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Pôle de Mathématiques COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE S. BALAC - L. CHUPIN Pôle de Mathématiques Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

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Page 1: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Pôle de Mathématiques

COURS DE MATHÉMATIQUES

ASINSA

DEUXIÉME ANNÉE

S. BALAC - L. CHUPIN

Pôle de Mathématiques

Institut National des Sciences Appliquées de Lyon

Page 2: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE
Page 3: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Avant propos

Ce polycopié a été rédigé dans le cadre l’enseignement que nous dispensonsen deuxième année du cycle préparatoire de l’INSA de Lyon dans la filière depremier cycle international ASINSA. À ce titre, il ne doit en aucun cas êtreconsidéré comme document de référence pour l’enseignement des mathéma-tiques de l’ensemble du cycle préparatoire de l’INSA de Lyon.

Tant dans le fond que dans la forme, ce polycopié reprend les choix qui avaientété retenus lors de la rédaction du polycopié de première année (depuis publiédans la Collection Sciences Appliquées de l’INSA de Lyon aux Presses Poly-techniques et Universitaires Romandes

(1)

.)

Nous nous sommes attaché à donner des définitions précises et à présenter desraisonnements rigoureux sans toutefois chercher l’exhaustivité. Ainsi, les dé-monstrations « techniques » sont omises au profit des démonstrations pouvantaméliorer la compréhension du résultat énoncé, illustrant l’utilisation de no-tions déjà introduites ou mettant en avant des idées ou méthodes susceptiblesd’être réutilisées par la suite. Celles-ci sont soigneusement détaillées et com-mentées et une attention toute particulière a été apportée à leur rédaction.Nous ne saurions trop insister sur l’importance d’une bonne compréhension deces démonstrations

(2)

, élément fondamental pour l’assimilation des notions ma-thématiques introduites. Par ailleurs, nous avons, dans la mesure du possible,cherché à motiver les notions introduites et à les illustrer par des exemples,des remarques et des mises en garde afin de rendre l’apprentissage plus dyna-mique. Chaque chapitre contient de courts exercices visant à tester la bonnecompréhension des notions introduites.

L’enseignement des mathématiques durant les deux années du cycle prépara-toire formant un tout relativement cohérent, l’enseignement de seconde annéefait largement appel aux notions mathématiques introduites au cours de la pre-mière année. Dans ce polycopié, nous avons mentionné par une note de bas depage les références aux résultats du cours de première année lorsqu’une connais-sance précise de l’énoncé de ceux-ci est indispensable à la compréhension dudéveloppement effectué. Ces références, en terme de numéro de définition ou

(1)Algèbre et Analyse, Cours de Mathématiques de Première Année avec Exercices Corrigés.

Stéphane Balac, Frédéric Sturm. Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2003(ISBN : 2-88074-558-6).

(2)Ce qui nécessite une appropriation de la démonstration passant le plus souvent par unereformulation de celle-ci. On peut considérer qu’il s’agit du meilleur moyen de s’assurerde l’assimilation des éléments antérieurs du cours.

Page 4: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

4

théorème et de page, sont basées sur l’ouvrage(1)

utilisé dans le cadre de l’en-seignement de première année de la filière ASINSA, mais l’utilisation par lelecteur d’une autre ressource bibliographique est tout à fait envisageable.

Le polycopié est structuré en trois parties, la première consacrée aux séries, laseconde à l’algèbre bilinéaire et aux espaces vectoriels normés et la dernière aucalcul différentiel pour les fonctions de plusieurs variables réelles.

La rédaction de ce polycopié a été mené a bien au sein du Pôle de Mathéma-tiques de l’INSA de Lyon où nous avons pu bénéficier de différentes ressourcespédagogiques et matérielles. Il doit sa réalisation aux encouragements de laDirection de la filière internationale ASINSA à mener à bien de tels projets.

Les auteurs recueilleront avec intérêt toute remarque ou suggestion concernantce polycopié.

Stéphane Balac

Pôle de MathématiquesINSA de LYON21 avenue Capelle69621 [email protected]

Laurent Chupin

Pôle de MathématiquesINSA de LYON21 avenue Capelle69621 [email protected]

s. balac & l. chupin - cours de mathématiques de deuxième année

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Page 5: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Chapitre 1

Séries numériques

1.1 Definitions et premieres proprietes

1.1.1 Definitions

K désignant le corps R ou le corps C, on note S(K) l’espace vectoriel sur K

des suites numériques(1)

à valeurs dans K (suites réelles si K = R ou suitescomplexes si K = C).

Si l’on considère une suite numérique (un)n, il est assez naturel, à l’instar dece qui est fait avec une suite géométrique, de sommer les n premiers termesde cette suite et d’étudier la nouvelle suite (Un)n, appelée suite des sommespartielles associée à la suite (un)n, ainsi construite :

∀n ∈ N Un =

n∑

k=0

uk. (1)

Définition 1.1 Soit (un)n une suite numérique ; on appelle série numé-rique de terme général un et l’on note

n un, le couple ((un)n, (Un)n) d’élé-ments de S(K)×S(K) où (Un)n est la suite des sommes partielles associée àla suite (un)n définie par la relation (1).

Remarques

1. Deux séries numériques∑

n un et∑

n vn sont égales si pour tout entier n ona un = vn.

2. À une suite numérique (un)n on peut associer sa suite des sommes partielles(Un)n et par conséquent la série

n un. Inversement, à une suite numérique(Sn)n on peut associer une série

n un dont elle est la suite des sommes par-tielles de la manière suivante :

u0 = S0 et ∀n ∈ N∗ un = Sn − Sn−1.

(1)Voir le chapitre 5 du livre de cours de première année.

Page 6: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

6 Définitions et premières propriétés

⋄On définit sur l’ensemble Σ(K) des séries numériques sur K une loi de compo-sition interne + de la manière suivante : si

n un et∑

n vn sont deux sériesnumériques alors

n un+∑

n vn est la série numérique de terme général un+vn.On peut également munir Σ(K) d’une loi de composition externe · de la ma-nière suivante : pour toute série numérique

n un et pour tout scalaire λ ∈ K

la série λ ·∑n un est la série de terme général λun.

L’ensemble des séries numériques Σ(K) muni de ces deux lois + et · est unespace vectoriel sur K.

Définition 1.2 ✗ On dit que la série∑

n un converge dans K si la suite dessommes partielles (Un)n converge dans K.

✗ Si µ ∈ K désigne la limite de la suite (Un)n, on dit que µ est la somme dela série

n un et on note µ =∑+∞

n=0 un.

✗ Si la suite des sommes partielles (Un)n diverge dans K, on dit que la série∑

n un diverge.

Remarque Si la suite (un)n n’est définie qu’à partir d’un rang n0 ∈ N∗, onpeut prolonger cette suite en une suite (un)n définie sur N en posant

– un = un ∀n ∈ N n > n0 ;

– un = 0 ∀n ∈ N n < n0.

La série∑

n un sera notée∑

n>n0un.

Inversement, à la série∑

n un et à l’entier non nul n0, on peut associer la série∑

n>n0un qui est dite série déduite de

n un par troncature.

Dans ce chapitre et dans les chapitres suivants, les propriétés concernant lesséries seront énoncées en supposant que n0 = 0 mais le lecteur adaptera sansdifficulté l’énoncé de ces propriétés dans le cas où n0 ∈ N∗. ⋄

Définition 1.3 Étant donnée une série numérique∑

n un convergente, onappelle reste d’ordre p de la série et on note Rp la somme de la série∑

n>p+1 un :

Rp =+∞∑

n=p+1

un.

Pour tout entier p on a donc

µ =

+∞∑

n=0

un =

p∑

n=0

un +

+∞∑

n=p+1

un = Up + Rp.

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Page 7: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 7

Exercice 1.1 Procédé télescopique

Soient (un)n une suite numérique et∑

n vn la série de terme général vn =un+1 − un. Montrer que la série

n vn converge si et seulement si la suite(un)n converge. Quelle relation a-t-on entre la limite de la suite (un)n et lasomme de la série

n vn ? ⋄

Les exemples qui suivent vont illustrer les principales techniques d’étude d’unesérie numérique (nature et calcul de la somme) basées sur l’étude de la suitedes sommes partielles. Ces exemples nous fourniront également des séries deréférences pour illustrer les propriétés des séries numériques qui sont l’objet dece chapitre.

Exemples

1. La série géométrique de raison r (r ∈ K) et de premier terme α (α ∈ K) estla série de terme général un = α rn. Pour tout n ∈ N on a

(2)

Un =

n∑

k=0

uk =

α1 − rn+1

1 − rsi r 6= 1

(n + 1)α si r = 1.

Si |r| < 1, la suite (Un)n converge vers α(1 − r)−1 et si |r| > 1 la suite (Un)n

diverge. On en déduit que la série géométrique de raison r et de premier termeα est une série convergente si et seulement si |r| < 1. Sa somme vaut alors∑+∞

n=0 αrn = α(1 − r)−1.

2. La série∑

n>2 un de terme général un =1

n(n − 1)(n > 2) converge et sa

somme vaut 1. En effet, la fraction rationnelle1

X(X − 1)admet pour décom-

position en éléments simples dans R(X)

1

X(X − 1)=

1

X − 1− 1

X.

Le terme général de la suite des sommes partielles s’écrit donc :

Un =

n∑

k=2

uk =

n∑

k=2

(1

k − 1− 1

k

)

=

n−1∑

k=1

1

k−

n∑

k=2

1

k= 1 − 1

n + 1.

La suite des sommes partielles converge vers 1 et par conséquent la série∑

n>2 un est convergente de somme∑+∞

n=2 un = 1.

3. La série de terme général un = (−1)n 1n (n ∈ N∗) est appelée série harmo-

nique alternée. Elle converge et sa somme vaut − ln(2). Pour tout k ∈ N∗ on a

(2)Voir le Cours de Première Année, proposition 5.21 p. 195.

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Page 8: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

8 Définitions et premières propriétés

en effet 1k =

∫ 1

0tk−1 dt, de sorte que le terme général de la suite des sommes

partielles associée à la série harmonique alternée s’écrit :

Un =

n∑

k=1

(−1)k

k= −

n∑

k=1

∫ 1

0

(−t)k−1 dt = −∫ 1

0

n∑

k=1

(−t)k−1 dt.

Orn∑

k=1

(−t)k−1 =1 − (−t)n

1 + tcar il s’agit de la somme des n premiers termes

d’une progression géométrique(2)

de raison −t. On en déduit que :

Un = −∫ 1

0

1 − (−t)n

1 + tdt = −

∫ 1

0

1

1 + tdt +

∫ 1

0

(−t)n

1 + tdt

= − ln(2) +

∫ 1

0

(−t)n

1 + tdt.

Finalement, pour tout n ∈ N∗ on a

|Un + ln(2)| =

∣∣∣∣

∫ 1

0

(−t)n

1 + tdt

∣∣∣∣

6

∫ 1

0

tn

1 + tdt 6

∫ 1

0

tn dt =1

n + 1.

On conclut alors par le théorème d’encadrement(3)

que la suite des sommes par-tielles converge vers − ln(2). La série harmonique alternée

n(−1)n 1n converge

donc vers − ln(2).

On pourra consulter l’exercice ?? p. ?? pour une autre méthode permettantd’établir ce résultat.

4. La série de terme général un = 1/n! converge et sa somme vaut e. En effet, laformule de Taylor-Lagrange

(4)

appliquée à l’ordre n à la fonction exponentielleentre 0 et 1 donne :

∃cn ∈]0, 1[ e =

n∑

k=0

1

k!+

1

(n + 1)!exp(cn).

Le terme général de la suite des sommes partielles associée à cette série vérifiedonc :

Un =

n∑

k=0

1

k!= e − 1

(n + 1)!exp(cn).

Puisque cn ∈]0, 1[ on a 1 < exp(cn) < e et

|Un − e| =1

(n + 1)!exp(cn) <

e

(n + 1)!.

(3)Voir le théorème 5.1 p. 179 du Cours de Première Année.

(4)Voir le Cours de Première Année, théorème 16.4 p. 750.

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Page 9: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 9

Par le théorème d’encadrement(4)

, on en déduit que la suite des sommes par-tielles converge vers e et par conséquent que la série

n un est convergente,de somme

∑+∞n=1 un = e. Plus généralement, en utilisant la même méthode, on

montre que pour tout réel x la série de terme général un = xn/n! converge etque sa somme vaut ex.

5. La série de terme général un = ln(1 + 1n ) diverge puisque le terme général

de la suite des sommes partielles s’écrit :

Un =

n∑

k=1

uk =

n∑

k=1

ln(1 + 1k ) =

n∑

k=1

ln

(k + 1

k

)

=

n∑

k=1

ln(k + 1) −n∑

k=1

ln(k) = ln(n + 1).

La suite des sommes partielles tend vers +∞ (donc diverge).

6. Pour déterminer la nature de la série de terme général un = (−1)n

√n

, intéressons-

nous aux suites (Sn)n et (Tn)n extraites de la suite de sommes partielles (Un)n

correspondant aux termes d’indices pairs et aux termes d’indices impairs :

Sn = U2n+2 =

2n+2∑

k=1

uk, Tn = U2n+1 =

2n+1∑

k=1

uk.

La suite (Un)n et par conséquent la série∑

n>1 un convergent si et seulement

si les deux suites extraites (Sn)n et (Tn)n convergent vers une même limite(5)

.Cette limite est alors la limite de la suite (Un)n et par conséquent la somme dela série

n>1 un. Puisque pour tout n ∈ N on a

Sn+1 − Sn =2n+4∑

k=1

uk −2n+2∑

k=1

uk = u2n+4 + u2n+3 =1√

2n + 4− 1√

2n + 3< 0,

Tn+1 − Tn =

2n+3∑

k=1

uk −2n+1∑

k=1

uk = u2n+3 + u2n+2 = − 1√2n + 3

+1√

2n + 2> 0,

la suite (Sn)n est (strictement) décroissante et la suite (Tn)n est (strictement)croissante. Par ailleurs,

Sn − Tn =2n+2∑

k=1

uk −2n+1∑

k=1

uk = u2n+2 =1√

2n + 2.

On en déduit que les deux suites (Sn)n et (Tn)n sont des suites adjacentes(6)

;elles convergent vers une même limite ℓ qui vérifie :

∀n ∈ N Tn 6 ℓ 6 Sn.

(5)Voir la proposition 5.19 p. 189 du Cours de Première Année.

(6)Voir la définition 5.6 et le théorème 5.2 p. 185 du Cours de Première Année.

