Upload
nguyendung
View
216
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
46
2.0 PRELIMINAIRES
Apn!s avoir etudie quelques caracteristiques gen~iales des
approches communicatives dans le chapitre precedent, nous allons cerner
de plus pres la notion de l'approche communicative. Il s'agit de definir 3
principes generaux qui sous-tendent notre definition de l'approche
communicative. Nous entreprenons cette tache car nous estimons que
l'approche communicative reste une notion polyvalente et fait l'objet
d'interpretations diverses. Avant de definir les trois principes, il serait
interessant de faire un survol de differentes interpretations/definitions de
l'approche communicative a travers quelques ecrits 1 a partir de 1980.
2.1 APPROCHE COMMUNICATIVE: NOTION POLYVALENTE
(Esquisse de quelques definitions)
I. Progression des cours communicatifs (Jeanine Courtillon:1980)2
D'apres Jeanine Courtillon, dans Ia plupart des cours
"situationnels", l'etablissement de Ia progression se fonde sur les criteres
d'ordre morpho-syntaxique, en fonction d'un prmctpe de complexite
1 Vu l'immensite de Ia litterature sur !'approche communicative, nous avons choisi quelques ecrits des auteurs consideres. representatifs du mouvement communicatif surtout dans le cadre du FLE.
2 COURTILLON Jeanine ( 1980): "Que devient Ia notion de progression?" dans Le francais dans le monde, No 153. Paris, pp.89-97.
47
purement formel, par exemple, les temps simples sont consideres plus
faciles que les temps composes. Au sein des cours communicatifs, le fil
conducteur pour !'elaboration de progression n'est plus la grammaire
(structures de Ia langue) rna is les fonctions selectionnees selon les
besoins de l'apprenant. Cependant, il est souhaitable d'eviter les 2
extremes.
Entre une programmation trop rigoureuse des donnees qui ne laisse
aucune marge de libetie a l'eleve dans ses choix linguistiques et une
"presentation atomisee" qui rend difficile le reperage des regularites
formelles et la memorisation, Courtillon propose de regrouper des
donnees linguistiques en "ensembles fonctionnels de discours". 1 tels que
Ia description d'une personne, la demande de donner un objet, le dire de
faire, la narration... etc. Les notions grammaticales peuvent etre
presentees a }'interieur des ensembles fonctionne}s par un JeU
d'oppositions, par exemple, la description d'etats passes ("imparfait")
s'oppose au "ne ... plus" de l'etat actuel.
Ainsi, voit-on que Ia progression d'un cours communicatif ne
s'etablit pas selon les criteres morphologiques mais plutot semantiques.
Une telle approche n'oblige pas a enseigner une seule forme pour une
fonction mais un ensemble de formes au service de Ia fonction.
1 1bid,p.91.
48
II · Trois illusions au sujet de l'approche communicative (Alan
Maley: 1980)1
Selon Alan Maley, "une approche communicative de
l'enseignement des Jangues est necessairement reliee a la realite. "2 En
fait, le point important n'est plus ce que les apprenants savent sur le
systeme linguistique mais ce qu'ils peuvent faire avec ce langage dans le
monde reel. Maley estime qu'il existe en general 3 illusions au sujet de
Ia perspective communicative:
• il existe une description systematique des situations de
communication/fonctions du langage.
• cette description peut etre appliquee a une methodologie existante
( traditionnelle)
• pour engendrer l'authenticite en classe, il suffit d'avoir recours aux
documents authentiques
Parlant de la premiere illusion, Maley precise qu'il n'existe pas
"une taxonomie satisfaisante" des actes de communication. "Les listes
produites par Wilkins, Van Ek3 et d'autres auteurs ne co'incident pas, bien
qu'il existe une certaine similitude entre elles. "4 De plus, il est
1 MALEY A.( 1980): "L'enseignement d'une competence de communication: Illusion du reel et
Rea lite de !'illusion" dans Le francais dans le monde, N° 153, Paris, Hachette/Larousse, pp.58-71.
2 Ibid, p.58. 3 WILKINS D.A. ( 1976) Notional Syllabuses, Oxford. Oxford University Press.
VAN EK J. ( 1975), The Threshhold level, Strasbourg.Conseil de !'Europe. 4 MALEY A. ( 1980): op.cit.. p.58.
49
extremement difficile de trouver une equation simple entre une fonction
et ses enonces ou inversement, entre un enonce donne et les fonctions
qu'il doit exprimer.
Une des consequences methodologiques qm resultent de Ia
deuxieme illusion, c'est de remplacer les structures par des fonctions sans
changer !'hypothese de base quant a l'apprentissage d'une langue. Dans
les methodes traditionnelles, }'hypothese s'appuie sur le fait que "!'input"
( ce qui est enseigne) do it equivaloir a "l'intake" ( ce qui est retenu par
l'eleve). Or, une telle conception selon Maley, laisse de cote, le role actif
joue par l'apprenant dans sa propre demarche. S'il est vrai qu'un
apprenant doit s'exprimer correctement, il est aussi important qu'il soit
amene a produire une expression spontanee (''fluency").
Quant a Ia troisieme illusion, Maley precise que l'emploi du
document authentique lui-meme ne garantit pas obligatoirement les
resultats voulus. II est important de donner a l'apprenant des activites qui
soient en rapport avec ses besoins et pour cela il n'est pas necessaire que
le materiel enseigne so it reellement authentique. L'objectif du professeur
est done de "... creer dans la classe un climat de communication
authentique". 1
Compte tenu des considerations mentionnees au-dessus, Maley tire
3 consequences pedagogiques pour l'enseignement des langues dans une
perspective communicative: i) II est difficile de fonder tout un programme
d'etudes uniquement sur les fonctions/notions; ii) On doit accorder autant
I Ibid, p.69.
50
d'importance a !'ensemble "accuracy/fluency"1
qu'a !'ensemble
"input/output"2; iii) Il faut permettre a l'apprenant de controler son propre
processus d'apprentissage, d'etre un participant actif et non pas un
"observateur."
III. Focalisation sur le discours (Widdowson H.G. 1981)3
Selon Widdowson, en vue de promouvoir une approche de
l'enseignement des langues qui permet de mettre en place la capacite de
communiquer, il faut explorer le domaine de la communication et les
consequences pratiques qui decoulent de cet objectif. Cela suppose done,
un examen de la nature du discours et des capacites qui contribuent a le
creer. Cela implique egalement que l'on definisse les procedures
pe.~agogiques susceptibles d'amener l'apprenant a Ia maitrise du discours.
' · · · Une description du discours suppose " ... !'analyse de la fa9on dont
les propositions se combinent entre elles pour assurer un developpement
continu mais elle suppose egalement !'analyse des actes illocutionnaires
que ces propositions servent a accomplir, et leurs rapports".4 II s'ensuit
que dans un discours (ecrit/oral) on peur lier developpement
propositionnel (cohesion) d'une part et developpement illocutionnaire
(coherence) d'autre part. La cohesion est definie comme la relation
1 Expression correcte/expression spontanee.
,, ~ Reception/production.
3 WIDDOWSON H.G. ( 1981 ): Une approche communicative de l'enseignement des Iangues (Traduction de: Teaching language as communication, 1978), Paris, Hatier-CREDIF, pp.ll-183
4 Ibid, p.37.
51
explicite signalee par les indices linguistiques entre propositions et la
coherence comme la relation entre les actes illocutionnaires. En fait, " ...
ce qui permet !'interpretation du discours, est le fait que nous
comprenons comment les phrases assurent le developpement
propositionnel et illocutionnaire et comment ces deux aspects du discours
s'interpenetrent et se renforcent l'un rautre" .1
Par consequent, en vue de permettre a l'apprenant d'acquerir une
competence de communication, une capacite a interpreter/produire un
discours, il serait raisonnable " ... que l'on utilise des discours comme
point de reference pour tousles exercices."2
IV. Centrage sur l'aisance (Christopher Brumfit: 1981)3
Brumfit remarque que les discussions sur !'approche
communicative dans l'enseignement des langues ont davantage porte sur
Ia definition des programmes ("syllabus design") que sur les activites
d'enseignement/apprentissage. Dans son opinion, il faut creer des
conditions appropriees en classe qui faciliteront l'apprentissage, plutot
qu'a imposer un comportement predetermine. II s'agit done d'encourager
les interactions qui developperont "une aisance" d'utilisation de la langue.
