Jean Guillausseau, Hôpital Lariboisière, Paris).

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Gastro-entérologie

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Marc-André Bigard (Nancy)

La gastro-entérologie a connu cette année quelques déceptions concer-nant les nouvelles approches thérapeutiques du reflux gastro-œsopha-gien (RGO). Toutefois, ces échecs n’effacent pas le bouleversement thé-

rapeutique que vivent les patients souffrant de MICI (maladies inflammatoireschroniques intestinales) grâce à l’arrivée des biothérapies.

Reflux gastro-œsophagien

RGO et IPP réversibles : déception !

● Des études ont été présentées à l’AGA (American Gastroenterology As-sociation) concernant une nouvelle classe d’inhibiteurs de la pompe à pro-tons, les IPP réversibles au profil pharmacocinétique intéressant. Ces der-niers se fixent sur la pompe grâce à une liaison chimique réversible et nonconvalente (caractérisant les IPP standards), ils bloquent ainsi l’ensembledes pompes à protons en une heure, faisant passer le pH acide à un pHproche de 7. Ce qui ne ressemble pas du tout au profil des IPP standards at-teignant le maximum de leur efficacité au bout de 5 jours.

Un essai de phase II a comparé AZD 0865, IPP réversible, à l’ésomépra-zole. Les investigateurs de cet essai ont randomisé 1500 patients dans 4 groupesde traitement recevant 3 différentes doses d’AZD 0865 ou l’ésoméprazole40 mg/j. Le critère principal de jugement de cet essai était le taux de cicatri-sation à un mois. On appréciait aussi la disparition de la symptomatologiedouloureuse à deux semaines. Aucune différence entre le groupe ésomé-prazole et les différentes doses d’AZD 0865 n’a été trouvée. En revanche,le taux de transaminases était supérieur à 5 fois la normale dans plus de 1 %des cas chez les patients sous AZD 0865. Cette hépatotoxicité a conduit le la-boratoire Astra Zeneca à l’arrêt du développement de la molécule. Ceci pré-sage-t-il de la fin des IPP réversibles? Rien n’est moins sûr, il reste une mo-lécule en développement au sein du laboratoire Altana Pharma.

La suprématie des IPP standards n’est pas à ce jour entamée : leur effica-cité reste inégalée, leur bon profil de sécurité d’emploi et leur tolérance nesont pas remis en cause. Cette efficacité médicamenteuse a réduit considéra-blement les indications chirurgicales qui restent préconisées dans des RGOgraves, invalidants : le nombre d’interventions chirurgicales était de 4300 enl’an 2000 et est actuellement inférieur à 2000.

Echec de toutes les techniques endoscopiques anti-reflux

● Les techniques endoscopiques anti-reflux avaient fait l’objet de nom-breuses publications dans la presse internationale ; elles s’appuyaient sur dif-férentes méthodes pour juguler le reflux gastro-oesophagien :

- l’injection de biopolymères au niveau du sphincter du bas œsophage ;- la réalisation de plicatures de la muqueuse au niveau du cardia ;- l’insertion de petites prothèses sous la muqueuse au niveau du cardia qui

gonflaient pour resserrer le cardia ;- la radio-fréquence qui consistait à chauffer le muscle à 80°C et à induire

par ce biais une sclérose du sphincter inférieur de l’œsophage (SIO).Ces techniques ont été jugées inefficaces à la suite des essais dirigés

aux Etats-Unis les comparant « aux procédures fantômes » réalisées endouble aveugle. Les essais ont ainsi démontré des résultats comparables auplacebo notamment pour les procédures telles que la réalisation de plicaturesou encore la radiofréquence. Des accidents graves voire mortels liés à l’in-jection de biopolymères en dehors du SIO (notamment au niveau du médias-tin) ont conduit l’Afssaps et la FDA (Food and Drug Administration) à inter-dire en octobre 2005 cette technique.

Dysplasies œsophagiennes

Thérapie photodynamique : des dysplasies œsophagiennesau cancer de l’œsophage

● En septembre 2005 ont été rendues publiques des recommandations surla thérapie photodynamique qui comprend trois indications essentielles :

- la dysplasie de haut grade sur endobrachyœsophage ;- le traitement palliatif à visée de désobstruction ;- le traitement des récidives de lésions œsophagiennes superficielles après

traitement du cancer de l’œsophage.Ces nouvelles recommandations ont été motivées par la venue sur le mar-

ché français du Photobarr qui a obtenu l’AMM dans le Barrett avec dysplasiede haut grade ou cancer superficiel. Ainsi, les patients ont une injection avantles cures de thérapie photodynamique de Photobarr pour une photosensibilisa-tion préalable. Les résultats sont assez satisfaisants ; ce procédé qui n’est pasrécent a bénéficié d’améliorations technologiques notables ; néanmoins, il in-duit une nécrose profonde qui peut avoir pour conséquence dans 30 % des casune sténose œsophagienne, après 2 cures on peut atteindre 60 % de sténosesdevant être dilatées secondairement (avec le cortège de complications possibles).

Réflexion autour du Barrett

● L’attitude à l’égard du Barrett est en train d’être révisée; sa gravité mêmesi elle est réelle ne doit pas être au demeurant surestimée. Les stratégies dedépistage n’ont pas prouvé leur efficacité : un cancer de dépisté pour 250 pa-tients/année. Le suivi de tels patients implique de leur proposer un traitementqui est souvent l’œsophagectomie.

Ulcère gastro-duodénal

Helicobacter pylori : antibiothérapie de 1ère,2ème voire 3ème ligne

La première ligne thérapeutique reste l’association amoxicilline + clary-thromycine + IPP pendant 7 jours ; la deuxième ligne est l’association amoxi-cilline + imidazolé + IPP pendant 14 jours ; la troisième ligne est l’associa-tion amoxicilline + lévofloxacine + IPP.

Un gastro-entérologue allemand a caractérisé in vivo H. pylori grâce à unendoscope permettant des coupes de muqueuse en microscopie « confocale ».Cet appareillage est très onéreux et la sensibilité et la spécificité d’un tel exa-men est comparable au test respiratoire.

Endobrachyœsophage.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

A.I.M. 117 - 2006

Maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI) en plein bouleversement

RCH et biothérapies● L’infliximab a eu une AMM délivrée par l’EMEA (Agence européenne

du médicament) l’année dernière dans le traitement de la recto-colite hémor-ragique (RCH), six ans après l’obtention de son AMM dans la maladie deCrohn. Cette nouvelle indication dans la RCH s’est appuyée sur les résul-tats des études ACT 1 et ACT 2 1 : le traitement par infliximab a permis d’ob-tenir un taux de réponse de 65 % à 69 % à la huitième semaine contre 30 %à 37 % avec le placebo. L’infliximab peut donc être utilisé désormais chez lespatients souffrant d’une recto-colite hémorragique sévère réfractaire ou into-lérante aux corticostéroïdes et aux immunosuppresseurs (aziathioprine). Sonadministration implique une injection par voie intraveineuse de 2h toutes les8 semaines.

● Des résultats préliminaires d’une étude de phase I-II concernant le vi-silizumab, anticorps humanisé anti-CD3, dont l’efficacité a été évaluée dansla RCH sévère, ont été présentés dans le cadre des journées de la SNFGE. Cetanticorps monoclonal anti-CD3 agit en induisant l’apoptose des lymphocytesT activés muqueux et en réduisant le recrutement des lymphocytes CXCR3+ dans la muqueuse. 54 malades ont été inclus. Le visilizumab a eu une effi-cacité clinique et endoscopique pour toutes les doses testées avec un effet ra-pide dans la RCH réfractaire aux corticoïdes. La poursuite de l’essai vise àdéfinir la dose optimale à utiliser.

Maladie de Crohn et anti-TNF-alpha● Deux autres anti-TNF-alpha sont en développement cette fois dans la

maladie de Crohn modérée à sévère :- l’adalimumab (Humira, laboratoires Abbott) dont l’avantage est la

voie sous-cutanée avec une injection toutes les deux semaines ;- le certolizumab Pegol (Cimzia, laboratoires UCB) administré égale-

ment par voie sous-cutanée, est un fragment Fab PEGylé humanisé anti-TNF-alpha, permettant une injection toutes les 4 semaines.

Deux essais de phase III ont été présentés à l’AGA: l’essai CHARM avecl’adalimumab et l’essai Precise 1 avec le certolizumab. Difficile de comparerles résultats de ces deux essais car la méthodologie et les critères de jugementprincipaux ne sont pas les mêmes. Toutefois, actuellement, il ne semble pasy avoir de différences fondamentales importantes en termes de rémission, deréponse clinique, de cicatrisation endoscopique entre les 3 anti-TNF-alpha.

L’Humira est déjà disponible pour le traitement de la polyarthrite rhuma-toïde mais n’a pas encore l’AMM dans la maladie de Crohn et donc non rem-boursée dans cette indication. Le certolizumab est en cours d’enregistrementauprès de l’EMEA.

● L’infliximab était en cours d’enregistrement chez l’enfant dans le trai-tement de la maladie de Crohn mais tout récemment sur des données de phar-macovigilance, six cas de lymphomes hépatospléniques (5 cas mortels) ontété déclarés chez des patients recevant l’aziathioprine associé à l’infliximab.La conséquence de tels événements est le ralentissement sensible de la pro-cédure d’enregistrement et une réévaluation du rapport bénéfice/risque.

Un grand registre présenté à l’AGA incluant 15 000 patients traités par in-fliximab a permis d’identifier les facteurs de risque infectieux : il s’agit descorticostéroïdes et des drogues illicites (héroïne, cocaïne).

Les nouvelles explorations des voies digestives basses

Leurs applications cliniques :de la vidéocapsule à l’entéroscopie à double ballon

L’exploration du tube digestif par vidéocapsule est indiquée dans les hé-morragies digestives des anémies inexpliquées. Cette vidéocapsule aide éga-lement à mieux caractériser des lésions de maladie de Crohn. Toutefois, il fautse méfier de toute interprétation hâtive car il s’avère que même des sujetssains peuvent avoir des érosions de la muqueuse du grêle : on ne sait donc pasce qu’est un grêle parfaitement sain. Ces lésions ne doivent pas être étique-tées abusivement maladie de Crohn, il convient de rester prudent. Le plus sou-vent en cas d’hémorragies inexpliquées, ce sont des angiodysplasies du grêle,des dégénérescences vasculaires présents chez le sujet âgé.

L’atout de l’entéroscopie à double ballon est la possibilité de traiter aumoment de l’exploration, il est possible notamment de réaliser une coagula-tion endoscopique dans le cas de lésions angiodysplasiques, par exemple.Néanmoins, c’est une technique lourde à mettre en œuvre.

Diverticulite sigmoïdienne

Recommandations de pratique clinique

Ces recommandations n’ont pas encore été publiées mais ont été présen-tées dans le cadre des Journées francophones de la SFNGE.

● Il est recommandé de réaliser un examen TDM à tous le patients cli-niquement suspects de diverticulite du colon et ce, à chaque épisode afin :

- d’établir le diagnostic positif (infiltration péricolique associée à la pré-sence de diverticules) ;

- de poser un diagnostic alterne ;- d’aider à la prise de décision thérapeutique en urgence (drainage d’un

abcès, chirurgie en urgence) et à distance (nombre de poussées inflamma-toires).

Cet examen TDM doit être réalisé dans les 24h suivant l’admission despatients ou dans les 72h suivant la suspicion diagnostique et la mise en routedu traitement antibiotique pour les patients non hospitalisés.

● En ambulatoire, il est recommandé dans la diverticulose sigmoïdiennenon compliquée d’utiliser en première intention une antibiothérapie orale as-sociant une pénicilline A et un inhibiteur de beta-lactamase pendant 7 à 10jours. Ou en cas d’allergie aux beta-lactamines, d’utiliser une fluoroquino-lone (Ofloxacine) associée à un nitro-imidazolé. La durée du traitement estfonction de l’évolution.

En hospitalisation, l’antibiothérapie sera administrée par voie IV.● Concernant le traitement chirurgical à froid de la diverticulite sigmoïdienne:- Il est recommandé de réaliser une chirurgie prophylactique après une

poussée de diverticulite avec signes de gravité scanographiques (niveau B) ;- En l’absence de signes de gravité scanographiques, le bénéfice réel de

la chirurgie prophylactique, même après 2 poussées, reste à évaluer ;- Chez le sujet de moins de 50 ans, après une première poussée de diver-

ticulite même sans signes scanographiques de gravité, du fait du risque plusélevé de récidive, la chirurgie prophylactique peut être proposée dès la pre-mière poussée, mais son bénéfice est discuté ; Un délai d’environ deux moisest recommandé après la dernière poussée de diverticulite.

Avant cette intervention, la coloscopie est recommandée pour explorerl’ensemble du cadre colique, en particulier chez les patients de plus de 50 ans,et chez les patients à risque élevé de cancer recto-colique.

- Chez le sujet de plus de 60 ans, il convient d’attendre la deuxième criseavant d’envisager la chirurgie.

Le bilan sera complété d’une NFS dans les 48h.

Propos du Pr Marc-André Bigard (Chef du service de Gastro-Entérolo-gie du CHU de Brabois, Nancy) recueillis par le Dr Sylvie Le Gac

1. Rutgeerts P and al. Infliximab induction and maintenance therapy for active ulce-rative colitis : the Act-1 and Act-2 studies. N Engl J Med 2005 ; 353 (23) : 2462-76.

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Diverticulite sigmoïdienne : 2 diverticules sont visibles (en rouge). TDM, coloscanner encoupe axiale, position decubitus dorsal, d’un patient de 77 ans, fausses couleurs.

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Hépatologie

A.I.M. 117 - 2006

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Jean-Pierre Bronowicki (Nancy)

Des données épidémiologiques récentes à la conférence européenne deconsensus en passant par les nouvelles pistes thérapeutiques des hé-patites virales et de la cirrhose, l’hépatologie ne nous déçoit pas en-

core cette année.

Co-infections VIH et VHC ou VHB

Recommandations consensuelles1 pour la prise en chargedes patients

● Une première conférence européenne de consensus1 sur le traitementde l’hépatite chronique B et C chez des patients co-infectés par le VIH, et leVHC ou le VHB, rendue publique en 2005, rappelle que la première cause demortalité des patients VIH + est liée aux hépatites virales, dont l’hépatiteC. Ces patients doivent être suivis de manière rapprochée afin deréaliser une réévaluation histologique régulière, sachant quele traitement Peg-interféron et ribavirine donne des ré-sultats tout à fait satisfaisants, évitant une comorbi-dité élevée liée à cette affection hépatique. Ce trai-tement est proposé à partir d’une échelle de fibroseF2 (échelle allant de F0 à F4) ; la difficulté étantde persuader les patients déjà polymédica-mentés de prendre des traitements aux effetssecondaires non négligeables.

Le problème posé par l’hépatite B esttout autre puisqu’un grand nombre d’anti-rétroviraux sont actifs sur le VHB, ce quine fait que confirmer l’efficacité de cestraitements.

● Des données épidémiologiques ré-centes françaises corroborent celles de laconférence européenne de consensus. En ef-fet, une étude financée par l’ANRS (Agencenationale de la recherche sur le sida et les hé-patites virales) présentée dans le cadre du derniercongrès de l’Association européenne pour l’étudedu foie (European Association for the Study of theLiver) et dirigée par des équipes Inserm, l’InVs ainsique des Sociétés savantes, révèle la gravité de l’infectionpar le VHB et le VHC en France.

Le nombre de décès imputables à ces virus est estimé, en 2001,à près de 4000 : le nombre de décès imputables au VHC est de 2 646 et auVHB de 1 327. Le taux de décès annuel lié à ces deux pathologies est de4,5 pour 100 000 pour le VHC et 2,2 pour 100 000 pour le VHB. 73 % dessujets décédés de l’hépatite C présentaient une cirrhose et 25 % un carci-nome hépato-cellulaire sur cirrhose. 84 % des sujets décédés d’une hépa-tite B étaient atteints d’une cirrhose et 31 % d’un carcinome hépato-cellu-laire sur cirrhose.

Pour l’infection par le virus VHC, ces chiffres et ces pathologies associéess’expliquent par le nombre de personnes contaminées il y a 20 à 30 ans aprèstransfusion sanguine et qui ont développé des pathologies carcinologiques surcirrhose et des cancers primitifs du foie. Ces patients, longtemps asympto-matiques (puisque la maladie du foie se développe de façon insidieuse), ontété victimes d’une inertie de prise en charge thérapeutique soit par échappe-ment au traitement, soit parce qu’ils n’ont pas bénéficié du traitement opti-mal à un stade très sévère de la maladie (cirrhose).

Une étude Inserm réalisée auprès de 15000 assurés sociaux tirés au sort aévalué la prévalence des hépatites C et B estimée à 0,8 % soit 400 000 infec-tés par le VHC et à 0,6 % soit 300 000 par le VHB. De plus, dans cette étude,40 % à 50 % des personnes ne connaissaient par leur statut sérologique parrapport au VHB et VHC.

Il convient donc de renforcer les stratégies de prévention et de sensi-biliser les médecins et le grand public au dépistage, plus particulièrementlorsqu’on s’adresse à des populations à risque.

Hépatite C chronique

Les génotypes 2 et 3 doivent bénéficier d’un traitement de 24 semaines

● Un nouvel essai, ACCELERATE2, a permis d'établir que 24 semainesd'administration d'une thérapie contre l'hépatite C combinant l'interféronpégylé (Peg-interféron alpha-2a) et la ribavirine offre de meilleurs résul-tats que 16 semaines pour les patients infectés avec les génotypes 2 et 3 del'hépatite C. Les huit semaines supplémentaires de traitement impliquentune plus grande probabilité de rémission chez les patients atteints d'hépa-tite C chronique.

