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IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTREMENT : Professeur certifié DE L’AUTORITE A LA COMMUNICATION LOPERA, David ESPAGNOL Mme SOUMIER Mme LEBEL 2005/2006 0401701G

DE L’AUTORITE A LA COMMUNICATION - espe.u …€¦ · 2- Les obstacles à l’échange: ... excès d’autorité sur la classe au détriment de la communication avec les élèves

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IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTREMENT : Professeur certifié

DE L’AUTORITE A LA COMMUNICATION

LOPERA, David ESPAGNOL Mme SOUMIER Mme LEBEL 2005/2006 0401701G

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« L’autorité doit être désacralisée pour être humanisée » Mauro Laeng, Guy Avanzini,

Vocabulaire de la Pédagogie Moderne.

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De l’autorité à la communication.

INTRODUCTION . ................................................................................................................... 5

1- La conception utopique du jeune stagiaire. ...............................................................5 2- L’établissement et mes classes. ..................................................................................6

I - PREMIERS CONTACTS AVEC L’AUTORITE PROFESSORALE ........................... 7

A- DE LA PRISE DE FONCTION AUX PREMIERS BILANS........................................................... 7

1- Premières représentations du concept d’autorité. .....................................................7 2- Le test. ........................................................................................................................8 3- L’autoritarisme...........................................................................................................8

B- QU’EST-CE QUE L’AUTORITE ?........................................................................................ 9

1- Les causes à l’autoritarisme. .....................................................................................9 2- La remise en question de la notion de pouvoir. .......................................................10

C- ENTRE AUTORITARISME ET LAXISME : A LA RECHERCHE DE LA CONVERGENCE DES

EXTREMES. ............................................................................................................................ 11 1- Se défaire de l’autoritarisme....................................................................................11 2- Vers une pratique collective de l’autorité. ...............................................................13 3- Un échec relatif mais des certitudes.........................................................................13

II - L’AUTORITE COMME PREALABLE A L’ECHANGE OU UNE BONNE COMMUNICATION COMME SOCLE DE L’AUTORITE ? ......................................... 15

A- LE MODELE EDUCATIF : INFORMATION OU COMMUNICATION ? ..................................... 15

1- Première approche du concept de communication en classe de langue..................15 2- Décalage de perception : l’illusion d’une bonne relation pédagogique..................16 3- Le guidage. ...............................................................................................................17

B- LA COMMUNICATION EN CLASSE DE LANGUE.................................................................... 19

1- Qu’est-ce que l’échange ?.........................................................................................19 2- Les obstacles à l’échange: autorité et dysfonctionnements de la communication. ..20 3- La réponse en retour positive. ..................................................................................21

C- LA REMEDIATION.............................................................................................................. 21

1- La relation à l’autre et le savoir-être. .......................................................................21 2- L’approche par le jeu.................................................................................................23 3- L’autorité obstacle et vecteur d’échange et la communication source d’autorité. ...24

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III - LA JUSTE DISTANCE ENTRE AUTORITE ET COMMUNICA TION :

QU’EST-CE QU’UNE BONNE RELATION PEDAGOGIQUE ? ................................... 25

A- LES DILEMMES DE LA COMMUNICATION. .......................................................................... 25

1- La participation orale et l’interaction. .....................................................................25 2- La gestion de l’erreur : norme langagière et idée, correction et valorisation. ........27

B- CREER UN CLIMAT DE CONFIANCE : VERS UNE AUTORITE BIENVEILLANTE. ...................... 28

1- La communication non verbale : outil pédagogique et disciplinaire. ......................28 2- Le rôle de l’humour. .................................................................................................29 3- L’accompagnement et la communication écrite. ......................................................30

C- QU’EST-CE QU’UN BONNE RELATION PEDAGOGIQUE ?...................................................... 31

1- Autorité et/ou communication ?................................................................................31 2- Adapter l’exercice de l’autorité et de la communication au groupe-classe. ............32

CONCLUSION ....................................................................................................................... 34

BIBLIOGRAPHIE . ................................................................................................................ 35

ANNEXES............................................................................................................................... 36

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Introduction.