Cette aisance ("fluency") est definie non pas comme la capacite de
produire des realisations correctes du systeme linguistique cible mais
I I bid, p.42.
2 Ibid, p.165.
3 BRUMFIT Christopher ( 1981 ): "Linguistic specifications for fluency work: how meaningful a question" dans "Description. Presentation et'Enseignement (ed. Richterich R., Widdowson), LAL. CREDIF/Hatier, pp.45-59.
52
comme la capacite d'utiliser la langue, comme le ferait un natif pour
negocier des significations et produire des enonces qui repondent a des
contraintes de communication:
"Negotiation implies self rectification of perceived errors (in communicative terms) and that what foreign learners need is experience of same uncertainty in the foreign language as
they accept in mother tongue." 1
Pour Brumfit, les activites qui visent !'acquisition de 'l'aisance',
doivent etre definies non en termes linguistiques mais en termes de
significations. L'accent doit done etre mis sur un "contenu" et non sur "Ia
langue".
V Conception des programmes communicatifs (Sophie Moirand
1982)2
Sophie Moirand utilise le terme "approche communicative" en le
prenant dans son acception originelle: " ... il ne s'agit ni des materiaux
d'enseignement ni des procedures pedagogiques mais des principes
d'elaboration des 'syllabus', c'est-a-dire des repertoires, des inventaires
determinant des contenus d'enseignement". 3 Un programme de langue
(La negociation implique une autocorrection des erreurs peryues en terrnes de communication et ce dont les apprenants ont besoin, c'est d'etre confrontes en langue etrangere a cette incertitude qu'ils acceptent en langue maternelle.) Ibid, p.49. 2 MOl RAND Sophie ( 1982): Enseigner a communiquer en langue etrangere, Recherches/Applications, Paris, Hachette.
3 Ibid. o.21.
53
"communicatif' a pour objectif l'enseignement d'une competence de
communication.
Les programmes d'enseignement communicatif peuvent se
caracteriser selon l'une des conceptions suivantes de !'approche
communicative:
1) Approche minimaliste : II s'agit de faire acquerir les capacites
communicatives minimales dans une langue etrangere. Par exemple :
enseigner les habiletes necessaires pour faire quelque chose, pour dire ce
qu'on a en vie de dire ... "La notion de Niveau-seuil diffusee par le Conseil
de !'Europe parait bien evidemment relever de cette approche." 1 II s'agit
surtout de "survivre" lors des contacts temporaires avec des locuteurs
d'une autre langue ou bien d'etablir des contacts sociaux en tant que
visiteurs dans les pays etrangers. On peut aussi citer le cas de certains
programmes, ou l'acte de parole tend a devenir !'unite d'enseignement et
" ... rem placer la structure par l'acte ne parait pas une condition suffisante
pour enseigner Ia communication. "2 En fait, les regles de systeme ne sont
pas moins importantes que les regles d'emploi.
2) Approche maximaliste : A !'oppose de !'approche minimaliste, cette
approche vise !'acquisition d'une competence de communication qui
comprend quatre composantes essentielles : composante linguistique,
composante discursive, composante
socioculturelle.
I Ibid, p.23.
2 I bid, p.26.
referentielle, composante
54
Selon Moirand, meme s'il s'agit d'un public "general", il faut se
tourner vers ses attitudes, motivations, habitudes d'apprentissage et
envisager une description fine de la situation d'enseignement/
apprentissage. Mais, enseigner a des publics particuliers (Ex: medecins
etc.) qui ont des objectifs specifiques, ne veut pas dire qu'on se limite a
une approche minimaliste, a des domaines d'experiences restreints aux
connaissances de l'apprenant. En fait, meme si on vise dans un premier
temps, 1 'acquisition d'une capacite particuliere (par exemple: lire le
discours specifique des textes scientifiques ), le developpement des
composantes culturelles et sociolinguistiques doivent etre egalement
integrees dans un programme d'enseignement.
VI Quatre orientations des approches communicatives (Franc;is
Debyser: 1985) 1
Pour Francis Debyser, 4 orientations caracterisent les "approches
communicatives" vis-a-vis des "methodes structurales":
1) Un retour au sens : Les methodes structurales s'etaient inspirees des
recherches linguistiques, predominantes a }'epoque qUI etaient
car·acterisees par un exces de formalisme. Par consequent, Ie but des
methodes structurales etait de faire acquerir, en priorite, les structures de
Ia langue a l'eleve en esperant qu'il pourrait les utiliser en Ies chargeant
de sens.
1 DEBYSER Francis (I 985): "De l'imparfait 'du subjonctif aux methodes communicatives"
dans Le fran9ais dans le monde, N° 196, oct., pp.28-31.
55
A !'oppose des "methodes structurales", dans les "methodes
communicatives", le retour a la grammaire de sens inverse la priorite
forme-sens. Si la connaissance des formes reste indispensable en langue
etrangere, "elle est toujours au service d'un projet de sens, d'expression,
de communication" .1
2) Une pedagogie moins repetitive : Dans "les methodes structurales et
audio-visuelles" la plus grande partie du temps de travail des eleves en
classe etait consacree a des repetitions ou a des reemplois mecaniques.
Dans le cas des methodes communicatives, on accorde plus d'importance
aux exercices de communication reelle ou stimulee conformement a une
hypothese: "C'est en communiquant qu'on apprend a communiquer."
3) La centration sur l'apprenant : Selon cette formule, l'eleve est plus
important que la methode. II est le sujet de l'apprentissage et non objet.
Pour communiquer, l'eleve ne se contentera pas d'utiliser les phrases
grammaticales dans le vide mais les enonces dont il sera le sujet actif et
implique.
4) Aspects sociaux et pragmatiques de Ia communication : "Les
methodes communicatives" prennent les performances communicatives
comme objectifs de le<;on. A titre d'exemple, on n'enseigne pas la forme
imperatif comme objet en soi, mais on l'enseigne a demander a quelqu'un
de faire quelque chose.
I Ibid, p.JO.
56
A !'oppose des methodes communicatives, les methodes
structurales et audio-visuelles n'etaient pas tres preoccupees de cet aspect
pr'l.gmatique de la communication, faisant !'hypothese qu'une fois qu'on
connalt les bases d'une langue etrangere, on est capable de faire le reste.
VII. Quelques considerations methodologiques de l'approche
communicative (Holec H: 19891)
Pour Holec, "le postulat fondamental de cette approche, de cette
orientation est que l'on apprend une langue pour s'en servir ( ecouter, lire,
parler, ecrire) et que cette utilisation a pour visee la cmnmunication."2
11
en decoule qu'on n'ecoute pas pour ecouter, on ne lit pas pour lire... On
utilise la langue pour faire quelque chose, aux fins specifiques. Un tel
postulat a 3 consequences methodologiques.:
1). Discours vs. langue
C'est par le discours que des partenaires communiquent et non la
structure qui ne constitue que l'un des moyens dans lesquels il faut puiser
pour construire et interpreter. Autrement dit, c'est le discours que l'on
construit et/ou interprete a chaque fois que l'on s'engage dans une activite
Iangagiere. Par consequent, ce qu'il faut apprendre, c'est a participer a
des discours, c'est-a-dire a se faire comprendre et a comprendre }'autre, a
p_roduire/interpreter des enonces et non des phrases.
I HOLEC H. ( 1989): "Enseignement-apprentissage de langues: Etat methodologique actuel", dans NOV! SAD, juillet, CRAPEL, Universite de Nancy II, pp.2-19.
, -Ibid, p.3.
57
2). La langue comme pratique
La langue est con9ue en tant que pratique et non un code statique.
Apprendre une langue, c'est done apprendre a mettre en oeuvre des
strategies specifiques de comprehension et d'expression. Pour
!'acquisition des savoir-faire langagiers (ex : la comprehension orale,
!'expression orale, la comprehension ecrite, !'expression ecrite) des
strategies specifiques doivent etre mises en oeuvre, dans la mesure ou
elles representent des fa9ons differentes de faire fonctionner la langue et
de l'utiliser.