Ces résultats contredisent les résultats de trois essais plus limités suggé-rant que le traitement de patients présentant une PCR négative après 4

semaines de traitement pouvait bénéficier d’une période théra-peutique plus courte (12 voire 14 semaines) induisant une

réponse virologique prolongée. Cet essai ACCELE-RATE plus étendu a clairement établi que les pa-

tients atteints des génotypes 2 et 3 du VHC, mêmeceux présentant une réponse virologique rapide,

nécessitent vraiment 24 semaines de traite-ment.

Au total, 1469 patients de huit pays ontparticipé à cet essai, ce qui en fait le plusgrand essai prospectif sur cette popula-tion. Lors de l'essai, les patients recevaientde façon randomisée du Peg-interféronalfa-2a (40KD) 180 mg une fois par se-maine et de la ribavirine 800 mg pendant16 ou 24 semaines. Puis venait un suivide 24 semaines sans traitement.

Les résultats ont démontré un taux deréponse virologique après 24 semaines

de thérapie égale à 76 % contre 65 % chezles patients recevant une thérapie pendant

16 semaines ; un taux de rechute plus im-portant chez les patients traités 16 semaines,

29 %, contre 16 % chez les patients traités sur24 semaines.Il convient de proposer quel que soit le statut du

patient, mono-infecté ou co-infecté, une bithérapie (Peg-interféron et ribavirine) pendant 48 semaines pour les patients

infectés par un VHC de génotype 1, 4, 5 ou 6 et 24 semaines pour des gé-notypes 2 et 3.

● Les génotypes 1 (60 % à 70 % de la population traitée en France) sonttraités par Peg-Interféron et ribavirine pendant 48 semaines soit un an environ.

Une étude espagnole multicentrique randomisée menée auprès de 517 pa-tients et présentée dans le cadre du congrès américain d’hépatologie a dé-montré que chez les patients qui n’avaient pas de réponse positive très pré-coce (PCR positive après 4 semaines de traitement), la réponse virologiqueétait encore meilleure chez les sujets traités 72 semaines par Peg-Interféronalpha-2a (180 µg/j) + ribavirine (800 mg/j) comparativement à ceux traités48 semaines, 44 % versus 28 % respectivement ; la différence était très si-gnificative, la tolérance étant comparable dans les 2 groupes. Cette piste de-mande à être vérifiée mais semble être intéressante pour les patients qui né-gativent leur PCR à partir de la 12ème semaine.

Au 41ème congrès de l’EASL, ont été présentés les résultats obtenus avec uninhibiteur de polymérase oral, le R1626 développé par les laboratoires Roche.Le médicament a permis de réduire de façon significative la charge virale chezles patients infectés par le virus de l’hépatite C chronique de génotype 1.

● La difficulté de l’étude du VHC est qu’il n’existe pas de modèles ani-maux pour cultiver le virus. Certaines équipes ont transfecté des hépatocytespar des gènes viraux permettant de produire des virions in vitro. ©

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

A.I.M. 117 - 2005

Ainsi, il est possible de tester des molécules inhibant certaines enzymesspécifiques du virus de l’hépatite C telles que l’inhibiteur de la RNA-poly-mérase développé notamment par les laboratoires Idenix sous le nom de Va-lopicitabine et les anti-protéases, le VX950 et le SCH 503034 (ce dernier dé-veloppé par Schering-Plough). Ces deux dernières molécules ont fait l’objetd’études de phase II. Leur intérêt réside dans le fait qu’elles potentialisentl’efficacité du traitement anti-viral par Peg-Interféron et diminuent de fait lacharge virale.

Des études de phase III débutent avec la Valopicitabine chez les patientsnon répondeurs au traitement Peg-Interféron + ribavirine et également chezles patients naïfs de génotype 1. Cet inhibiteur de l’ARN-polymérase à ladose de 800 mg/j a une certaine toxicité digestive motivant le laboratoire àle développer à la dose de 400 mg/j au risque d’en diminuer l’efficacité. Àsuivre donc.

Hépatite B

La famille des analogues nucléosidiques ou nucléotidiques s’agrandit

Trois traitements ont l’AMM en France : l’adéfovir, la lamivudine et lePeg-interféron alpha-2a.

● L’entécavir développé par les laboratoires BMS, anti-nucléoside, estplus efficace que la lamivudine sur la réponse virologique, sur la normalisa-tion des transaminases et des lésions histologiques chez les patients AgHBe+ et AgHBe-.

Aucune résistance n’a été mise en évidence après 2 ans de traitement. L’en-técavir est également efficace chez les patients ayant une résistance à la la-mivudine. Mais dans cette population, le taux de résistance à l’entécavir estde 9 % à un an.

L’entécavir a reçu l’AMM aux États-Unis. Ce nouveau traitement est at-tendu cette année en France.

● Les laboratoires Gilead comparent actuellement dans un essai l’effi-cacité de l’adéfovir au ténofovir (anti-nucléotide très puissant pour contrô-ler la réplication virale), actuellement utilisé pour le traitement des patientsVIH +

Reste à savoir comment toutes ces molécules vont être préconisées dansles protocoles thérapeutiques. La tendance est de privilégier les associa-tions thérapeutiques chez les patients qui présentent une résistance à la la-mivudine.

Cirrhose

De nouvelles pistes de traitement

Une étude préclinique3 dirigée par l’Unité Inserm 581 vient de montrerqu’un antagoniste des récepteurs CB1 des cannabinoïdes, le rimonabant, ré-duit la progression de la fibrose hépatique, qui mène à la cirrhose, dans plu-sieurs modèles expérimentaux. Ces travaux s’appuient sur des données éta-blies : l’usage quotidien de cannabis accélère l’évolution vers la cirrhose despatients atteints d’hépatite chronique C ; ces résultats suggèrent que la sti-mulation des récepteurs du cannabis peut jouer un rôle dans la progressionde la fibrose associée aux maladies chroniques du foie.

Ces données ont des applications cliniques immédiates : chez tout patientprésentant une hépatopathie, il faut recommander l’arrêt de l’alcool mais éga-lement du cannabis si le sujet en est consommateur.

Propos du Pr Jean-Pierre Bronowicki (CHU de Brabois, Nancy)recueillis par le Dr Sylvie Le Gac

1. Première conférence européenne de consensus sur le traitement de l’hépatite chro-nique B et C chez des patients co-infectés par le VIH, et le VHC ou le VHB. Mars 2005.http://www.infectiologie.com.

2. Schiffman ML, Pappas S, Nyberg L et al. Résultats finaux de l'essai ACCELE-RATE. Présentés à la 41ème conférence de l'Association européenne d'étude du foie, te-nue du 26 au 30 avril 2006. Prochainement publié dans GastroEnterology 2006.

3. Lotersztajn S. and al. Nature Medicine. Juin 2006.

À suivre…

Hépatite B

Le risque d’hépatocarcinome varie en fonction de la charge virale…

Une étude multicentrique taïwanaise 1 a cherché à mettre enévidence l’existence d’un risque accru de développer un can-cer du foie chez les patients atteints d’une hépatite chronique Β

présentant des concentrations élevées du VHB. L’étude REVEAL -HBV(Risk Evaluation of Viral Load Elevation and Associated Liver Di-sease/Cancer - HBV) a suivi, sur une durée moyenne de 11,4 années,3 653 patients (âgés de 30 à 65 ans) chez lesquels le diagnostic d’hé-patite B chronique avait été posé entre 1991 et 1992. Les résultats decette grande étude qui représente le suivi de 41 779 patients - annéeslaissent à penser qu’il existe une corrélation entre des taux éle-vés d’ADV viral à l’inclusion et le risque de survenue d’un car-cinome hépato-cellulaire (voir courbe) : les patients inclus qui pré-sentaient une élévation persistante de leur charge virale (HBV-DNA)tout au long des années de suivi ont eu le plus haut risque de déve-lopper un cancer du foie. L’incidence cumulative du cancer hé-pato-cellulaire (à la fin des 13 ans de suivi) passe de 1,30 pourune charge virale indétectable, (<300 copies/ml) à 14, 89 quandla charge virale est ≥1 million de copies/ml. Ce lien est indé-

pendant d’autres facteurs tels que le sexe, l’âge, le tabac, la consom-mation d’alcool, les antigènes HBe, le taux d’ALAT ou encore la pré-sence de lésions hépatiques ou de cirrhose à l’entrée dans l’étude.Lestaux sanguins élevés du virus semblent donc bien être un facteur pré-dictif important d’évolution vers le cancer du foie. Dans ce contexte,une autre étude 2 concernant les résultats virologiques d’un traitementpar l’entécavir versus lamivudine (étude clinique de phase 3) est in-téressante. Les patients étaient naïfs de nucléosides antigène HBe né-gatifs et atteints d’une hépatite chronique (n = 638). Sur une périodede 96 semaines, 94 % des patients traités par entécavir ont pré-senté une charge virale indétectable (<300 copies/ml), compa-rés à 77 % des patients traités par lamivudine (p < 0,0001), au-cune résistance n’étant observée au cours des 96 semaines de suividans le groupe entécavir chez ces patients qui ne présentaient pas derésistance à la lamivudine à l’inclusion. ■ Dr P.B.

1. Chien-Jen Chen et al JAMA 2006 ; 295 : 65 -732. D. Shouval et al. Abstract ID: 45. 41ème congrès de l’EASL Mise à jour des résul-

tats à 48 semaines de l’étude de Ching-Lung Lai et al N EnglJMed 2006; 354: 1011-20.

Conférence de presse européenne des Laboratoires BMS dans lecadre du 41ème congrès de l’European Association for Study of Liver(Vienne)

L’incidence cumulative de carcinome hépatocellulaire est corrélée à l’augmenta-tion de la charge virale (HBV-DNA)

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13Années de suivi

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Rhumatologie

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Jean-Marie Le Parc (Boulogne)

La rhumatologie est définitivement sortie de ses errements thérapeu-tiques et de sa faible technicité. Une deuxième époque s’ouvre : cellede l’évaluation des nouveaux acquis, de l’innovation à partir des voies

thérapeutiques nouvelles. Ces réels progrès intéressent un domaine majeur desanté publique : l’ostéoporose.

Ostéoporose post-ménopausique

Remboursement de la densitométrie osseuse et nouveauxmédicaments

C’est indiscutablement une année faste pour ce domaine touchant plu-sieurs millions d’individus et pesant à terme sur les coûts de santé.

Le remboursement de la densitométrie osseuse annoncé par les autori-tés ministérielles pour juillet est une avancée très significative et l’aboutisse-ment des travaux des nombreux collègues regroupés au sein du GRIO (Groupede Recherche et d’Information sur les Ostéoporoses) et partenaires actifs del’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé).Les règles de prescription sont logiques et encadrées pour éviter toute dérive.

Les possibilités thérapeutiques de l’ostéoporose post-ménopausique sesont enrichies de plusieurs molécules, originales.

Le tériparatide et le ranélate de strontium convergent vers une stimu-lation ostéoblastique et donc un mode d’action différent des bisphosphonates.

- Le teriparatide (Forstéo, laboratoires Lilly) est un fragment de PTHen injection sous-cutanée quotidienne indiquée chez les patientes ayant faitplus de deux fractures vertébrales ostéoporotiques post-ménopausiques ; uneréduction significative de l’incidence des fractures vertébrales, mais non desfractures de hanche a été démontrée ; la durée de traitement est pour l’instantlimitée à dix-huit mois. Ce médicament peut être prescrit d’emblée en casd’ostéoporose sévère. La prescription après une phase de traitement par bis-phosphonates n’altère pas son efficacité ; la compliance se révèle bonne.

- le ranélate de strontium (Protelos, laboratoires Servier) est le fruit delongues années de recherche au sein de l’Institut Servier. Le ranélate de stron-tium stimule la prolifération ostéoblastique et réduit la résorption. Il est admi-nistré per os en une prise quotidienne. Il prévient de façon significative les nou-velles fractures vertébrales et diminue le risque de fracture du col fémoral chezles patients les plus à risque. Deux études cliniques ont démontré l’efficacité duranélate de strontium: SOTI1 (Spinal Osteoporosis Therapeutic Intervention)et TROPOS2 (TReatment Of Peripheral OSteoporosis). Ces études ont mon-tré que Protelos diminuait le risque de nouvelle fracture vertébrale de 41 % avecun effet significatif dès la première année; cette efficacité s’avère pérenne (suivià 5 ans) – le ranélate de strontium ayant un poids atomique élevé peut modifierartificiellement les données de l’ostéodensitométrie (surestimation) –. Il s’avèreun médicament innovant, en particulier dans la tranche d’âge élevée, au-delàde 70 ans, à côté des bisphosphonates.

La famille des bisphosphonates s’est également enrichie de deux nouveauxproduits :

- Fosavance associant l’alendronate 70 mg (Fosamax) à la vitamine D(cholécalciférol, 2800 UI) est indiqué dans le traitement de l’ostéoporosepost-ménopausique avérée avec au moins une fracture ostéoporotique chezles patients à risque d’insuffisance en vitamine D. Fosavance a pris appui sur :l’efficacité de Fosamax, démontrée notamment dans l’étude FIT3 (FractureIntervention Trial) sur la réduction du risque relatif de fractures vertébraleset du col du fémur chez les femmes ménopausées ostéoporotiques et sur lesrecommandations de l’Afssaps rappelant la correction des déficits éventuelsen calcium et vitamine D, préalable indispensable à la mise en route d’un trai-tement anti-ostéoporotique et qui devra être poursuivi.

- Bonviva (ibandronate, laboratoires Roche et GlaxoSmithKline), puis-sant bisphosphonate, autorisant un traitement mensuel sous forme de com-primé oral. Son efficacité dans l’ostéoporose post-ménopausique s’appuie surl’étude de phase III MOBILE (Monthly Oral iBandronate In Ladies) : ef-ficacité sur la densité minérale osseuse (DMO) se traduisant par une diminu-tion significative de l’incidence des fractures vertébrales. Bonviva 150 mg,forme orale mensuelle, a obtenu une homologation européenne mais n’est pasencore disponible en France.

2005 a vu les autorités sanitaires prendre des positions claires en rédigeantdes recommandations de 1/ la prescription de la DMO, 2/ de l’utilisation destraitements selon les tranches d’âge et les situations cliniques.

Biothérapie et anti-TNFα

Les premiers enseignements de l’utilisation des anti-TNFααse précisent

Le recul acquis par l’utilisation des anti-TNFα permet de mieux appré-hender les effets secondaires et leur prévention.

La crainte de l’émergence excessive des tumeurs solides s’éloigne (saufpour les vaso- et spino-cellules), reste une hypothèse sur l’excès des lym-phomes, jusque là non confirmée. Les anti-TNFα ont fait l’objet dans leursdeux grandes indications (spondylarthrite ankylosante (SPA), polyarthrite rhu-matoïde (PR) de consensus européens identifiant le profil des patients qui sontredevables de ces thérapeutiques. Plusieurs études ont simultanément pu dé-gager le profil clinique et biologique initial des patients susceptibles de bé-néficier au maximum de ces thérapeutiques.

2005 aura également apporté au clinicien plusieurs éléments nouveaux :- l’absence d’efficacité des anti-TNFα dans le syndrome de Sjögren pri-

mitif ;- la possibilité de moduler les posologies des anti-TNFα selon l’état de la

réponse aux posologies standards ;- l’absence de résistance croisée entre les trois anti-TNFα.Les infections restent la complication la plus fréquente des rhumatismes

inflammatoires incitant à ne pas relâcher la surveillance et à constammentéduquer le patient traité.

L’utilisation des anti-TNFα débute dans d’autres connectivites mais il fautattendre des cohortes en nombre suffisant.

Chez la femme ménopausée, il est recommandé de réaliser une os-téo-densitométrie devant :

● la découverte radiologique d’une fracture vertébrale sans caractèretraumatique ni tumoral évident.

● un antécédent personnel de fracture périphérique survenue sans trau-matisme majeur (sont exclues de ce cadre les fractures du crâne, des orteils,des doigts et du rachis cervical).

● des antécédents documentés de pathologies potentiellement induc-trices d’ostéoporose en particulier : hypogonadisme prolongé, hyperthyroï-die évolutive non traitée, hypercorticisme et hyperparathyroïdie primitive.

La réalisation d’une ostéo-densitométrie peut être proposée chez lafemme ménopausée en présence d’un ou de plusieurs des facteurs derisque suivants :

● des antécédents de fracture vertébrale ou du col fémoral sans trau-matisme majeur chez un parent au 1er degré.

● un indice de masse corporel < 19 kg/m2.● ménopause avant 40 ans quelle qu’en soit la cause ou ménopause ia-

trogénique.● antécédent de corticothérapie prolongée (> 3 mois) à la dose de cor-

ticoïde équivalent à la prise de Prednisone à 7,5 mg par jour.

Il n’est pas recommandé de réaliser une ostéo-densitométrie chezune femme ménopausée :

● chez laquelle le traitement hormonal substitutif (THM) est indiqué, pres-crit à dose efficace (pour assurer une prévention de l’ostéoporose) et estbien suivi.

● lorsque le résultat de l’ostéo-densitométrie est normal et qu’aucun trai-tement n’est institué, une deuxième ostéo-densitométrie peut être proposée2 à 5 ans après la réalisation de la première et ce, en fonction de l’ancien-neté de la ménopause, du résultat de la première mesure et de la persistanceou de l’apparition de facteurs de risque.