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10 Définitions et premières propriétés

La série∑

n>1(−1)n

√n

est donc une série convergente. On peut obtenir une valeurapprochée de sa somme en calculant les valeurs de Sn et Tn pour un entier n« assez grand » : on a ℓ ≈ 1

2 (Sn + Tn) = Sn + 12u2n+2 et l’erreur commise

est inférieure à 12 (Sn − Tn). POur obtenir une valeur approchée de ℓ avec une

erreur inférieure à 10−3 (trois chiffres significatifs), il faut choisir n de sorteque :

1

2(Sn − Tn) =

1

2√

2n + 26 10−3.

On a 12√

2n+2= 10−3 pour n = 124999. Cette approche pour calculer une

valeur approchée de la somme se révelle un peu couteuse en calculs. Une valeurapprochée de la somme de la série est : −0.604.

Exercice 1.2 Déterminer la nature et calculer le cas échéant la somme desséries suivantes :

1 -∑

n>1

1

n(n + 1)2 -∑

n

(−1)n

n!3 -∑

n>1

e−n

n.

1.1.2 Critere de Cauchy

Cauchy, Augustin-Louis (1789, Paris - 1857, Sceaux).

Augustin-Louis Cauchy commence sa carrière comme ingénieurmilitaire. En 1816, il obtient un poste de professeur à la Facultédes Sciences de Paris et à l’École Polytechnique et entre à l’Aca-démie des Sciences. L’œuvre de Cauchy est considérable, surtouten analyse où il a su donner le cadre rigoureux nécessaire à sondéveloppement. Il a introduit une notion précise de continuitéet a élaboré une définition rigoureuse de l’intégrale. Son travailconcerne tous les domaines des mathématiques, en particulierles équations différentielles, la théorie des groupes et l’algèbrelinéaire.

Théorème 1.1 (Critère de Cauchy)

Une condition nécessaire et suffisante pour que la série numérique∑

n un

converge est qu’elle vérifie le critère de Cauchy :

∀ε ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀(m, n) ∈ N

2

(

n > m > N ⇒∣∣∣∣∣

n∑

k=m

uk

∣∣∣∣∣6 ε

)

.

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Page 11: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 11

Démonstration La série numérique∑

n un converge si et seulement si la suitedes sommes partielles (Un)n qui lui est associée converge. Or, une suite numé-rique converge si et seulement s’il s’agit d’une suite de Cauchy

(7)

. Ainsi la sérienumérique

n un converge si et seulement si la suite (Un)n de terme général

Un =∑n

k=0 uk est une suite de Cauchy, c’est-à-dire(8)

si

∀ε ∈ R∗+ ∃Nε ∈ N ∀(p, n) ∈ N

2(

n > p > Nε ⇒ |Un − Up| 6 ε)

. (2)

Soit ε un réel strictement positif et Nε = Nε + 1 où Nε est défini par l’asser-tion (2). Pour tous réels m et n tels que n > m > Nε + 1 on a

∣∣∣∣∣

n∑

k=m

uk

∣∣∣∣∣= |Un − Um−1| 6 ε

d’après l’assertion (2) où p = m − 1. Le résultat est établi. �

Exemple La série∑

n>11n , appelée série harmonique, diverge. Pour l’établir,

montrons que cette série ne satisfait pas au critère de Cauchy. Il s’agit de vérifierque

(9)

∃ε ∈ R∗+ ∀N ∈ N ∃(m, n) ∈ N

2

(

(n > m > N) et∣∣∣

n∑

k=m

1

k

∣∣∣ > ε

)

. (3)

Soit N un entier naturel quelconque. On considère les entiers m = 2N et n =2N+1. On a

n∑

k=m

1

k=

2N+1∑

k=2N

1

k>(2N+1 − 2N + 1

) 1

2N+1>(2N+1 − 2N

) 1

2N+1=

1

2

car dans la somme, il y a 2N+1−2N +1 termes positifs tous supérieurs à 12N+1 .

Cela permet d’affirmer que∑n

k=m1k > 1

2 . On a donc montré l’assertion (3) avecε = 1

2 . On en déduit que la série∑

n>11n ne vérifie pas le critère de Cauchy ; il

s’agit donc d’une série divergente. Il est par ailleurs aisé de vérifier que la suitedes sommes partielles (Sn)n est à termes positifs et strictement croissante (etnon majorée, sans quoi elle convergerait). La suite (Sn)n tend donc vers +∞.

(7)Voir le Cours de Première Année, théorème 5.4 p. 191.

(8)Voir le Cours de Première Année, définition 5.8 p. 191.

(9)Cette assertion quantifiée est la négation de celle définissant le critère de Cauchy dans laproposition 1.1.

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Page 12: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

12 Définitions et premières propriétés

1.1.3 Premieres proprietes

Proposition 1.1 Si les deux suites (un)n et (vn)n ne différent que par unnombre fini de termes, i.e.,

∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ vn = un)

alors les séries∑

n un et∑

n vn sont de même nature :

– ou bien elles convergent toutes les deux ;

– ou bien elle divergent toutes les deux.

Démonstration Les suites des sommes partielles (Un)n et (Vn)n associéesaux deux séries

n un et∑

n vn vérifient pour n > N :

Un =n∑

k=0

uk =N∑

k=0

uk +n∑

k=N+1

uk = UN +n∑

k=N+1

uk,

Vn =

n∑

k=0

vk =

N∑

k=0

vk +

n∑

k=N+1

vk = VN +

n∑

k=N+1

vk.

Puisque uk = vk pour tout entier n > N , on en déduit que Un −Vn = UN −VN

et par conséquent que Un = Vn + (UN − VN ) Comme la quantité UN − VN estindépendante de n, on en conclut que

(10)

– si la suite (Vn)n converge vers ν alors (Un)n converge vers ν + UN − VN ;

– si la suite (Un)n converge vers µ alors (Vn)n converge vers µ − UN + VN ;

– si l’une des deux suites diverge, l’autre diverge aussi.

Le résultat est démontré. �

Exemple Les séries∑

n>1ln(n)n2 et

n>1| ln(n)|

n2 sont de même nature : commeln(n) > 0 pour tout entier n > 3, elles ne diffèrent que par leur second termequi vaut respectivement 1

4 ln(2) et 14 | ln(2)| = − 1

4 ln(2).

Si les deux suites (un)n et (vn)n ne différent que par un nombre fini determes alors les séries

n un et∑

n vn sont de même nature mais si ellesconvergent leur somme est en général différente.

Proposition 1.2 Une condition nécessaire pour que la série∑

n un convergeest que la suite (un)n converge vers 0.

(10)Voir le Cours de Première Année, proposition 5.8 p. 175.

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Page 13: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 13

Démonstration Supposons que la série∑

n un converge et que sa somme estégale à µ où µ ∈ K. D’après la définition 1.2, la suite des sommes partielles(Un)n converge vers µ. De plus, la suite de terme général Sn = Un−1 (n ∈ N∗)converge aussi vers µ (cette suite est formée des mêmes termes que la suite(Sn)n, seul l’indicage des termes est modifié). Puisque pour tout n ∈ N∗ on aun = Un − Un−1, on en déduit que la suite (un)n converge vers 0. �

Remarque On dispose là d’un critère simple permettant d’établir qu’une sériediverge. Si le terme général de la série ne tend pas vers 0 quand n tend vers +∞,alors la série diverge nécessairement. On qualifie dans ce cas la divergence dela série de divergence grossière. ⋄

Exemples

1. La série∑

n sin(n) diverge grossièrement car la suite de terme général sin(n)diverge.

2. La série∑

nn

n+1 diverge grossièrement car limn→+∞n

n+1 = 1.

La condition est nécessaire mais n’est pas suffisante. Nous avons établi pré-cédemment que la série de terme général ln(1+ 1

n ) divergeait ; or la suite determe général ln(1 + 1

n ) converge bien vers 0.

Proposition 1.3

✗ Soient∑

n un et∑

n vn deux séries numériques convergentes de sommesrespectives µ et ν et λ un scalaire. Alors,

– la série∑

n(un + vn) converge et sa somme vaut µ + ν ;

– la série∑

n(λun) converge et sa somme vaut λµ.

✗ Soient∑

n un une série numérique convergente,∑

n vn une série numériquedivergente et λ un scalaire non nul. Alors,

– la série∑

n(un + vn) diverge ;

– la série∑

n(λvn) diverge.

Démonstration Ces propriétés résultent de manière immédiate des proprié-tés des suites numériques

(11)

en considérant les suites des sommes partiellesassociées à ces séries. �

Remarques

1. Il résulte de la proposition 1.3 que l’ensemble des suites numériques dont lasérie associée converge est un sous-espace vectoriel

(12)

de l’espace vectoriel dessuites convergentes.

(11)Voir le Cours de Première Année, proposition 5.8 p. 175.

(12)Voir le chp. 8 du Cours de Première Année.

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Page 14: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

14 Séries réelles à termes positifs

2. Par ailleurs, si λ est un scalaire non nul alors les séries∑

n(λun) et∑

n un

sont de même nature. Cette propriété est très fréquemment utilisée lors del’étude de la nature d’une série numérique. Par exemple, on peut affirmer quela série

n2n! converge car on a établi que la série

n1n! convergeait. De plus,

∑+∞n=0

2n! = 2

∑+∞n=0

1n! = 2e.

3. Enfin, la proposition 1.3 permet d’affirmer qu’une série complexe∑

n un

converge si et seulement si les deux séries réelles∑

n Re(un) et∑

n Im(un)

convergent. De plus, dans ce cas∑+∞

n=0 un =∑+∞

n=0 Re(un) +∑+∞

n=0 Im(un). ⋄

Si la série∑

n un converge et si la série∑

n vn diverge alors la série∑

n(un + vn) diverge. Mais si les deux séries∑

n un et∑

n vn divergent,la série

n(un + vn) peut, selon les cas, ou bien converger ou bien diverger(voir les exemples suivants).

Exemples

1. Les séries∑

n>1(−1)n

n et∑

n>1(−1)n+1

n convergent et ont pour sommes res-

pectivement − ln(2) et ln(2) (voir p. 7). La série∑

n>1

((−1)n

n + (−1)n+1

n

)

est

la série nulle qui converge bien et qui a pour somme 0 = − ln(2) + ln(2).

2. La série∑

n>1(−1)n

n converge et a pour somme − ln(2) ; la série∑

n>11n

diverge. D’après la proposition 1.3, la série∑

n>1

((−1)n

n + 1n

)

diverge. On

peut le montrer directement en considérant la suite des sommes partielles dontle terme général s’écrit :

Sn =

n∑

k=1

((−1)k

k+

1

k

)

=

E(n/2)∑

k=1

1

k= TE(n/2)

où (Tn)n est la suite des sommes partielles associée à la série harmonique∑

n>11n . La suite (Tn)n tend vers +∞ (voir p. 11) donc la suite (Sn)n qui

est une suite extraite de la suite (Tn)n tend aussi vers +∞.

3. Les séries∑

n>11n et

n>1−1n divergent. La série

n>1

(1n + −1

n

)est la

série nulle qui converge et qui a pour somme 0.

Exercice 1.3

1 - Soit (un)n une suite numérique. Montrer que si la série de terme généralsn = u2n converge et que la série de terme général tn = u2n+1 diverge alors lasérie

n un diverge.

2 - En déduire que la série de terme général vn = ln(

1 + (−1)n

√n

)

diverge. ⋄

1.2 Series reelles a termes positifs

1.2.1 Proprietes generales

On a vu que l’on ne change pas la nature d’une série lorsque l’on modifie unnombre fini de ses termes. Les résultats énoncés dans ce paragraphe concernant

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Séries numériques 15

la nature des séries réelles à termes positifs seront donc également valables pourdes séries à termes positifs à partir d’un certain rang.

Par ailleurs, si∑

n un est une série à termes négatifs, alors d’après la proposi-tion 1.3 la série

n −un est une série à termes positifs qui est de même natureque la série

n un. Les résultats qui seront énoncés dans ce paragraphe s’appli-queront donc d’une manière plus générale aux séries de signe constant à partird’un certain rang. On sera toutefois vigilant dans le cas d’une série à termesnégatifs aux résultats faisant intervenir des relations de comparaison ; (6, >),celles-ci doivent être inversées.

Proposition 1.4 Pour qu’une série∑

n un à termes positifs converge, ilfaut et il suffit que la suite des sommes partielles associée à cette série soitmajorée, i.e.

∃M ∈ R+ ∀n ∈ N

∣∣∣∣∣

n∑

k=0

uk

∣∣∣∣∣6 M.

Démonstration Soit∑

n un une série à termes positifs. La suite (Un)n dessommes partielles associée à cette série est une suite croissante :

∀n ∈ N Un+1 − Un = un+1 > 0.

Or toute suite croissante et majorée converge(13)

. Donc si la suite des sommespartielles est majorée, elle converge et par conséquent la série

n un aussi.

Par ailleurs, toute suite croissante et non majorée tend vers +∞(14)

. Donc sila suite des sommes partielles n’est pas majorée, elle tend vers +∞ et la série∑

n un diverge. L’équivalence est établie. �

Corollaire 1.1Pour qu’une série à termes positifs diverge, il faut et ilsuffit que la suite des sommes partielles associée à cette série ne soit pasmajorée.

Démonstration Il s’agit de la négation de l’équivalence établie proposition 1.4.

Une série numérique à termes positifs, ou bien converge (et a pour somme unréel positif) ou bien diverge en ayant une somme infinie (i.e. la suite des sommespartielles associée à cette série tend vers +∞).

(13)Voir le Cours de Première Année, proposition 5.16 p. 183.

(14)Voir le Cours de Première Année, proposition 5.17 p. 184.

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Page 16: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

16 Séries réelles à termes positifs

1.2.2 Criteres de comparaison

Théorème 1.2 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes positifstelles que

∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ un 6 vn).

– Si la série∑

n vn converge alors la série∑

n un converge.

– Si la série∑

n un diverge alors la série∑

n vn diverge.

Démonstration D Supposons que la série∑

n vn converge et notons ν sasomme. Pour montrer que la série

n un converge, montrons que la suite dessommes partielles (Un)n associée à cette série converge. Par hypothèse,

∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ un 6 vn).

Pour tout entier n > N on a

Un =

N−1∑

k=0

uk +

n∑

k=N

uk 6

N−1∑

k=0

uk +

n∑

k=N

vk 6

N−1∑

k=0

uk + ν.