3). La langue comme pratique culturelle
Le comportement langagier est auss1 un compm1ement
socioculturel qui suppose !'acquisition d'un certain nombre de
connaissances extra-linguistiques, a savoir, les connaissances partagees
par les membres de la communaute culturelle, les conventions
socioculturelles qui reglent les pratiques sociales du langage (politesse,
tactique, etc.).
VIII. Communication dans Ia salle declasse (Joe Sheils: 1991)1
Joe Sheils presente dans son ouvrage, une vue d'ensemble de
differents materiaux didactiques con9us dans le cadre de !'approche
communicative. Pour J. Sheils, !'application de cette approche exige une
certaine "ambiance" en classe. Une classe communicative necessite une
1 SHEILS J. (1991): La communication dans Ia·c1asse de langue (traduit de Communication in the modern languages classroom - 1988), Strasbourg, Conseil de !'Europe.
58
ambiance socio-affective favorable dans laquelle l'apprenant s'investit
activement et personnellement. "Elle se caracterise par un esprit de ·' '·
cooperation qui fait de l'apprentissage de Ia langue cible une experience
socialement partagee., I L, approche communicative vise a evoquer chez
l'apprenant l'interet d'apprendre Ia langue etrangere par !'utilisation et le
developpement de ses connaissances. A cet egard, Ia langue maternelle
des apprenants peut jouer un role positif surtout lors des phases initiales
de l 'apprentissage.
IX. L'approche communicative - A l'ecoute de l'autre (Evelyne
Berard: 1991)2
Chez Evelyne Berard, une description de l'approche
communicative se degage d'une etude des ecrits methodologiques, des
pratiques d' enseignement dans les manuels de FLE et une experience de
classe. Selon l'auteur:
1 Ibid, p.2.
" I' approche communicative est construite autour du vecteur principal qu'est la double motivation de l'apprenant et de l 'enseignant, dont les effets attend us sont les echanges au sein de Ia classe."3
2 BERARD Evelyne (1991) L'approche communicative theorie et pratiques, CLE
International, Paris.
31bid, p.IO~.
Ainsi, une participation active de Ia part de l 'apprenant et une
responsabiLisation. des participants du groupe ont- ·un·; ·effet positif ·sur
l 'apprentissage.
Il importe de noter que l'A.C. est a l'ecoute de !'autre, par
consequent, elle comporte en elle, les caracteres de la variabilite et de la
modification.
X. Double dimension adaptative de Ia langue (Claude Germain:
1993)1
D'apres Claude Germain :
" ... un des principes de l'approche communicative est qu'il ne suffit pas de connaitre les regles d'une langue etrangere pour pouvoir communiquer dans cette langue."2
La connaissance du vocabulaire et des structures grammaticales est une
condition necessaire mais non suffisante pour Ia communication. Pour
communiquer efficacement, il faut connaitre les regles d'emploi de cette
langue. Cela signifie qu'on sache employer des formes linguistiques
appropriees, compte tenu d'une situation de communication et des
intentions de communication. C'est ce qu'on pourrait appeler comme "Ia
double dimension adaptative de Ia langue".3
1 CLAUDE Germain ( 1993 ): "L'approche communicative" dans Evolution de l'enseignement des langues. 5000 ans d'histoire, Paris, CLE International, pp.20 1-219.
2 Ibid, p.203.
3 1bid.
60
2.2 BILAN
A Ia lumiere d'un apen;u general de differentes definitions, nous
sommes amene a conclure que !'approche communicative se pn~te a plusieurs usages et interpretations. Aussi, constatons-nous une
terminologie heterogene (par ex: coherence/cohesion, usage/emploi,
accuracy/fluency, fonctions langagieres, actes de parole, input/output etc.)
dans les ecrits, qui renforce le cote polyvalent de l'approche.
L'usage d'une terminologie heterogene est du au fait que les tenants
de l'approche communicative ne s'adherent pas aux memes outils/theories
de reference. En effet "... cette heterogeneite theorique des outils
descriptifs de reference n'est pas sans consequence sur le flou
terminologique constate dans les ecrits sur !'approche communicative." 1
Il conviendrait de mentionner que, si, a premiere vue, !'approche
communicative semble etre une notion polyvalente (terminologie
heterogene, usages multiples), ses differentes interpretations2 ne sont pas
toujours contradictoires. Elles le seraient, si chacune d'entre elles etait
prise separement sans prendre en consideration une vision totalitaire.
A Ia lumiere de ce qui precede, il s'avere necessaire de definir une
approche communicative en vue d'eviter toute equivoque a son
interpretation. Avant de. Ia definir, examinons quelques lignes de fore~
auxquelles se referent les discours sur !'approche communicative.
1 MOl RAND Sophie. op.cit. p.21.
2 Surtout celles esquissees au-dessus.
61
2.3. APPROCHE COMMUNICATIVE: QUELQUES LIGNES DE
FORCE1
1). Acte de parole
Le concept d'acte de parole s'emploie souvent pour definir les
contenus notionnels de l'enseignement communicatif. Ce concept tire son
origine des travaux de deux philosophes de langue: Austin2 et Searle3•
Selon Austin, le dire et le faire sont intimement lie dans un meme enonce.
Ainsi, le langage est con9u comme un moyen d'action sur }'autre et il faut
l'etudier dans sa contextualisation: c'est le contexte qui permet de fournir
une interpretation, de savoir s'il s'agit d'un acte de promesse, de souhait,
d'ordre ...
II importe de preciser qu'un meme acte peut etre realise par des
enonces tres differents. Inversement, un meme enonce, selon la situation
d'enonciation est capable d'effectuer des actes differents. Ainsi, un
enonce de forme interrogative, "Est-ce que la porte est fermee?" peut
realiser l'acte de donner un ordre, ou faire une requete. Le concept d'acte
pose le probleme de savoir comment le destinataire d'un message parvient
a reconnaitre sa valeur. En effet, les parametres de l'enonciation jouent ici
un role primordial.
1 Nous presenterons les concepts cles dans un ordre alphabetique : acte de parole, authentique, autonomie, besoin langagier, communication, competence de communication, situation de communication.
2 AUSTIN J.L. ( 1970): Ouand dire. c'est faire (Traduction de How to do things with words -
1962. Paris, Le Seuil.
' SEARLE .I.R. (1972): Les actes de langage (Traduction de Speech acts- 1969). Paris, Hermann.
62
II conviendrait de mentionner que les actes de parole ont ete classes
de differentes manieres aupres de differents chercheurs. Selon Jupp et al.
11 ••• I'acte social que l'enonciateur accomplit en prononyant un enonce est
un acte illocutoire. A !'oppose, l'acte provoque ou accompli par le fait de
dire quelque chose est un acte perlocutoire. 111
Dans Un Niveau Seuil, Ia partie consacree aux actes de paroles2
semble mettre en avant !'idee que l'acte se realise au niveau de Ia phrase et
ne propose rien sur Ia fa9on dont s'enchainent les actes dans un discours.
C'est bien ce danger dont parle Maley: "Prise dans sa forme la plus nai"ve,
cette application ne fait que rem placer les structures par des fonctions. "3
De tout ce qui precede, nous constatons que Ie concept de l'acte de
parole reste une des notions importantes pour determiner Ies contenus
notionnels/semantiques. Pourtant, il importe de preciser que l'acte de
parole s'actualise toujours dans un discours. Par consequent, il ne faut pas
le traiter d'une maniere isolee en dehors d'une situation d'enonciation.
2) Authentique/Authenticite
Etant donne que !'approche communicative est liee a Ia realite ( elle
VISe a preparer les apprenants a utiliser Ia langue aux fins de
1 JUPP T.C. et al ( 1978): Apprentissage linguistique et communication, DOLE, Paris, CLE International, p.32.
2 "Actes de Parole" (pp.83-224) dans Llll N iveau Seui I ( 1976), op.c it.
3 MALEY A. ( 1980): op.cit, p.59.
63
communication), la notion d'authentique/ authenticite fait partie
integrante de !'ensemble conceptuel de !'approche communicative.