1- La conception utopique du jeune stagiaire.

Lorsqu’une personne se destine à l’enseignement, et bien avant qu’elle n’en ait encore fait l’expérience, celle-ci perçoit généralement le métier de professeur comme la congruence de deux aspects fondamentaux : la connaissance de la discipline enseignée et la capacité à la relation à l’autre. Cette certitude est le fruit de son observation en tant qu’apprenant, le seul statut qu’il ait jusqu’alors connu tout au long de son cursus scolaire. Tel était mon cas.

En effet, ce sont ces conclusions (peut-être simplistes) qui m’avaient amené à désirer

quitter les bancs de l’Ecole pour en occuper le bureau, le deuxième aspect étant celui qui m’attirait le plus dans la fonction. Pourtant, le passage difficile du cahier au tableau allait apporter son lot de désillusions ; non pas que mes premières représentations de l’enseignement étaient erronées, mais je me suis vite aperçu que ce que je considérais comme primordial dans l’exercice de la profession (c’est-à-dire l’envie du rapport à autrui, et la satisfaction et l’enrichissement que l’on en tire) était ce qu’il fallait que je travaille le plus. Le sentiment d’avoir la vocation pour la profession ne fait pas que son exercice en soit facilité.

Ce constat est le résultat des bilans de mes premières expériences de l’enseignement, qu’ils soient personnels ou institutionnels. Ainsi, les observations de mes conseillères pédagogiques et la visite conseil d’une de mes formatrices IUFM ont rendu manifeste mon excès d’autorité sur la classe au détriment de la communication avec les élèves. De ce fait, le rapport à l’apprenant permettant la transmission des savoirs et savoir-faire s’en trouvait altérés, et cette difficulté à entretenir de bonnes relations avec le groupe-classe complexifiait l’acquisition des apprentissages, d’où l’importance du savoir-être dans la relation pédagogique.

Venait donc le moment de la remise en question de sa pratique pédagogique, de la réflexion sur les mécanismes de l’acquisition des connaissances. Il convient par conséquent de se demander quels rapports entretiennent les notions d’autorité et de communication en classe de langue et dans quelle mesure un excès d’autorité peut nuire à l’échange, et donc à la transmission des savoirs. Comment concilier ces impératifs de l’enseignement qui dans mes classes ne s’exerçaient que séparément ? Enfin, comment favoriser les apprentissages et la communication en classe de langue par un bon exercice de l’autorité ?

Ce mémoire professionnel se propose ainsi de détruire les premières représentations de ces concepts, celles que j’avais avant les premiers bilans et la lecture d’ouvrages théoriques sur ces sujets, pour les redéfinir afin de tenter d’arriver à une possible conciliation de l’autorité et de l’échange. Dès lors, qu’est-ce que l’autorité et qu’est-ce que la communication ? Dans quelle mesure peuvent-elles réciproquement se détruire ou s’enrichir ? Qu’est-ce qu’une bonne relation pédagogique ?

Mais avant cela, il est nécessaire de présenter le contexte de mon stage et le public qui est le mien.

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2- L’établissement et mes classes.

Mon stage en responsabilité se déroule au Collège Vivant Denon de Saint-Marcel, un collège de 574 élèves et ne connaissant pas de grandes difficultés, que ce soit au niveau de la discipline ou des résultats obtenus par une population-élèves sympathique. Ce collège ne compte que deux professeurs d’espagnol : ma conseillère pédagogique et moi-même.