La dernière inégalité résulte du fait que la série∑

n vn étant une série à termespositifs et convergente de somme ν on a

n∑

k=N

vk 6

+∞∑

k=N

vk 6

+∞∑

k=0

vk = ν.

La suite des sommes partielles (Un)n associée à la série à termes positifs∑

n un

est donc majorée. D’après la proposition 1.4 ceci permet de conclure que la série∑

n un converge.

D La seconde assertion est la contraposée de la première. Elle est donc vraie(15)

.

Remarque Dans le cas de séries toutes les deux à termes négatifs, l’hypothèseest la suivante :

∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ vn 6 un)

(le sens de l’inégalité est inversé). ⋄

(15)Voir le Cours de Première Année, proposition 1.2 p. 10.

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Page 17: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 17

Exemples

1. Pour tout entier n > 2 on a n(n − 1) 6 n2 donc 1n2 6 1

n(n−1) . Comme la

série de terme général1

n(n − 1)converge (voir les exemples de la page 8), la

série de terme général 1n2 converge aussi. On peut par ailleurs montrer (voir

l’exercice ?? p. ??) que sa somme vaut

+∞∑

n=1

1

n2=

π2

6.

2. Pour tout n ∈ N avec n > 2 on a 0 < ln(n) 6 n et par conséquent 1ln(n) > 1

n .

Comme la série∑

n>11n diverge, on en déduit que la série

n>21

ln(n) divergeaussi.

On sera vigilant au fait que le résultat du théorème 1.2 n’est valable que pourdes séries à termes positifs. Par exemple, pour tout n ∈ N∗ on a − 1

n 6(−1)n

n

et la série∑

n − 1n diverge alors que la série

n(−1)n

n converge.

Exercice 1.4 Soient∑

n un et∑

n vn deux séries à termes positifs conver-gentes. Montrer, en utilisant le théorème 1.2, que la série

n

√un × vn converge

Application : règle de la loupe

Soient (un)n une suite décroissante de réels strictement positifs et a un entierstrictement plus grand que 1. On peut montrer, en utilisant le théorème 1.2,que les séries de terme général un et vn = anuan sont de même nature.

Tout d’abord, considérons la série de terme général wn =∑an+1−1

k=an uk. Le termegénéral Wn de la suite des sommes partielles associée à la série

n wn est donnépar

Wn =

n∑

ℓ=0

wℓ =

n∑

ℓ=0

aℓ+1−1∑

k=aℓ

uk =

an+1−1∑

ℓ=1

un = Uan+1−1 − u0 (4)

où (Un)n est la suite des sommes partielles associée à la série∑

n un. Signalonsque comme la suite (un)n est à termes strictement positifs, la suite (Un)n

est une suite à termes positifs qui est strictement croissante. On déduit de larelation (4) que les suites de terme général Wn et UaN+1−1 sont de même natureet que la suite (Wn)n est, au terme u0 près, extraite de la suite (Un)n (en effet,comme a > 1, l’application n ∈ N 7→ an ∈ N est strictement croissante). Onen déduit d’une part que si la suite (Un)n converge, la suite (Wn)n converge.D’autre part que, si la suite (Un)n diverge, alors, comme elle est strictementcroissante, elle tend nécessairement vers +∞ ce qui implique que la suite (Wn)n

tend également vers +∞ (et donc diverge). En conclusion, les deux suites desommes partielles (Un)n et (Wn)n et par conséquent les deux séries

n un et∑

n wn sont de même nature.

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Page 18: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

18 Séries réelles à termes positifs

Comme la suite (un)n est une suite décroissante de réels positifs, pour toutk ∈ {an, . . . , an+1 − 1} on a : uan+1 6 uk 6 uan . On en déduit que

an+1−1∑

k=an

uan+1 6 wn 6

an+1−1∑

k=an

uan .

Or,∑an+1−1

k=an uan+1 = (a − 1)anuan+1 = (a − 1)a−1vn+1

et∑an+1−1

k=an uan = (a − 1)anuan = (a − 1)vn.

Le théorème 1.2, permet de déduire de la relation

(a − 1)a−1vn+1 6 wn 6 (a − 1)vn,

– d’une part que si la série de terme général wn converge alors la série de termegénéral (a − 1)a−1vn+1 converge (et donc que la série de terme général vn

converge aussi) ;

– et d’autre part que si la série de terme général vn converge alors la sériede terme général wn converge (car les deux séries de terme général vn et(a − 1)vn sont de même nature).

Finalement, on peut conclure que les trois séries∑

n un,∑

n wn et∑

n vn sontde même nature.

Proposition 1.5 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes stric-tement positifs à partir d’un certain rang telles que la suite de terme généralun/vn admette pour limite ℓ ∈ R+ ∪ {+∞}.1. Si ℓ > 0 alors les deux séries

n un et∑

n vn sont de même nature.

2. Si ℓ = 0 et si la série∑

n vn converge alors la série∑

n un converge aussi.

3. Si ℓ = +∞ et si la série∑

n vn diverge alors la série∑

n un diverge aussi.

Démonstration D Si la suite (wn)n de terme général wn = un/vn convergec’est nécessairement vers un réel ℓ positif

(16)

et on a(17)

:

∃N2 ∈ N ∀n ∈ N (n > N2 ⇒ |wn − ℓ| 6 1) .

On en déduit que pour tout entier n > N2 on a

un

vn6 1 + ℓ,

c’est-à-dire que un 6 (1+ℓ)vn. La proposition 1.3 et le théorème 1.2 permettentde conclure que si la série

n vn converge alors la série∑

n un converge aussi.

(16)Voir la proposition 5.2 p. 169 du Cours de Première Année.

(17)Voir la définition 5.1 p. 168 du Cours de Première Année concernant la convergence d’unesuite numérique. On prend ici ε = 1.

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Page 19: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 19

D Si la suite (wn)n converge vers un réel ℓ strictement positif alors la suite (wn)n

de terme général wn = w−1n converge vers ℓ−1. Reprenant le raisonnement

précédent, on a

∃N3 ∈ N ∀n ∈ N(n > N3 ⇒

∣∣w−1

n − ℓ−1∣∣ 6 1

).

On en déduit que pour tout entier n > N3 on a

vn

un6 1 + ℓ−1,

c’est-à-dire que vn 6 (1 + ℓ−1)un. Le théroème 1.2 permet de conclure que sila série

n un converge alors la série∑

n vn converge aussi.

D Compte tenu de ce qui a été établi dans la première partie de la démons-tration, les deux séries

n un et∑

n vn sont bien de même nature si ℓ > 0.Si ℓ = 0, la première partie de la démonstration permet de conclure que laseconde assertion de la proposition est vraie.

D Si la suite de terme général un/vn tend vers +∞, alors la suite de termegénéral vn/un tend vers 0. D’après ce qui vient d’être démontré, on en déduitque si la série

n un converge alors la série∑

n vn converge aussi. La contra-

posée(18)

de cette assertion est : si la série∑

n vn diverge alors la série∑

n un

diverge. �

Exemples

1. La série∑

n>11

n3 converge car 1n3 / 1

n2 = 1n tend vers 0 (quand n tend vers

+∞) et la série∑

n>11

n2 converge.

2. La série∑

n>11√n

diverge car 1√n/ 1

n =√

n tend vers +∞ (quand n tend

vers +∞) et la série∑

n>11n diverge.

Corollaire 1.2 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes positifstelles que un ∼

+∞vn. Les deux séries

n un et∑

n vn sont de même nature.

Démonstration Si un ∼+∞

vn, on a limn→+∞

un

vn= 1 ; il suffit d’appliquer la

proposition 1.5 dans le cas ℓ = 1. �

Si (un)n et (vn)n sont deux suites réelles à termes positifs telles que un ∼+∞

vn

alors les séries∑

n un et∑

n vn sont de même nature mais leur somme esten général différente.

(18)Voir le Cours de Première Année, proposition 1.2 p. 10.

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Page 20: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

20 Séries réelles à termes positifs

Exemples

1. On a1

n(n + 1)∼

+∞1

n2. Comme la série

n>11

n2 converge, la série∑

n>11

n(n+1)

converge aussi. Les sommes de ces séries sont différentes puisque

n>1

1

n2=

π2

6et

n>1

1

n(n + 1)= 1,

voir les exercices 1.2 p. 10 et ?? p. ??.

2. La série∑

n>1 ln(1− 1n ) est une série à termes négatifs. On a − ln(1− 1

n ) ∼+∞

1n

et∑

n1n diverge, donc cette série diverge aussi.

3. Le corollaire 1.2 est très utile lorsque le terme général de la série fait inter-venir des factorielles car la formule de Stirling

(19)

donne un équivalent à n! auvoisinage de +∞ :

n! ∼+∞

√2πn

(n

e

)n

.

A titre d’illustration, déterminons la nature de la série∑

n n!/nn. Cette sérieest à termes positifs et d’après la formule de Stirling on a

un =n!

nn∼

+∞

√2π

√ne−n.

Or(20)

, pour tout entier n on peut montrer par récurrence que√

ne−n 6 1/2n.Comme la série

n 1/2n est une série géométrique convergente, le théorème 1.2permet de conclure que la série

n

√ne−n converge aussi et donc que

n un

converge.

Dans le corollaire 1.2, l’hypothèse imposant que les suites (un)n et (vn)n

soient à termes positifs est essentielle. A titre de contre-exemple, considéronsles suites (un)n et (vn)n de terme général respectifs

un =(−1)n

√n

, vn =(−1)n

√n

+1

n.

Ces suites ne sont pas des suites à termes de signe constant. On a un ∼+∞

vn

car 1n = O+∞( (−1)n

√n

) mais la série∑

n un converge alors que la série∑

n vn

diverge.

En complément au corollaire 1.2, l’exercice suivant permet de montrer que,dans le cas de séries à termes positifs convergentes, si les termes généraux dedeux séries sont équivalents au voisinage de +∞, alors leurs restes d’ordre nsont également équivalents au voisinage de +∞.

(19)Cette formule est établie dans le Cours de Première Année p. 199.

(20)Nous verrons ultérieurement des critères qui permettent de conclure directement à laconvergence de cette série, voir la proposition 1.11 p. 34.

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Page 21: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 21

Exercice 1.5 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes strictementpositifs à partir d’un certain rang telles que un ∼

+∞vn. On suppose que la série

n vn converge et on considère les restes d’ordre n associés aux deux séries∑

n un et∑

n vn définis par Rn =∑+∞

k=n+1 uk et R′n =

∑+∞k=n+1 vk.

1 - Montrer que : ∀ε ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ |un − vn| 6 εvn) .

2 - En déduire que : ∀ε ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒ |R′

n − Rn| 6 εR′n).

3 - Conclure que Rn ∼+∞

R′n. ⋄

Corollaire 1.3 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes positifstelles que un = O+∞(vn).

✗ Si la série∑

n vn converge alors la série∑

n un converge aussi.

✗ Si la série∑

n un diverge alors la série∑

n vn diverge aussi.

Démonstration D Si un = O+∞(vn) alors limn→+∞

un

vn= 0. Il suffit d’appliquer

la proposition 1.5 (dans le cas ℓ = 0) pour établir que si la série∑

n vn convergealors la série

n un converge aussi.

D Si un = O+∞(vn) alors limn→+∞

un

vn= 0 et puisque (un)n et (vn)n sont deux

suites réelles à termes positifs on a limn→+∞

vn

un= +∞. Il suffit d’appliquer la

proposition 1.5 (dans le cas ℓ = +∞) pour établir que si la série∑

n un divergealors la série

n vn diverge. �

Exemples

1. La série∑

n>2

1

n2 ln(n)converge car

1

n2 ln(n)= O+∞

(1

n2

)

et la série∑

n>1

1

n2

converge.

2. La série∑

n>2

1√n ln(n)

diverge car1

n= O+∞

(1√

n ln(n)

)

et la série∑

n>1

1

n

diverge.

Le lecteur attentif aura remarqué que les résultats utilisés pour l’étude de lanature des séries numériques sont très voisins dans leur forme de ceux énoncésdans le chapitre consacré aux intégrales généralisées (chapitre 19 du Cours dePremière Année). La proposition suivante permet d’en saisir la raison.

Proposition 1.6 (Comparaison à une intégrale généralisée)

Soient n0 un entier naturel et f une application de [n0, +∞[ dans R, positiveet décroissante. La série

n>n0f(n) et l’intégrale généralisée

∫ +∞n0

f(t) dtsont de même nature.

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Page 22: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

22 Séries réelles à termes positifs

Démonstration Nous allons commencer par établir une inégalité (relation (5)ci-dessous) qui va nous permettre dans un deuxième temps d’établir l’équiva-lence.

D Comme(21)

f est une application décroissante sur [n0, +∞[, elle est localementRiemann intégrable sur [n0, +∞[. La décroissance de f implique par ailleursque f(k + 1) 6 f(t) 6 f(k) pour tout t ∈ [k, k + 1] (k ∈ N, k > n0) et parconséquent

f(k + 1) 6

∫ k+1

k

f(t) dt 6 f(k).

En sommant ces inégalités pour k ∈ {n0, . . . , N − 1} (N ∈ N, N > n0), il vient

N−1∑

k=n0

f(k + 1) 6

N−1∑

k=n0

∫ k+1

k

f(t) dt 6

N−1∑

k=n0

f(k).

Puisque∑N−1

k=n0f(k + 1) =

∑Nk=n0+1 f(k) et

∑N−1k=n0

∫ k+1

kf(t) dt =

∫ N

n0f(t) dt,

on obtient :

N∑

k=n0+1

f(k) 6

∫ N

n0

f(t) dt 6

N−1∑

k=n0

f(k). (5)

D L’intégrale généralisée∫ +∞

n0f(t) dt sera convergente si

(22)

l’intégrale indéfinie

F : x ∈ [n0, +∞[7−→∫ x

n0f(t) dt admet une limite quand x tend vers +∞.

Comme f est positive, F est croissante. Pour montrer que F a une limitequand x tend vers +∞, il suffit de montrer qu’elle est majorée. Pour toutréel x positif on a E(x) 6 x < E(x) + 1 (E désignant la partie entière

(23)

).Puisque f est positive, on en déduit que pour tout x ∈ [n0, +∞[

∫ E(x)

n0

f(t) dt 6 F (x) 6

∫ E(x)+1

n0

f(t) dt

puis, compte tenu de la relation (5), que

E(x)∑

k=n0+1

f(k) 6 F (x) 6

E(x)∑

k=n0

f(k). (6)

Si la série∑

n f(n) converge et a pour somme le réel S alors, f étant positive, on

a∑E(x)

k=n0f(k) 6 S. L’application F est bien majorée. Par conséquent l’intégrale

généralisée∫ +∞

n0f(t) dt converge.