II est interessant de noter que le terme "authentique" s'emploie
etroitement en rapport avec le document dit "authentique". En fait, il
importe de ne pas confondre les deux. Un document authentique est un
" ... document/enonce produit dans une situation reelle de communication:
en sont exclus les textes ecrits et oraux, fabriques ou modifies en vue
d'enseigner une langue." 1 Autrement dit, un document authentique est une
sot1e de photographie d'un discours donne, a un moment precis dans un
endroit donne. Par consequent, a cause de son caractere unique, le
document authentique ne peut pas etre utilise comme "brut", comme
modele a repeter ou a imiter mais il peut etre utilise comme materiau
d'observation preparatoire a !'expression. Ainsi, selon Holec: "Les
documents authentiques ont pour fonction de fournir !'exposition
presentant la langue et son fonctionnement." 2
II y a lieu d'ajouter que le choix d'un document authentique
quelconque ne debouche forcement ni sur des activites ni sur des taches
communicatives. Quelquefois des tach~s peu authentiques (au sens ou on
ne Ies rencontre pas en dehors de I a classe) peuvent engendrer des
activites de communication authentiques. Par exemple, selon Moirand :
ABE. D. et al ( 1979): "Didactique et authentique: Du document a Ia pedagogie" dans M.clanges pedagogiques. CRAPEL, Nancy, p.2.
' ~ . HOLEC H.( 1990b ): "Des documents authentiques pour quai fa ire" dans Melanges pedagogiques. Nancy II. CRAPEL, p.67.
" ... reconstituer l'ordre de deroulement d'un texte a partir de morceaux predecoupes et distribues dans le desordre a differents sous-groupes d'apprenants obligent ceux-ci a demander des informations soit a l'enseignant soit aux autres
I apprenants."
II s'agit ici de "veritable communication".
64
11 en resulte de ce qui precede que l'authenticite des taches est plus
importante que celle des documents authentiques. On peut integrer dans
Jes programmes de langue comme l'enonce S. Moirand "des documents
realistes, ami-chemin entre le fabrique et l'authentique."2
3) Autonomie
Le concept de l'autonomie se trouve etroitement lie avec celui de
l'apprenant. En fait, rendre un apprenant "autonome" devient un slogan
cher aux tenants de }'approche communicative. 3
II conviendrait de preciser que le terme "autonomie" renvoie a deux
interpretations. La premiere est Iiee a "l'autonomie communicative",
c'est-a-dire Ia capacite de l'apprenant de faire face au previsible aussi bien
qu'a l'imprevisible des situations de communication. La deuxieme est liee
a "l'autonomie d'apprentissage" ( apprendre a apprendre ), " ... dire d'un
1 MOIRAND S. (1982). op.cit.. p.52.
:Ibid. p.52.
3 a savoir : RICHTERICH R .. SUTER B.( I 98 !'), DALGALIAN et al (I 98 I). RICHTERICH R.( 1985).
65
apprenant qu'il est autonome, c'est done dire qu'il est capable de prendre
. "' en charge son apprentlssage.
Etant donne que l'apprenant ne peut pas prendre en charge son
apprentissage tout seul, il importe de prevoir des phases preparatoires
methodologiques qui le preparent dans la voie de l'autonomie. II
conviendrait de preciser que l'autonomisation de l'apprenant n'implique
pas une absence de l'enseignant. En fait, le dernier a un role important a
jouer dans la mesure ou il permettrait a l'apprenant d'acceder ala voie de
l'autonomie par la mise en oeuvre des strategies et les activites
appropriees. Le processus de l'autonomisation suppose des phases de
"negociation"2 entre les deux.
De ce qui precede, nous degageons que le terme d'autonomie
englobe deux acceptions3 et que le processus de l'autonomisation
implique une participation active de l'apprenant dans I'acte de
l'enseignement/apprentissage.
4) Besoin langagier
Le terme de 'besoin langagier' constitue un pilier important de
!'approche communicative.
1 HOLEC ( 1979): "Autonom ie et apprentissage des langues etrangeres" dans Auto nom ie et Enseignement/ Apprentissage des Langues Etrangeres, (ANDRE B.ed.), Paris, Hatier/Didier, p.32.
, ~ RICHTERICH ( 1985): Besoins langagiers et objectifs d'apprentissage, Paris, Hachette, p.Jss: 3 J.·capacite a communiquer. II. apprendre a apprendre.
66
Abondamment utilisee en psychologie, psychoanalyse, economie,
la notion de besoin peut se referer a un reseau de significations multiples:
etat de manque, relation entre l'individu et le monde, force qui pousse un
individu a agir pour changer un etat en un autre, expression d'un projet...
Il est interessant de noter qu'au debut du mouvement communicatif,
le terme de besoin se trouve associe a la notion de la situation dans
Iaquelle les apprenants auront a utiliser Ia langue. C'est ainsi que le
detinit Richterich:
"Les besoins langagiers des adultes apprenant une langue vivanle correspondent aux exigences nees de !'utilisation de la langue dans la multitude des situations de la vie sociale des individus et des groupes". 1
La notion de besoin s'emploie done en rapport avec Ia definition des
objectifs, dans le cadre de Ia formation des adultes.
Il conviendrait d'ajouter qu'au fil des annees, la notion de besoin se
trouve elargie et modifiee. Selon Henri Besse et Robert Galisson, la
notion de besoin renvoie a 3 realites differentes:
" ... ce que desire l'apprenant, ce qu'on lui demande de savoir fa ire et ce q u' il doi t apprendre ..... "2
1 RICHTERICH R. ( 1973 ): "Modeles pour Ia definition des besoins langagiers des adultes" dans Systemes d'apprentissage des langues viyantes pour les adultes,(TRIM, J. et al (eds.)) Strasbourg, Conseil de !'Europe, p.38.
2 BESSE H., GALISSON R ( 1980).: Polemique en didactique, Paris, CLE International, p.56.
67
Ainsi, la notion de besoin ne peut se limiter seul aux situations d'ordre
utilitaire et professionnel. Pour Holec :
" ... quels que soient les besoins, les raisons d'acquerir une langue, toutes ces raisons sont bonnes: les raisons d'ordre fonctionneL instrumental ne sont en rien plus dignes d'attention que les raisons d'ordre culturel..."
1
La meme idee est vehiculee par Yalden:
"The lines between needs and wishes is quite indistinct and 2 may be unnecessary."
(La frontiere entre les besoins et les desirs n'est pas tres nette et elle parait '
e'tre inutile).
Il en resulte que la notion de besoirt englobe les motivations de
l'apprenant, ses desirs, ses attentes, son environnement culture! et le
temps dont il dispose. II y a lieu de preciser qu'au fil des annees, les
tenants de !'approche communicative ont reconnu la complexite des
operations liees a !'identification des besoins langagiers. C'est ainsi que
l'affirme Louis Porcher: "Le besoin n'est pas un objet qui existe et que
l'on pourrait rencontrer tout fait dans la rue."3 Etant donne que les besoins
langagiers n'existent pas en tant que tels, il s'agit de les construire et de
1 HOLEC ( 1989): op.cit.. p.8.
2 Y ALDEN J. ( 1983.): The communicative syllabus. evolution design and implementation, England, Oxford Press, p.90.
3 PORCHER L. ( 1976): "Preface" dans Analyse des besoins langagiers d'adultes en milieu professionnel (Pelfrere A. et al (ed.), Paris, CREDJF-ENS, p.XII.
68
leur donner une identite. En fait, l'emploi du terme "identification" a Ia
place du mot "definition" dans les travaux du Conseil de l'Europe1
est
revelateur du changement d'acception de Ia notion de besoin.
' Pour identifier les besoins langagiers, Richterich R. et Chancerel-
proposent un modele "systemique" selon lequel 1' identification des
besoins langagiers devient !'affaire de tous: apprenants, enseignants,
institutions de formation, institution d'utilisation, societe. Selon les
auteurs, !'identification des besoins est un processus continu. II ne doit
pas se limiter aux eta pes initiales de 1 'apprentissage, car les besoins
evoluent avec le temps.
r
De tout ce qui precede, nous degageons que le concept du besoin
Iangagier se trouve elargi au fil des annees. II ne se limite plus au sens
restrictif (par exemple : situations d'ordre professionnel) mais englobe
tout ce qui constitue I 'apprenant : attitudes, interets, vecu anterieur,
temps ... Malgre Ia complexite des operations liees a I 'identification des
besoins langagiers, ceux-ci restent des outils essentiels pour definir les
objectifs et par Ia suite les contenus d'enseignement/apprentissage.