Indication de l’ostéo-densitométrie

2006 - A.I.M. 117

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A.I.M. 117 - 2006

Autres anticorps monoclonaux en développement

Zoom sur le rituximab

Plusieurs molécules ont montré des effets intéressant dans la polyarthriterhumatoïde. La plus connue, utilisée depuis longtemps est le rituximab quiselon un protocole comportant deux perfusions espacées de quinze jours in-duit une déplétion lymphocytaire suivie d’une amélioration spectaculairedes indicateurs d’activité (ACR/DAS).

L’anti-IL6 et le CTL4 I5 en développement dans les PR réfractaires ap-parait comme des biothérapies intéressantes mais dont les effets secondairesdoivent être encore mieux étudiés.

L’imagerie des rhumatismes inflammatoires et de l’arthrose

Une évolution positive indiscutable

L’échographie-doppler et l’IRM sont amenées à devenir des outils pré-cieux dès le début des rhumatismes inflammatoires encore inclassés, pour dé-tecter des synovites et des enthésopathies inflammatoires que la radiographiestandard ne révèlera que très tardivement.

L’échographie, compte tenu de sa facilité d’utilisation entre des mains ren-dues expertes, son faible coût, fera partie de l’arsenal technique des rhuma-tologues formés selon des critères rigoureux. Les autres confieront leurs pa-tients à des rhumatologues qui, à l’instar des cardiologues, auront acquis cesavoir nouveau. Il reste bien sûr du chemin à parcourir mais les choses vontvite. Comme pour l’IRM il reste à standardiser les procédures de réalisationdes examens et à s’accorder sur le normal et le pathologique.

L’IRM reste un gold standard mais sont coût, le temps de machine parfoisexcessivement long sont des facteurs limitant tout comme son accessibilité.Il reste que des données accumulées en 2005 avec de très beaux travaux franco-français mettent à l’évidence l’IRM en pointe autant dans l’exploration deslésions précoces de la PR (primauté de l’oedème osseux au début) que dansl’étude -plus délicate- du cartilage et de l’os arthrosique.

Ces avancées en imagerie sont dès maintenant des outils d’analyse desréponses aux traitements récents.

On a vu que l’IRM à haut champ est une technologie évoluant vers un em-ploi commun. Le risque est un encombrement des machines pour des exa-mens prescrits sans réflexion et occupant du temps machine qui aurait pu ser-vir plus efficacement.

Le débat est lancé au sein de la communauté des rhumatologues sur l’in-térêt des IRM dédiées à faible champ, occupant un volume restreint mais ca-pables sur les appareils actuels de donner des renseignements fiables aux ex-trémités et aux genoux. Pour l’instant, le débat est engagé il faut souhaiter lacompréhension des pouvoirs publics dans un pays où le nombre d’IRM estun des plus faibles d’Europe.

Arthrose et arthropathies diverses

Des travaux prospectifs révélateurs

Si les progrès objectifs restent modestes au plan thérapeutique – travauxà poursuivre sur le blocage de l’IL1- plusieurs travaux prospectifs ont permisde mettre en évidence l’intérêt du dosage sérique de produits de dégra-dation du collagène articulaire qui deviendront avec d’autres indices desoutils permettant d’isoler des patientes dont l’arthropathie dégénérative évo-lue rapidement et doit faire l’objet d’une attention particulière pour tenter defreiner le processus évolutif.

L’IRM devient un outil d’évaluation et de suivi du processus arthro-sique. Comme depuis longtemps le remodelage et la souffrance de l’os sous-chondral dans les poussées d’arthrose sont amplement confirmés par les étudesIRM prospectives. La signification exacte de ces anomalies de signal osseuxdoit être précisée, mais ces données nécessitent à l’évidence à reconsidérercertaines voies thérapeutiques qui auront pour objet de tonifier l’os sous-chon-dral des arthrosiques.

Traitements de la goutte

Un nouveau venu, le febuxostat

Un certain nombre de patients font des intolérances immunoallergiquesgraves à l’allopurinol ou son emploi est contre-indiqué en raison de traite-ment concomitant.

Deux nouvelles molécules permettent de traiter ces patients soit par la voiede l’inhibition de la xanthine oxydase (febuxostat) soit par l’uricolyse (Fas-turtec (rasburicase). Ce dernier traitement est pour l’instant réservé aux hy-per-uricémies induites par les chimiothérapies.

Le quasi abandon des uricosuriques (Benemide et Desuric) seulement dis-ponibles en ATU a permis de découvrir l’effet uricosurique significatif d’autresmolécules largement utilisées dans le spectre métabolique : fénofibrate, ator-vastatine, losartan.

Les progrès en recherche fondamentale sont foisonnants. Les multiplesvoies de signalisation déclenchant ou inhibant la réaction auto-immune se cla-rifient et donne naissance à de nouveaux concepts thérapeutiques.

Le rhumatologue clinicien doit faire l’effort de comprendre les avancéesqui modifient le visage de sa spécialité.

C’est le grand enjeu de la future formation continue.

Pr Jean-Marie Le Parc(chef du service de Rhumatologie

de l’Hôpital Ambroise-Paré,Assistance Publique - Hôpitaux de Paris)

1. Lancet 1996 ; 348 : 1535-41. 2) N Engl J Med 2004 ; 350 : 459-68.3. J Clin Endocrinol Metab 2005 ; 90 (5) : 2816-2822.

Ostéocyte

Hydroxyapatite

Ostéoblaste

Différenciation

Cellules souchesmésenchymateuses

Pré-ostéoclastes

Ostéoclaste

Macrophage

RÉSORPTION OSSEUSE FORMATION OSSEUSE

Parathormone

Ostéoporose : le remodelage osseux déséquilibré

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Dermatologie

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Gérard Lorette (Tours)

L’actualité en dermatologie aura été marquée cette année par l’arrivéedes biothérapies dans le traitement du psoriasis. La vigilance est tou-jours de rigueur dans la prévention du mélanome. Dermatophytoses,

chez les sportifs, parabens, dermatite atopique ont ponctué également l’ac-tualité dermatologique.

La transmission des infections cutanées chez les sportifs

Ce sujet a donné lieu à plusieurs publications intéressantes. Un article duNEJM a rapporté de tels cas chez des joueurs professionnels de football amé-ricain porteurs de staphylocoques résistants. Ces infections entraînent des ab-cès parfois invalidants ; l’infection a pu être transmise aux joueurs de l’équipeadverse. Un article du BEH rapporte quant à lui des cas de transmission demycose chez les judokas (Pr. E. Estève, CHU d’Orléans). Au pôle « espoirFrance » d’Orléans, un grand nombre des judokas étaient contaminés pardes dermatophytes présents sur les kimonos, les tatamis. Le même auteura également décrit précédemment des cas de transmission d’herpès gladiato-rium (herpès cutané étendu et douloureux, habituellement rencontré chez leslutteurs) parmi une équipe de rugbymen. De toute évidence donc, ce typed’activité sportive représente un milieu propice à la transmission d’agents pa-thogènes ; le nombre des adversaires, les contacts directs, le non respect derègles d’hygiène élémentaires sont des facteurs favorisants.

Les parabens

Un article publié dans la revue « Que choisir » a attiré l’attention sur lecaractère potentiellement cancérigène des parabens, conservateurs utili-sés depuis les années 1920 dans les cosmétiques et les médicaments. Ilsseraient susceptibles de favoriser l’apparition de cancers du sein. Ces conclu-sions ont été élaborées sur la base de travaux tronqués et aucune preuve n’aété apportée jusqu’à présent. Et comment être certain qu’une substance deremplacement ne serait pas plus toxique que des produits utilisés sans incon-vénient depuis des années ?

Les biothérapies

Etanercept (Embrel), efalizumab (Raptiva), infliximab (Remicade)ont reçu leur AMM dans le psoriasis. Indiqués après échec des autres trai-tements généraux, avec une prescription initiale hospitalière, ils représententun progrès dans la prise en charge de cette maladie. Ils permettent égale-ment d’effectuer des rotations entre les différentes possibilités thérapeutiques,tous les six à douze mois par exemple. On a observé peu d’effets secondairesimmédiats et la tolérance est bonne. Ces produits doivent être injectés, l’ad-ministration de Remicade apparaît plus facile en hospitalisation de jour.

Les anti-TNF-alpha et particulièrement l’infliximab sont également indiquésdans une maladie orpheline : la maladie de Verneuil. D’étiologie inconnue, par-tiellement génétique, cette dermatose touche les glandes sudorales apocrines etentraîne des abcès des plis. Les traitements habituels des abcès et les rétinoïdessont inefficaces. Une étude est actuellement en cours avec l’infliximab.

Enfin, selon certains travaux, les anti-TNF-alpha pourraient également êtreindiqués dans la forme nécrotique du pityriasis lichènoïde.

La dermatite atopique

Très fréquente, cette dermatose fait l’objet d’une nouvelle classificationétablie par des équipes scandinaves. Elle est qualifiée de AEDS (Atopic Ec-zema Dermatitis Syndrome). Ce syndrome se définit comme un terrain par-ticulier de susceptibilité du système immunitaire sur lequel agissent diffé-rents éléments extérieurs : allergie alimentaire, staphylocoques, stress…Certains atopiques ont des IgE totales élevées, d’autres non. Il faut distinguer,au niveau du système immunitaire, l’inné de l’adaptatif. Les atopiques à IgEbasses par exemple sont réactifs surtout aux staphylocoques. Le bilan aller-gologique ne doit pas être systématique mais discuté en fonction des tableauxcliniques car l’atopique réagit à de multiples allergènes.

Le mélanome

L’Académie américaine de dermatologie insiste sur la prévention de cetteforme de cancer cutané, dont l’incidence ne cesse de croître. Aux Etats-Unis,le risque pour un enfant né en 2000 d’en être atteint est de 1/74. Ce risqueétait de 1/150 en 1985, 1/1500 en 1935 !

Cette augmentation est liée à de multiples facteurs : mode du bronzage,envie d’habiter des régions ensoleillées, vacances plus longues, UV artificiels,messages négatifs sur la vitamine D : « ne pas exposer les enfants au soleilfait courir un risque de rachitisme… ». Certains auteurs, particulièrement op-timistes suggèrent même que la hausse du prix du pétrole, les attaques terro-ristes, pourraient avoir un rôle favorable sur l’incidence des mélanomes depar leur impact négatif sur les voyages ! L’exérèse des lésions suspectes, unemeilleure utilisation des crèmes solaires sont également des mesures efficaces,bien qu’une étude américaine ait montré que les sujets qui utilisaient les crèmesà fort indice de protection s’exposaient plus longtemps au soleil !

Au plan thérapeutique, l’exérèse du ganglion sentinelle ne modifie pasla survie globale. Quant à l’échographie ganglionnaire et au curage, ils l’aug-mentent peu. Des discussions portent actuellement sur une redéfinition desmarges d’exérèse, elles sont actuellement d’un centimètre pour une lésiond’un millimètre d’épaisseur.

Propos du Pr Gérard Lorette, chef du service de dermatologie, CHU deTours recueillis par Jean Nolay

L’EMEA, l’Agence européenne du médicament, a autorisé la mise sur lemarché du premier et unique traitement préventif du zona : le vaccin Zos-tarax. Développé par le groupe Sanofi Pasteur MSD et destiné exclusive-ment pour les plus de 60 ans, ce vaccin devrait de fait prévenir les douleurspost-zostériennes liées à cette affection virale fréquemment mal sup-portées par les sujets âgés.

Une étude parue dans The New England Journal Of Medicine menée chez 38 000 sujets de plus de 60 ans a montré que la vaccination réduisait de51% la survenue de la maladie et de trois quarts l’apparition de névralgies.Ces bons résultats ont motivé la FDA a approuvé sa commercialisation enmai dernier. Zostarax devrait être commercialisé l’an prochain en Europe etrépondre ainsi à l’attente des patients : on estime le nombre de cas annueldans l’union européenne à environ un million et demi ; avec le vieillissementde la population, ce chiffre risque d’augmenter. Dr S.L.G.

Un vaccin efficace contre le Zona

Le psoriasis peut avoir un retentissementimportant sur la qualité de vie du patient.

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Gynécologie

A.I.M. 117 - 2005

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Joëlle Bensimhon

La gynécologie aura animé en 2005-2006 toute la commu-nauté médicale : d’abord en raison de la polémique née desdifférentes études menées outre-Atlantique, mettant en cause

la sécurité d’emploi du THS ; aujourd’hui le THS est réévalué po-sitivement dans l’étude E3N, conduite avec les estrogènes percu-tanés et la progestérone naturelle micronisée, et sa prescription estdésormais encadrée par des recommandations de l’Afssaps. En-suite, l’arrivée prochaine dans l’Hexagone du 1er vaccin prévenantle cancer du col de l’utérus représente une innovation marquanteen gynécologie. Une année riche d’enseignements !

Contraception

Etablir un dialogue médecin/patient pour choisir le moyen contraceptif le mieux adapté

Dans le domaine de la contraception, le patch hebdomadaireet l’anneau vaginal ont certes été mis sur le marché en 2004 maisleurs prescriptions ont réellement débuté en 2005. La Haute Au-torité de Santé* a publié des recommandations afin d’adapter lacontraception à chaque patiente. En effet, en dépit de l’accès àl’ensemble des méthodes contraceptives, le nombre d’IVG de-meure stable : environ 200 000 chaque année. Il est donc essen-tiel d’établir un dialogue médecin/patiente pour choisir la tech-nique qui conviendra le mieux à la femme.

Il faut noter une évolution importante: jusqu’à présent, le stéri-let (DIU) était déconseillé chez la nullipare en raison du risqueinfectieux. Cette contre-indication a été levée de façon officielle.Une restriction de bon sens demeure : les patientes aux partenairesmultiples, qui présentent de ce fait un risque élevé d’IST (infections sexuelle-ment transmissibles).

En août 2005, le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) apublié les résultats d’une étude qui montre une légère augmentation durisque de cancer du sein chez les femmes sous contraception orale. Le risquede cancer du sein demeure toutefois faible dans cette tranche d’âge et sonaccroissement disparaît 10 ans après l’arrêt de la contraception. A l’inverse,la contraception orale diminue le risque de cancer de l’endomètre et de l’ovaire.

Enfin, la technique de contraception définitive « Essure », qui consiste àimplanter un micro-implant souple et flexible dans chaque trompe, fait dé-sormais l’objet d’un remboursement.

En ce qui concerne la ménopause, l’étude française E3N a confirmé avecun recul de 7,7 ans et sur une cohorte de près de 100 000 femmes que le risquerelatif de cancer du sein n’est pas augmenté chez les patientes traitéespar estrogènes percutanés et progestérone naturelle micronisée. Cettemême étude met également en avant le rôle bénéfique du THS – prescrit defaçon précoce – sur le plan cardio-vasculaire. A l’heure actuelle, le THSn’est plus prescrit de façon quasi-systématique, mais seulement chez les pa-tientes qui souffrent de bouffées de chaleur ou d’une altération importante deleur qualité de vie.

En obstétrique, il faut insister sur la prise de conscience de la nocivité del’alcool pendant la grossesse et des dangers qu’il fait courir, même avec unseul verre. Par ailleurs, le dogme de l’épisiotomie systématique pratiquéeà titre préventif pour protéger le périnée d’une déchirure a vécu. Cer-taines équipes commencent à utiliser l’accouchement en position verticale,censé faciliter l’expulsion. On note également un retour à la maison plusprécoce, afin notamment de diminuer le risque d’infections nosocomiales.

Procréation maternelle assistée

Un nombre de candidates sans cesse plus important

Dans la prise en charge de la stérilité, on constate que le nombre d’icsiaugmente et dépasse désormais celui des fiv. L’âge moyen des candidates tendà s’élever : à l’heure actuelle, 51 % de ces patientes a plus de 35 ans.

CancérologieUn 1er vaccin au monde pour prévenir le cancer du col de l’utérus

Dans la prise en charge du cancer du sein, la publication en octobre 2005d’un Protocole Temporaire de Traitement (PTT) par l’Institut National duCancer autorise les patientes dont la tumeur surexprime la protéine HER-2 à bénéficier du trastuzumab (Herceptin) en situation adjuvante. Aupa-ravant, ce médicament était utilisé en seconde ligne en situation métastatique.Mais différentes études, dont notamment l’étude HERA, ont montré un bé-néfice important du trastuzumab sur la survie globale et sans rechute.La mise en place de ce PTT a permis de ne pas attendre le délai de plusieursmois nécessaire à la modification de l’AMM.

On constate également que la mortalité globale imputable à ce cancer tendà diminuer bien que le nombre de nouveaux cas augmente, notamment en rai-son de la généralisation de son dépistage.

Le vaccin anti-HPV Gardasil, vaccin recombinant quadrivalent contreles papillomavirus humains de types 6, 11, 16 et 18 (Sanofi-Pasteur MSD)a été approuvé par la FDA (Food and Drug Administration). Il devrait êtrebientôt disponible en France, une demande d’autorisation de mise sur lemarché ayant été déposée auprès de l’Agence européenne du médicament(EMEA) en décembre 2005. Lors des essais cliniques, Gardasil a montré uneefficacité de 100 % dans la prévention des lésions précurseurs du cancerinvasif du col de l’utérus et des lésions précurseurs des cancers de la vulveet du vagin dues aux papillomavirus de types 16 et 18. Administré auxjeunes filles qui n’ont pas encore été en contact avec le virus, et donc avanttout rapport, il va permettre de diminuer le nombre de cancers du col impu-tables à ce virus. Son prix et son absence de prise en charge peuvent toute-fois représenter un handicap.

Enfin, l’embolisation des artères utérines pour traiter les fibromes chezla femme jeune est une technique peu invasive qui se développe.