(21)Voir le Cours de Première Année, p. 917.

(22)Voir le Cours de Première Année, définition 19.2 p. 918.

(23)Voir p. 104 du Cours de Première Année.

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Page 23: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 23

D Inversement, supposons que l’intégrale généralisée∫ +∞

n0f(t) dt converge et

notons I =∫ +∞

n0f(t) dt = limx→+∞

∫ x

n0f(t) dt. De la relation (5) on déduit

que :

N∑

k=n0

f(k) = f(n0) +

N∑

k=n0+1

f(k) 6 f(n0) + F (N) = f(n0) +

∫ N

n0

f(t) dt.

Comme f est positive, on a∫ N

n0f(t) dt 6 I. On en déduit que la suite des

sommes partielles associée à la série∑

n>n0f(n) est majorée par f(n0) + I.

Comme f est positive, cette suite est croissante ; par conséquent elle converge(24)

.La série

n>n0f(n) est donc bien une série convergente. �

Interprétation graphique Pour tout entier k > n0, f(k) est l’aire du rec-tangle rk = [k, k + 1] × [0, f(k)]. L’aire cumulée des rectangles rk pour k > n0

est finie si et seulement si l’aire sous la représentation graphique de la fonctionf sur l’intervalle [n0, +∞[ est finie.

k k+1

f(k)

0

Exemple Il est facile de vérifier que la fonction f : x 7−→ 1x ln(x) est positive et

décroissante sur ]1, +∞[ et qu’elle admet pour primitive x 7−→ ln(ln(x)). On endéduit que l’intégrale généralisée

∫ +∞2

1t ln(t) dt diverge car lim

x→+∞ln(ln(x)) = +∞.

Ceci implique que la série∑

n1

n ln(n) diverge.

Remarque On utilise le critère de comparaison d’une série à une intégralegénéralisée lorsque les autres critères permettant d’établir la nature d’une sérieà termes positifs ne permettent pas de conclure rapidement et qu’il est facilede déterminer la nature de l’intégrale généralisée par un calcul de primitive.

(24)Voir la proposition 5.16 p. 183 du Cours de Première Année.

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Page 24: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

24 Séries réelles à termes positifs

Dans les autres cas ce critère est de peu d’intérêt dans la mesure où les critèrespermettant d’établir la nature de l’intégrale généralisée d’une fonction positivesont du même type que ceux permettant d’établir la nature d’une série à termespositifs. ⋄

Bien que la série∑

n>n0f(n) et l’intégrale généralisée

∫ +∞n0

f(t) dt sontde même nature, si elles convergent la somme de la série est en géné-ral différente de la valeur de l’intégrale généralisée. Ainsi, l’applicationf : x ∈ [1, +∞[7−→ 1/x2 est positive et décroissante. Pour tout réel x > 1on a ∫ x

1

1

t2dt =

[

−1

t

]x

1

= 1 − 1

x.

On en déduit que∫ +∞1

f(t) dt = limx→+∞∫ x

11/t2 dt = 1. Par contre, la

série∑

n>1 1/n2 converge mais sa somme vaut π2/6, voir l’exercice ??.

D’une manière générale, si on désigne par I la valeur de l’intégrale généralisée∫ +∞

n0f(t) dt et par S la valeur de la somme de la série

n>n0f(n), les relations

(6) et (??) nous indiquent que

I 6 S 6 I + f(n0) et S − f(n0) 6 I 6 S.

Il existe de nombreux critères permettant d’établir la nature d’une série àtermes positifs ; nous en avons donné les principaux. L’exercice suivant établi uncritère supplémentaire, d’usage moins fréquent que ceux donnés précédemment.

Exercice 1.6 Soient (un)n et (vn)n deux suites réelles à termes positifs vé-rifiant

∃N ∈ N ∀n ∈ N

(

n > N ⇒ un+1

un6

vn+1

vn

)

.

1 - a) Montrer que pour tout entier n > N on a un 6uN

vN× vn.

b) En déduire que si la série∑

n vn converge alors la série∑

n un converge.

2 - Montrer que si la série∑

n un diverge alors la série∑

n vn diverge. ⋄

1.2.3 Series de reference

Nous avons établi dans le paragraphe précédent des critères de convergenced’une série par comparaison à une autre série dont la nature est connue. Dansce paragraphe nous allons introduire des séries de référence, dont nous allonsétablir la nature et qui seront susceptibles d’être utilisées dans les critères decomparaison.

Définition 1.4 On appelle série de Riemann, toute série réelle de terme

général1

nα(n ∈ N∗) où α est un réel.

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Page 25: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 25

Riemann, Bernhard (1826, Hanovre - 1866, Selasca en Italie).

Bernhard Riemann fut un étudiant de Gauss à Göttingen.Sa thèse de doctorat, passée en 1851, est un travail im-portant sur les fonctions de variables complexes. L’œuvrede Riemann est fondamentale dans de nombreux domainesdes mathématiques : étude des surfaces, définition de l’inté-grale, équations différentielles, théorie des nombres, séries,etc. Riemann était également profondément attaché aux re-lations entre les mathématiques et la physique. On lui doitdes travaux sur les théories de la chaleur, de la lumière, del’acoustique, etc. Riemann est mort précocement de tuber-culose.

En utilisant la proposition 1.6 et les propriétés de convergence des intégralesgénéralisées de Riemann établies dans le cours de première année

(25)

, on obtientle résultat suivant sur la convergence des séries de Riemann. Compte-tenu del’importance de cette proposition, nous en donnons une démonstration directesans avoir recours aux résultats sur les intégrales généralisées de Riemann.

Proposition 1.7 (Convergence des séries de Riemann)

La série de Riemann∑

n>1

1

nαconverge si α > 1. Elle diverge sinon.

Démonstration On procède par disjonction de cas pour déterminer la naturede la série de Riemann

n>1 1/nα en fonction de la valeur de α.

D Si α < 0 alors la suite de terme général n−α tend vers +∞. Comme elle neconverge pas vers 0, il y a divergence grossière de la série.

D Si α = 0 alors la suite de terme général n−α est la suite constante égale à 1.Comme elle ne converge pas vers 0, il y a là encore divergence grossière de lasérie.

D Si α = 1, il s’agit de la série harmonique dont on a établi la divergence (voirl’exemple de la page 11).

D Si α ∈]0, 1[ alors pour tout n ∈ N∗ on a n−α > n−1 > 0. Comme la série∑

n>1 n−1 diverge, on déduit des critères de comparaison (voir le théorème 1.2)que la série

n>1 n−α diverge aussi.

(25)Voir le Cours de Première Année p. 927.

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Page 26: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

26 Séries réelles à termes positifs

D Intéressons-nous au cas où α > 1. Considérons la série∑

n>1 vn de termegénéral vn = 1

nα−1 − 1(n+1)α−1 . La suite (Vn)n des sommes partielles associée à

cette série a pour terme général

Vn =

n∑

k=1

vk =

n∑

k=1

1

kα−1−

n∑

k=1

1

(k + 1)α−1= 1 − 1

(n + 1)α−1.

Si α > 1, la suite (Vn)n converge vers 1 et par conséquent la série∑

n vn

converge. Par ailleurs, on peut exprimer vn sous la forme :

vn =1

nα−1

(

1 −(

n

n + 1

)α−1)

=1

nα−1

(

1 −(

1 +1

n

)1−α)

.

En utilisant le développement limité (1 + u)β = 1 + βu + O0(u), on en déduitque

1 −(

1 +1

n

)1−α

=α − 1

n+ O+∞

(1

n

)

et donc que vn ∼+∞

α − 1

nα. On a par conséquent

1

nα∼

+∞1

α − 1vn. Comme la

série∑

n>1 n−α est une série positive dont le terme général est équivalent auvoisinage de +∞ à celui d’une série convergente, on déduit des critères decomparaison (voir la proposition 1.5) que la série

n>1 n−α converge. �

Proposition 1.8 (Règle de Riemann)

Soit∑

n un une série à termes positifs.

✗ S’il existe un réel α ∈]1, +∞[ tel que la suite (nαun)n converge vers 0 alorsla série

n un converge.

✗ S’il existe un réel α ∈]−∞, 1] tel que la suite (nαun)n tende vers +∞ alorsla série

n un diverge.

Démonstration D S’il existe un réel α ∈]1, +∞[ tel que la suite (nαun)n

converge vers 0 alors un = O+∞(1/nα). Si α ∈]1, +∞[ la série de Riemann∑

n 1/nα converge et le corollaire 1.3 permet de conclure que la série∑

n un

converge.

D S’il existe un réel α ∈]−∞, 1] tel que la suite (nαun)n tende vers +∞ alors1/nα = O+∞(un). Si α ∈] −∞, 1], la série de Riemann

n 1/nα diverge et lecorollaire 1.3 permet de conclure que la série

n un diverge. �

Exemple Déterminons la nature de la série de terme général un = (ln(n))−n.Pour tout n ∈ N∗ on a

n2un = exp(2 ln(n) − n ln(ln(n))).

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Page 27: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 27

On a ln(n) = O+∞(n) et par conséquent 2 ln(n) = O+∞(n ln(ln(n))). On en dé-

duit(26)

que 2 ln(n)−n ln(ln(n)) ∼+∞

−n ln(ln(n). Ceci implique que limn→+∞

n2un = 0

et par conséquent que la série∑

n un converge.

On se convaincra de l’intérêt de ce critère en notant que un n’a pas d’équivalentqui permette de conclure en ayant recours au corollaire 1.2.

Bertrand, Joseph (1822, Paris - 1900, Paris).

En 1839, année où il entre à l’École Polytechnique, JosephBertrand soutient une thèse de doctorat sur la théorie ma-thématique de l’électricité. Ingénieur au corps des Mines, ilenseigne à l’École Polytechnique et à l’École Normale. En1856, il succède à Charles Sturm à l’Académie des Scienceset ses talents littéraires lui ouvrent en 1874 les portes del’Académie Française. En 1862, il est nommé titulaire de lachaire de physique et mathématique du Collège de France.Les travaux de J. Bertrand sont variés. Il étudia les appli-cations des équations différentielles à la thermodynamique.Il travailla également sur les courbes et les surfaces puis surla théorie des probabilités.

Définition 1.5 On appelle série de Bertrand toute série réelle de terme

général1

nα ln(n)β(n > 2) où α est un réel et β est un réel non nul.

En utilisant la proposition 1.6 et les propriétés de convergence des intégralesgénéralisées de Bertrand établies dans le cours de première année

(27)

, on obtientle résultat suivant sur la convergence des séries de Bertrand. Compte-tenu del’importance de cette proposition, nous en donnons une démonstration directesans avoir recours aux résultats sur les intégrales généralisées de Bertrand.

(26)Voir le Cours de Première Année p. 694.

(27)Voir le Cours de Première Année p. 928.

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Page 28: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

28 Séries réelles à termes positifs

Proposition 1.9 (Convergence des séries de Bertrand)

La série de Bertrand∑

n>2

1

nα ln(n)βoù α et β sont deux réels converge dans

les cas suivants :

– si α > 1 ;

– ou si α = 1 et β > 1.

Elle diverge dans les autres cas.

Démonstration On procède par disjonction de cas.

D Cas α > 1. On a1

nα ln(n)β= O+∞(n−γ) où γ = 1

2 (1 + α) car

limn→+∞

1nα ln(n)β

1nγ

= limn→+∞

1

nα−1

2 ln(n)β= 0.

Pour α > 1 on a 1+α2 > 1, donc la série de terme général n−γ est une série

de Riemann convergente. Le corollaire 1.3 permet de conclure que la série deBertrand converge si α > 1.

D Cas α < 1. On a limn→+∞

1nα ln(n)β

1nγ

= limn→+∞

1

nα−1

2 ln(n)β= +∞

et 1+α2 < 1 donc la série de terme général n−γ est une série de Riemann di-

vergente. On déduit du corollaire ?? que la série de Bertrand diverge si α < 1.

D Cas α = 1 et β 6 0. Pour tout entier n > 3 on a ln(n)β > 1 et

1

nα ln(n)β=

1

n ln(n)β>

1

n.

Comme la série harmonique∑

n>11n diverge, on déduit du théorème 1.2 que

la série de Bertrand diverge.

D Cas α = 1 et β > 0. L’application f : t ∈ [2, +∞[7−→ 1

t ln(t)βest positive

et décroissante. D’après la proposition 1.6, la série de Bertrand∑

n>2

1

n ln(n)β

et l’intégrale généralisée∫ +∞

2

f(t) dt sont de même nature. Considérons l’in-

tégrale indéfinie F : x ∈ [2, +∞[7−→∫ x

2

f(t) dt. En effectuant le changement

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Page 29: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 29

de variable défini par φ : s 7−→ es on obtient(28)

pour tout x > 2,

F (x) =

∫ φ(ln(x))

φ(ln(2))

f(t) dt =

∫ ln(x)

ln(2)

f(φ(s)) φ′(s) ds

=

∫ ln(x)

ln(2)

1

es ln(es)βes ds =

∫ ln(x)

ln(2)

1

sβds = G(ln(x))

où G : x ∈ [ln(2), +∞[7−→∫ x

ln(2)

1

sβds. L’intégrale généralisée

∫ +∞

ln(2)

1

sβds est

une intégrale généralisée de Riemann(29)

qui converge si et seulement si β > 1.On en déduit que G et par conséquent F ont une limite finie en +∞ si etseulement si β > 1. �

On pourra consulter l’exemple de la page 32 pour une autre méthode permet-tant de démontrer ce résultat.

1.3 Series absolument convergentes

Lors de l’étude de la nature d’une série numérique∑

n un dont les termes nesont pas de signe constant, la première étape consiste à considérer la série nu-mérique de terme général |un|. Cette série est à termes positifs et les critèresdu paragraphe précédent permettent d’en étudier la nature. Si la série

n |un|converge alors on peut affirmer que la série

n un converge aussi (voir le théo-rème 1.3). Par contre, si la série

n |un| diverge, on ne peut rien conclure surla nature de la série

n un dont il faudra envisager l’étude en ayant recours àdes critères spécifiques qui sont présentés dans le paragraphe suivant.

1.3.1 Generalites

Définition 1.6 La série numérique∑

n un est dite absolument convergentesi la série

n |un| est une série convergente.