J’enseigne à une classe de 4ème de 24 élèves (11 filles et 13 garçons), ainsi qu’à une

classe de 3ème dont l’effectif est de 26 élèves (13 filles et 13 garçons.) Ces classes, toutes deux très sympathiques, sont très différentes. Alors que les 4èmes sont calmes et attentifs en classe et que le groupe est très hétérogène au vu des résultats, la classe de 3ème est plutôt homogène et beaucoup plus encline au chahut et à l’inattention si on lui en laisse l’occasion. De plus, contestataires et trop actifs (les interventions spontanées sont fréquentes et les élèves doivent être constamment canalisés), le caractère de ces élèves contraste fortement avec leurs camarades du niveau inférieur, très majoritairement passifs et peu loquaces sur les documents proposés.

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I

Premiers contacts avec l’autorité professorale.

A- De la prise de fonction aux premiers bilans.

1- Premières représentations du concept d’autorité.

Dans toute relation pédagogique, autorité et apprentissages sont indissociables. Il est effectivement essentiel que le professeur fasse preuve d’autorité dans sa classe s’il ne veut pas que le pouvoir décisionnaire se retrouve entre les mains de ses élèves, car le pouvoir n’est jamais vacant et le groupe-classe ne manquera pas de s’emparer de cette arme si la main qui la tient est trop hésitante et tremblante.

J’assimile ici l’acte pédagogique à un combat, et nous verrons que cette vision est à

rectifier et que l’on ne peut pas réellement parler d’une relation de pouvoir entre l’enseignant et l’élève. Cependant, cette représentation de la salle de classe comme un front guerrier était celle qui était la mienne avant mon entrée dans la salle 213 et qui m’a suivi les premiers jours de service. Par ailleurs, la transmission du savoir devait, selon moi, être imposée à une grande majorité d’élèves réfractaires à l’enseignement.

De cette manière, l’exercice d’une autorité sans faille devenait la condition préalable et

fondamentale de tout acte pédagogique. Une sévérité inflexible et une surveillance intense permettent de maintenir l’ordre, d’obtenir l’obéissance, le silence et l’attention nécessaires à la « réception des savoirs » (cette expression sera à rectifier ultérieurement.) Mais cette rigidité pédagogique ne crée pas le respect vis-à-vis de la personne de l’enseignant sinon la crainte. Ainsi, faut-il faire peur aux élèves, prenant le risque par là même d’empêcher la motivation à l’égard de la discipline enseignée que le maître représente ?

C’était en tout cas l’opinion des autres professeurs de mon établissement et de mon entourage avec lesquels j’avais pu parler de mes craintes. Confiant en leur jugement puisqu’ils avaient l’expérience et le recul qui imposaient l’écoute du petit stagiaire encore ignorant en la matière, et qui était rassuré d’avoir les conseils de telles « autorités » (cette autre signification du terme n’est pas sans renvoyer à un aspect que je découvris plus tard sur le thème) : « Si tu ne t’imposes pas dès le début, tu es fichu pour toute l’année. » « Tout se joue la première heure, alors sois ferme ou ils te boufferont. » Par conséquent, je devais dès le premier cours user (et abuser ?) de cette autorité ferme. En outre, le premier contact avec la classe est crucial pour poser les bases de la relation pédagogique qui sera instituée par le professeur avec ses élèves pour le reste de l’année scolaire. Il revient à l’enseignant de définir la situation initiale s’il ne veut pas que ses élèves le fassent pour lui.1

De plus, le jeune stagiaire a conscience que cette première heure de cours est doublement importante dans sa situation de débutant : s’agissant de ses premiers pas en tant qu’enseignant et sachant que les élèves vont le juger dès son entrée et que les impressions retenues seront tenaces, il veillera à ne pas commettre « l’erreur fatale », autrement dit vouloir

1 Georges LAPASSADE, Guerre et paix dans la classe … La déviance scolaire.

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leur plaire, désirer les séduire… et laisser faire, faire semblant de ne pas voir les attitudes déviantes ou leur trouver une justification sympathique. J’avais en outre le sentiment qu’il ne fallait pas avoir peur de ne pas être aimé de ses élèves pour être un bon professeur. Et persuadé après la lecture d’un sondage pratiqué sur des élèves sur les qualités requises d’un bon enseignant que l’autorité devait s’appliquer sans même avoir à remettre en cause cette idée, je l’adoptai. Mais s’agissait-il de cette autorité désirée par les élèves chez leur enseignant ? Et appliquai-je vraiment ce que me conseillèrent mes collègues ? Non, car j’avais transformé ces données, les avaient subtilement déviées de leur but premier, j’en avais grossi les traits et je devins la caricature du gendarme. Voilà où était l’erreur …

2- Le test.