Propos du Dr Joelle Bensimhon (gynécologue médicale,attachée à l’Hôpital Broussais, Paris) recueillis par Jean Nolay

Le virus HPV entre dans l’organisme et pénètre dans la cellule cible (1). Si l’ADN viral reste extra-chromo-somique, les cellules touchées deviennent des koïlocytes ; des condylomes (bénins mais très infectants) ap-paraissent (2). Si l’ADN viral s’intègre à l’ADN cellulaire, la carcinogenèse se déclenche, mais la survenued’un cancer peut prendre de longues années : lésions précancéreuses de bas grade (C1) puis de haut grade(C2, C3), évoluant vers une rupture de la membrane basale et un cancer invasif (C4).

1 2 C1 C2 C3 C4

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Urologie

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Richard-Olivier Fourcade (Auxerre)

Les informations fusent en Urologie, spécialité dynamique, qui n’a pasmanqué d’actualités dans ces derniers mois : un des éléments les plusmarquants à souligner est le nouvel arbre décisionnel de la prise en

charge de l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) non compliquée, fruitd’une collaboration franco-française, récemment publiée dans la presse internationale.

Hypertrophie bénigne de la prostate

Hypertrophie bénigne de la prostate (HBP)non compliquée : nouvel arbre décisionnel

De nombreux événements motivent la réalisation d’un arbre décisionnel del’HBP non compliquée. En effet, le traitement médical standard de l’hypertro-phie bénigne de la prostate repose actuellement sur 3 grandes familles théra-

peutiques: la phytothérapie, les alpha-bloquants et les inhibiteurs de la 5-al-pha-réductase. Ces traitements utilisés en monothérapie à visée symptomatiqueont fait l’objet ces dernières années de nombreuses études visant à démontrerqu’ils sont capables de modifier l’histoire naturelle de la maladie. L'étude MTOPS1 étudiant l'effet de la doxazosine, du finastéride, de leur association ou d'un pla-cebo a notamment montrer leur effet à long terme non seulement sur les symp-tômes mais sur le risque de rétention aiguë d’urines et de recours à la chirurgie.De plus, elle montre que la monothérapie est moins efficace que l'association.Cette notion un peu nouvelle a été rapidement prise en compte par les urologues:85 % d'entre eux, interrogés dans le cadre d'un observatoire, disent prescrire desassociations 2. Le renouveau de nouvelles techniques instrumentales, ther-mothérapie, radiofréquence et les lasers par exemple, amplifie encore leschoix thérapeutiques. Aussi, fort de ces constats, le Pr François Desgrand-champs (hôpital Saint-Louis, Paris) avec le Comité des Troubles Mictionnels del’Homme (CTMH) de l’AFU (Association Française d’Urologie) vient de pu-blier dans The World Journal Of Urology3 ce nouvel arbre décisionnel.

Prise en charge de l’HBP non compliquée

IPSS ≤ 7

Pas de facteurs de risque*

Avec facteurs de risque*

Surveillance rapprochée

Traitement médical

Une décision de prise en charge partagée avec le patient

* Facteurs de risque: Qmax (débit urinaire) > 10 ml/s; PVR(résidu post-mictionnel) > 150 ml ; volume prostatique >30 cm3; PSA > 2ng/ml ; RUV > 39 ml ; flux max < 10,6 ml/s

IPSS > 7

Qol < 3 Qol ≤ 3

Traitement médical de 1ère ligne de l’HBP non compliquée

Volume prostatique< 30/40 cc

Traitement médical de 1ère ligne

Succès thérapeutique :poursuite du traitement siprésence de facteurs de

risque ou arrêt du traitement

Intolérance :changer de médicament à l’intérieurd’une même classe thérapeutique ouchanger de classe médicamenteuse

Echec :décision

dupatient

Evaluation clinique après 3 à 6 mois

Volume prostatique≥ 30/40 cc

(3 mois pour les α bloqueurs ou la phytothérapie, 6 mois pour les inhibiteurs

de la 5- α réductase)

α - bloqueurs ou phytothérapie α - bloqueurs ou inhibiteurs de la 5-α réductase ou phytothérapie

Après échec d’une 1ère ligne thérapeutique

Deuxième ligne thérapeutique

Evaluation clinique :à 3 ou 6 mois

Succès :poursuite du traitement

de 2e ligne

Chirurgie :(ou interventions minimales

invasives)

Volume prostatique < 30/40 cc Volume prostatique ≥ 30/40 cc

- Phytothérapie ➞ α bloqueur ou I-5 alpha-réductase

- I-5 alpha-réductase ➞ α bloqueur

- α bloqueur ➞ autre α bloqueur ou I-5 alpha-réductase

- Facteurs de risque : α bloqueur + I-5 alpha-réductase

- association aux anti-cholinergiques si symptômes résiduels.

Chirurgie (ou interventionsinvasives a minima)

- Phytothérapie ➞ α bloqueur

- α bloqueur ➞ autre α bloqueur

- Association avec des

médicaments

anti-muscariniques

Partager la décision avec le patient

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A.I.M. 117 - 2006

Le laser à lumière verte : une alternative chirurgicale à la résection trans-uréthrale de la prostate

● Les patients souffrant d’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) sé-vère ou compliquée doivent être traités par un procédé chirurgical, dont la ré-section endoscopique (RTUP) reste l'étalon-or. De nombreuses techniques"alternatives", réputées moins invasives, ont vu le jour à la fin du siècle der-nier, avec des succès mitigés, aboutissant à leur abandon progressif, telles lestechniques utilisant l'énergie laser. Les développements du laser KTP (pourPotassium-Titanyl-Phosphate), émettant une lumière verte de longueur d’ondede 532 nm sous forte puissance (80Watts et bientôt 120 Watts), permet la Pho-toVaporisation de la Prostate4 (PVP). En effet, la longueur d’onde du laservert est hautement absorbée par l’oxhyhémoglobine (et très peu par l’eau per-mettant une vaporisation tissulaire efficace, sans nécrose majeure des tissus,sans œdème important, pénétration du KTP sur 0,8 mm). La résection du tissuprostatique obstructif est ainsi obtenue par vaporisation des tissus avec un ef-fet mineur de coagulation, autrefois responsable de troubles irritatifs post-opératoires Le traitement des patients sous anti-coagulants5 est possible. Cettetechnique impliquant une intervention peu invasive a été comparée à la pro-cédure chirurgicale standard RTUP6 ; elle donne des résultats comparables àceux obtenus par RTUP c’est-à-dire une disparition rapide des symptômesavec de plus des effets indésirables minimisés (symptômes irritatifs légers etde courte durée) favorisant le rétablissement rapide du patient. La vaporisa-tion photo-sélective de la prostate intéresse également les patients présentantune rétention urinaire chronique.

Au total, la PVP devient donc une alternative sérieuse à la RTUP. Lecoût élevé des consommables (fibres laser à usage unique) nécessite toutefoisune évaluation médico-économique qui devrait débuter dès 2007 financée parle Ministère de la Santé dans le cadre du programme de Soutien aux Innova-tions diagnostiques et thérapeutiques coûteuses (STIC).

Rétention aiguë d’urines :des signes prédictifs aux alpha-bloquants

● La rétention aiguë d'urines constitue un épisode évolutif imprévisible del'HBP, et une crainte majeure pour les patients. Une première étude a cherché àidentifier les facteurs prédictifs de la survenue d’une rétention aiguë d’urine (RAU)chez des patients présentant une hypertrophie bénigne de la prostate. Parue dansUrology en 2005, elle a démontré que l’antécédent d’un épisode de RAU, une

aggravation du score symptomatique (IPSS pour International Prostate Symp-tom Score) sont des éléments prédictifs alors que l’âge, le volume post-mic-tionnel et l’importance de la symptomatologie initiale ne le sont pas.

● L'étude Alfaur 7 avait démontré l'intérêt d'un traitement bref par l'al-fuzosine pour favoriser la reprise des mictions après l'ablation de la sondemise en place pour RAU. Une autre étude multicentrique, conduite par le PrFrançois Desgrandchamps 8 (hôpital Saint-Louis, Paris) et présentée au der-nier congrès de l’EAU (European Association of Urology) rassemblant 2635patients en rétention d’urines confirme ces résultats avec 53 % de bons ré-pondeurs contre 39 % sous placebo. Une nouvelle tentative de trois jours d'al-pha bloqueur parmi les patients n'ayant pas repris leur miction, permet d'enguérir 25 % supplémentaires. Toutefois, parmi ce quart de bons répondeurs,la moitié d'entre eux seront opérés malgré tout dans les 8 mois.

Troubles mictionnels et HBP

● D'autres publications faites au Congrès de l'EAU 2006 ouvrent de nou-velles voies thérapeutiques : une étude9 a démontré que le dutastéride amé-liorait le score IPSS des patients traités, ce qui était connu, mais a aussi mon-tré que cette amélioration était significative sur chacune des sept questionsconstituant ce score, portant aussi bien sur l'obstruction prostatique que sur l'ir-ritation vésicale. De même d’autres études ont mis en exergue l’action posi-tive des inhibiteurs de la phosphodiestérase 5 tel que le tadalafil 10 . Onobserve une amélioration à 3 mois du score IPSS et du score de qualité de viesans modification de la quantité mictionnelle et du résidu post-mictionnel.

Cancer de la prostate

L’hormonothérapie, traitement adjuvant à la radiothétapiemarque des points

● Depuis l'étude majeure de l'EORTC menée par le Pr Bolla 11, l'avantagede survie globale qu'apporte le traitement adjuvant par la goséréline au trai-tement par radiothérapie des cancers de la prostate est bien connu. Toutefois,cette étude restait unique ; elle a maintenant reçu confirmation. L'étude indé-pendante effectuée par le Radiation Therapy Oncology Group 12 (RTOG study85-31) a concerné presque 1000 patients atteints d'un cancer de la prostate lo-calement avancé. Cette étude de phase III randomisée montre que l'admi-nistration de goséréline après une radiothérapie ralentit la progressiondu cancer de la prostate et améliore la survie globale. Le RTOG est uneunité de recherche clinique de l'American College of Radiology.

Les résultats ont montré que pour les patients ayant reçu de la gosérélineen adjuvant à la radiothérapie, des améliorations significatives ont été objec-tivées en termes de survie globale à dix ans : 49 % (hormonothérapie + ra-diothérapie) versus 39 % (radiothérapie seule) (p < 0,0002), de survie spéci-fique (16 % versus 22 % (p = 0.0052), de probabilité de métastases distantes(24 % versus 39 % (p < 0,001) et de récidive locale (bras adjuvant 23 % ver-sus 38 % dans le bras contôle, p < 0,0001).

Cette amélioration de la survie bénéficie préférentiellement aux patientsprésentant un score de Gleason compris entre 7-10, mais est clairement si-gnificative dans la totalité du groupe, ce qui constitue la nouveauté.

● Mais la goséréline n'est maintenant plus seule dans cette indication. Eneffet, une seconde étude évaluant cette fois un traitement adjuvant par le bica-lutamide à la radiothérapie dans le traitement du cancer de la prostate lo-calement avancé (n = 305) et publiée en début d’année dans le Bristish Jour-nal of Urology International 13 a montré une amélioration significative de lasurvie dans le bras du traitement adjuvant : en effet, les auteurs de ce travail(Early Prostate Cancer Trial Programme) ont observé une réduction du risquede décès de 35 % chez les patients avec traitement combiné (bicalutamide+ radiothérapie) comparativement à ceux sous radiothérapie seule (p = 0,03).Concernant les patients atteints d'un cancer localement avancé et traité soit parprostatectomie, soit par radiothérapie (n = 2024), les dernières données à 7,4ans de suivi ont confirmé que l’hormonothérapie par le bicalutamide retardesignificativement la progression de la maladie de 31 % (p < 0,001), ce tauxatteignant 40 % dans le groupe (n = 657) opposant suveillance attentive au trai-tement par bicalutamide (p < 0,001). Ces résultats sous-entendent égalementune amélioration de la survie, sans toutefois que la significativité statistique soitatteinte. Cependant, cette dernière analyse des données confirme, à ce terme desuivi encore bref pour les cancers non- métastatiques de la prostate, l’absencede bénéfice pour les patients présentant un cancer prostatique localisé.

Adénome de la prostate (empreinte prostatique : volumineux lobe médian). Impor-tant rétrécissement (sténose) de l’urètre et vessie de lutte. Urétrographie rétrograde,incidence oblique, fausses couleurs.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Inhibiteurs de l’endothéline et carcinome métastatique hormono-résistant

● Parmi les nouvelles molécules, les antagonistes sélectifs des récepteursde type A de l’endothéline sont en cours de développement notamment dans lecancer prostatique métastatique réfractaire à l’hormonothérapie. L’atrasentanfait partie de cette nouvelle famille thérapeutique qui doit encore faire ses preuves.

Cancer du rein

Les thérapies ciblées génèrent de l’espoir

● Le cancer du rein est relativement fréquent en France puisque 8500 per-sonnes seraient concernées chaque année. Si un nombre croissant de ces can-cers est diagnostiqué précocement de manière fortuite, sur une imagerie ab-dominale demandée pour une autre cause, leur relative mutité clinique expliqueque près de la moitié ait déjà une diffusion métastatique au moment du dia-gnostic. Si le traitement des formes localisées par la chirurgie de moins enmoins invasive, donne d'excellents résultats en matière de survie, en revanche,le traitement des cancers métastatiques manquait dramatiquement d’un arse-nal thérapeutique approprié du fait d'une insensibilité de ces tumeurs aussibien à la radiothérapie qu'à la chimiothérapie classique. Les urologues, aprèsavoir effectué la néphrectomie élargie 14, (qui apporte un avantage de survie),-malgré la présence de métastases-, se trouvaient donc limités à l'utilisation del'immunothérapie. Evaluée dans le cadre du programme Percy, l’immuno-thérapie par interféron et/ou interleukine-2 indiquée dans les cancers du reinmétastatique de pronostic intermédiaire voire péjoratif apportent des résul-tats plutôt mitigés. L’interleukine-2 indiquée chez les sujets de bon pronosticdonne également des résultats contrastés 15.

Les inhibiteurs de l’angiogenèse en revanche apportent de réels espoirs dansle traitement du cancer du rein avancé ou métastatique : le bevacizumab(Avastin), anticorps monoclonal anti-VEGF, le sorafenib (Nexavar), inhibiteurde tyrosine kinase, et le sunitinib (Sutent), inhibiteur multi-kinases. Ces deux der-nières molécules sont administrées par voie orale et ont été approuvées par laFDA dans le traitement du cancer du rein métastatique avec un taux de réponsesde 20% à 45 % et dans les tumeurs stromales gastro-intestinales. Cette décisions’appuie sur les résultats des études de phase III démontrant une amélioration dela survie sans progression et peut-être de la survie globale. De multiples proto-coles sont en cours, évaluant de tels produits à des stades plus précoces de l’évo-lution de la maladie. Ils sont utilisés actuellement en France en ATU de cohorte.

Dysfonction érectile

Dysfonction érectile :signe avant-coureur d’événements cardio-vasculaires?

● Afin d’évaluer l’association entre dysfonction érectile et conséquencescardio-vasculaires, Ian M. Thompson et collaborateurs ont dirigé une étude pu-bliée en décembre 2005 dans le JAMA 16 incluant les 9457 patients âgés de 55ans et plus constituant le groupe placebo de l’essai PCPT (Prostate Cancer Pre-vention Trial). Tous les 3 mois, de 1994 à 2003, l’apparition d’une dysfonctionérectile associée ou non à une pathologie cardio-vasculaire était recherchée.

A l’entrée dans l’étude, 85 % des sujets n’avaient aucun antécédent ou demaladie cardio-vasculaire patente, 47 % d’entre eux avaient une dysfonctionérectile ; parmi les 4247 patients indemnes de dysfonction érectile, 57 % ontprésenté de tels symptômes après cinq ans de suivi. Après ajustement, la dys-fonction érectile incidente était associée à un risque relatif d’événements car-dio-vasculaires de 1,25 au terme de la période de suivi (p = 0,04). La dys-fonction érectile incidente et prévalente était associée à un risque relatif de1,45 (p < 0,001). Initialement, le risque d’événement cardio-vasculaire inci-dent était de 0,015 par personne/année parmi les patients sans dysfonction érec-tile et de 0,024 par personne/année parmi ceux présentant une dysfonctionérectile.

La dysfonction érectile est, pour ces auteurs, un signe avant-coureur d’évé-nements cardiovasculaires chez certains patients. Son existence clinique de-vrait, selon eux, conduire à des explorations et des investigations afin de re-chercher des risques cardio-vasculaires associés.

Propos du Dr Richard-Olivier Fourcade (Chef du service d’Urologie,centre hospitalier d’Auxerre) recueillis par le Dr Sylvie Le Gac

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1. Mc Connell J.D. New Engl J Med 2003 ; 349 : 2387-98. 2. Fourcade R.O. et alProgrès Urol 2005; 15 Suppl 1 52A. 3. Desgrandchamps F and al. World J Urol 2006;DOI 10.1007/s00345-006-0096-9. 4. Bouchier-Hayes DM and al. J Urol 2005 (suppl),173 : 421, #1555. 5. Malloy TR and al. J Urol 2005 (suppl), 173 : 423, # 1562. 6. Bachmann A and al. J Urol 2005 (suppl) ; 173 : 424, #1566. 7. Fourcade R.O. etal. Progr. Urol. 2003 13 Suppl. 1 36A. 8. Desgrandschamps F. et al. Eur Urol Suppl5 (2) 196. 9. Desgrandschamps F. et al. Etude ARIF 4005. BJU 2006. in press. 10. Mc Vary K. Eur Urol Suppl 5 (2) 196. 11. Bolla and al. Lancet. 2002; 360: 103-08. 12. Pilepich MV and al. Int J Radiat Oncol Biol Phys. 2005 ; 61 (5) : 1285-1290.13. Mc Leod et al. Br J Urol Int. 2006 ; 97 : 247-254. 14. Staehler M et al. BJUI.2005 ; 95 : 1153-1161. 15. Négrier S. et al. Progr Urol. 2002 12 213-218. 16. Ian M.Thompson and al. JAMA 2005. Vol 294, n°23. 17. Raman JD et coll. J Urol. 2005 ;174 : 1819-22. 18. Seyam RM and al. J Urol. 2006 ; 175 : 557-61. 19. Hossain RZ.J Urol. 2005 ; 174 : 2027-311.