Remarques

1. On dit aussi que la série numérique∑

n un converge absolument pour indiquerqu’il s’agit d’une série absolument convergente.

2. Si la suite (un)n est une suite complexe, |un| désigne le module du nombrecomplexe un. Si la suite (un)n est une suite réelle, |un| désigne la valeur absoluedu nombre réel un. Dans les deux cas, la série

n |un| est une série à termesréels positifs.

(28)Voir le théorème 18.2 p. 863 du Cours de Première Année.

(29)Voir le Cours de Première Année, p. 927.

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Page 30: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

30 Séries absolument convergentes

3. La notion d’absolue convergence faisant intervenir des séries à termes positifs,tous les résultats établis dans le paragraphe précédent peuvent (et doivent) êtreutilisés pour montrer qu’une série converge absolument. ⋄On note ℓ1(K) l’ensemble des séries numériques à coefficients dans K abso-lument convergentes. Il s’agit d’un sous-espace vectoriel de l’espace vectorielΣ(K) des séries numériques. Il est non vide car la série nulle est absolumentconvergente. De plus si

n un et∑

n vn sont deux séries numériques absolu-ment convergente et λ, µ deux scalaires alors la série λ

n un + µ∑

n vn dontle terme général est λun + µvn et vérifie :

|λun + µvn| 6 |λ||un| + |µ||vn|.

Or si∑

n un et∑

n vn convergent absolument alors∑

n |un| et∑

n |vn| convergedonc la série de terme général |λ||un|+|µ||vn| aussi. On en déduit que

n |λun+µvn| converge donc que

n λun + µvn qui est absolument convergente appar-tient à ℓ1(K).

Si la série numérique∑

n un est absolument convergente, alors la série∑

n un

converge. Il n’y a toutefois pas de relation directe entre la somme ν de lasérie

n |un| et la somme µ de la série∑

n un. En particulier, on n’a pas|µ| = ν, comme le prouve l’exemple qui suit (il est toutefois facile d’établirque |µ| 6 ν).

Exemple La série de terme général un = (−1)n/n! est une série absolumentconvergente car |un| = 1/n! et on a établi (voir les exemples de la page 8 etl’exercice 1.2) que la série de terme général 1/n! convergeait. On a

+∞∑

n=0

1

n!= e mais

+∞∑

n=0

(−1)n

n!= 1/e.

Exercice 1.7

1 - On appelle série trigonométrique toute série dont le terme général est dela forme αneint où (αn)n est une suite réelle ou complexe et t un réel. Donnerune condition nécessaire et suffisante (portant sur la suite (αn)n) pour qu’unesérie trigonométrique soit absolument convergente.

2 - On appelle série alternée une série réelle dont le terme général est de la forme(−1)nεn ou de la forme (−1)n+1εn où (εn)n désigne une suite de réels positifs.Donner une condition nécessaire et suffisante (portant sur la suite (εn)n) pourqu’une série alternée soit absolument convergente. ⋄

Théorème 1.3 Toute série numérique absolument convergente est une sérieconvergente.

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Page 31: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 31

Démonstration Par définition, la série numérique∑

n un est absolumentconvergente si la série

n |un| converge. Mais si la série∑

n |un| converge,elle satisfait au critère de Cauchy (voir le théorème 1.1) :

∀ε ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀(n, m) ∈ N

2

(

n > m > N ⇒∣∣∣∣∣

n∑

k=m

|uk|∣∣∣∣∣6 ε

)

. (7)

Pour tous entiers m et n tels que n > m on a par l’inégalité triangulaire∣∣∣∣∣

n∑

k=m

uk

∣∣∣∣∣6

n∑

k=m

|uk| =

∣∣∣∣∣

n∑

k=m

|uk|∣∣∣∣∣.

On déduit alors de l’assertion (7) que

∀ε ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀(n, m) ∈ N

2

(

n > m > N ⇒∣∣∣∣∣

n∑

k=m

uk

∣∣∣∣∣6 ε

)

.

Ceci signifie que la série numérique∑

n un satisfait au critère de Cauchy. Elleest donc convergente. �

La réciproque du théorème 1.3 est fausse : une série numérique peut êtreconvergente sans être absolument convergente. Par exemple, on a montréque la série

n>1(−1)n

n convergeait (vers − ln(2)) mais que la série∑

n>11n

divergeait.

Remarque Si la série∑

n |un| diverge grossièrement (i.e. si la suite (|un|)n

ne converge pas vers 0) alors la série∑

n un diverge également grossièrement.Ceci résulte du fait que la suite (|un|)n converge vers 0 si et seulement si lasuite (un)n converge vers 0. ⋄

Exercice 1.8 Étudier la convergence et la convergence absolue des sériesdont le terme général est :

1 - un =(−1)n

n2 + sin(n2)2 - un =

cos(√

n)

n√

n3 - un =

(1 + i)n

(n2 + 1)

1.3.2 Regles de Cauchy et de D’Alembert

Proposition 1.10 (Règle de Cauchy)

Soit (un)n une suite numérique telle que la suite de terme général n√

|un|converge ou tend vers +∞. On note ℓ = lim

n→+∞n√

|un| (ℓ ∈ R+ ∪ {+∞}).

– Si ℓ < 1 alors la série∑

n un converge absolument.

– Si ℓ > 1 (en particulier si ℓ = +∞) alors la série∑

n un diverge grossiè-rement.

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Page 32: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

32 Séries absolument convergentes

Démonstration D Supposons que la suite (vn)n de terme général vn = n√

|un|converge vers un réel ℓ ∈ [0, 1[. Notons ε le réel strictement positif 1

2 (1 − ℓ).

Puisque la suite (vn)n converge vers ℓ, on a(30)

:

∃N ∈ N ∀n ∈ N

(

n > N ⇒∣∣∣

n√

|un| − ℓ∣∣∣ 6 ε

)

.

Pour n > N , on a −ε 6 n√

|un| − ℓ 6 ε, c’est-à-dire 0 6 n√

|un| 6 ε + ℓ =12 (1 + ℓ). On en déduit que |un| 6

(12 (1 + ℓ)

)npour tout n > N . Comme

12 (1 + ℓ) < 1, la série géométrique

n

(12 (1 + ℓ)

)nconverge. On déduit des

critères de comparaison (voir le théorème 1.2) que la série∑

n |un| converge.On a donc montré que si ℓ < 1 alors la série

n un convergeait absolument.

D Supposons que la suite (vn)n de terme général vn = n√

|un| converge vers unréel ℓ > 1. Notons ε le réel strictement positif 1

2 (ℓ − 1). Puisque la suite (vn)n

converge vers ℓ, on a(30)

:

∃N ∈ N ∀n ∈ N

(

n > N ⇒∣∣∣

n√

|un| − ℓ∣∣∣ 6 ε

)

.

On en déduit que pour tout entier n > N ,

12 (ℓ + 1) = ℓ − ε 6

n√

|un| 6 ℓ + ε = 12 (3ℓ − 1)

ce qui implique que |un| >(

12 (1 + ℓ)

)n. Comme 1

2 (ℓ + 1) > 1, la suite determe général |un| tend vers +∞. et par conséquent la série

n |un| divergegrossièrement. On en conclut la série

n un diverge grossièrement.

D Le cas où la suite (vn)n de terme général vn = n√

|un| tend vers +∞ se traiteavec des arguments analogues, voir l’exercice 1.9. �

Exercice 1.9 Soit (un)n une suite numérique telle que la suite de terme gé-néral n

|un| tend vers +∞. Montrer que la série∑

n un diverge grossièrement.

Si la suite de terme général n√

|un| converge vers 1 ou si cette suite n’a pasde limite, on ne peut pas conclure à la convergence ou à la divergence de lasérie

n un. Par exemple, pour les séries de Riemann∑

n>1 n−α (α ∈ R)on a

n√

|un| =n√

n−α = n−αn = e−

αn ln(n)

et cette quantité tend vers 1 quand n tend vers l’infini. Or on sait que siα > 1 la série converge et que si α 6 1, elle diverge.

Application : convergence des séries de Bertrand

Le critère de Cauchy permet de déterminer la nature des séries de Bertrand∑

n>21

nα ln(n)β en fonction des valeurs de α et β. Nous avons montré à la page 17

(30)Voir la définition 5.1 p. 168 du Cours de Première Année.

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Page 33: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 33

que si (un)n désignait une suite décroissante de réels strictement positifs et aun entier strictement plus grand que 1 alors les séries de terme général un etvn = anuan étaient de même nature.

Posons un = n−α ln(n)−β . Pour α > 0 ou si α = 0 pour β > 0 la suite (un)n estbien une suite décroissante de réels strictement positifs. Dans tous les autrescas, comme (un)n ne converge pas vers 0, il y a divergence grossière de la série∑

n un. Pour tout entier naturel n, on a

vn =an

anα ln(an)β=( a

)n 1

nβ ln(a)β.

Étudions la nature de la série∑

n vn en ayant recours au critère de Cauchy :

n√

vn = a1−α (n ln(a))−βn = a1−α exp

(

−βn ln(n ln(a))

)

.

On en déduit que ℓ = limn→+∞ n√

vn = a1−α. Cette limite est strictementinférieure à 1 si et seulement si α > 1 et elle est strictement supérieure à 1 siet seulement si α < 1. On en conclut que la série de Bertrand

n>21

nα ln(n)β

converge si α > 1 et diverge si α < 1 et ceci quelque soit la valeur de β.

Exercice 1.10 En utilisant le critère de Cauchy, déterminer la nature de lasérie

n un de terme général :

1 - un =

(n

2n + 1

) 12n

2 - un =(n + i)n

n2n3 - un =

(sh(

1n

))n2

D’Alembert, Jean Le Rond (1717, Paris - 1783, Paris).

Fils naturel du chevalier Destouches et de Mme de Tencin quil’abandonna dès sa naissance sur les marches de l’église Saint-Jean Le Rond à Paris dont on lui donna le nom. Géomètreet mathématicien, il entra à l’Académie des Sciences à 23ans. Ami de Diderot (avec qui il co-dirigea l’Encyclopédie)et de Voltaire, D’Alembert fut l’un des mathématiciens etphysiciens les plus renommés du XVIIIe siècle. Il fut élu le 28novembre 1754 à l’Académie Française

(31)

.

(31)http ://www.academie-francaise.fr/immortels/

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Page 34: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

34 Séries absolument convergentes

Proposition 1.11 (Règle de D’Alembert)

Soit (un)n une suite numérique dont les termes sont tous non nuls à par-tir d’un certain rang. On suppose que la suite de terme général |un+1/un|converge ou tend vers +∞ et on note ℓ = lim

n→+∞

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣(ℓ ∈ R+ ∪ {+∞}).

– Si ℓ < 1 alors la série∑

n un converge absolument.

– Si ℓ > 1 (en particulier si ℓ = +∞) alors la série∑

n un diverge grossiè-rement.

Démonstration D Supposons que la suite (vn)n de terme généralvn = |un+1/un| converge vers un réel ℓ ∈ [0, 1[. Notons ε le réel strictement

positif égal à 12 (1 − ℓ). Puisque la suite (vn)n converge vers ℓ, on a

(32)

:

∃N ∈ N ∀n ∈ N

(

n > N ⇒∣∣∣∣

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣− ℓ

∣∣∣∣6 ε

)

.

On en déduit que pour tout entier n avec n > N ,

0 6

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣6 ε + ℓ = 1

2 (1 + ℓ).

On a donc |un+1| 6 12 (1 + ℓ)|un| pour tout n > N . On montre par récurrence

que ceci implique que

|un+1| 6(

12 (1 + ℓ)

)n−N |uN | = K(

12 (1 + ℓ)

)n

où Kdéf.=(

12 (1 + ℓ)

)NuN . La série de terme général

(12 (1 + ℓ)

)nconverge car

il s’agit d’une série géométrique de raison r = 12 (1 + ℓ) < 1. On déduit des

critères de comparaison pour les séries à termes positifs (voir le théorème 1.2)que la série

n |un| converge. On a donc montré que pour ℓ < 1 la série∑

n un

convergeait absolument.

D Supposons que la suite (vn)n de terme général vn = |un+1/un| converge versun réel ℓ > 1. Notons ε le réel strictement positif égal à 1

2 (ℓ − 1). Puisque lasuite (vn)n converge vers ℓ, on a :

∃N ∈ N ∀n ∈ N

(

n > N ⇒∣∣∣∣

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣− ℓ

∣∣∣∣6 ε

)

.

On en déduit que pour tout entier n > N on a

12 (ℓ + 1) = ℓ − ε 6

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣6 ℓ + ε = 1

2 (3ℓ − 1).

(32)Voir la définition 5.1 p. 168 du Cours de Première Année.

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Page 35: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 35

Comme 12 (ℓ + 1) > 1, la suite de terme général |un| est strictement croissante

à partir du rang N . Puisqu’elle est à termes positifs, elle ne tend pas vers 0.Cela signifie que la série

n |un| diverge grossièrement et par conséquent quela série

n un diverge aussi grossièrement.

D Le cas où la suite (vn)n de terme général vn = |un+1/un| tend vers +∞ setraite avec des arguments analogues, voir l’exercice 1.11. �

Exercice 1.11 Soit (un)n une suite numérique dont les termes sont tousnon nuls à partir d’un certain rang. On suppose que la suite de terme général|un+1/un| tend vers +∞. Montrer que la série

n un diverge grossièrement. ⋄

Exemple Pour tout z ∈ C fixé, la série numérique∑

nzn

n! converge absolumentcar ∣

∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣=

|z|n + 1

tend vers 0 quand n tend vers +∞.

Si la suite de terme général |un+1/un| converge vers 1 ou si cette suite n’apas de limite, on ne peut pas conclure à la convergence ou à la divergence dela série

n un. Par exemple, pour les séries de Riemann∑

n>1 n−α (α ∈ R)on a ∣

∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣=

(n + 1)−α

n−α=

(

1 +1

n

)−α

et cette quantité tend vers 1 quand n tend vers l’infini. Or on sait que siα > 1 la série converge et que si α 6 1, elle diverge.