Dès le début, j’énonçai donc les règles de vie de la classe et exposai mes exigences de travail ou de discipline ainsi que les sanctions encourues en cas de non respect de celles-ci (le lever de doigt comme règle élémentaire de prise de parole, la régularité du travail requis, l’échelle des sanctions…) Je fus très vite perturbé par l’agitation des 3èmes : le test commençait. A la vue d’un nouveau professeur, jeune et qui ne bénéficie pas encore d’une réputation au sein de l’établissement, les élèves étaient inattentifs à mes propos, bavardaient et ricanaient malgré mes rappels à l’ordre qui me semblaient pourtant assez fermes. Face à ces comportements d’une majorité de la classe, mon attitude de fermeté se transforma progressivement en sévérité extrême, montant d’un grade dans l’échelle de la rigidité.

Par la suite, je mis en place un plan de classe, aidé du professeur principal d’une partie de la classe (qui était constituée par deux 3èmes) et de ma tutrice qui connaissaient bien leurs membres, et dont quelques cas pouvaient se révéler difficiles à gérer si les réactions du professeur étaient hésitantes. De plus, la vérification systématique des devoirs, de la mémorisation des leçons à chaque début d’heure donnant lieu à une note, et les sanctions données en cas de non réalisation des tâches demandées (en correspondance avec ce qui avait été annoncé en début d’année : recopiage de correction d’exercices ou d’évaluations, observations sur le carnet, heure de colle si le travail exigé n’est pas réalisé à plusieurs reprises) renforçaient cette intransigeance de l’enseignant qui n’autorisait aucune faiblesse à ses élèves. Je n’ai à ce jour pas changé cette attitude qui pousse les élèves récalcitrants à travailler de manière régulière et qui ne sont pas autonomes face aux apprentissages. Mais ce que je commençais à percevoir était que les remontrances sèches et les commentaires qui accompagnaient les sanctions n’étaient en rien utiles pour des élèves ne prenant aucunement en compte l’avis de l’enseignant et qui ajoutaient à l’atmosphère tendue de la classe. La sanction se suffit à elle-même.

3- L’autoritarisme.

Les observations de mes différents conseillers pédagogiques confirmèrent mes dires précédents, que je ressentais déjà, mais introduirent de nouveaux points de réflexion qui m’avaient échappé, ou tout du moins que je n’appréhendais pas de la même manière, trop centré sur ma personne et ma volonté première de bien faire, de faire en sorte que les élèves acquièrent les savoirs et les savoir-faire à travers un cours exhaustif. Cette exigence envers moi-même est bien sûr importante lorsqu’il s’agit de bien préparer et construire ses cours, mais je sais à présent que l’exhaustivité n’est pas une fin de l’enseignement.

Il existait donc un décalage entre ma perception du cours et celle des apprenants et des

observateurs extérieurs. En effet, la relation d’autorité entretenue relevait de l’autoritarisme à

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tous niveaux, créant une barrière entre le professeur et la classe qui entravait la communication. Pourtant, la participation orale des élèves était active malgré mes corrections de la langue immédiates et sévères qui pourraient démotiver les plus timides et ayant une vision pessimiste de leur personne et de leurs capacités. De même, le manque de valorisation des interventions ne permettait pas d’encourager à poursuivre les efforts et à s’investir dans la matière. Enfin, l’image que je renvoyais était celle d’un gendarme menant un interrogatoire et prêt à bondir sur les erreurs et attendant le moindre écart de conduite pour effectuer un rappel à l’ordre vibrant. Regard baissé, bras derrière le dos, voix monocorde, absence de sourires et questionnement incessant ne favorisaient pas l’échange productif entre le professeur et ses classes, point sur lequel j’axerai plus longuement mon propos ultérieurement.