Références

● Cancer du testicule et infertilitéL’incidence du cancer du testicule a augmenté au cours des 25 dernières

années, parallèlement à la baisse en nombre et qualité des spermatozoïdesdans les spermogrammes. Raman JD et collaborateurs ont montré que laspermatogenèse était altérée chez les porteurs de cancer du testicule. A l’in-verse, les hommes ne présentant pas de stérilité semblent davantage à l’abride ce cancer que les hommes stériles. Il a ainsi démontré qu’une anomaliedu spermogramme multipliait par 20 les risques de cancer du testicule 17.

● Cancer du pénis chez les circoncisLa prévalence et l’incidence des cancers péniens restent deux inconnues

épidémiologiques en raison de leur relative rareté. De plus de très anciennesréférences, ne reposant parfois que sur des bases scientifiques aléatoires,alimentent la croyance que la circoncision serait un élément protecteur. Néan-moins, �R M Seyam (Ryad, Arabie Séoudite) a constaté une prévalence éle -vée chez les sujets circoncis qui gardent des cicatrices résiduelles impor-tantes et qui doivent bénéficier d’une surveillance très rapprochée18. En effet,ces cancers sont à mauvais pronostic puisque la survie à trois ans des stadesT1 et T2 est de 41 %, et chute à 13 % pour les stades T3 et T4. La médianede survie parmi les opérés est de 34 mois et de 3 mois parmi les non-opérés.

● Traitement préventif de la lithiase oxaliqueLes recommandations diététiques en matière de lithiase oxalo-calcique

insistent sur la nécessité d'un régime non carencé en calcium et pauvre ensel, plutôt que sur une réduction des apports alimentaires en oxalates (Thé,chocolat, asperges, oseille…). En effet, la majeure partie de l'oxalurie provientdu métabolisme endogène de ce composé. Une étude parue dans le Journalof Urology de novembre 200519 confirme ces recommandations en montrantque le régime pauvre en sel et riche en calcium permet de prévenir les lithiasesoxaliques. Elle insiste sur le fait que la prise d'aliments lactés donc riches encalcium, avant l'ingestion d'aliments riches en oxalates, permet de diminuerl’oxaliurie (en tout les cas c’est ce qui est observé chez le rat).

Sachez-le aussi

Cancer du rein gauche. TDM de l’abdomen sous injection d’iode, coupe axiale,fausses couleurs.

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Neurologie

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Christian Geny (Montpellier)

Chaque année, il devient de plusen plus difficile de faire l’in-ventaire de tous les progrès en

neurologie, car tous les domaines de laneurologie bénéficient des progrès desneurosciences.

Démences de type Alzheimer

A la recherche de substances influençant leprocessus neuro-dégénératif

Les nouvelles thérapeutiques pro-posées sont souvent originales, parfoisspectaculaires, et peuvent concerner despathologies orphelines ou de réels pro-blèmes de santé publique comme la ma-ladie d’Alzheimer (MA) ou les acci-dents vasculaires cérébraux. Toutefois,l’ampleur de l’effet thérapeutique restemodérée, surtout dans les maladies dé-génératives où l’on attend toujours dessubstances pouvant influencer le pro-cessus dégénératif. Mais ces médica-ments ont un intérêt qui dépasse leureffet pharmacologique : ils sont la pre-mière pierre d’une prise en charge mul-tidisciplinaire prenant en compte lessymptômes, le handicap et la souffrancede l’aidant.

Malgré une certaine déception dans le déclin cognitif léger, où l’on espé-rait un bénéfice plus important des inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, cetteclasse médicamenteuse occupe une place de plus en plus importante dans letraitement des démences. La rivastigmine vient d’avoir son A.M.M. dans ladémence parkinsonienne. Le donepezil vient de démontrer son efficacité dansla maladie d’Alzheimer sévère (MMS < 10). La tolérance est améliorée pardes formes à libération prolongée (galantamine) et l’on espère bientôt avoirà notre disposition des formes transdermiques. Malgré des résultats promet-teurs avec une substance qui inhiberait la formation de fibrilles amyloïdes, iln’existe toujours pas de substances agissant directement sur le processus dé-génératif. Cette impuissance justifie le regain d’intérêt actuel de la vaccina-tion contre la protéine amyloïde… Affaire à suivre.

Les objectifs de la prise en charge de la démence sévère ont été préci-sés lors d’une conférence de consensus. Les différents experts réunis ontnotamment réfléchi sur la phase terminale de la maladie, souvent éprou-vante pour les patients, les familles et les soignants. L’objectif du diagnos-tic précoce de la maladie d’Alzheimer à un stade prédémentiel est en voied’être réalisé. Une étude scandinave a notamment montré, chez les patientsexprimant une plainte mnésique, que le dosage de la protéine tau et amy-loïde dans le LCR permettait de prédire l’évolution vers la maladie d’Alz-heimer. L’imagerie morphologique (IRM volumétrique), qui permet de quan-tifier l’atrophie, semble être une technique pleine d’avenir. Il est devenupossible de détecter en PET-scan les plaques amyloïdes grâce à l’utilisationd’un traceur spécifique, mais ne rêvons pas, cet examen sera encore long-temps réservé à la recherche.

Sclérose en plaques

L’IRM, outil diagnostiquequi supplante la ponctionlombaire

Plus proche de notre quotidien,l’IRM permet de faire de plus en plusprécocement le diagnostic de scléroseen plaques (SEP). De nouveaux critèresdiagnostiques (critères de Mac Donald)avaient été proposés tenant compte del’apport de l’IRM. En 2005, ces cri-tères ont été modifiés sur plusieurspoints. Le diagnostic de SEP primaireprogressive devient plus facile car iln’est pas nécessaire d’avoir une ponc-tion lombaire anormale. De même, lediagnostic de forme rémittente peut êtreaffirmé seulement un mois après la pre-mière IRM diagnostique, lorsque le se-cond examen montre des anomaliessupplémentaires.

Pourquoi diagnostiquer aussi rapi-dement? Pour traiter tôt, car plusieursétudes ont montré que le traitement pré-coce par les interférons retardait l’ap-parition d’une seconde poussée, et pos-siblement l’aggravation du handicap.Depuis l’importante avancée qu’a re-présenté l’introduction des interféronsdans la SEP au début des années 1990,les neurologues sont en attente de nou-

veaux traitements. Les pistes thérapeutiques sont nombreuses mais pour lemoment les résultats sont mitigés. La mitoxantrone a relancé l’intérêt des im-munosuppresseurs mais le risque de leucémie a limité son utilisation. D’autresimmunosuppresseurs sont actuellement testés, mais aussi d’autres médica-ments originaux comme le FTY 720 qui intervient sur la recirculation deslymphocytes.

La nouveauté la plus marquante reste l’identification de la cible des anti-corps anti-NMO (antigène de la mononucléose infectieuse) retrouvés dans lamaladie de Devic, qui est une affection démyélinisante sévère proche de laSEP. L’aquoporin-4, qui est une protéine transporteuse d’eau localisée au ni-veau des pieds astrocytaires de la barrière hématoencéphalique, est le premierauto-antigène identifié dans une maladie démyélinisante, ouvrant ainsi desperspectives thérapeutiques intéressantes.

Maladie de Parkinson

Des gènes au développement thérapeutique

La génétique de la maladie de Parkinson continue a éclairer la physiopa-thologie de cette maladie. Une nouvelle mutation d’un gène codant une pro-téine nommée dardarine a récemment été identifiée. Une équipe française amontré qu’une des mutations de cette protéine était particulièrement fréquentechez les patients d’origine maghrébine avec une forme familiale de Parkin-son.

Sclérose en plaques (SEP) : multiples plaques rouges. IRM de l'encéphale, coupe axiale,fausses couleurs

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Le syndrome des jambes sans repos n’est plus une pathologie orphe-line. Une équipe française a montré que la prévalence de cette affection esttrès élevée en France (environ 10 % chez les femmes de plus de 18 ans). Pour-tant cette affection reste sous diagnostiquée ce qui est fort dommageable caril existe des médicaments actifs comme le ropinirole, qui est le premier a avoirobtenu une A.M.M dans cette indication.

Pour lutter contre les mouvements anormaux, le neurologue va avoir à sadisposition d’autres médicaments :

- La rasagiline (Azilect), nouvel inhibiteur irréversible de la mono-amineoxydase B, a obtenu une AMM européenne en mars 2005 dans la maladie deParkinson. La rasagiline n’est pas encore commercialisée en France ;

- La tétrabénazine (Xenazine) dans la maladie de Huntington. Cettemolécule est assimilée à la classe des neuroleptiques, elle permet une dimi-nution présynaptique de la dopamine. Dans cette dernière maladie, la publi-cation des résultats du suivi des quelques patients ayant bénéficié de greffesintracérébrales va peut être relancer cette approche thérapeutique.

La maladie de Parkinson permet de revisiter de nombreux champs de laneuropsychiatrie. Des troubles psychiatriques ont pu être observés après neu-rostimulation comme des états d’hypomanie ou du jeu pathologique. D’autrestroubles du comportement proche des activités compulsives peuvent être ob-servés. Ces symptômes témoignent de l'implication de voies dopaminergiquesdans les systèmes cérébraux de récompense.

Pathologies vasculaires cérébrales

Quelques déconvenues thérapeutiques

Dans le domaine de la pathologie vasculaire cérébrale, les études sont parti-culièrement nombreuses battant en brèche certaines idées reçues, suscitant oubrisant certains espoirs thérapeutiques. Ainsi, les associations d’antiagrégantsapportent pour le moment peu de bénéfices. La chirurgie précoce des hématomescérébraux n’est pas supérieure au traitement médical. L’angioplastie peine à mon-trer sa supériorité sur la chirurgie carotidienne. A coté de ces échecs, certains es-sais laissent penser que les fibrinolytiques, à condition de respecter scrupuleu-sement les contre-indications, pourraient être proposés aux sujets plus âgés oudans une fenêtre temporelle étendue jusqu’à 4 heures 30. Le facteur VII a étéplus largement utilisé dans les hématomes intracérébraux et confirme son effi-cacité au prix d’un risque coronarien. Mais l’espoir le plus important portesur la neuroprotection. En effet, une étude vient de montrer l’efficacité d’unesubstance anti-oxydante administrée moins de 3 heures après le début de l’AVC.

Pour progresser sur le plan thérapeutique, il est souvent nécessaire demieux connaître l’histoire de la maladie. Plusieurs études ont apporté des in-formations importantes pour les cliniciens. Certaines techniques d’IRM peu-vent mettre en évidence les caractéristiques de la plaque athéromateuse ca-rotidienne. Le risque d’AVC après un AIT peut être identifié par tous lesneurologues grâce au calcul d’un score ABCD prenant en compte l’âge dupatient, la durée du déficit, le niveau tensionnel et la symptomatologie cli-nique. De même, le risque évolutif des sténoses intracrâniennes étant plus im-portant, il s’avérera nécessaire de proposer des traitements plus agressifs.

La pharmacogénomique en neurologie

Pouvoir prédire la réponse thérapeutique

Au-delà des agents pharmacologiques, il existe des avancées dans lesconcepts qui seront à l’origine des traitements de demain. Ainsi, la variabi-lité inter-individuelle de la réponse aux traitements peut être expliquée pardes raisons génétiques. La pharmacogénomique commence à prendre uneplace significative dans la thérapeutique neurologique. Ainsi le polymorphismede certains gènes peut expliquer une partie de la variabilité de l’efficacité desinterférons dans la SEP, de la rivastigmine dans la maladie d’Alzheimer et decertaines chimiothérapies dans les tumeurs cérébrales. La neurologie revientà ses origines en réinvestissant le champ de la psychiatrie par le biais de laneurologie comportementale. Les techniques d’imagerie fonctionnelle et mor-phologique permettent de corréler des symptômes les plus divers comme lafatigue, les activités compulsives ou l’apathie à des structures anatomiquesvoire des perturbations biochimiques. Cette évolution de la neurologie est ma-jeure car elle fait le pont avec la psychiatrie, offrant des perspectives théra-peutiques pour des pathologies sévères et orphelines.

Dr Christian Geny (CHU Gui de Chauliac, Montpellier)

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Psychiatrie

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Florian Ferreri, Pr Charles-Siegfried Peretti (Paris)

Ce tour d’horizon n’a pas la prétention d’être exhaustif mais de pré-senter une sélection de l’actualité psychiatrique de l’année en reve-nant sur les publications importantes ou originales.

Grossesse et Inhibiteurs de la Recapture de la Sérotonine (IRS)

Le choix de la poursuite du traitement antidépresseur doit se faire au cas par cas

Les travaux de Chambers et collaborateurs 1, grâce à une étude de cohorteont étudié le lien possible entre l’hypertension artérielle pulmonaire dunouveau né et la prise d’IRS en fin de grossesse. Dans cette étude cas-té-moin, l’équipe de recherche a interrogé, dans les 6 mois suivant l’accouche-ment, 377 mères dont le nouveau-né a souffert d’une hypertension artériellepulmonaire et 836 femmes témoins ayant accouché dans la même période.Quatorze des mères d’enfants victimes d’hypertension artérielle pulmonaire(soit 3, 7 %) avaient pris des IRS après la 20ème semaine de grossesse contre6 dans le groupe témoin (soit 0,7 %). Cependant, les auteurs précisent quele risque n’est pas aussi important que l’on pourrait le craindre : « envi-ron 99 % des femmes prenant l’un de ces médicaments en fin de la grossesseaccouchera d’un enfant qui ne souffrira pas d’une hypertension artérielle pul-monaire persistante ». Ce risque n’a pas été retrouvé lors de l’utilisationd’IRS en début de grossesse (avant la 20ème semaine), ni lors de l’utili-sation des autres classes d’antidépresseurs. Les résultats de cette étude si-tueraient la période à risque au cours de la deuxième partie de la grossesseplutôt que pendant la période de l’embryogenèse.

Faut-il en conclure que les femmes sous IRS devraient cesser leur traite-ment avant ou pendant la grossesse?

L’étude de Cohen et collaborateurs 2 fournit des éléments importants de ré-flexion. Cette équipe a évalué le risque de récidive dépressive au cours de lagrossesse après l’arrêt du traitement antidépresseur lors de la période de laconception. Deux cent une femmes enceintes, aux antécédents dépressifs im-portants, ont été suivies dans 3 centres spécialisés dans le traitement des ma-ladies psychiatriques pendant la grossesse. Les patientes ont été réparties en 4groupes en fonction de leur choix : poursuivre leur traitement antidépresseurà la même dose (82 patientes), diminuer la posologie (34 patientes), augmen-ter la posologie (20 patientes) ou interrompre leur traitement (65 patientes).Parmi les 82 femmes qui ont poursuivi leur traitement antidépresseur, le tauxde rechute était de 26 %. Par contre, chez les 65 patientes qui l’ont interrompu,ce pourcentage s’est élevé à 68 %. Le risque de rechute des patientes sanstraitement antidépresseur est multiplié par 5 quand on tient compte de dif-férents facteurs comme le nombre d’épisodes antérieurs, le type de médica-ment utilisé et l’état matrimonial. Par ailleurs, chez les 34 femmes qui avaientopté pour une réduction de posologie, 35 % ont rechuté. Parmi les partici-pantes qui avaient réduit ou cessé de prendre un antidépresseur 61 % ontdemandé la reprise de leur traitement au cours de la grossesse.

En obstétrique, on distingue d’une part les risques pour l’enfant, et d’autrepart la santé de la mère. Dans la pratique clinique, bien que les risques soientjugés plutôt faibles pour l’enfant, de nombreuses femmes décident de cesserou de diminuer la dose de leur traitement antidépresseur. L’interruption dutraitement anti-dépresseur laisse planer la menace d’une récidive dépressive.Il convient de rappeler que les répercussions d’un épisode dépressif lors dela grossesse ou du post-partum peuvent être majeures : passages à l’actesuicidaire, consommation de psychotropes, troubles de l’appétit (effets sur lepoids de l’enfant), mais aussi répercussions familiales perturbant la prépara-tion psychique à la venue de l’enfant autant que la relation mère-enfant 3,4.Le choix de la poursuite du traitement antidépresseur doit se faire au caspar cas, après une évaluation des bénéfices et des risques pour la mère et l’en-fant, en fonction des choix de la patiente et de la probabilité de rechute dé-pressive (principalement lors de la période à risque du post-partum). La gra-vité et la durée des antécédents dépressifs, le nombre et la fréquence desépisodes dépressifs, le déroulement des grossesses précédentes, les antécé-dents thymiques familiaux ainsi que la situation socio-économique et mari-tale sont autant d’éléments d’appréciation du risque de récidive.