Exercice 1.12 En utilisant la règle de D’Alembert, déterminer la nature dela série

n un de terme général :

1 - un =n!

nn2 - un =

(n!)2

n23 - un =

2n + 1√2n+1

Remarque On peut démontrer (voir l’exercice 1.13) qu’étant donnée une suitenumérique (un)n, si la suite de terme général |un+1/un| tend versℓ ∈ R+ ∪ {+∞} alors la suite de terme général n

|un| tend aussi vers ℓ. Larègle de Cauchy s’applique donc dans tous les cas où la règle de D’Alemberts’applique. Toutefois selon l’expression du terme général de la série, la règle deD’Alembert peut être plus simple à appliquer que la règle de Cauchy (ce quijustifie l’énoncé des deux règles). Par ailleurs, il résulte de cette propriété quesi les limites correspondant aux règles de Cauchy et de D’Alembert existent,elles sont nécessairement égales. En particulier, si l’on a obtenu pour limite 1avec l’une des deux règles (et que l’on ne peut donc pas conclure), il est inutiled’essayer d’utiliser la seconde règle : elle ne permettra pas, elle non plus, deconclure. ⋄

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Page 36: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

36 Séries absolument convergentes

Exemple Intéressons-nous à la suite de terme général un =n(−1)n

2n. Pour tout

n ∈ N∗ on a

∣∣∣∣

un+1

un

∣∣∣∣=

1

2

(n + 1)(−1)n+1

n(−1)n =

1

2n(n + 1)si n est pair

12n(n + 1) si n est impair

.

La suite de terme général |un+1/un| n’a pas de limite. La règle de D’Alembertne permet donc pas de déterminer la nature de cette série. Intéressons-nous àprésent à la règle de Cauchy. Pour tout n ∈ N∗ on a

n√

un =

{12

n√

n si n est pair

12

n√

1/n si n est impair.

Comme limn→+∞

n√

n = 1 et limn→+∞

n√

1/n = 1, la suite de terme général n√

un

converge(33)

vers 12 . La règle de Cauchy permet de conclure que la série

n un

converge absolument.

Exercice 1.13 Soit (un)n une suite de réels strictement positifs tels que lasuite de terme général un+1

unconverge vers un réel strictement positif ℓ.

1 - a) Montrer que pour tout réel strictement positif ε, il existe un entier N1

tel que pour tout entier n > N1 on ait : ℓ − ε2 6

un+1

un6 ℓ + ε

2 .

b) En déduire que pour tout entier n > N1 on a

(

ℓ − ε

2

)n−N

uN1 6 un 6

(

ℓ +ε

2

)n−N

uN1 .

2 - a) Montrer qu’il existe un entier N2 tel que pour tout entier n > N2 on ait

(

ℓ − ε

2

)1−N1n

n√

uN1 > ℓ − ε et(

ℓ +ε

2

)1−N1n

n√

uN1 6 ℓ + ε.

O(n pourra s’intéresser à la convergence des suites (vn)n et (wn)n de terme

général vn =(ℓ − ε

2

)1−N1n n

√uN1 et wn =

(ℓ + ε

2

)1−N1n n

√uN1 .)

b) En déduire que la suite de terme général n√

un converge vers ℓ.

On adaptera facilement le raisonnement afin de montrer que le résultat estencore vrai si ℓ = 0 ou si ℓ = +∞. ⋄

(33)Voir la proposition 5.19 p. 189 du Cours de Première Année : une condition nécessaire etsuffisante pour qu’une suite converge vers le réel ℓ est que la suite extraite correspondantaux termes d’indices pairs et la suite extraite correspondant au termes d’indices impairsconvergent toutes les deux vers ℓ.

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Page 37: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 37

1.3.3 Produit de Cauchy de deux series

Nous avons vu que l’ensemble Σ(K) des séries numériques à valeurs dans K munides lois + (somme de deux séries) et · (produit d’une série par un scalaire) avaitune structure d’espace vectoriel.

On peut se demander s’il est possible de définir une loi produit × sur Σ(K)de sorte que Σ(K) muni des lois + et × ait une structure d’anneau commu-tatif

(34)

. On pourra vérifier que définir le produit de deux séries de « manièrenaïve » comme la série dont le terme général est le produit des termes géné-raux des deux séries ne permet pas d’obtenir pour (Σ(K), +,×) une structured’anneau commutatif. À l’instar de ce qui est fait avec les polynômes

(35)

ou lesmatrices

(36)

, on munit Σ(K) d’un « produit de Cauchy ».

Définition 1.7 (Produit de Cauchy de deux séries)

Soient∑

n un et∑

n vn deux séries numériques. On appelle produit (de Cau-chy) des séries

n un et∑

n vn, la série∑

n wn dont le terme général est :

wn =n∑

k=0

uk vn−k.

On vérifie que (Σ(K), +,×) a bien une structure d’anneau commutatif.

– La loi + est associative et commutative ; elle possède pour élément neutrela série nulle et tout série

n un possède un symétrique pour cette loi quiest la série de terme général −un.

– La loi × est associative, commutative et distributive sur la loi + ; elle possèdepour élément neutre la série

n en où e0 = 1 et pour tout n ∈ N∗, en = 0.

Toutefois, (Σ(K), +,×) n’est pas un corps car les séries dont le premier termeest nul n’ont pas de symétrique pour la loi × (on a w0 = u0 v0 donc si u0 = 0,il n’existe pas de scalaire v0 tel que u0 v0 = e0 = 1).

Le produit de Cauchy de deux séries convergentes n’est pas nécessairement unesérie convergente. Nous avons par exemple établi p. 9 que la série de termegénéral un = (−1)n

√n

était convergente. Déterminons la série∑

n wn produit de∑

n>1 un par elle-même. On pose u0 = 0 de sorte que :

wn =

n∑

k=0

uk un−k = (−1)nn−1∑

k=1

1√

k(n − k)︸ ︷︷ ︸

= Sn

.

(34)Voir la définition 2.36 p. 64 du Cours de Première Année.

(35)Voir la définition 6.7 p. 221 du Cours de Première Année.

(36)Voir la définition 10.8 p. 398 du Cours de Première Année.

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Page 38: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

38 Séries absolument convergentes

L’étude de la fonction x 7→ 1√x(n−x)

montre que les n termes de la somme Sn

sont tous supérieurs à 12n . On a donc Sn > n × 1

2n = 12 . On en déduit que

la suite (Sn)n ne converge pas vers 0 et par conséquent que la série de termegénéral wn diverge grossièrement.

Le résultat suivant donne une condition suffisante pour que le produit de deuxséries convergentes soit une série convergente.

Proposition 1.12 Si∑

n un et∑

n vn sont deux séries numériques abso-lument convergentes alors la série

n wn produit de∑

n un et∑

n vn estabsolument convergente. De plus,

+∞∑

n=0

wn =

(+∞∑

n=0

un

) (+∞∑

n=0

vn

)

.

Démonstration Ce résultat est admis. On pourra consulter par exemple J.

Lelong-Ferrand, J.M. Arnaudiès, Cours de Mathématiques, p. 263 dutome 2 pour une démonstration. �

Exemples

1. La série∑

n 1/n! est une série absolument convergente dont la somme est e.Le produit de cette série avec elle même a pour terme général :

wn =

n∑

k=0

1

k!(n − k)!=

1

n!

n∑

k=0

Ckn =

2n

n!.

On déduit de la proposition 1.12 que la série∑

n2n

n! est absolument convergenteet de somme e2.

2. Pour tout z ∈ C avec |z| < 1 la série géométrique de raison z est absolumentconvergente de somme 1/(1 − z). Le produit de cette série avec elle même apour terme général

wn =

n∑

k=0

zk zn−k = (n + 1)zn.

On déduit de la proposition 1.12 que la série∑

n(n + 1)zn est absolumentconvergente et de somme 1/(1 − z)2.

Remarque On a également le résultat suivant : si∑

n un est une série nu-mérique convergente et

n vn est une série numérique absolument convergentealors la série

n wn produit de∑

n un et∑

n vn est convergente. ⋄

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Page 39: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 39

Calcul du produit de Cauchy de deux series avec maple

Il existe une bibliothèque de maple dédiée au calcul avec les séries. Il s’agitde la bibliothèque powseries. Pour illustrer l’utilisation de cette bibliothèque,vérifions le résultat du calcul du produit de la série

n un de terme généralun = 1/n! par elle même effectué dans l’exemple précédent. La commandepowcreate est utilisée pour définir les coefficients de la séries ; la commandemultiply pour effectuer le produit de Cauchy de deux séries.

> with(powseries):

> powcreate(u(n)=1/n!,u(0)=1):

> w:=multiply(u,u):

> seq(w(n),n=0..10);

1, 2, 2,4

3,

2

3,

4

15,

4

45,

8

315,

2

315,

4

2835,

4

14175

> seq(2^n/n!,n=0..10);

1, 2, 2,4

3,

2

3,

4

15,

4

45,

8

315,

2

315,

4

2835,

4

14175

Notre résultat semble conforme à celui obtenu par maple.

1.3.4 Groupement de termes et changement de l’ordre des termes

Proposition 1.13 (Groupement de termes)

Soient∑

n un une série numérique, ϕ une application de N dans N strictementcroissante et

n vn la série numérique définie par :

v0 =

ϕ(0)∑

k=0

uk, et vn =

ϕ(n)∑

k=ϕ(n−1)+1

uk pour tout n > 1.

– Si la série∑

n un converge alors la série∑

n vn converge et ces deux sériesont même somme.

– Si la série∑

n un est à termes positifs et si la série∑

n vn converge alorsla série

n un converge et ces deux séries ont même somme.

Démonstration D Soient (Un)n la suite des sommes partielles associée à lasérie

n un et (Vn)n celle associée à la série∑

n vn. Pour tout n ∈ N on a

Vn =

n∑

k=0

vk =

ϕ(n)∑

k=0

uk = Uϕ(n);

la suite (Vn)n est donc une suite extraite de la suite (Un)n. La série∑

n un

converge et admet pour somme µ si et seulement si la suite (Un)n converge

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Page 40: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

40 Séries absolument convergentes

vers µ. Dans ce cas, la suite (Vn)n extraite de la suite (Un)n converge(37)

aussivers µ. La série

n vn est donc une série convergente de somme µ.

D Supposons que la série∑

n un est à termes positifs et que la série∑

n vn

converge et admet pour somme µ. Comme un > 0 pour tout n ∈ N, les suites(Un)n et (Vn)n sont croissantes. On a donc Vn 6 µ pour tout n ∈ N et parailleurs, puisque ϕ est une application de N dans N strictement croissante :ϕ(n) > n. Cela implique que :

∀n ∈ N Un 6 Uϕ(n) = Vn 6 µ.

La suite (Un)n est par conséquent une suite croissante et majorée ; il s’agit donc

d’une suite convergente(38)

. Comme la suite (Vn)n qui est extraite de la suite(Un)n converge vers µ, la suite (Un)n admet pour limite µ. �

Exemples

1. En considérant l’application φ : n ∈ N 7→ 2n+1, on effectue des groupementsde 2 termes : pour tout n ∈ N, vn = u2n + u2n+1.

2. En considérant l’application φ : n ∈ N 7→ 3n+2, on effectue des groupementsde 3 termes : pour tout n ∈ N, vn = u3n + u3n+1 + u3n+3.

La démonstration de cette proposition indique que si∑

n un est une sérieconvergente alors quelque soit le regroupement de termes qui est opéré, la sérieainsi obtenue sera convergente (et de même somme que

n un). Par contre,une série obtenue par regroupement de termes peut converger alors que la sérieinitiale divergeait ; ceci ne peut avoir lieu que pour des séries qui ne sont pas àtermes positifs (ou plus généralement, de signe constant à partir d’un certainrang).

Le programme maple suivant permet d’explorer le regroupement de termes. Lavariable T représente le nombre de terme regroupés, u définit la série numériqueconsidérée et v désigne la série numérique issue de u par le regroupement determes.

> T:=3: phi := n-> T*n+1;

> u := n-> (-1)^n/n: n0:=1:

> v := n-> simplify(sum(u(k),k=phi(n-1)..phi(n)-1),assume=integer):

> sum(u(n),n=n0..+infinity);evalf(%);

> sum(v(n),n=n0..+infinity);evalf(%);

L’instruction suivante :> seq([seq(k,k=phi(n-1)..phi(n)-1)],n=n0..10);

(37)Voir la proposition 5.18 p. 187 du Cours de Première Année.

(38)Voir la proposition 5.16 p. 183 du Cours de Première Année.

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Page 41: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 41

permet par ailleurs de visualiser les groupements de termes qui sont effectués.

En regroupant convenablement les termes de certaines séries divergentes(qui ne sont pas à termes positifs à partir d’un certain rang) on peut obtenirune série numérique

n vn qui est convergente. C’est le cas par exemple dela série de terme général un = (−1)n qui diverge grossièrement alors que lasérie obtenue en regroupant deux termes successifs est la série nulle qui estconvergente.

Proposition 1.14 (Changement de l’ordre des termes)

Soient∑

n un une série absolument convergente et σ une permutation de N

(i.e. une bijection de N dans N). La série∑

n uσ(n) est une série absolumentconvergente qui a même somme que la série

n un.

Démonstration Soient (Sn)n la suite des sommes partielles associée à la série∑

n |un| et (Tn)n celle associée à la série∑

n |uσ(n)|. Les suites (Sn)n et (Tn)n

sont des suites croissantes et à termes positifs. Pour tout n ∈ N on a

Tn =

n∑

k=0

|uσ(k)| 6

mn∑

k=0

|uk| = Smn ,

où mn = supk∈{0,...,n} σ(k). Puisque la série∑

n un est absolument convergente,la série

n |un| est convergente et par conséquent la suite (Sn)n converge versun réel positif S. Cette suite (Sn)n étant croissante, elle est majorée par S. Onen déduit que pour tout n ∈ N on a Tn 6 S. La suite (Tn)n est donc une suite

croissante et majorée ; il s’agit donc d’une suite convergente(39)

. On en conclutque la série

n |uσ(n)| est une série convergente et par conséquent que la série∑

n uσ(n) est une série absolument convergente.

On admet que les séries∑

n uσ(n) et∑

n un ont même somme. �

Le programme maple suivant permet d’explorer l’effet d’un réarrangement destermes d’une série alternée (

n un avec un = (−1)nαn où (αn)n est une suitede réels positifs) sur la somme de cette série. On réarrange les termes de lamanière suivante : un terme négatif de la série est suivi des T termes positifssuivants.

> alpha:= n-> [à définir]: u:= n-> (-1)^n*alpha(n):

> T:=3:

> sum(u(n),n=1..+infinity);

> v:= n -> -alpha(2*n+1) + sum(alpha(2*(T*n+1)+2*k),k=0..T-1):

> sum(v(n),n=0..+infinity);

(39)Voir la proposition 5.16 p. 183 du Cours de Première Année.