5). Communication
Qu'est-ce que communiquer?
L'acte de communication reste une des notions fondamentales de
!'approche communicative. Selon Ia conception traditionnelle (par ex. :
1 Par exemple: RICH ERICH et CHANCEREL ( 1977) : Identification des besoins langagiers des adultes, Strasbourg, Consei I de !'Europe.
2 RICHTERICH et CHANCEREL (1977): ibid.
69
theories de !'information), il y a communication des !'instant qu'il y a
transmission d'une information a l'aide d'un code commun entre l'emetteur
et le recepteur. 11 en resulte qu'emetteur et recepteur sont idealement
semblables dans leur competence linguistique meme s'il est attribue a chacun d'eux un role particulier: emetteur ou recepteur. La
communication est con9ue en tant que processus symetrique puisque
l'encodage (production) represente un mouvement qui va de !'intention
informative a sa mise en forme a travers un code et que le decodage
(comprehension) un mouvement qui va de la forme resultante a !'intention
de l'emetteur.
A !'oppose de la representation reductrice de la communication, (un
mecanisme simple d'encodage et de decodage, d'une information circulant
a travers un message limpide entre 2 partenaires parfaitement sur la meme
longueur d'ondes et partageant totalement un code homogene), les
tenants de !'approche communicative estiment que le message n'est pas un
simple emballage linguistique d'une information en direction d'un
locuteur ou d'un interlocuteur, mais "un discours construit sur Ia base non
seulement d'une intention mais egalement de la prise en compte de divers
facteurs (tacite ou explicite) qui conditionnent les formes et la legitimite
de l'echange." 1
Entre la production d'un discours par un sujet et }'interpretation de
ce discours par son interlocuteur, il n'y a pas toujours symetrie. En effet,
le sujet communiquant est amene a construire une certaine image du sujet
1 CLAUDE Germain, op.cit, p.204.
70
interpretant auquel il va adapter son propos. A !'autre bout, le sujet
interpretant va construire un certain nombre d'hypotheses lui permettant
( ou non) d'acceder au sens du message qui lui est adresse.
Ainsi le sens communique n'est pas toujours totalement identique
au message que le locuteur a voulu transmettre. Le sens est vu comme le
produit d'une interaction, c'est-a-dire 'negociation' entre 2 interlocuteurs
plut6t qu'un simple produit qu'un locuteur desire transmettre.
Cette remarque vaut autant pour l'ecrit que pour !'oral. A l'ecrit, il y
a negociation du message en ce sens que le lecteur essaie de comprendre
les intentions du scripteur, alors que ce dernier ecrit en fonction d'un
'eventuel lecteur'.
De ce qui precede, nous degageons que commumquer, c'est
recevoir/produire un message (un contenu de sens) en fonction d'un but,
que ce soit pour informer/s'informer, pour agir sur/faire agir, pour faire
part d'un sentiment. Par consequent, lire, ecrire, comprendre, parler sont
des actes de communication, dans Ia mesure ou ils s'inscrivent dans une
situation de communication.
6) Competence de communication
Ce concept trouve son origine dans les travaux de Dell Hymes, un
sociolinguiste.
II conviendrait de souligner que la notion de "competence" chez
Hymes, n'est pas telle qu'elle apparalt dans Ia theorie generative
71
transformationnelle de Chomsky. Selon le dernier, la competence signifie
" ... the speaker hearer's knowledge of the language system"1
c'est-a-dire
la connaissance des regles linguistiques d'une langue. Par consequent, la
competence est con9ue comme un "savoir" grace a laquelle un locuteur
peut produire et comprendre une serie infinie de phrases.
Pour Hymes, une telle conception de la competence pose des
"objets ideaux" et fait abstraction des traits socioculturels. 11 estime que
chez Chomsky "I' acquisition de la competence est consideree com me
essentiellement independante des facteurs socioculturels."2 Une telle
conception de la competence presente une vision reductrice, par
consequent..) un elargissement de Ia notion de Ia competence est propose
par Hymes : "II existe plusieurs secteurs de la competence verbale et Ia
grammaire en est un parmi d' autres. "3
S'inspirant des travaux de Dell Hymes, le concept de la competence
de communication a ete precise par plusieurs tenants de !'approche
communicative. Ainsi, chez Canale et Swain 4 Ia competence de
communication englobe 3 composantes principales:
"I. competence grammaticale 2. competence sociolinguistique 3.
competence strategique."
':CHOMSKY N., (1965): Aspects ofthe Theory of Syntax, Cambridge, MIT Press, p.4.
2 HYMES D.( 1984) : Yers Ia competence de communication (traduction de Towards Linguistic Competence et d'autres essais), Paris, Hatier CREDIF, p.24.
3 Ibid, p.82.
4 CANALE et SWAIN cite.par GERMAIN C. ( 1990), op.cit., p.213.
72
Selon eux, la competence sociolinguistique inclut competence
socioculturelle et une competence discursive. La competence strategique
est definie comme !'ensemble des strategies qui permettent de compenser
les rates de communication. Chez Sophie Moirand, la notion de
competence de communication inclut 4 competences:
• "une composante linguistique, c'est-<1-dire Ia connaissance et !'appropriation (Ia capacite de les utiliser) des modeles phonetiques, lexicaux, grammaticaux et textuels du systeme de Ia langue.
• une composante discursive, c'est-a-dire Ia connaissance et !'appropriation des differents discours et de leur organisation ...
• une composante referentielle, c'est-a-dire Ia connaissance des domaines d'experience et des objets du monde.
• une composante socioculturelle, c'est-a-dire Ia connaissance et !'appropriation des regles sociales et des normes d'interaction entre les individus et les institutions." 1
Sans nous lancer dans une explication exhaustive de differents
modeles de la competence de communication proposes par les tenants de
!'approche communicative, reiterons que le concept de la competence de
communication ne se limite pas seulement a un savoir des regles '
grammaticales mais comprend a la fois un ensemble des savoirs et des
savoir-faire verbaux et non verbaux. II s'applique tant a l'ecrit qu'a l'oral
(comprehension et expression).
1 MOl RANDS. ( 1982): op.cit., p.20.
73
11 importe d'ajouter que la competence de communication s'associe
etroitement aux objectifs des cours communicatifs. Par consequent, les
con tenus d'enseignement/apprentissage s' organisent compte tenu de I a
conception qu'on se fait de la competence de communication.
7) Situation de communication
La notion de situation de communication fait partie integrante de
!'ensemble conceptuel de !'approche communicative. En fait, il est
difficile de parler de Ia communication sans parler d'une situation de
communication.
11 conviendrait de preciser que la notion de situation ne se limite
pas ala situation orale (face a face) mais elle s'applique egalement a l'ecrit
(comprehension et expression), a la comprehension orale. 11 en decoule
qu'il existe plusieurs situations de communication, a savoir, situation de
lecture, situation d'ecoute, situation de communication epistolaire,
situation d'oral (au telephone) ... ' ·-
Il est important de noter qu'une situation de communication peut se
definir a partir de quelques questions :
"Qui 1 parle? A qui2? Qui communique? En presence de qui? A propos de quoi? OU? Quand? Comment? Pour quoi faire? Quelles sont les relations entre qui 1, et qui2? Entre qui 1, et quoi, qui2 et quoi? ... "1
1 MOIRAND Sophie (1982), op.cit, p.l4.
74
II en resulte qu'une situation de communication implique la participation
des sujets (au moms deux), l'environnement physique (cadre
spatio-temporel etc.), les facteurs psychologiques (intention des sujets,
rapports entre eux, attitudes ... ), les facteurs socioculturels (rang social,
roles qui entra'inent le choix de registres, les formules de politesse et les
aspects thematiques ).
II conviendrait d'ajouter que la transmission du message est assuree
par un systeme de signes selon un code convenu par les 2 interlocuteurs.