Ma pratique ne laissait certes pas de possibilité de désobéissance et créait de bonnes

conditions de travail, dans le calme et l’attention propices à l’étude et à la réflexion. Par contre, elle pouvait potentiellement être le germe de conflits face à des élèves contestataires et acceptant difficilement d’avoir à obéir de manière inconditionnelle sans une certaine liberté de parole et une marge de tolérance relative.

D’autre part, ce ressenti a été confirmé par les élèves eux-mêmes qui, en heure de vie

de classe, ont déclaré à leur professeur principal que tout se passait bien en espagnol excepté que « il s’énerve pour un rien, on comprend pas toujours pourquoi. »

Il convenait donc de comprendre le « pourquoi » de mes réactions exagérées et de

revoir ma définition de l’autorité et son application.

B- Qu’est-ce que l’autorité ?

1- Les causes à l’autoritarisme.

Comme je l’ai affirmé précédemment, les conseils de mes pairs mal interprétés et mal appliqués ont contribué à mon passage à une autorité extrême. Par ailleurs, le manque de confiance en soi et de crédibilité du stagiaire qui n’a pas encore fait ses preuves peuvent amener à exacerber cette autorité pour prévenir toute déviance, ce que l’on souhaite d’autant plus éviter lorsque sa gestion peut se révéler difficile du fait d’une expérience non acquise en début de carrière. De même, la peur de ne pas arriver à transmettre les apprentissages prévus ainsi que la difficulté à organiser les interventions et à se détacher de sa préparation du cours, dans mon questionnement intérieur sur le « comment faire pour que …. ? » au lieu d’être à l’écoute entière de l’élève, ne permettent pas la transmission des savoirs sinon celle d’un sentiment de froideur, l’attention du public s’axant davantage sur l’image que le maître renvoie plutôt que sur le contenu qu’il tente de faire passer, et créant également un climat de tension permanent .

L’âge du professeur, bien que secondaire dans la relation pédagogique, reste tout de

même un paramètre important qui explique mon évolution initiale. Persuadé que la jeunesse de l’enseignant ne force pas nécessairement l’obéissance, et muni de la volonté de me démarquer le plus possible de mes élèves et de veiller à ce que la différence de statut entre enseignant et apprenant soit ressentie et effective, je créais une distance certaine avec mes classes. Mes souvenirs de ma vie de collégien et de lycéen me semblaient très proches et le risque était que les élèves perçoivent le maître comme plus accessible (ce qui n’est pas préjudiciable), mais surtout potentiellement plus laxiste et amical.

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Par ailleurs, l’aspect relationnel du métier fait que sa pratique dépend pour beaucoup de la personne même du professeur. Ainsi, ma maladresse maladive qui provoquait les rires avait pour conséquence mon exaspération et mes réactions colériques pour réimposer le silence et revenir à la leçon. En effet, les petits incidents étaient fréquents (mes rencontres répétées avec une armoire entravant mes allers et venues, les bouchons de feutres qui m’échappent sans cesse pour aller rebondir sur les tables, la manipulation catastrophique du matériel audio ou vidéo qui provoque des larsens ou le visionnage furtif d’émissions de télévision bien connues des adolescents et rompant le rythme du cours…), ce qui ne contribua pas à freiner cette escalade de la violence, tout du moins dans le ton de ma voix et dans l’intensité de mes regards. La réaction provoquée était somme toute normale, mais la gestion difficile de ces incidents m’amena à monter une marche dans l’échelle de la rigidité. Ces événements, risibles aujourd’hui, ont fortement influencé mon évolution future et ont leur importance.

Pour pouvoir remédier à ces causes désormais connues de mon autorité exacerbée et à

leurs conséquences, un passage obligatoire par une redéfinition du concept est nécessaire.