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Page 42: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

42 Séries absolument convergentes

Si on considère la série alternée∑

n>1(−1)n

n2 , on peut observer que la valeurde la somme reste identique quelque soit la valeur de T (pour laquelle maple

parvient à calculer la somme...).

Par contre, si on prend la série harmonique alternée∑

n>1(−1)n

n et T = 2, lespremiers termes de la série réarrangée sont :

> v:= n -> -alpha(2*n+1) , seq(alpha(2*(T*n+1)+2*k),k=0..T-1):

> seq(v(n),n=0..5);

−1,1

2,1

4,−1

3,1

6,1

8,−1

5,

1

10,

1

12,−1

7,

1

14,

1

16,−1

9,

1

18,

1

20,− 1

11,

1

22,

1

24

et la somme de la série∑

n vn réarrangée est − 12 ln(2).

En choisissant T = 3 on obtient pour somme − ln(2)+ 12 ln(3) et en choisissant

T = 4, la somme est nulle.

En changeant l’ordre des termes d’une série convergente qui n’est pas ab-solument convergente, on change en général la valeur de la somme de cettesérie. Le cas de la série harmonique alternée est intéressante à ce point :quelque soit le réel que l’on se fixe, on peut trouver un réarrangement deses termes de sorte que la somme de la série réarrangée lui soit égal.

Rearrangement des termes de la serie harmonique alternee

Nous allons voir que quelque soit le réel ℓ positif que l’on se fixe (on adaptera ladémarche présentée dans ce qui suit pour le cas d’un réel ℓ qui serait négatif),on peut trouver un réarrangement des termes de la série harmonique alternée∑

n>1 un où un = (−1)n

n de sorte que la somme de la série réarrangée soit égaleà ℓ.

Considérons les séries∑

n>1 vn de terme général vn = 12n et

n>1 wn de termegénéral wn = − 1

2n−1 : elles divergent toutes les deux et ont pour sommesrespectives +∞ et −∞. La suite des sommes partielles (Vn)n associée à la série∑

n>1 vn tend donc vers +∞ et par conséquent pour tout p ∈ N fixé, la suitede terme général Vn − Vp tend aussi vers +∞ quand n tend vers +∞. Sous laforme d’une assertion quantifiée cela se traduit par :

∀p ∈ N ∀κ ∈ R ∃N ∈ N ∀n ∈ N (n > N ⇒n∑

k=p+1

vk > κ),

ce qui implique que :

∀p ∈ N ∀κ ∈ R ∃N ∈ N

(

N > p etN∑

k=p+1

vk > κ)

. (8)

De même, la suite des sommes partielles (Wn)n associée à la série∑

n>1 wn

tend vers −∞ et par conséquent pour tout p ∈ N fixé, la suite de terme général

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Page 43: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 43

Wn − Wp tend aussi vers −∞ quand n tend vers +∞. Sous la forme d’uneassertion quantifiée cela se traduit par :

∀p ∈ N ∀κ′ ∈ R ∃N ′ ∈ N ∀n ∈ N (n > N ′ ⇒n∑

k=p+1

wk 6 κ′)

ce qui implique que :

∀p ∈ N ∀κ′ ∈ R ∃N ′ ∈ N

(

N ′ > p etN ′

k=p+1

wk 6 κ′)

. (9)

Nous construisons une série∑

n uσ(n) correspondant à un réarrangement destermes de la série harmonique alternée selon l’approche suivante :

– on détermine le plus petit entier N1 tel que VN1 > ℓ et on prend pourpremiers termes de la série : v1, . . . , vN1 ;

– on détermine le plus petit entier N ′1 tel que VN1 + WN ′

16 ℓ et on prend

pour termes suivants de la série : w1, . . . , wN ′

1;

– on détermine le plus petit entier N2 tel que WN ′

1+ VN2 > ℓ et on prend

pour termes suivants de la série : vN1+1, . . . , vN2 ;

– on détermine le plus petit entier N ′2 tel que VN2 + WN ′

26 ℓ et on prend

pour termes suivants de la série : wN ′

1+1, . . . , wN ′

2;

– on poursuit ainsi la construction de la série∑

n uσ(n).

Le processus de réarrangement des termes peut être justifié comme suit.

– D’après l’assertion (8) (on prend κ = ℓ et p = 0), il existe un entier N telque

∑Nk=1 vk > ℓ. Désignons par N1 le plus petit des entiers N satisfaisant

à la propriété et réarrangeons les termes de la façon suivante :

uσ(1) = v1 = 12 , . . . , uσ(N1) = vN1 = 1

2N1.

Par construction, en posant M1 = N1, on a

Uσ(M1) = Uσ(N1) =

N1∑

k=1

uσ(k) =

N1∑

k=1

vk = VN1 > ℓ.

– D’après l’assertion (9) (on prend κ = ℓ − Uσ(M1) et p = 0), il existe un

entier N ′ tel que∑N ′

k=1 wk 6 ℓ − Uσ(M1). Désignons par N ′1 le plus petit

des entiers N ′ satisfaisant à la propriété et réarrangeons les termes de lafaçon suivante : uσ(N1+1) = w1 = −1, . . . , uσ(N1+N ′

1)= wN ′

1= − 1

2N ′

1−1 . Par

construction, en posant M ′1 = N1 + N ′

1, on a

Uσ(M ′

1) =

M ′

1∑

k=1

uσ(k) =

N1∑

k=1

uσ(k) +

N1+N ′

1∑

k=N1+1

uσ(k) = Uσ(M1) +

N ′

1∑

k=1

wk 6 ℓ.

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Page 44: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

44 Séries absolument convergentes

À l’étape i, à partir des valeurs obtenues à l’étape i−1, on poursuit le processusde construction de la manière suivante.

– D’après l’assertion (8) (on prend κ = ℓ − Uσ(M ′

i−1) et p = Ni−1), il existe

un entier N > Ni−1 tel que∑N

k=Ni−1+1 vk > ℓ − Uσ(M ′

i−1). Désignons parNi le plus petit des entiers N satisfaisant à la propriété et réarrangeons lestermes de la façon suivante :

uσ(M ′

i−1+1) = vNi−1+1 = 12(Ni−1+1) , . . . , uσ(M ′

i−1+Ni−Ni−1) = vNi = 12Ni

.

Par construction, en posant Mi = M ′i−1 + Ni − Ni−1, on a

Uσ(Mi) =

M ′

i−1∑

k=1

uσ(k) +

M ′

i−1+Ni−Ni−1∑

k=M ′

i−1+1

uσ(k) = Uσ(M ′

i−1) +

Ni∑

k=Ni−1+1

vk > ℓ.

– D’après l’assertion (9) (on prend κ = ℓ − Uσ(Mi) et p = N ′i−1), il existe un

entier N ′ > N ′i−1 tel que

∑N ′

k=N ′

i−1+1 wk 6 ℓ − Uσ(Mi). Désignons par N ′i

le plus petit des entiers N ′ satisfaisant à la propriété et réarrangeons lestermes de la façon suivante :

uσ(Mi+1) = wN ′

i−1+1 = − 12(N ′

i−1+1)−1 , . . . , uσ(Mi+N ′

i−N ′

i−1)= wN ′

i= − 1

2N ′

i−1 .

Par construction, en posant M ′i = Mi + N ′

i − N ′i−1, on a

Uσ(M ′

i)=

M ′

i∑

k=1

uσ(k) =

Mi∑

k=1

uσ(k)+

Mi+N ′

i−N ′

i−1∑

k=Mi+1

uσ(k) = Uσ(Mi)+

N ′

i∑

k=N ′

i−1+1

wk 6 ℓ.

On peut montrer que les suites (Uσ(Mi))i et (Uσ(M ′

i))i convergent toutes les

deux vers ℓ, la suite (Uσ(Mi))i par valeurs supérieures et la suite (Uσ(M ′

i))i par

valeurs inférieures. La suite des sommes partielles (Uσ(n))n associée à la série∑

n uσ(n) converge également vers ℓ puisque pour tout entier n on peut trouverun entier i tel que Uσ(M ′

i )6 Uσ(n) 6 Uσ(Mi).

La procédure maple suivante permet de construire la suite réarrangée en dé-terminant l’entier N tel que

∑Nk=n0

vk soit supérieur (cas où la variable symb

vaut ’Sup’) ou inférieur (cas où la variable symb vaut ’Inf’) à la valeur contenuedans la variable val.

findN := proc(n0,a,val,symb)

local S,k:

S := 0:

if (symb=’Sup’) then

for k from n0 while is(S<val) do

S := S + a(k):

end:

elif(symb=’Inf’) then

for k from n0 while is(S>val) do

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Page 45: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 45

S := S + a(k):

end:

else error "invalid symbol"

end if;

k-1:

end proc:

On peut alors obtenir les premiers termes de la suite réarrangée qui a poursomme ℓ de la manière suivante (la variable ell contient la valeur de ℓ et lavariable Nmax donne le nombre d’itération de l’algorithme de constuction).

> v := n-> 1/(2*n): w := n-> -1/(2*n-1):

> ell := 1/Pi: Nmax := 20:

Initialisation

> Nv[0]:=0: U_sv[0]:=0: Nw[0]:=0: U_sw[0]:=0:

Calcul des deux suites partielles

> for n from 1 to Nmax do

Nv[n]:=findN(Nv[n-1]+1,v,ell-U_sw[n-1],’Sup’);

U_sv[n]:= U_sw[n-1]+sum(v(k),k=Nv[n-1]+1..Nv[n]);

Nw[n]:=findN(Nw[n-1]+1,w,ell-U_sv[n],’Inf’);

U_sw[n]:=U_sv[n]+sum(w(k),k=Nw[n-1]+1..Nw[n]);

> end do:

La suite réarrangée

> ur:=[seq(v(k),k=1..Nv[1]),seq(w(k),k=1..Nw[1])]:

> for n from 2 to Nmax do

ur:=[op(ur),seq(v(k),k=Nv[n-1]+1..Nv[n]),

seq(w(k),k=Nw[n-1]+1..Nw[n])]:

end:

La suite des sommes partielles réarangée

> Sr[1]:=ur[1]:

> for n from 2 to nops(ur) do

Sr[n]:=Sr[n-1]+ur[n]:

> end:

On peut visualiser graphiquement la nouvelle série réarrangée et la suite dessommes partielles associée à la série réarrangée pour constater que le termegénéral de la série tend bien vers 0 et que la suite des sommes partielles tendbien vers le réel ℓ qui a été fixé.

> plot([seq([n,ur[n]],n=1..nops(ur))],x=1..50,y=-3*ell..3*ell);

> F0:=plot(ell,x=0..nops(ur)):

> F1:=plot([seq([n,Sr[n]],n=1..nops(ur))],style=point):

> plots[display]([F0,F1]);

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Page 46: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

46 Séries semi-convergentes

–0.8

–0.6

–0.4

–0.2

0

0.2

0.4

0.6

0.8

y

10 20 30 40 50

x

–0.4

–0.2

0

0.2

0.4

20 40 60 80 100 120 140 160

x

Fig. 1 À gauche les termes de la nouvelle série réarrangée et à droite les termes dela suite des sommes partielles convergeant vers ℓ = 1/π.

1.4 Series semi-convergentes

Comme cela a été indiqué au paragraphe précédent, pour étudier la natured’une série numérique

n un dont les termes ne sont pas de signe constant, ilconvient dans un premier temps de s’intéresser à la série numérique

n |un|.Cette série est à termes positifs et les critères pour les séries à termes positifspermettent d’en étudier la nature. Nous avons montré que si la série

n |un|convergeait alors la série

n un convergeait aussi mais que si la série∑

n un

divergeait aucune conclusion n’était possible sur la nature de la série∑

n un.Dans ce paragraphe nous allons présenter des résultats permettant d’étudier lanature des séries non absolument convergentes.

1.4.1 Definition

Définition 1.8 Une série est dite semi-convergente si elle est convergentesans être absolument convergente.

Exemple La série harmonique alternée∑

n>1(−1)n

n est une série qui est semi-convergente. Elle converge et sa somme vaut − ln(2) mais elle ne converge pasabsolument car |(−1)n/n| = 1/n et la série harmonique

n>11n diverge.

Il existe deux familles de séries qui relèvent des séries semi-convergentes : lesséries alternées et les séries trigonométriques. Dans les paragraphes qui suiventnous allons étudier ces deux types de séries et donner des critères permettantd’établir leur convergence. Les résultats pour la semi-convergence de ces sériessont des cas particuliers d’un résultat connu sous le nom de règle d’Abel quiassure la semi-convergence d’une classe plus grande de séries. Nous étudieronsla semi-convergence des séries alternées de manière directe sans avoir recoursau théorème d’Abel en utilisant les propriétés des suites adjacentes. La semi-convergence des séries trigonométriques sera elle établie par l’utilisation duthéorème d’Abel.

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Page 47: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 47

1.4.2 Series alternees

Définition 1.9 On appelle série alternée une série numérique dont le termegénéral est de la forme (−1)nαn ou (−1)n+1αn, où (αn)n désigne une suitede réels positifs.

Remarques

1. Si la suite (αn)n ne tend pas vers 0, les séries alternées∑

n(−1)nαn et∑

n(−1)n+1αn divergent grossièrement.

2. Pour tout entier n on a∑

n(−1)n+1αn = −∑n(−1)nαn. D’après la proposi-tion 1.3 les deux séries

n(−1)nαn et∑

n(−1)n+1αn sont de même nature (etdans le cas où elles convergent leur somme est opposée). Nous nous contenteronsdans ce qui suit de l’étude des propriétés de la série

n(−1)nαn. ⋄

Exemple La série harmonique alternée∑

n>1(−1)n

n est une série alternée.

Théorème 1.4 (Critère spécial pour les séries alternées)

Si la suite (αn)n est une suite de réels positifs, décroissante et convergeantvers 0 alors la série alternée

n(−1)nαn converge vers un réel U qui vérifiepour tout entier n

U2n+1 6 U 6 U2n

où (Un)n désigne la suite des sommes partielles associée à la série alternée.

Démonstration Soit∑

n un une série de terme général un = (−1)nαn où(αn)n désigne une suite de réels positifs, décroissante et convergeant vers 0.Considérons la suite (Un)n des sommes partielles associée à cette série alternée.Par définition, la série alternée

n un converge si la suite (Un)n converge. Une

condition nécessaire et suffisante(40)

pour que la suite (Un)n converge est quela suite extraite (An)n correspondant à ses termes d’indice pair et que la suiteextraite (Bn)n correspondant à ses termes d’indice impair convergent toutesles deux et admettent la même limite. Nous allons montrer que les suites (An)n

et (Bn)n sont deux suites adjacentes(41)

.