Dans le cas de Ia communication orale (face a face) une partie du sens a transmettre peut se faire au moyen de mimiques, gestes et intonation,
alors que dans le cas de la communication ecrite, etant donne que
l'interlocuteur auquel on s'adresse est absent, le scripteur a recours au
code verbal dans sa forme graphique. II n'est pas possible de se servir des
gestes etc. Le scripteur devra done prevoir les perturbations dans la
reception de son message et lever des ambigui'tes susceptibles de na'itre.
Par consequent :
" ... produire un texte ecrit, ce sera formuler une hypothese sur les conditions de reception du message que J'on va transmettre." 1
De meme, lire un texte consiste a faire des hypotheses sur Je sens du
message, sur les intentions du scripteur.
1 YIGNER G. ( 1979): Lire du texte au sens, Paris, CLE International, p.l2.
75
A Ia lumiere d'un eclaircissement progressif des termes-cles utilises
au sein du mouvement communicatif, surtout au fil des 15 dernieres
anneeS I, nOUS SOmmes amene a definir ('approche COmmunicative SOUS
forme de trois principes.
2.4. PRINCIPES DE L'APPROCHE COMMUNICATIVE
Trois principes sous-tendent notre conception de !'approche
communicative:
• centration sur l'apprenant
• utilisation de Ia langue en situation de communication
• focalisation sur le sens
2.4.1 Centration sur l'apprenant
Selon ce principe, il faut accorder a l'apprenant un role central dans
le processus d'enseignement/apprentissage. Ceci implique une prise en
consideration de certains facteurs.
a) Identification des besoins langagiers
En vue de definir les objectifs et par Ia suite les contenus
d'enseignement/apprentiss~ge, il est important de prendre en
consideration les besoins des apprenants. Le terme 'besoin' n'est pas vu
dans un sens restrictif mais englobe tout ce qui constitue l'apprenant. A
I ( 1980-1995).
76
savmr age vecu anterieur, rmsons d'apprendre la langue, ressources
disponibles ...
b) Apprenti-communicateur: non natif
L'apprenant n'est pas un locuteur natif de la langue etrangere (ici le
FLE). En vue de lui permettre d'atteindre son objectif, il lui faudra
trouver des moyens de compenser ses lacunes, utiliser des strategies pour
reussir malgre ses manques de connaissances. Ces strategies, dites 'de
compensation' doivent done etre prises en compte lors de Ia definition des
objectifs et des activites d'enseignement/apprentissage.
c) Choix en matiere de textes et d'activih~s
L'apprenant n'est pas une entite generique: il a ses propres raisons
d'apprendre Ia langue, strategies et progressions d'apprentissage. Il en
resulte de ne pas imposer, dans Ia mesure du possible, une seule
progression, un seul texte a l'apprenant. L'apprenant doit avoir "un
choix"2 en matiere de textes, activites et progressions.
d) Apprenant : sujet actif
Etant donne que I' apprentissage concerne I' apprenant, i I est
important de I 'impliquer dans le processus de l'apprentissage. II faut lui
accorder, une "initiative" non seulement lors des activites d'expression - -
mais aussi celles de comprehension. II en resulte que l 'apprenant
I Communiquer dans Ia langue etrangere_
2 C' -I 1· est nous qlll e sou 1gnons_
77
reconstruit le sens des textes en s'appuyant sur ses conna1ssances
· anterieures et les indices du texte en fonction d'un but/projet
(comprehension globale, comprehension detaillee pour s'informer, pour
agir, pour s'amuser. .. ).
II importe de preciser que Ia centration sur l'apprenant n'implique
pas l'absence de l'enseignant. En fait, celui-ci jouera un role important
dans Ia mesure ou il deviendra facilitateur, animateur et
co-communicateur pendant l' organisation des activites en salle de classe.
2.4.2. Utilisation de Ia langue en situation de communication
La langue ne s'emploie jamais dans le vide. Autrement dit, elle
s'actualise toujours dans une situation de communication.
Utiliser/interpreter la langue en situation implique qu'on sache repondre a une serie de questions: qui parle/ecrit, a qui, a propos de quoi, avec quelle
intention, pour quoi faire, en presence de qui, ou, quand.... De ce
principe, se degage une serie de consequences methodologiques.
a) Objectifvise: competence de communication
Savoir utiliser/interpreter Ia langue en situation implique qu'on ait
acquis un ensemble de competences relevant d'ordres linguistique,
socioculturel, referentiel, discursif.... II en decoule que l'objectif vise de
·t'enseignement/apprentissage n'est plus seuleltlent }'acquisition d'un code
linguistique mais aussi !'acquisition des savoirs et des savoir-faire
verbaux et non verbaux (competence de communication).
78
b) Desolidarisation des 4 aptitudes1
Des que l'on vise non seulement le code linguistique d'une langue
etrangere mais aussi Ia capacite a s'en servir en situation, il convient de
differencier \'approche de chacune des aptitudes pour l'analyse des
besoins, pour le choix des activites et des supports. d'apprentissage. Ce,
car les roles sociaux qu'un locuteur est amene a assumer en
comprehension ne sont pas les memes qu'il doit jouer en expression. De
meme, !'utilisation du code linguistique ne se fait pas de Ia meme fac;on a
l'oral eta l'ecrit, en comprehension et en expression.
c) Choix de textes authentiques/realistes
Etant donne qu'un document authentique represente l'emploi de Ia
langue en vraies situations de communication, il peut etre utilise comme
materiel d'observation en vue de sensibiliser l'apprenant aux differents
registres de langue, aux differents discours.
2.4.3. Focalisation sur le sens
Ce principe est intimement lie avec le precedent. Selon ce principe,
tout texte/message comporte un contenu de sens. Pour degager le sens il
est important de considerer le texte en tant que "discours" _2 Autrement - -
dit, le sens d'un texte ne se degage pas a partir d'une adjonction de mots
I a savoir : compn!hension ecrite, expression ecrite, comprehension orale, expression orale.
2 C'est nous qui le soulignons.
79
ou de phrases isolees mais des unites discursives. De ce principe decoule
une serie de consequences pedagogiques :
a) Primaute du discours sur Ia phrase
Lors d'une interpretation/production d'un texte/message, il est
important qu'on retienne les indices d'ordres linguistique et non
linguistique (Ex : elements co-referentiels, articulateurs, modalites,
indices iconiques, intonation, etc ... ) qui accordent un sens au texte. ll
convient de noter que les activites pratiquees en classe se tournent vers un
but specifique. Ainsi, on ne parle pas pour parler mais pour dire quelque
chose a quelqu'un, a un moment donne, a un lieu specifique, en vue d'une
intention particuliere.
b) Progression mixte
Etant donne que l'unite d'organisation du contenu d'enseignement
n'est plus une structure linguistique, la progression d'un enseignement/
apprentissage ne peut se baser uniquement sur des progressions
linguistiques. II importe d'y ajouter des elements semantiques ( actes de
parole, notions, themes ... ).
ll y a lieu de preciser que les 3 principes mentionnes au-dessus
s'inspirent des donnees/concepts relevant d'un champ interdisciplinaire.
-Etant donne que nous avons deja etudie le -eadre theorique de certains
concepts ctes 1, no us no us bornerons a mentionner ici quelques supports
theoriques sous-jacents a l' A.C.
1 Voir 2.3.
2.5. SUPPORTS THEORIQUES
1 ). Perspective cognitive : apport de Ia psycholinguistique
a) Theorie cognitive de l'apprentissage
Selon Ganoac'h :
"Les connaissances qu'un individu possede deja sont le principal determinant de ce que cet individu peut apprendre... Ces connaissances prealables ne sont pas necessairement liees directement aux stimulus presents dans la situation d'apprentissage; elles peuvent servir a elaborer les informations presentees, a emettre des hypotheses sur ces informations." 1
80
Il en decoule que tout sujet possede un systeme cognitif ayant son
organisation propre. L'activite cognitive correspond a des processus dont
le but est de traiter le materiel presente (l'information) non pas selon des
caracteristiques inherentes a ce materiel mais selon des "schemas"
appartenant au systeme cognitif. A titre d'exemple, etant donne un
materiel (ici, Ia langue) presentant a la fois une grande variabilite et
certaines regularites, l'activite mentale du sujet qui y est confronte,
consiste a en detecter les regularites et les conditions de variabilite a travers ses "structures cognitives".