Bénéfices possibles des IRS dans le cancer colorectal

Des doses élevées d’IRS diminueraient le risque de cancer colorectal

Selon les résultats d’une étude épidémiologique publiée dans the LancetOncology, les IRS pourraient réduire le risque de cancer colorectal. En effet,Xu et collaborateurs 5 ont analysé les données de 6544 patients atteints decancer colorectal prenant des antidépresseurs tricycliques comparativementaux données d’une population contrôle de 26 176 personnes. Ils ont procédéde la même manière avec les IRS chez 3367 patients cancéreux qu’ils ontcomparé aux données d’une population témoin de 13 468 personnes. Les au-teurs concluent que des doses élevées d’IRS dans les années précédantl’étude (mais pas dans un passé lointain) diminueraient le risque de can-cer colorectal de 30 %. Ce risque semblerait peu affecté par la prise d’anti-dépresseurs tricycliques. C’est la première fois, à notre connaissance qu’untel lien est rapporté dans la littérature.

Le mécanisme physiopathologique est incertain et les résultats de cetteétude sont déjà controversés en raison de nombreux facteurs confondants, maisle bénéfice d’une prise d’IRS pourrait résulter, selon les auteurs, d’un effet cy-totoxique direct ou d’un effet anti-promoteur sur les cellules épithéliales.

Schizophrénie et maladies auto-immunes

Un lien de comorbidité?

Une étude épidémiologique publiée dans l’American Journal of Psychia-try révèle que la schizophrénie pourrait être associée à un nombre importantde maladies auto-immunes. Eaton et collaborateurs 6 ont comparé 7704 pa-tients schizophrènes et leur parents à un groupe témoin. Cette équipe a notéque le risque de schizophrénie était supérieur de 45 % chez les individusaffectés par une ou plusieurs maladies auto-immunes. Parallèlement, lespatients schizophrènes seraient plus vulnérables à 9 maladies auto-im-munes dont la thyrotoxicose, la maladie cœliaque, l’anémie hémolytique ac-quise, la cystite interstitielle et le syndrome de Sjögren. Comparativement auxparents du groupe témoin, les parents de patients schizophrènes étaient plusfréquemment atteints par 12 maladies auto-immunes (ratio d’incidence ajustéde 1,3-3.8).

Une meilleure connaissance de cette comorbidité pourrait aider à mieuxdépister et prendre en charge d’une part les maladies immunitaires chez lespatients schizophrènes et d’autre part les troubles psychiatriques des patientsatteints de maladies immunitaires. La poursuite des recherches dans ce do-maine pourrait également participer à l’amélioration des connaissances dansla pathogenèse des troubles psychiatriques et des maladies auto-immunes.

Dr Florian FERRERI et Pr Charles-Siegfried PERETTI (service de Psychiatrie et de Psychologie Médicale, Hôpital Saint Antoine, Université

Pierre et Marie Curie, Paris).

1. Chambers CD, Hernandez-Diaz S, Van Marter LJ, et al. Selective serotonin-reup-take inhibitors and risk of persistent pulmonary hypertension of the newborn. N EnglJ Med 2006 ; 354 (6) : 579-87. 2. Cohen LS, Altshuler LL, Harlow BL, et al. Relapseof major depression during pregnancy in women who maintain or discontinue anti-depressant treatment. JAMA 2006 ; 295 (5) : 499-507. 3. Ferreri M, Ferreri F, NussP. La dépression au féminin. Paris : John Libbey Eurotext, 2003. 4. Ferreri F, Agbo-kou C. Psychiatrie et développement. Maturation et vulnérabilité. Paris : Med-Lineéditions, 2006. 5. Xu W, Tamim H, Shapiro S, Stang MR, Collet JP. Use of antide-pressants and risk of colorectal cancer : a nested case-control study. Lancet Oncol2006 ; 7 (4) : 301-8. 6. Eaton WW, Byrne M, Ewald H, et al. Association of schizo-phrenia and autoimmune diseases : linkage of Danish national registers. Am J Psy-chiatry 2006 ; 163 (3) : 521-8.

Références

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ORL

2006 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Béatrix Barry (Paris)

La pathologie ORL présentéeici concerne les cancers ORLqui ont un pronostic souvent

effroyable et les troubles du sommeilavec apnées du sommeil, que l’on aappris au fil des années à mieux ca-ractériser et à mieux prendre encharge. Deux facettes de l’ORL hos-pitalière qu’il faut connaître car lespossibilités thérapeutiques se diver-sifient.

Carcinomesépidermoïdes ORL

Des données récentes dela chimiothérapie néo-ad-juvante des cancers ORL

La chimiothérapie a de plus enplus d’indications dans le traitementdes carcinomes épidermoïdes ORL.Elle est utilisée depuis plusieurs an-nées en néo-adjuvant dans les indications de préservation d’organe pour évi-ter une chirurgie mutilante de type laryngectomie totale. Lorsqu’elle est uti-lisée en néo-adjuvant (c’est-à-dire avant le traitement par chirurgie ouradiothérapie) la chimiothérapie n’augmente pas la survie mais est un trèsbon moyen pour sélectionner les patients qui vont être de bons répondeursau traitement et donc pouvoir bénéficier d’une radiothérapie exclusive. Dece constat est né le concept de préservation d’organe, qui est depuis plu-sieurs années utilisée dans le traitement des cancers du larynx et de l’hy-popharynx. Les tumeurs qui justifieraient d’une chirurgie mutilante,donc d’une laryngectomie totale, et qui ne sont pas classées T4 (exten-sion sous glottique, cartilagineuse et/ou à la base de langue) sont ainsiréévaluées après deux à trois cures de chimiothérapie. En cas de ré-gression tumorale importante (>80%) de la tumeur initiale, ces patientspeuvent être traités par radiothérapie sans incidence sur la survie. Lachimiothérapie néo-adjuvante permet en sélectionnant les patients « répon-deurs » à la chimiothérapie et donc à la radiothérapie de sélectionner les pa-tients qui ne seront pas opérés et pourront bénéficier d’une préservation deleur larynx. Les deux grandes études qui font référence ont montré que l’onpouvait ainsi préserver le larynx de plus de 40% des patients environsans diminuer la survie globale.

Pour les carcinomes épidermoïdes ORL, quelle que soit leur localisation,la chimiothérapie, associée à la radiothérapie, permet également un meilleurcontrôle loco-régional des tumeurs avancées opérées nécessitant une radio-thérapie post-opératoire ou des tumeurs non opérées, qui sont alors traitéespar radio-chimiothérapie exclusive. Dans l’ensemble des études publiées, laradio-chimiothérapie concomitante permet donc un meilleur contrôleloco-régional des tumeurs ORL (en moyenne plus 10%) avec une aug-mentation sensible de la survie. La tolérance immédiate de la radio-chi-miothérapie concomitante est moins bonne que celle de la radiothérapie ex-clusive mais les taux de séquelles à long terme sont similaires.

Les Taxanes (docétaxel ouTaxotere) sont utilisés depuis plu-sieurs années en deuxième lignedans le traitement des cancers ORLmétastatiques ou en échec de ra-diothérapie. Leur utilisation dans lachimiothérapie néo-adjuvante dansles protocoles de préservation d’or-ganes est beaucoup plus récente.

L’adjonction de docétaxel auprotocole de chimiothérapie néo-adjuvante par 5-fluorouracil/sels deplatine augmenterait la survie glo-bale de 20% dans une méta-analysequi reprend les différentes étudesouvertes de phase II et III 1. Les ré-sultats préliminaires d’une étudecomparant deux protocoles de chi-miothérapie néo-adjuvante (5-fluo-rouracil/ Cis-platine ou 5-fluorou-racil/ Cis platine/docétaxel) dansdes cancers du larynx inopérablessont en faveur de l’adjonction deTaxotere en terme de contrôle lo-

cal et de survie. L’association de Taxotere augmente le nombre d’aplasies maispermet de réduire les doses de 5-FU et de Cis-platine, et par conséquent de di-minuer la toxicité générale (radiomucite, nausées, vomissements) 2.

Ainsi, la prise en charge des cancers du larynx et de l’hypopharynxT3Nx évolue vers l’utilisation de la chimiothérapie néo-adjuvante incluantdes Taxanes dans les protocoles de préservation d’organe, avec un traite-ment par radio-chimiothérapie pour les patients répondeurs et la chirurgiepour les non répondeurs.

Les atouts des thérapies ciblées

Erbitux (cétuximab) est un anticorps monoclonal chimérique homme-souris qui se lie spécifiquement au domaine extra-cellulaire du récepteur dufacteur de croissance épidermique humain (EGFR). Il est utilisé en associa-tion avec l'irinotécan (anti-topo-isomérase I) dans les cancers du colon méta-statiques ayant résisté à une première chimiothérapie.

Dans les cancers ORL évoluées localement, une étude de 424 maladesa montré une augmentation de 10% du contrôle local et de la survie à 3ans des patients traités par radiothérapie avec une perfusion hebdoma-daire de Cetuximab 3. Ce traitement a donc un effet similaire à une radio-chimiothérapie concomitante sans les effets secondaires de la chimiothéra-pie. Les effets secondaires de l’Erbitux sont :

- Des réactions aiguës très importantes rares (2% des cas environ) lors dela première perfusion avec apparition d'un bronchospasme, d'un urticaire et/oud'une hypotension

- Des effets secondaires moins violents (frissons, fièvre, dyspnée) chezenviron 15% des malades lors de la première cure

- Un rash acnéiforme décrit comme de l'acné, un rash maculo-papulaireou pustulaire, ou un aspect de peau sèche desquamante très fréquent, qui s'ex-plique par une action de l'anticorps sur les cellules cutanées porteuses de ré-cepteurs EGFR. Ce rash disparaît à l’arrêt du traitement.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

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Des études sont en cours pour comparer l’intérêt de l’association de ce-tuximab à celle devenue classique de chimiothérapie (5-fluorouracil/sels deplatine) et radiothérapie dans les cancers ORL évolués.

L’association d’une radiothérapie à une chimiothérapie classique reste ce-pendant aujourd’hui le traitement de référence des tumeurs ORL évoluéesopérées ou non. Le cetuximab (actuellement encore très onéreux) est une al-ternative chez les patients pour lesquels la chimiothérapie est contre-indiquée.

Les troubles respiratoires du sommeil

Se méfier des apnées du sommeil

Les troubles respiratoires du sommeil sont actuellement reconnus commeexcessivement fréquents (environ 20% de la population générale). Le ronfle-ment n’en est qu’une manifestation, provoqué par la vibration des partiesmolles de l’oropharynx (voile, luette, base de langue). Ce ronflement peutêtre isolé ou associé à la survenue d’épisodes d’obstruction des voies aériennessupérieures, responsables d’interruption (apnées) ou de réduction de la ven-tilation (hypopnées). Ces apnées s’accompagnent de manifestations cli-niques avec une somnolence diurne excessive et représentent un facteurde risque cardio-vasculaire. Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil(SAOS) est suspecté chez certains ronfleurs (environ 10%) qui font des apnéeset présentent une somnolence diurne à l’interrogatoire.

● Le bilanL’examen ORL est indispensable pour rechercher un site obstructif spé-

cifique (malformations, pathologies obstructives bénignes ou malignes de labase de la langue, du voile ou des amygdales).

L’enregistrement du sommeil est indiqué lorsque un SAOS est sus-pecté à l’interrogatoire (tableau 1). Il permet de dépister les syndromesd’apnées du sommeil lorsque l’index d’apnées/hypopnées (IAH) est supérieurà 30 ou s’accompagne de plus de 10 micro-éveils par heure. Seuls les traite-ments de ces syndromes d’apnées sont remboursés par l’assurance maladie.

● Le traitementS’il existe de multiples traitements médicaux et chirurgicaux du ronfle-

ment, l’appareillage en pression positive continue (PPC) est le traitementde référence du syndrome d’apnées du sommeil. Ce traitement efficace,moins agressif que la trachéotomie qui était le traitement de référence anté-rieur, est cependant limité par la contrainte qu’il impose au patient.

Le traitement chirurgical d’avancée mandibulaire ou bi-maxillaire estune chirurgie maxillo-faciale lourde mais efficace permettant de dimi-nuer l’IAH de manière définitive ; ce traitement est en pratique réservé auxpatients qui présentent une rétrognatie et/ou qui sont en refus ou échec d’unappareillage.

Les différents traitements du ronflement (règles hygiéno-diététiques ou trai-tements chirurgicaux des tissus mous) peuvent également être proposés en casde SAOS modéré ou pour faciliter la tolérance de la pression positive conti-nue. Ces traitements chirurgicaux des tissus mous (septoplastie, uvulo-pa-lato-pharyngoplastie) sont des traitements du ronflement simple en casd’anomalie anatomique : déviation de la cloison nasale, voile long, amyg-dales obstructives. Ils peuvent aussi servir de traitement d’appoint pour la to-lérance de la PPC mais sont peu efficaces dans les SAOS sévères. Ils sont ef-ficaces dans le ronflement simple chez plus de 80% des patients si l’indicationopératoire est bien posée (bonne évaluation du niveau du site obstructif).

La radiofréquence est une méthode ambulatoire de réduction volu-métrique des tissus mous pharyngés moins douloureuse que la chirurgieclassique vélaire. L’électrode qui délivre la radiofréquence peut égalementêtre utilisée dans les cornets pour les obstructions nasales et dans la base dela langue pour une réduction volumétrique lorsque l’obstacle est basi-lingual.On peut estimer le résultat satisfaisant chez environ 60% des ronfleurs.

Ces dernières années, les orthèses endobuccales se sont beaucoup dé-veloppées. Leur but est d’agrandir la filière pharyngée en avançant lalangue en agissant sur les muscles génioglosses insérés sur la mandibule.Ces orthèses d’avancement mandibulaire solidarisent la mandibule au maxil-laire supérieur par des gouttières fixées aux arcades dentaires et solidariséesentre elles (figure 1). Il en existe différents types : orthèses thermoformables(exemple Somnofit®) ou orthèses moulées par les orthodontistes. La littéra-ture fait état de 45% à 50% de réponse complète avec un succès qui est in-versement proportionnel à la gravité du SAOS 4. Leur tolérance limite leurutilisation dans le ronflement simple (hypersialorrhée, douleurs des articula-tions temporo-mandibulaires).

Ces orthèses endobuccales sont de plus en plus prescrites en remplace-ment de la PPC chez les patients qui présentent des formes peu sévères oumodérées de SAOS mais également dans les formes sévères chez les patientsqui refusent ou tolèrent mal les contraintes de la PPC. Si l’on compare di-rectement orthèses et PPC, cette dernière est supérieure en terme d’efficacitémais des résultats similaires peuvent être obtenus chez certains patients avecles deux méthodes. Il faut connaître les défauts de ces orthèses :

- L’impossibilité de prévoir l’efficacité du traitement- La nécessité d’une période d’adaptation pour obtenir une efficacité maxi-

male- Les difficultés d’appréciation de l’importance de l’avancement de la man-

dibule- Les incertitudes sur les effets secondaires à long terme.

La PPC reste le traitement de référence des SAOS mais il s’agit d’untraitement contraignant qui est de plus en plus concurrencé par les or-thèses. Quelle que soit la méthode de traitement utilisée, c’est l’améliorationressentie par le patient et surtout l’enregistrement du sommeil sous traitementqui doivent permettre d’en évaluer l’efficacité.

Propos du Pr Béatrix Barry (PU-PH)Hôpital Bichat-Claude Bernard, AP-HP, Paris.

1. Pignon JP Anticancer Drugs 2004 ; 15 :331-340.2.Vermoken JB et al. J Clin Oncol 2004 ; 22 :14S. 3. Bonner JA et al. N Engl J Med. 2006; 354(6):567-78.4. Lim J, Lasserson TJ, Fleetham J, Wright J. Oral appliances for obstructive sleep ap-

noea. Cochrane Database Syst Rev 2004.

Echelle de Somnolence d’Epworth

Risque d’assoupissement

Situation 0 1 2 3Assis en train de lireEn regardant la télévisionAssis inactif dans un lieu public ou au cours d’une réunionPassager de voiture ou d’un transport en commun roulant depuis plus d’une heureAllongé dans l’après midiAssis en train de parler avec quelqu’unAssis au calme après un déjeuner sans alcoolDans une voiture à l’arrêt quelques minutes

0 = jamais d’assoupissement1 = faible chance2 = chance moyenne3 = forte chance

Score = /24Score supérieur à 10 probable

syndrome d’apnées du sommeil

Tableau 1 : Echelle d’Epworth d’évaluation à l’interrogatoire du risque de syndromed’apnée du sommeil

Principe de fonctionnement de l’orthèse d’avancement mandibulaire : un traitement chirurgical des troubles respiratoires du sommeil.

Page 26: AMED117

Pneumologie

A.I.M. 117 - 2005

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Gérard Huchon (Hôtel-Dieu, Paris)

L’année 2005-2006 a notamment été marquée par l’arrivée de nou-velles molécules contre la BPCO et l’asthme allergique, par la confir-mation de l’espoir prudent que l’on peut placer dans les thérapies

ciblées contre les cancers bronchiques non à petites cellules, par le débatpolitique animé sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics et par laquestion toujours posée de la meilleure politique de prévention de la tu-berculose à adopter en France.

BPCO

Des campagnes de sensibilisation, une nouvelle moléculesur le marché, l’efficacité des thérapies combinées discutée

Plusieurs campagnes de sensibilisation à la BPCO ont été menées au-près du grand public, des professionnels de santé et du monde politique.L’objectif : sensibiliser l’ensemble de la population à la nécessité d’une ac-tion concertée de prévention et de prise en charge de cette affection. Trop sou-vent ignorée ou banalisée, la BPCO tue pourtant plus de 15 000 personneschaque année en France. Grâce à ces actions, sa reconnaissance progresse len-tement.