2- La remise en question de la notion de pouvoir.

Peut-on qualifier la relation pédagogique de relation de pouvoir ? Cette association peut être vraie pour l’enseignant qui se considère en position de supériorité, qu’elle soit intellectuelle, statutaire ou d’âge. La relation pédagogique est en effet inégalitaire. Cependant, la notion de pouvoir induit les dérives possibles à celui-ci telles que la domination, la manipulation et l’imposition forcée de l’enseignement, et plus généralement tout ce qui relève des abus de pouvoir. Or, la relation enseignant-enseigné n’est en rien cela : les apprentissages ne peuvent être acquis que par acceptation de ceux-ci par les apprenants qui se les approprient. Pour cela, il convient dès lors de favoriser la proximité (toute relative) avec les élèves.

Dès lors, qu’est-ce que l’autorité si elle n’est pas prise dans sa signification

d’imposition de l’obéissance, forcée et non soumise à discussion. Le lien éducatif est certes un lien violent en raison de la réticence aujourd’hui de plus en plus grande de nos élèves à apprendre, mais les adolescents composant nos effectifs de classe ne sont pas nés élèves, et tout comme le professeur en formation, ils doivent également apprendre un « métier » et à se conformer à leur statut d’apprenant. Il revient au maître d’adapter et de changer son autorité du fait de l’évolution des comportements déviants à l’Ecole, car s’il y a crise de l’obéissance c’est qu’il y a crise de l’autorité.

« L’autorité exclut l’usage de moyens extérieurs de coercition comme la force,

l’oppression ou la contrainte physique : là où la force est employée, l’autorité a échoué. »2 Le recours à la persuasion et à l’imposition, de cette manière, n’est pas caractéristique d’une attitude fondée sur l’autorité. Alors que recouvre exactement le terme ? Des lectures sur le sujet font entrevoir le champ extrêmement large que balaye le concept et qui apparaît beaucoup plus complexe que la simple idée exposée antérieurement.

Nous pouvons notamment nous demander si la possession de ce que l’on nomme le

charisme garantit seul la bonne tenue de la classe et la transmission des savoirs. De la sorte, cette idée induirait que toute personne n’est capable d’user d’une autorité effective puisqu’il

2 MENDEL, Les Cahiers Pédagogiques, « L’Autorité ».

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s’agirait de quelque chose d’inné et d’inexplicable. Bien que cette forme d’autorité existe chez certaines personnes, nous ne pouvons la réduire à cela, car bien des enseignants non particulièrement charismatiques n’ont aucun mal à se faire écouter de leurs élèves.

Or, il existe une autre forme d’autorité : l’autorité statutaire. Préexistant à la personne,

elle est le pouvoir de la fonction dans un cadre institutionnel. Autorité de prestige que tout professeur possède dès son entrée dans la fonction et qui fonde la transmission des savoirs, elle ne suffit pas à garantir l’adhésion des apprenants à la discipline enseignée.

« Avoir de l’autorité » peut aussi renvoyer à l’autorité de l’auteur, de celui qui

autorise, et qui serait à rapprocher de la confiance en soi, de l’affirmation de sa personnalité pour s’affirmer dans la relation à l’autre et qui requerrait une bonne connaissance de soi.

D’autre part, l’autorité de compétence, que l’on associe à l’expression « faire

autorité », est la capacité fonctionnelle dans la relation et les savoirs que déploie la personne dans l’action (dont étaient pourvus à mes yeux les professeurs de mon établissement.)