1 GAONAC'H D. ( 1987): Theories d'apprentissage et acquisition d'une langue etrangere, Paris, Hatier-Credit, p.l 07.
81
Ainsi, le systeme cognitif se compose essentiellement de quatre
parties:
"Un dispositif d'entree (saisie) des informations, une memoire (stockage des connaissances); un dispositif de traitement qui peut accomplir un ensemble d'operations sur les informations (issues de l'entree, ou du systeme de stockage); un dispositif de sortie." 1
Les relations entre les differentes composantes peuvent se representer par
un modele "minimal" (Figure II.A.)
(Figure II. A)
Traitement
A Ia lumiere de ce qui precede, nous degageons que la memoire
(connaissances prealables) joue un role important dans les "traitements"
qui aboutiront a !'elaboration de nouvelles connaissances (apprentissage).
II y a lieu d'ajouter que dans Ia perspective constructiviste, le
lecteur/auditeur joue un role actif lors d'une activite de lecture/ecoute.
I Ibid, p.l 09.
82
Par consequent, la comprehension (ecrite et/ou orale) n'est pas con<;ue
com me un recueil d'informations~ elle est "construction de sens" 1
par un
lecteur/auditeur actif s'appuyant sur les indices du texte, juges les plus
significatifs. La comprehension suppose done la presence d'un objectif,
d'un projet, et comme tout processus de perception, elle implique des
strategies anticipatrices liees a des attentes.
b) La comprehension: un processus actif
Selon les chercheurs du CRAPEL 2, la comprehension, en tant qu'un
processus cognitif comprend trois etapes : Prevision, verification,
synthese. Ce processus peut se representer schematiquement (Figure
ILB):
L
II.
Figure II B
PREVISION hypothese de sens
hypothese de forme VERIFICATION
recueil d'indices confirmation ou infirmation des previsions
III. SYNTHESE.
Ainsi, lors du processus de la comprehension, un
lecteur/auditeur fait des hypotheses sur le contenu du message. Les
1 C'est nous qui le soulignons .
., ~ GREMMO M.; I-IOLEC 1-1.( 1990): "La compn!hension orale: un processus et un comportement" dans Aquisition et utilisation d'une langue etrangere : !'approche cognitive, Le fran~ais dans le monde, Collection F, Paris, 1-lachette, pp.30-40.
83
hypotheses qui anticipent le sens au niveau global comme au niveau local,
generent des attentes sur des formes linguistiques que les significations
vont prendre. Ces hypotheses sont fondees sur les connaissances que le
lecteur ou l'auditeur a du code utilise (syntaxe, forme visuelle/phonique
des mots, marqueurs de !'architecture etc.) Les hypotheses sont verifiees
a partir d'un recueil d'indices. "Cette verification s'opere non pas par une
discrimination lineaire et exhaustive de Ia chaine phonique mais par une
prise d'indices ... " 1 Si les hypotheses sont confirmees, Ia signification du
message preconstruite s'integre dans Ia construction du sens en cours. Si
les hypotheses sont infirmees, on peut reprendre Ia procedure en
etablissant de nouvelles hypotheses.
II convient de preciser que Ia perspective cognitive integre le fait
que: le processus de comprehension est un processus oriente vers un but et
qu'il' varie selon ce but (comprendre pour agir, pour s'informer etc.) Le
processus de "prevision-verification" implique qu'il n'y a pas circulation
de la signification du message du texte a l'auditeur/au lecteur, mais que
cette signification se construit par une interaction entre !'information
apportee par l'auditeur/le lecteur et !'information donnee par le texte.
2). Perspective enonciative : apport de Ia linguistique du discours
"L'enonciation" peut etre definie comme l'acte par lequel un
individu se pose dans son enonce comme Jocuteur, au moyen d'indices
1 GREMMO M .. HOLEC ( 1990), op.cit, p.32.
84
specifiques. La perspective enonciative refute ainsi le prmctpe de la
langue-code et de la fonction informative dominante. Selon Gshwind
Holtzer:
II,,. presentee comme !'attitude du sujet face a son enonce, comme Ia presence du locuteur dans son enonce ou encore le rapport que le sujet instaure avec l'auditeur. .. , l'enonciation implique Ia rehabilitation de l'individu comme source du discours. 111
Par consequent, !'analyse du message ne consiste pas a renvoyer
seulement au code qui le constitue mais de le rapporter aussi au sujet
utilisant la langue pour exprimer son intention.
Etant donne qu'un message est produit a un moment donne (temps
de l'enonciation) et dans un endroit precis (lieu de l'enonciation), un
certain nombre d'elements linguistiques, tels que les indicateurs
spatio-temporels (Ex: demain, ICI, dans une semaine etc.) ne prennent
signification que par rapport au moment de la prise de parole de
l'enonciateur. A titre d'exemple, dans une lettre, un segment je vous
Verf'ai 'dans I 10 }ours SOU S-en tend dix jours a partir de la date de la lettre.
Selon Benveniste2, il existe dans un texte des elements "deictiques" qui
se referent a certaines donnees de la situation ou il est emis. Les pronoms
(par ex: je, tu) personnels ne sont qu'une des classes de ces elements dont
le sens ne peut etre etabli que par rapport aux donnees spatio-temporelles
1 GSHWIND-HOL TZER G. (I 981 ): Analyse sociolinguistique de Ia communication et didactique. Paris Hatier-CREDIF,, p.l2.
2 ·BENVENISTE E. ( 1966) : "L'homme darrs Ia langue" dans Problemes de linguistique generale I, Paris, Collection Gallimard, pp.225-285.
85
de la situation d'enonciation. On peut y ajouter les adverbes de temps
(aujourd'hui, demain ... ) les adverbes et pronoms demonstratifs (ici, la,
celle-la ... ) et les variations temporelles du verbe.
Outre les elements linguistiques mentionnes au-dessus, il existe,
selon Maingueneau 1, certaines "modalites" (traces linguistiques) qui
rendent compte dans un texte des rapports locuteur/allocutaire et
locuteur/enonce. Ainsi, selon les relations que l'on entretient avec son
interlocuteur, on peut, a propos d'un meme contenu referentiel, formuler
de· differentes manieres une meme intention de communication. Par
exemple: 'II faut venir chez moi. Viens chez moi. Je vous prie de venir
chez moi.'
On pourrait dire que ces enonces traduisent la meme intention de
communication, le meme 'acte de parole': inciter a faire quelque chose. II
est a preciser que le choix des formulations linguistiques est etroitement
lie aux composantes non-linguistiques de Ia situation de communication:
role, attitude, relations inter-sujets, nature du referent etc.
De ce qui precede, nous degageons que Ia perspective enonciative
depasse le cadre de Ia phrase et de la langue-code. Elle contribue a !'etude
du fonctionnement de la langue dans des situations de communication
donnees, du role du sujet parlant, de !'interaction sujet/texte,
sujet/allocutaire. C'est ainsi que l'enonce Moirand2, "Un texte, ce n'est
MAINGUENEAU. D. ( 1981 ): Approche de l'enonciation en linguistique franvaise, Paris, Hachette.
1
- MOIRAND S. (1990): "Avant Propos" dans Une grammaire des textes et des dialogues, Paris, Hachette FLE, p.lll.
86
pas une addition de phrases. Un dialogue ce n'est pas une addition de
repliques. II Autrement dit, il existe des regles de construction qui
conditionnent !'organisation des "discours". Le choix et l'ordre des mots
ne sont pas dus au hasard et que leur combinaison decoule de ce que l'on
veut dire, de ce qu'on veut representer ou raconter.
A titre d'exemple, dans un texte : Des malfaiteurs se sont attaques
a !a bijouterie. Jls ant en e./Jet rajle to us les bijoux de valeur... Ces
gangsters ant reagi avec une extreme rapidite ... , on voit apparaitre un
reseau co-referentiel forme de "Des malfaiteurs ", 'ils' et "ces
gangsters". Ce reseau contribue a une dynamique du texte, so it dans Ia
progression des informations soit dans Ia progression du raisonnement.1
De ce qui precede, il s'ensuit que la perspective enonciative
contribue a !'etude du fonctionnement de Ia langue dans des situations de
communication, du role du sujet parlant, de !'interaction sujet/texte,
sujet/ allocutaire.