L’arrivée du premier bronchodilatateur anticholinergique sélectifde longue durée d’action, le tiotropium (Spiriva), a enrichi l’arsenalthérapeutique contre la BPCO. Le tiotropium est un antagoniste préfé-rentiel des récepteurs muscariniques de type M3, les plus impliqués dansla bronchoconstriction, présents sur les muscles lisses bronchiques et lesglandes à mucus. Il est indiqué, à raison d’une inhalation quotidienne, dansle traitement continu de première intention la BPCO, lorsque les symp-tômes persistent malgré l’utilisation de bronchodilatateur de courte duréed’action.

Au plan clinique, le tiotropium entraîne une amélioration de la dyspnéeet une amélioration de la qualité de vie. Il réduit les exacerbations modé-rées à sévères de 35 % et diminue le nombre des hospitalisations.

● Les résultats de l’étude TORCH, présentés en mai dernier au congrèsde l’American Thoracic Society. Menée auprès de 6100 patients ayant unVEMS < 60 % de la valeur théorique et suivis durant 3 ans, l’étude TORCHvisait à évaluer les bénéfices de l’association corticoïde inhalé/agoniste ß2 delongue durée d’action dans la prise en charge à long terme de la BPCO. L’an-nonce des résultats n’a pas clos le débat : TORCH montre une réduction dela fréquence des exacerbations sous traitement combiné corticoïde in-halé/agoniste ß2 de longue durée d’action, ainsi qu’une amélioration dela qualité de vie des patients. Mais, si elle indique une baisse de la morta-lité globale (critère principal d’évaluation) de 17 % sur 3 ans chez les patientsayant reçu le traitement combiné, le seuil de significativité est ici tangent (p= 0,052).

Asthme allergique

L’arrivée du premier anticorps monoclonal anti-IgE

● Avec l’apparition du premier anticorps monoclonal anti-IgE, l’oma-lizumab, une nouvelle classe thérapeutique est disponible pour le traite-ment de certains asthmes allergiques sévères. Approuvé par la FDA en2003, introduit en 2004 dans les recommandations internationales GINA (Glo-bal Initiative for Asthma), l’omalizumab (Xolair) a obtenu, fin octobre 2005,l’AMM de la Commission européenne dans l’indication suivante: chez l’adulteet l’adolescent de plus de 12 ans, dans le traitement additionnel de l’asthmeallergique persistant sévère mal contrôlé par un traitement de référence à basede corticoïde inhalé à forte dose et de bêta-2-agoniste inhalé à longue duréed’action. L’omalizulab reste réservé aux patients qui présentent un asthmedont la dépendance aux IgE est prouvée. Relevant d’une prescription ini-tiale hospitalière, sa prescription et son renouvellement sont réservés aux spé-cialistes en pneumologie et en pédiatrie. Son prix est actuellement en coursde négociation.

Rappelons que 60 à 70 % des asthmes ont une origine allergique : chez lespatients concernés, l’exposition à un aéro-allergène entraîne une réaction im-munitaire inadaptée, reposant pour une large part sur une production exces-sive d’IgE. L’omalizumab se lie spécifiquement aux IgE circulantes, dimi-nuant le pool d’IgE disponibles pour interagir avec les cellules inflammatoireset stoppant ainsi la cascade allergique.

Tuberculose

Quelle politique de prévention?

La tuberculose donne lieu à une situation épidémiologique paradoxaleen France, comme dans tous les pays développés. Au plan national, sa fré-quence diminue (très faiblement), mais elle augmente dans certains groupesà risque, où l’incidence de la tuberculose peut être 20 à 30 fois supérieure àla moyenne nationale : personnes précarisées, migrantes, séropositives pourle VIH ou vivant en milieu carcéral. De plus, de très fortes disparités régio-nales sont observées : la région Ile-de-France concentre ainsi la moitié des casfrançais.

● La France, on le sait, est l’un des rares pays européens à avoir main-tenu une politique de vaccination généralisée contre la tuberculose chez lesenfants ou les nouveau-nés (voir AIM 112, p. 20). Mais cette politique se jus-tifie-t-elle, compte tenu de son coût élevé, de l’efficacité restreinte du BCG etde la situation épidémiologique? D’autres pays, comme la Belgique, la Suède,la Danemark, la Suisse, l’Espagne, l’Italie et les Etats-Unis, préconisent unepolitique de vaccination ciblée sur les populations à risque. D’autres encore,comme l’Autriche et l’Allemagne, ne recommandent pas la vaccination.

L’Académie Nationale de Médecine estimait, dans un avis du 28 juin 2005,que si « la suppression totale de la vaccination par le BCG en France ne pa-raît pas possible à ce jour, en raison de la persistance de la tuberculose danscertaines régions et groupes à risque, la vaccination ciblée des enfants àrisque est une orientation possible, mais d’application difficile. » Elle né-cessiterait un renforcement des moyens de lutte contre la tuberculose :dépistage, traitement et suivi. En particulier, il faudrait détecter sans faillirles personnes en contact avec un malade contagieux et les sujets avec une in-fection latente.

Tuberculose pulmonaire très étendue nodulaire et cavitaire (caverne dans le lobesupérieure gauche). Radiographie du thorax, incidence de face, fausses couleurs.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

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Par ailleurs, le seul test de diagnostic de l’infection tuberculeuse préco-nisé reste le test de Mantoux (intra-dermo réaction), dont on connaît bien lesrésultats aléatoires. Or il existe de nouveaux tests plus spécifiques et sen-sibles, comme le Quanti FERON-TB ou le T SPOT-TB, dont il faudraitétendre l’utilisation.

Rappelons que la production du BCG par multipuncture est stoppée de-puis le 1er janvier 2006 : la seule voie de vaccination est désormais l’injec-tion intradermique avec la souche dite « Copenhague ». Cette pratiqueétant délicate chez l’enfant de moins de 1 an, une majorité (59 %) de mé-decins préfèrent réserver la vaccination aux seuls patients à risque.

Signalons une piste intéressante pour la recherche d’un vaccin plusefficace que le BCG, notamment pour éradiquer les formes pulmo-naires de tuberculose chez l’adulte (les plus contagieuses). En inactivantun seul gène du bacille de la tuberculose, des chercheurs de l’Institut Pasteur (Paris) et de l’Université de Saragosse ont obtenu une souche plusatténuée que celle du BCG et conférant, lors d’essais précliniques, une protection accrue contre la tuberculose, avec une meilleure tolérance quele BCG.

Cancer du poumon

L’espoir prudent des thérapies ciblées

Les thérapies ciblées ouvrent d’extraordinaires perspectives en cancéro-logie : leur nombre tend à augmenter malgré quelques déconvenues. Pourl’heure, leurs conséquences cliniques restent limitées compte tenu de leursindications très cadrées : elles ne sont pas (encore ?) évaluées en 1ère ligne,mais restent réservées à des traitement de 2ème ou 3ème ligne. De plus, ilfaut rester prudent quant à leurs éventuels effets indésirables.

● Dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules(CBNPC), certaines thérapies ciblées ont indéniablement montré une ac-tion, mais il faudra accumuler suffisamment de données cliniques pour ré-pondre à ces questions essentielles : dans quelles stratégies thérapeutiquess’inscrivent-elles? Avec quel bénéfice et quelle tolérance démontrés? A quellessous-populations de patients (répondeurs) s’adressent-elles ?

Le chef de file actuel de ces thérapies ciblées est l’erlotinib (Tar-ceva). un inhibiteur de tyrosine kinase, qui bloque la voie de signalisationdu récepteur du facteur de croissance épidermique humain (EGF-R). L’EGF-R étant exprimé dans 40 % à 85 % des CBNPC, il était logique de cher-cher à inhiber sélectivement les cellules tumorales à l’aide de moléculesbloquant spécifiquement son activité tyrosine kinase. Ayant montré un bé-néfice significatif en terme de survie dans les CBNPC avancés, l’erlotiniba été approuvé aux Etats-Unis en novembre 2004, dans le traitement duCBNPC localement évolué ou métastatique, après échec d’au moins unechimiothérapie.

Au moins 4 autres inhibiteurs de tyrosine kinase sont en développe-ment : le géfinitib, le vanitinib, le sunitinib et le sorafénib. Si le développe-ment clinique du géfinitib (Iressa) a été suspendu dans les CBNPC avancés,en raison de l’impossibilité de démontrer un bénéfice en terme de survie (etde l’apparition de complications pulmonaires), un point sur les études en coursavec les 3 autres molécules a été fait au dernier congrès de l’ASCO (juin 2006).Dans les CBNPC avancés, ces molécules donnent des résultats encourageants(en monothérapie ou associées au docétaxel, lors d’études randomisées contrô-lées ou ouvertes non contrôlées), notamment en termes de survie sans pro-gression – mais non en termes de survie globale. Par ailleurs, diverses étudesrécentes ont suggéré l’existence d’une sous-population de patients répon-deurs : ceux qui présentent des mutations de l’EGF-R au sein de la tu-meur.

Autre espoir de thérapie ciblée : les inhibiteurs de l’angiogenèse. Leconcept a montré son efficacité dans le traitement des CBNPC métasta-tiques. Ainsi le bevacizumab (anticorps monoclonal anti-VEGF), chefde file de cette stratégie anti-angiogénique, a montré une augmenta-tion significative de survie de 2 mois dans le traitement des CBNPCavancés (formes non épidermoïdes), en association avec une chimiothé-rapie conventionnelle. Le congrès de l’ASCO 2006 a permis de soulignerque les molécules anti-angiogéniques ont une activité antitumorale dé-montrée, qui ne concerne cependant qu’une minorité de patients (de l’ordred’un tiers). De plus, en raison de leur toxicité particulière vis-à-vis des can-cers épidermoïdes, ceux-ci doivent en être exclus. La découverte de mar-queurs biologiques qui permettraient de sélectionner les patients répon-deurs serait, là encore, bienvenue.

La déception du dépistage par le scanner hélicoïdal

Concernant le dépistage du cancer du poumon, une déception avec lesrésultats préliminaires de l’étude Depiscan, menée pour savoir si l’utilisa-tion du scanner hélicoïdal à faible dose, en permettant la détection plus pré-coce des cancers bronchopulmonaires, améliorait les possibilités de traite-ment et de guérison. En effet, avant de lancer dans un éventuel dépistage demasse, au coût important, il faut en avoir montré l’intérêt pour le patient…L’étude de faisabilité de Depiscan a donc été menée sur 824 fumeurs de plusde 50 ans, répartis en deux groupes de détection : l’un par une radiographieclassique du thorax, l’autre par le scanner hélicoïdal. Elle donne apparem-ment des résultats mitigés : si le scanner hélicoïdal permet la détection plusprécoce de cancers, il entraîne un risque important de faux positifs, dé-pistant un nombre important de nodules bénins. Au final, son utilisationne semble pas améliorer la survie des malades. Une réflexion est en courssur l’intérêt éventuel de son couplage au PET-Scan, notamment pour limiterce problème de faux positifs.

Lutte contre le tabagisme

Un débat politique animé

La lutte anti-tabagique a été marquée par un débat politique animé– non clos – sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics. D’uncôté, les partisans (dont le Ministre de la Santé) d’une interdiction de fu-mer dans tous les lieux publics, en ménageant cependant l’ouverture de« fumoirs ». De l’autre, les tenants d’une interdiction pure et simple de fu-mer dans tout lieu public, sans ouverture de fumoirs. Une décision a étépromise pour la fin de l’année. Une telle interdiction (avec ou sans fumoir !)aurait un impact positif non seulement sur le tabagisme passif, mais aussisur le nombre de fumeurs, qui diminuerait du fait d’une pression accrue àleur égard…

Dans le domaine du sevrage tabagique, une nouvelle molécule estattendue prochainement : la varenicline, agoniste partiel des récep-teurs nicotiniques, dont les résultats annoncés semblent supérieurs à ceuxdes autres traitements disponibles. Cette nouvelle approche pharmacolo-gique est à suivre avec intérêt : on connaîtra son efficacité « sur le terrain »dans quelques années.

Mucoviscidose

Une espérance de vie accrue

L’espérance de vie des patients atteints de mucoviscidose ne cesse decroître: pour un nouveau-né actuel, elle est de plus de 42 ans – alors qu’elleétait d’à peine 7 ans en 1965 ! Ce progrès considérable tient à l’améliorationconstante de la prise en charge des malades, par des équipes multidiscipli-naires de plus en plus spécialisées.

L’apport des macrolides dans le contrôle de la mucoviscidose est demieux en mieux connu. Ces molécules agissent en diminuant l’inflammationbronchique dues à des infections respiratoires chroniques, en réduisant lesexacerbations (de l’ordre de - 40 %) et en améliorant la fonction ventilatoire(VEMS).

Maladies infectieuses

Le paradoxe des résistances…

Le grand débat sur les résistances aux antibiotiques est désormais alimentépar une surprenante découverte : celle de la dissociation entre les résistancesobservées in vitro et l’efficacité constatée in vivo. Ainsi, les pneumocoquesmontrent in vitro des résistances très importantes, notamment à la pénicilline ;pour autant, on continue de traiter à la pénicilline les infections pneumococ-ciques et la mortalité due à ces germes n’est pas si élevée, en regard des ré-sistances enregistrées ex vivo…

Propos du Pr G. Huchon (Chef du service de pneumologie, hôpital del’Hôtel-Dieu, Paris) recueillis par Florence Rosier

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Pédiatrie

A.I.M. 117 - 2005

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Dr Jean-Louis Salomon (Hôpital de Mantes-la-Jolie)

Comme souvent en Pédiatrie, les progrès viennent essentiellement dela vaccinologie. Nous les avions d’ailleurs annoncés dans l’opus de2005. Ainsi un premier vaccin anti-rotavirus a été commercialisé :

le Rotarix (GSK).

Vaccination chez l’enfant

Rotavirus : deux vaccins déjà ou bientôt disponibles

● La place des rotavirus dans les gastro-entérites (GEA) de l’enfantest bien connue. Une récente étude prospective systématique menée à l’Hô-pital Saint-Vincent- de-Paul (Paris) sur les GEA hospitalisées montre que51 % d’entre elles sont liées au rotavirus, devant les autres virus comme lescalicivirus. On ignore, en revanche, le pourcentage de rotavirus dans les GEAnon hospitalisées et les sérotypes des rotavirus sévissant en ville. En France,le pourcentage d’enfants de moins de 6 mois hospitalisés pour GEA à rota-virus est plus important que dans d’autres pays européens : cela provient peut-être de la moindre durée de l’allaitement maternel chez nous.

● Une autre étude visant à estimer la morbidité et la mortalité liées aurotavirus selon le modèle de Markov souligne le poids de ces infections entermes de santé publique. Pour une cohorte théorique de 740 000 enfants, soitle nombre moyen annuel de naissances en France entre 1992 et 2001, elleconclut à 300 000 épisodes de diarrhée aiguë chez les enfants de moins de 5ans, dont 160 000 diarrhées sévères et 9 décès ; ce qui se traduit égalementpar 138 000 consultations en ville dont 112 000 auprès de généralistes et 26000 auprès de pédiatres, 18 000 hospitalisations et un coût annuel de 28 mil-lions d’euros, dont 80 % pour les hospitalisations.

● Par ailleurs, le rotavirus est la principale source d’infections noso-comiales. Plusieurs études ont été publiées à ce sujet, dont une récente me-née au Havre : pour 657 nourrissons hospitalisés entre début novembre et finmars, avec un âge moyen de 5,4 mois et une durée moyenne de séjour (DMS)de 5,3 jours, 10 % ont présenté une GEA nosocomiale (68 cas, dont 9 re-trouvés par enquête téléphonique secondaire) ; par rapport aux gastro-enté-rites communautaires, il s’agit d’enfants plus jeunes (âge moyen : 6,6 moiscontre 11,2 mois), dont la DMS est plus longue (DMS moyenne, 7,7 jourscontre 4,1 jours).

● Le rotavirus est un virus à ARN. Il dispose notamment d’une protéinede capside interne, VP6, à l’origine des 7 sous-groupes A à G (A en généraldans l’espèce humaine), et de protéines de capside externe : VP4 est à l’ori-gine de 10 sérotypes et de 20 génotypes P ; et VP7 est à l’origine de 14 séro-génotypes G. En pratique, les sérotypes G1 à 4 rendent compte de plus de90 % des rotavirus intervenant dans les pays développés, avec les sérotypesP(4) et P(8). Le sérotype G1P(8) est le plus répandu en Europe ; circulenten France également des sérotypes G2P(4), G3P(8) et surtout G4P(8).

● Un premier vaccin anti-rotavirus, le Rotashield (Wyeth), vaccin vivantréassortant d’origine simienne mis sur le marché en 1998, a dû être stoppé en1999 à cause de l’apparition d’un nombre élevé d’invaginations intestinalesaiguës (IIA), surtout chez des petits et parfois dès après la première dose.Après cet échec, deux autres vaccins ont été développés et sont ou seront bien-tôt disponibles. Le Rotarix (GSK), déjà commercialisé en France, est un vac-cin monovalent humain atténué à partir d’une souche G1 qui donne théori-quement une immunité croisée avec d’autres souches (G1P(8), G3P(8) etG9P(8)) ; il s’administre en deux doses orales à partir de 6 semaines de vie,avec un intervalle d’au moins 4 semaines. Le Rotateq (Sanofi-Pasteur MSD)est un vaccin pentavalent bovin réassortant G1, G2, G3, G4 et P1a ; il s’ad-ministre en trois doses orales.