Pour tout n ∈ N on a :

An+1 − An = U2n+2 − U2n =2n+2∑

k=0

uk −2n∑

k=0

uk = u2n+2 + u2n+1

= (−1)2n+2α2n+2 + (−1)2n+1α2n+1 = α2n+2 − α2n+1.

(40)Voir la proposition 5.9 p. 189 du Cours de Première Année.

(41)Voir la définition 5.6 p. 185 du Cours de Première Année.

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Page 48: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

48 Séries semi-convergentes

La suite (αn)n étant une suite décroissante de réels positifs, on a An+1−An 6 0et la suite (An)n est décroissante. Par ailleurs, pour tout n ∈ N on a :

Bn+1 − Bn = U2n+3 − U2n+1 =

2n+3∑

k=0

uk −2n+1∑

k=0

uk = u2n+3 + u2n+2

= (−1)2n+3α2n+3 + (−1)2n+2α2n+2 = α2n+2 − α2n+3.

La suite (αn)n étant une suite décroissante de réels positifs, on a Bn+1−Bn > 0et la suite (Bn)n est croissante.

Pour montrer que les suites (An)n et (Bn)n sont deux suites adjacentes, il resteà vérifier que limn→+∞(An − Bn) = 0. Pour tout n ∈ N on a :

An − Bn = U2n − U2n+1 =

2n∑

k=0

uk −2n+1∑

k=0

uk = −u2n+1 = α2n+1.

La suite (αn)n convergeant vers 0, on a bien limn→+∞(An−Bn) = 0 et les suites(An)n et (Bn)n sont adjacentes. Elles convergent donc et ont même limite

(42)

.Leur limite commune U vérifie

(42)

:

∀n ∈ N Bn = U2n+1 6 U 6 U2n = An.

Exemple La série∑

n>1(−1)n

√n

est une série alternée convergente. En effet la

suite (αn)n de terme général αn = 1√n

est une suite à termes positifs, tendantvers 0 et strictement décroissante puisque pour tout entier n > 1,

αn+1 − αn =1√

n + 1− 1√

n= − 1√

n + 1 +√

n< 0.

Remarque Il est établi à l’exercice 1.7 qu’une condition nécessaire et suffi-sante pour que les séries alternées

n(−1)nαn et∑

n(−1)n+1αn convergentabsolument est que la série

n αn converge. Si la série∑

n αn converge il estdonc inutile et fortement déconseillé d’utiliser le critère spécial pour les sériesalternées. ⋄

La condition de décroissance de la suite (αn)n est essentielle. Par exemple,on ne peut pas appliquer le critère spécial pour les séries alternées à la sériealternée de terme général un = (−1)n

√n+(−1)n .

En effet, la suite (αn)n de terme général αn = 1√n+(−1)n est bien une suite à

termes positifs, tendant vers 0 mais elle n’est pas décroissante. Pour le vérifier,il suffit de remarquer que si n désigne un entier pair supérieur à 2, on a

αn+1

αn=

√n + 1√

n + 1 − 1=

(√

n + 1)(√

n + 1 + 1)

n> 1

(42)Voir le théorème 5.2 p. 185 du Cours de Première Année.

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Page 49: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 49

car√

n + 1 >√

n et√

n + 1 + 1 >√

n. (La suite (αn)n possède une sous-suitecroissante, donc cette suite ne peut pas être décroissante mais il ne faudrait paspenser pour autant que la suite (αn)n est croissante. On peut montrer qu’ellen’est pas monotone en vérifiant que αn+1

αn< 1 si n est un entier impair.)

On peut en fait montrer que la série alternée∑

n>2(−1)n

√n+(−1)n diverge. Consi-

dérons pour cela la série de terme général vn = 1n+(−1)n

√n. Il s’agit d’une série

à termes positifs (car pour tout n ∈ N∗ on a√

n 6 n) qui diverge car vn ∼+∞

1n .

Or, pour tout entier n > 2 on a

vn =(−1)n

√n

− (−1)n

√n + (−1)n

=(−1)n

√n

− un.

Comme on a montré précédemment que la série alternée∑

n>1(−1)n

√n

conver-geait, la série

n>2 un ne peut converger sans quoi d’après la proposition 1.3∑

n>2 vn convergerait.

Exercice 1.14 Déterminer la nature de la série∑

n un de terme général :

1 - un = (−1)n sin(1/n) 2 - un = (−1)n(√

n + 1 −√

n)

3 - un = (−1)n 2n

n!

Proposition 1.15 (Majoration du reste d’une série alternée)

Si la suite (αn)n est une suite de réels positifs, décroissante et convergeantvers 0 alors la série alternée

n(−1)nαn converge et le reste à l’ordre n définipar Rn =

∑+∞k=n+1(−1)nαn vérifie : |Rn| 6 αn+1.

Démonstration Reprenons le cadre de la démonstration du théorème 1.4.Pour tout entier n on a :

|Rn| = |U − Un| 6 |Un+1 − Un|

car

– si n est pair on a Un+1 6 U 6 Un donc 0 6 U − Un+1 6 Un − Un+1

– et si n est impair on a Un 6 U 6 Un+1 donc Un − Un+1 6 U − Un+1 6 0.

Pour conclure, il suffit de remarquer que

|Un+1 − Un| = |(−1)n+1αn+1| = αn+1

car (αn)n est une suite de réels positifs. �

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Page 50: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

50 Séries semi-convergentes

Abel, Niels Henrik (1802, Stavanger - 1829, Froland).

Les travaux de ce mathématicien norvégien, victime de la tu-berculose, ne furent reconnus qu’après sa mort. Il a démon-tré, à l’âge de 19 ans, l’impossibilité de résoudre par radicauxles équations polynomiales de degré 5, ce que son contem-porain Evariste Galois généralisera à tout entier strictementsupérieur à 4. Suite à ces premiers travaux, il a introduitles fonctions elliptiques et plus généralement les intégralesabéliennes. Récemment les intégrales abéliennes ont joué unrôle fondamental dans la démonstration par Andrew Wilesdu théorème de Fermat résolvant par la négative le problèmeposé voici plus de trois cents ans : est-il possible de trouvertrois nombres entiers non nuls x, y et z, tels que xn

+yn

= zn

pour une puissance n supérieure à 2 ?

Le Prix Abel(43)

est une récompense créé en 2002 par le gouvernement norvégien (àl’occasion du bicentenaire de la naissance d’Abel) dans le but de combler l’absenced’un Prix Nobel en mathématiques. (On considérait toutefois en général que lamédaille Fields, d’origine canadienne, en était l’équivalent.) Les lauréats du PrixAbel sont Jean-Pierre Serre (2003), Michael Atiyah et Isadore Singer (2004), PeterLax (2005).

1.4.3 Regle d’Abel

Le critère spécial pour les séries alternées correspond à un cas particulier d’unrésultat plus général connu sous le nom de règle d’Abel.

Théorème 1.5 (Règle d’Abel)

Soient (un)n une suite numérique et (αn)n une suite de réels positifs. Si,

1. la suite (αn)n est décroissante,

2. la suite (αn)n converge vers 0,

3. ∃M ∈ R+ ∀n ∈ N |∑nk=0 uk| 6 M ,

alors la série∑

n αnun converge.

Démonstration Pour montrer que la série de terme général vn = αnun

converge, nous allons montrer qu’elle vérifie le critère de Cauchy (voir le théo-rème 1.1).

Pour tout n ∈ N, on note Un =∑n

k=0 uk ; on a donc un = Sn − Un−1 pourn > 1 et U0 = u0. De plus, d’après les hypothèses du théorème, on a |Un| 6 Mpour tout entier n.

(43)Site officiel : http ://www.abelprisen.no

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Page 51: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 51

Il s’agit de montrer que

∀ǫ ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀(m, n) ∈ N

2(

n > m > N ⇒∣∣∣

n∑

k=m

vk

∣∣∣ 6 ǫ

)

.

Soient ǫ un réel strictement positif et m et n deux entiers tels que n > m. On a

R(m, n)not.=

n∑

k=m

vk =

n∑

k=m

αkuk =

n∑

k=m

αk(Uk − Uk−1)

=n∑

k=m

αkUk −n∑

k=m

αkUk−1 =n∑

k=m

αkUk −n−1∑

k=m−1

αk+1Uk

= αnUn − αmUm−1 +n−1∑

k=m

(αk − αk+1)Uk.

Comme la suite (αn)n est positive et décroissante, on a αk − αk+1 > 0 pourtout k ∈ {m, . . . , n − 1}. On en déduit que

|R(m, n)| 6 αn|Un| + αm|Um−1| +n−1∑

k=m

(αk − αk+1) |Uk|

6 M

(

αn + αm +

n−1∑

k=m

(αk − αk+1)

)

= 2Mαm. (10)

Si M = 0 on a R(m, n) = 0 et le résultat est trivial. On suppose donc queM > 0. La suite (αn)n étant une suite à termes positifs qui tend vers 0, on a :

∀ǫ ∈ R∗+ ∃N ∈ N ∀m ∈ N (m > N ⇒ αm 6 ǫ) .

En particulier, pour ǫ = ǫ2M on obtient :

∃N ∈ N ∀m ∈ N

(

m > N ⇒ αm 6ǫ

2M

)

,

ce qui, compte tenu de la relation (10), implique que pour tous entiers m et ntels que n > m > N on a

|R(m, n)| 6 2Mαm 6 ǫ.

La série de terme général vn = αnun vérifie bien le critère de Cauchy. Parconséquent elle converge. �

1.4.4 Series trigonometriques

Définition 1.10On appelle série trigonométrique toute série dont le termegénéral est de la forme αneint où (αn)n est une suite numérique et t un réel.

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Page 52: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

52 Séries semi-convergentes

On remarquera que si la série∑

n αn converge absolument alors la série tri-gonométrique

n αneint converge elle aussi absolument pour tout t ∈ R car|αneint| = |αn|. Le théorème suivant donne une condition suffisante sur la suite(αn)n permettant de s’assurer de la convergence de la série trigonométrique∑

n αneint. D’un point de vue pratique, il conviendra d’utiliser ce théorèmedans le cas où la convergence de la série trigonométrique ne pourra pas êtreétablie à travers la convergence absolue de la série

n αn.

Théorème 1.6 Si (αn)n est une suite réelle (à termes positifs), décroissanteet convergeant vers 0 alors pour tout t ∈ R \ 2πZ la série trigonométrique∑

n αneint est convergente.

Démonstration On utilise la Règle d’Abel. La suite (αn)n étant par hypo-thèse une suite réelle (à termes positifs), décroissante et convergeant vers 0, ilfaut montrer que pour tout t ∈ R \ 2πZ la suite de terme général un = eint

vérifie :

∃M ∈ R+ ∀n ∈ N

∣∣∣

n∑

k=0

uk

∣∣∣ 6 M. (11)

La suite (un)n est une suite géométrique de raison r = eit. Pour toutt ∈ R \ 2πZ on a |r| < 1 et par conséquent

∣∣∣∣∣

n∑

k=0

uk

∣∣∣∣∣=

∣∣∣∣

1 − ei(n+1)t

1 − eit

∣∣∣∣=

1 − cos((n + 1)t)√

1 − cos(t)6

√2

1 − cos(t).

L’assertion (11) est établie avec M =√

2√1−cos(t)

. �

1.4.5 Series semi-convergentes ne relevant pas de la regle d’Abel

Lorsque la série∑

n un n’est pas absolument convergente et que les critèresliés à la règle d’Abel ne s’appliquent pas, on peut essayer de déterminer undéveloppement asymptotique du terme général un pour n au voisinage de +∞.Si on peut déterminer la nature des séries dont le terme général intervient dansle développement asymptotique

(44)

, on pourra conclure en ayant recours à laproposition 1.3 et au corollaire 1.3. Nous allons illustrer la méthode par deuxexemples.

Exemples

1. Déterminons la nature de la série de terme général un = 11+(−1)nn avec

n > 2. Remarquons tout d’abord qu’il ne s’agit pas d’une série à termes posi-tifs puisque si n est pair, un est positif alors que si n est impair, un est négatif.

(44)Voir le Cours de Première Année, paragraphe 17.4.3 p. 797 et paragraphe 17.6 p. 809.

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Page 53: COURS DE MATHÉMATIQUES ASINSA DEUXIÉME ANNÉE

Séries numériques 53

De plus cette série ne converge pas absolument car |un| ∼+∞

1n et la série har-

monique∑

n>11n diverge. Pour tout entier n > 2 on obtient en utilisant le

développement limité 11+u = 1 − u + O0(u),

un =1

1 + (−1)nn=

(−1)n

n

1

1 + (−1)n

n

=(−1)n

n− 1

n2+ O+∞

(1/n2

).

Comme la série∑

n>11

n2 converge, d’après le corollaire 1.3, le « reste » O+∞(

1n2

)

est le terme général d’une série absolument convergente. De plus, la série har-monique alternée

n>1(−1)n

n convergeant, on peut en déduire que la série∑

n>2 un converge en tant que somme de trois séries convergentes, voir la pro-position 1.3.

2. Déterminons la nature de la série de terme général un = ln(

1 + (−1)n

√n

)

.

Remarquons tout d’abord qu’il ne s’agit pas d’une série à termes positifs : si nest pair, un est positif alors que si n est impair, un est négatif. En utilisant ledéveloppement limité ln(1 + x) = x − 1

2x2 + 13x3 + O0(x

3), on obtient :

un = ln

(

1 +(−1)n

√n

)

=(−1)n

√n

− 1

2n+

(−1)3n

3n√

n+ Rn

où le reste Rn vérifie Rn = O+∞(n−3/2

). Nous avons vu que la série

n(−1)n

√n

était simplement convergente et que la série∑

n12n était divergente. Par ailleurs,

la série∑

n(−1)3n

3n√

nest absolument convergente car

∣∣∣∣

(−1)3n

3n√

n

∣∣∣∣=

1

3

1

n3/2

et∑

n1

n3/2 est une série de Riemann convergente. Enfin, pour conclure remar-quons que |Rn| = O+∞

(n−3/2

)et par conséquent, d’après le corollaire 1.3, la

série∑

n Rn est absolument convergente. La série∑

n un est donc divergente :elle se décompose en la somme de trois séries convergentes et d’une série di-vergente. On pourra consulter l’exercice 1.3 p. 14 pour une autre méthodepermettant d’établir ce résultat.

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