3. Quelques apports de Ia perspective sociolinguistique
a) Competence de communication
Le terme de "competence de communication" est ne a partir des
travaux de Dell Hymes. Ce terme resulte d'une analyse critique du
concept de "competence" qui dans I a theorie linguistique de Chomsky
traite avec des objets ideaux, abstraits des criteres sociaux. Chez
Chomsky, Ia competence est comprise comme un systeme de regles
1 MOl RAND Sophie ( 1990), op.cit., p.20.
87
grammaticales permettant au sujet d'emettre et de comprendre un nombre
infini de phrases. Pour Hymes, la competence de communication est
con9ue comme un savoir constitue de regles grammaticales et de regles
socioculturelles. En fait, "il existe plusieurs secteurs de la competence
verbale et le grammatical en est un parmi d'autres." 1
Par consequent, " au pnnc1pe de grammaticalite la
sociolinguistiques substitue le principe d'appropriation: le point central
reside dans !'appropriation des messages verbaux au contexte
socioculturel.2 "
b) Heterogeneite linguistique
Pour Ia sociolinguistique, aucune communaute n'est
linguistiquement homogene. II existe un certain nombre de varietes
linguistiques a l'interieur d'une meme langue (a savoir, registres de
langue, variete de langue ... ). L'emploi du systeme differencie ne depend
pas de la volonte libre du sujet: "... II est soumis a des regles
sociolinguistique dans le sens ou il doit y avoir adequation entre variete
utilisee/contexte social. "3
1 HYMES D. (I 984): Yers Ia competence de communication, op.cit, p.82.
2 GSHWIND-HOLTZER.G.(l981): op.cit., p.l9.
3 Ibid.
88
c) Composante culturelle
Selon Linton, le terme culture signifie "groupe organise de modeles
de comportement". 1 Par consequent, communiquer efficacement
presuppose la connaissance de certaines conduites dans la culture de
l'autre. II en decoule que toute activite communicative repose sur un jeu
de pratiques, de rites... Ainsi, les salutations, les invitations, etc. sont
reglees par le systeme des conduites conventionnelles qui forment des
rituels sociaux.
De ce qui precede, nous degageons que la communication n'est pas
un processus libre pla9ant face a face deux sujets autonomes. Du point de
vue social, tout discours est regie par des conventions socioculturelles.
2.6 CONCLUSION
A la suite de notre etude, nous constatons que !'approche
communicative reste une notion polyvalente et fait l'objet d'interpretations
diverses. II y a lieu d'enoncer que malgre une pluralite des interpretations
associees avec !'approche communicative, il en existe des !ignes de force.
C'est a Ia base de certaines !ignes de force que nous sommes
parvenu a degager une definition de !'approche communicative, et ce en
vue d'eviter toute equivoque liee a son interpretation. II conviendrait
d'ajouter que nous avons tente d'integrer dans notre definition quelques
1 LINTON cite dans GSHWIND-HOLTZER G. (1981), Ibid.
89
developpements conceptuels 1 intervenus au fil de 15 dernieres annees2
dans le cadre du mouvement communicatif. Soulignons qu'une
interpretation de !'approche communicative en termes concrets (sur le
plan pratique) dependrait d'une situation specifique de
l'enseignement/apprentissage. Par consequent, avant de traduire les trois
pnnc1pes de !'approche communicative dans le cadre de
l'enseignement/apprendre du FLE en contexte indien3, nous allons etudier
la situation actuelle de l'enseignement/l'apprentissage du FLE dans les
programmes de B.A. a trois universites: J.N.U., P.U. et B.H.U.
1 a savoir, Ia notion elargie de besoins langagiers, actes de paroles, autonomie, perspective cognitive ...
, - 1980-1995.
3 Programmes de B.A.
90
PREALABLES
La presente partie a pour objet d'etudier la situation actuelle de
I'enseignement/apprentissage du FLE dans le cadre des programmes de
B.A. 1 a trois universites: J.N.U., P.U., B.H.U. 11 s'agit d'examiner si
l'enseignement/apprentissage du FLE se pratique a des fins
communicatives. Quels sont les facteurs contraignants de la situation
d'enseignement/apprentissage qm empechent l'apprenant d'utiliser Ia
langue aux fins de communication? En bref, il est question de degager
Ies facteurs principaux qui peuvent entraver le developpement de la
competence communicative des apprenants en FLE.
Pour mener notre etude, nous avons entrepris une serie
d'investigations mais avant d'en parler, precisons d'emblee ce que nous
entendons par une situation d'enseignementlapprentissage.
Selon Richterich, une situation d'enseignement/apprentissage
pourrait se definir comme une situation dans laquelle :
" des apprenants sont en relation avec un enseignant pour apprendre des contenus dans le cadre d'une institution en
1 "B.A. French Honours" et "B.A. Pass French Elective".
vue d'atteindre des objectifs en realisant des actions a l'aide de moyens qui aboutissent a des resultats. II I
91
Ainsi, une situation d'enseignement/apprentissage se caracterise
par 6 composantes essentielles:
1. apprenant
2. enseignant
3. institution de formation
4. objectifs
5. procedes et procedures (moyens, con tenus et actions).
6. resultats
II y a lieu de preciser qu'une etude des composantes mentionnees
ci-dessus impliquerait a son tour une prise en consideration de certaines
questions. Pour les besoins de notre etude, nous nous bornerons aux
questions suivantes:
1. Apprenant: Qui apprend? Quel est le profil de l'apprenant inscrit aux
programmes de B;A. en termes de sexe, age, situation socio-economique,
connaissances anterieures des langues, vecu scolaire, besoins langagiers?
Quelles "representations"2 se fait l 'apprenant de la communication, de la
competence communicative et son apprentissage?
1 RICHTERICH R. ( 1985): Besoins langagiers et objectifs d'apprentissage, Paris, Hachette, p.6.
, - D'apres Riley P., les representations font partie du systeme de croyances de l'individu, un systeme qui peut etre aborde en 4 categories de representations: 1. representation d'ordre general 2. representations de soi-meme 3. representations des nonnes et des regles 4. representations des objectifs poursuivis ("Learners' Representations of language and language learning" dans Melanges pedagogiques, 1989.)
92
2. Enseignant: Qui enseigne? Quel est le profil de l'enseignant en termes
de sexe, age, qualifications, connaissances anterieures, experience
professionnelle? Que lies representations se fait 1 'enseignant du
programme scolaire, de la communication et de !'approche
communicative?
3. Institution de formation: Ou se deroule l'enseignement/apprentissage?
Une institution de formation est :
" ... un lieu ou les apprenants se trouvent a un moment donne, des moyens pour agir ensemble, selon cetiaines regJes afin d'atteindre des objectifs". I
Ainsi, se pose Ia question: quelles sont les ressources de !'institution?
C'est-a-dire, l'effectif du personnel, la disponibilite des supports
pedagogiques, des gadgets etc.
4. Objectifs: Pour quoi faire? Qui choisit les objectifs? Les auteurs des
manuels? Les administrateurs? L'enseignant? L'apprenant? Comment?
En quels termes? En termes de savoirs, de savoir-faire, de savoir-etre?
5. Procedes et procedures: Quoi enseigner/apprendre et comment?
Quelles activites sont organisees par l'enseignant? Que fait l'apprenant
pour apprendre? (par ex : ecouter, jouer, memoriser ... )
6. Resultats: "Les objectifs representent l'avenir. Ils sont toujours des
pans qu'on espere gagner" .2 Les resultats representent ce qui est
1 RICHTERICH, R. (1985), op.cit., p.7.
2 :Ibid.
93
effectivement realise. Par consequent, il convient de ne pas confondre les
objectifs avec les resultats. Se pose ainsi Ia question de !'evaluation: qui
evalue? L'Enseignant? L'apprenant? Des personnes externes a !'institution? Les exercices de controle, sont-ils lies aux objectifs
d'enseignement/ apprentissage? Quand pratique-t-on !'evaluation? A Ia
fin de l'annee scolaire? Periodiquement? D'une maniere permanente?
A Ia lumiere des questions posees au-dessus, nous avons mene une
serie d'investigations. Nous en preciserons les demarches ainsi que les
resultats dans les chapitres qui suivent.