● Ces vaccins sont immunogènes, n’interfèrent pas avec les autres vac-cinations et sont efficaces sur les souches G1: à 70 % sur toutes les GEAet à 90 % sur les formes sévères. L’efficacité sur les autres souches est plusdifficile à affirmer compte tenu de leur rareté relative, mais des études de ter-rain montrent une efficacité sur le nombre global d’hospitalisations et deconsultations aux urgences, quel que soit le sérotype. On n’a pas observé avecces vaccins de recrudescence des invaginations intestinales aiguës, notam-ment après la première dose. Deux questions restent cependant posées : quelleest la durée de la protection en cas de vaccination précoce – on l’espère égale

à 2 ans ? Et quelle est la place du vaccin chez les prématurés et les enfantsprésentant une maladie digestive chronique ? La question est aussi écono-mique : qui financera cette vaccination. Une dose du vaccin de GSK - com-mercialisé sans remboursement - coûte ainsi 68,90 euros. On voit mal nos dé-cideurs accorder le remboursement d’un vaccin dont les bénéfices n’apparaîtrontqu’à long terme, en cas de vaccination communautaire…

Papillomavirus : vacciner les pré-adolescents pour prévenirle cancer du col chez l’adulte?

● Un second vaccin pointe son nez : dirigé contre les papillomavirus,il a pour particularité de prévenir un cancer de l’adulte par une adminis-tration dans l’enfance, ou plutôt la pré-adolescence - c’est là qu’intervientle pédiatre. Les papillomavirus humains (HPV) sont responsables de lésionscutanées et muqueuses variées, dont le cancer du col de l’utérus. C’est ledeuxième cancer le plus fréquent chez la femme, avec un pic d’incidence au-tour de 40 ans en France et une mortalité croissante à partir de 30 ans. L’in-fection à HPV est acquise très précocement au cours de la vie sexuelle, dansles deux ans estime-t-on, et un cancer invasif se développe en moyenne 30 à40 ans plus tard.

● Les HPV sont des virus à ADN dont il existe plus de 120 génotypes,chacun ayant un tropisme particulier. Les HPV 16 et 18 son trouvés dans 60 %à 72 % des cancers du col ; les HPV 6 et 11 sont responsables de condylomesgénitaux.

● Les anticorps neutralisants développés après une infection naturelle sontmalheureusement spécifiques de type ; mais 4 types de HPV (les HPV 16,18,31 et 45) sont responsables de plus de 80 % des cancers du col (le type 16en provoquant à lui seul 50 %). Un vaccin vivant atténué n’est pas accep-table compte tenu de son risque carcinogène.

● Heureusement la protéine L1 du HPV a la propriété de s’auto-assem-bler en pseudo-particules virales (virus-like particles – VLP) de morpholo-gie quasi-identique aux virions et capables d’induire de forts titres d’anti-corps neutralisants. Autre atout : le gène L1 est dépourvu de pouvoironcogène. Les vaccins développés contre HPCV sont donc composés deVLP à base de protéine L1.

● Les premiers essais cliniques chez l’homme se sont avérés concluantsen termes d’immunogénicité et de tolérance. Deux vaccins vont être com-mercialisés : l’un, Cervarix (GSK), axé sur la prévention du cancer du col,contient les deux génotypes les plus fréquents (16 et 18) ; l’autre, Gardasil(Sanofi-Pasteur MSD), vise plus large en incluant les génotypes 6 et 11 àl’origine de condylomes génitaux. Leur efficacité est de l’ordre de 90 % entermes de protection contre l’infection et de 100 % en termes de préventiondes lésions dysplasiques.

● Idéalement la vaccination devrait intervenir avant les premiers rap-ports sexuels, vers 10-12 ans. Reste à faire accepter ce nouveau vaccin et à

Rotavirus infectant les entérocytesde la muqueuse intestinale

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

2005 - A.I.M. 117

préciser un certain nombre d’interrogations: faut-il aussi vacciner les garçons?Dans quel délai faudra-t-il envisager un rappel? Y a-t-il un risque d’évolutiondes sérotypes oncogènes, qui pourraient alors échapper à la vaccination?

Pneumocoques : zoom sur le Prévenar

Le vaccin anti-pneumococcique (Prévenar de Wyeth) n’en finit pas desusciter des études sur les retombées de son utilisation. Citons notamment,parmi les publications récentes : une étude montrant l’efficacité du Prévenarsur la diminution du nombre des otites, diagnostiquées sur les seuls critèrescliniques, mais son absence d’efficacité sur les otites moyennes aiguës réci-divantes ; une étude soulignant une augmentation du nombre de pleurésies àpneumocoques dues au sérotype 1, mais aussi aux sérotypes 3 et 19A, chezles sujets vaccinés par Prévenar ; et une étude indiquant une augmentation dessouches sensibles à la pénicilline, 15 et 33 par exemple, toutes pathologiesconfondues (bactériémies, méningites, mais aussi otites, ostéomyélites…).Toutes ces observations, essentiellement faites en comparant les périodes avantet après la vaccinatiopn par Prévenar aux Etats-Unis, ne remettent pas en causeles bénéfices de ce vaccin ; elles montrent (si tant est que leurs interprétationssoient indiscutables) surtout que la surveillance écologique, en termes de pneu-mocoque comme d’autres germes, est indispensable.

Rougeole, oreillons, rubéole : nouvelles recommandations

Pour clore le chapitre des vaccinations, rappelons les nouvelles directives enmatière de vaccination contre la rougeole, les oreillons et la rubéole: premièredose à 12 mois et non plus à partir de 12 mois, et rappel entre 13 et 24 mois (avecau moins un mois d’intervalle entre les deux doses), et en cas d’entrée en col-lectivité avant 12 mois, première dose à 9 mois et rappel entre 12 et 15 mois.

Diabète

Zoom sur l’insuline détémir

Dans un tout autre domaine, celui du diabète, un nouveau produit trouve peuà peu sa place dans l’arsenal thérapeutique : l’insuline détémir (Lévémir deNovo). Rappelons qu’il s’agit d’un analogue soluble de l’insuline d’action pro-longée, dont le gros avantage est un profil d’absorption beaucoup plus re-productible que la classique NPH: d’où un moindre risque d’hypoglycémie.Par ailleurs, elle se compare très favorablement avec la NPH en termes de ré-sultats sur l’hémoglobine glyquée. Son utilisation n’entraîne pas de prise depoids: un bon argument, surtout chez l’adolescent. En revanche, elle semble dif-ficile à administrer en une seule prise: un mauvais point, surtout chez l’adoles-cent… En fait, cette insuline paraît idéale pour remplacer la NPH surtout dansles tranches d’âge où l’instabilité glycémique est majeure, comme les nourris-sons et les petits enfants. Malheureusement elle n’a actuellement l’AMM qu’àpartir de 6 ans.

Reflux vésico-urétéral

L’intérêt de l’antiobioprophylaxie mise en doute

● On peut aussi considérer 2005-2006 comme une période de doute. Pourpreuve : la remise en cause de l’intérêt de l’antibioprophylaxie au coursdu reflux vésico-urétéral (RVU), découvert en général après un premier épi-sode de pyélonéphrite aiguë. Cette mise en doute fait suite à une étude pros-pective menée avec le cotrimoxazole.

● De fait, il n’existe pas d’études prouvant l’intérêt de ce type d’antibio-prophylaxie, en dehors des cystites répétées de la petite fille. Mais, à uneépoque où l’on opère presque plus le RVU, ou en tout cas plus tardivement(rarement avant trois ans, sauf infections répétées ou altération rénale)… ilne reste plus que « ça » à proposer aux petites filles… « ça » ou la circonci-sion pour les petits garçons !

● Une autre approche consiste à chercher des marqueurs du risque de lé-sion rénale au moment de l’infection urinaire: peut-être la procalcitonine (PCT)sera-t-elle ce marqueur, un certain nombre d’études montrant que son élévationva de pair avec un risque de lésions rénales ultérieures, elles-mêmes associéesà un risque théorique d’insuffisance rénale à distance. Reste à préciser le seuilde PCT le plus discriminant et à en tirer des conséquences thérapeutiques im-médiates (allongement du temps de traitement initial?) et secondaires (comptetenu de l’inefficacité probable de l’antibioprophylaxie actuellement proposée).

Reflux gastro-oesophagien

Un usage abusif des anti-acides

● L’utilisation systématique et sans doute déraisonnable des anti-acides dansle traitement du reflux gastro-oesophagien (RGO) est un autre sujet de réflexionsi ce n’est de doute. Certes depuis la quasi-disparition du cisapride dans le trai-tement du RGO, ce que l’on peut proposer est bien maigre : l’épaississement,bien sûr ; la dompéridone, dont l’utilité n’a jamais été prouvée (et pour causesans doute); et le Gaviscon, efficace mais en général refusé par les enfants.

● D’où cette dérive vers les anti-acides : anti-H2 et IPP. Mais ces produitsn’ont l’AMM que dans les RGO compliqués (il est vrai qu’un RGO mal traitédevient vite compliqué), ne disposent pas de formes pédiatriques pratiques etne sont peut-être pas aussi anodins qu’on le pensait.

● Deux études récentes montrent que l’acidité gastrique joue un rôle dansles défenses immunitaires : une étude italienne pointe une recrudescence deGEA communautaires et d’infections respiratoires chez des nourrissons sousanti-acides pour un RGO ; une autre étude laisse penser que les anti-acidesfavorisent la survenue d’entérocolites ulcéro-nécrosantes chez le prématuré.De quoi réfléchir, ce d’autant que les anti-acides ne sont pas des anti-RGO :le RGO persiste même si la guérison d’une oesophagite améliore le RGOsous-jacent ; et les reflux alcalins ne sont sans doute pas anodins, notammenten termes de pathologie respiratoire.

● Il faudra sans doute rendre sa place au cisapride, avec toutes les précautionsnécessaires liées à sa prescription; rappelons qu’on peut l’utiliser avec une pres-cription hospitalière et une surveillance codifiée de l’ECG et de l’ionogramme.

Rhinite allergique

La nouvelle indication des anti-leucotriènes

● Pour terminer, signalons l’indication des anti-leucotriènes dans la rhi-nite allergique, ce qui est évidemment une avancée dans la mesure où l’asthmeest souvent associé à une rhinite et où l’on sait que l’amélioration de la rhi-nite entraîne une amélioration de l’asthme.

● Ces données, associées à la bonne tolérance des anti-leucotriènes, ne doi-vent plus faire hésiter. Des indications complémentaires des anti-leucotriènes seprofilent d’ailleurs: dès que l’on disposera d’une galénique adaptée aux plus pe-tits, comme les exacerbations virales de l’asthme léger intermittent chez l’enfantde 2 à 5 ans, pour lesquels la corticothérapie inhalée est souvent mise en défaut.

Enurésie nocturne

Le retrait des sprays de desmopressine

Signalons enfin le retrait de la forme spray de la desmopressine dans letraitement de l’énurésie nocturne initiale, à cause de rares cas d’intoxicationpar l’eau : nous sommes à l’époque des précautions maximales. Reste, biensûr, la forme comprimé dans la même indication.

Rendez-vous l’année prochaine.

Dr Jean-Louis Salomon (Hôpital de Mantes-la-Jolie)

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Streptococcus pneumoniae(MEB, fausses couleurs).

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Gériatrie

2005 - A.I.M. 117

Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

Pr Bruno Vellas (Toulouse)

La Gérontologie fédère de plus en plus d’unités de soins et de réseaux quianiment l’offre de soins proposée aux personnes âgées, de plus en plusnombreuses et de plus en plus âgées. Maladies neuro-dégénératives, onco-

gériatrie, la Gérontologie est polyvalente et doit répondre à l’enjeu de santé pu-blique que représentent les pathologies affectant les sujets âgés voire très âgés.

Les pôles gériatriques

De véritables filières de soins

L’année 2006 est celle du développement de la médecine gériatrique :- Sur le plan des soins, avec l’augmentation des équipes mobiles de gé-

riatrie, des courts séjours gériatriques, des consultations « mémoire » au-tour des CMRR (Centres Mémoire de Ressources et de Recherches), desEHPAD (Etablissements d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes)

- Sur le plan de l’enseignement, avec la mise en place du DESC de Gériatrie- Sur le plan de la recherche.

● Sur le plan de l’offre de soins, la Gériatrie poursuit son important dé-veloppement. Peu à peu, avec les décisions gouvernementales, des ARH et

des Contrats d’Objectifs et de Moyens se concrétisent par le développe-ment de Pôles Gériatriques autour de véritables filières. Des lits de courtséjour sont créés, des consultations « mémoire » voient le jour, des équipesmobiles et des réseaux sont constitués, ce qui représente une véritable fi-lière gériatrique. Les EHPAD se structurent, ainsi que le long séjour. Desinvestisseurs privés viennent s'ajouter au secteur public pour une plus grandedynamique. Parallèlement de nombreux postes de PH, plus de 200 par an,sont ouverts aux concours. A noter aussi, l’organisation du « 1er CongrèsNational sur les Equipes Mobiles de Gériatrie », ainsi que celle du « 3eCongrès sur les Unités de Soins Alzheimer », qui a eu lieu à Nice. Un plangouvernemental ambitieux vient d’être présenté par le Premier Ministre etsera détaillé par Philippe Bas.

● Sur le plan de l’enseignement, parallèlement à la Capacité de Gériatrieet au Module vieillissement du Deuxième Cycle des Etudes Médicales, leDESC de Gériatrie se généralise. Près de 6000 capacitaires Gériatres sontainsi recensés dans le Répertoire des Gériatres publié à l’occasion du 20e an-niversaire de l’année gérontologique. Le DESC permet, aux Internes de Mé-decine Interne, de Médecine Générale et à de nombreux autres spécialistes,d’acquérir une compétence de haut niveau dans le domaine de la médecinegériatrique.

PLAQUE SÉNILE

α-sécrétase

γ-sécrétase

β-sécrétase

Clivage normalde l’APP parα-sécrétase

Protéine AmyloïdePrécurseur (APP)

Bêta amyloïde (Aβ) Agrégation Aβ

Agrégation Aβ

VAISSEAU

ASTROCYTE

Cholestérollibre

Cholestérol

Cholestérol

Mortneuronale

Cholestérol

HMG-CoAréductase

Apo E

Lipoprotéine

TransporteurABCA1

Cholestérol-24-hydroxylase

24OHcholestérol

24OHcholestérol

RécepteurProtéique duLDL (LRP)

NEURONE

Complexe ApoE,cholestérol, LDL

Clivage anormal =libération de l’Aβ

Des arguments de plus en plus nombreux suggèrent un lien entre le métabolisme du cholestérol dans le cerveau et la formation des plaques amyloïdes. L’excès de cholesté-rol augmente la formation et les dépôts de peptide β-amyloïde (Aβ) à partir de la Protéine Amyloïde Précurseur (APP). Voir AIM n° 113 page 30.

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Les Innovations de l’Année Médicale 2005-2006

● Sur le plan de la recherche clinique et des avancées thérapeutiques, l’an-née 2006 est marquée par le développement de l’Oncogériatrie, de la priseen charge des patients présentant un trouble cognitif, de l’ostéoporoseentre autres domaines.

- Le développement de l’Oncogériatrie a été permis par le Plan cancer, quia lancé de vastes programmes d’étude sur l’intérêt d’une évaluation gé-rontologique standardisée chez le sujet âgé cancéreux, la prise en chargespécifique de patients Alzheimer présentant un cancer, l’étude spécifiquedes médicaments chez le sujet âgé.

Maladie d’Alzheimer

De nouvelles stratégies de prévention

Chez les patients présentant un trouble cognitif, le concept de MCI (Mild-Cognitif Impairment) de Peterson paraît difficile à appliquer en clinique ainsiqu’en recherche thérapeutique, comme le montrent les résultats négatifs denombreuses études. Les avancées se font maintenant en amont, par la pré-vention en luttant contre les facteurs de risque tels que le diabète, l’obé-sité, l’HTA, l’hypercholestérolémie ; ou en aval, par la possibilité du Centreexpert d’évoquer très fortement un diagnostic de maladie d’Alzheimer à unstade non démentiel. Enfin de nombreuses molécules à visée anti-amyloïdefont aujourd’hui l’objet d’essais de phase III (Alzheimed…) ou de phaseII (inhibiteur des bêta-sécrétases, immunothérapie…). Ces essais théra-peutiques visent à modifier l’évolution de la maladie en agissant directementsur les processus physiopathogiques en cause. Les études sur les traitementsactuels, inhibiteurs des cholinestérases et mémantine, se poursuivent avecdes résultats dans les démences sévères et les démences parkinsoniennes.

La recherche de marqueurs biologiques de la maladie se développe avec lamise en place de grands programmes au niveau européen.

Ostéoporose du sujet âgé

Prise en charge du DEXA (Dual Energy X-Ray)

Le domaine de l’ostéoporose et de la prévention des fractures du col dufémur a été marqué par la prise en charge, par la sécurité sociale, du DEXApour étudier la densité minérale osseuse, ainsi que par la mise sur le mar-ché de nouveaux médicaments comme le ranélate de strontium. En re-vanche, des études sur l’intérêt de la simple prescription de calcium et de Vi-tamine D 3 - prescriptions pourtant largement généralisées en France - se sontavérées négatives. Des travaux supplémentaires sont nécessaires pour établirles meilleures stratégies de prise en charge.

D’autres avancées voient peu à peu le jour dans le domaine de la sarco-pénie, ou fonte musculaire, qui accompagne l’avance en âge, ainsi que dansle domaine de la nutrition avec des interrogations sur l’obésité du sujet âgé :doit-elle être surveillée ou traitée ? Les bienfaits de l’exercice physiquechez la personne âgée se confirment à tout âge, avec des résultats non seu-lement sur la masse musculaire mais aussi sur les fonctions cognitives.

Ainsi, en 2005-2006, la gérontologie poursuit sa rapide progression, tantsur le plan de la clinique, des filières de soins que de la recherche; elle de-vient peu à peu une grande discipline.

Propos du Pr Bruno Vellas (CHU de Toulouse)

A.I.M. 117 - 2005