Enfin, Le Petit Robert définit ainsi le terme : « supériorité de mérite ou de séduction

qui impose l’obéissance sans contrainte, le respect, la confiance. »

A la lumière de toutes ces nuances de l’autorité, je suis à présent convaincu que le professeur doit tendre à l’autorité de compétence. Elle se construit grandement avec l’expérience, mais l’optimisation des outils pédagogiques mis en œuvre dans l’enseignement ainsi que la réflexion sur sa pratique la rendent accessible. De même, ne croyant pas posséder ce charisme envié mais ayant tout de même le statut, il convenait de me mettre à la recherche de mon « moi » par l’introspection (se connaître pour s’affirmer dans la relation.) En début de carrière, il est effectivement difficile de se trouver. Déstabilisé par l’entrée dans le monde de l’enseignement, et encore enseignant et élève (maître en formation), intégrer son statut reste une donnée délicate. L’identité sociale du stagiaire est en pleine construction, prise entre deux statuts contradictoires.

Il fallait par conséquent faire de l’autorité un acte éducatif, c’est-à-dire qu’elle soit un

vecteur des apprentissages et de la communication en classe, et donc un outil, disciplinaire certes, mais avant tout pédagogique. Dans ce but, je devais en premier lieu me défaire d’un autoritarisme qui les freinait.

C- Entre autoritarisme et laxisme : à la recherche de la convergence des

extrêmes.

1- Se défaire de l’autoritarisme.

L’excès d’autorité m’apparaît désormais non comme le gage de l’adhésion des élèves au professeur et à sa discipline mais constitue un des obstacles majeurs à l’apprentissage. Afin que l’autorité du maître soit acceptée par la classe, et qu’elle lui revienne ainsi de manière méritée, il convient d’éviter les extrêmes, qu’ils soient abus de pouvoir ou laxisme, car l’autorité ne se décrète pas, elle doit être reconnue.

Conscient que l’arbitraire est l’ennemi d’une bonne relation pédagogique, je pris soin

de veiller à pratiquer la justice et l’équité. Cependant, mon attitude pouvait sembler

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schizophrénique après mes premières tentatives pour remédier à mes tendances autoritaristes. En effet, je passais de la gentillesse et de la valorisation des interventions, de l’attitude compréhensive et attentive à la dureté extrême lorsqu’il s’agissait de rappels à l’ordre disciplinaires, de telle sorte que les élèves ne comprenaient pas ces comportements lunatiques qui leur paraissaient irraisonnés.

Ce fut mon ressenti après analyse d’une heure de cours durant laquelle valorisations et

sanctions s’étaient enchaînés pour un élève de 3ème, ce qui avait provoqué l’indignation d’une partie de la classe qui me trouvait « injuste » selon leurs dires, alors que je pensais agir à l’inverse. Cet élève en difficulté avait demandé la parole pour procéder à la récapitulation de la leçon du cours précédent. Suite à ses efforts de mémorisation et pour récompenser son volontarisme, je le valorisai et lui attribuai une très bonne note avec un grand sourire de satisfaction. Mais certainement fier de sa réussite et orgueilleux de l’attention du professeur, il passa l’heure à se retourner et à parler avec ses voisins ; par conséquent, je lui demandai son carnet de liaison afin d’y apposer une observation discipline. Perdus entre mes changements d’humeur, les élèves les percevaient comme l’expression de mon manque de jugement.

De même, je recevais parfois l’absence de travail des élèves comme une blessure

narcissique qui me rendait irritable et fermé envers toute la classe, quand bien même certains élèves seulement étaient concernés. L’enseignant doit apprendre à ne pas prendre certains actes comme une réaction contre sa personne et bien différencier la fonction et son être profond, tout comme il doit le faire avec les élèves quand il juge leur travail et non leur personne.

Lorsque de telles analyses se font jour, le changement dans sa manière d’être et de

faire est de rigueur. Dans cet esprit, je m’aperçus que mes consignes de travail étaient données d’une façon bien trop autoritaire. Les phrases prononcées en classe étaient souvent des ordres dits à l’infinitif (« ¡Callarse !, ¡copiar !, ¡leer el texto ! …») Ces injonctions à l’infinitif, bien que courantes en Espagnol pour s’adresser à un auditoire, sont impersonnelles car elles ne considèrent pas la personne et le locuteur met l’accent sur l’action et sa réalisation. Bien que l’élève ne soit pas encore au fait de cette nuance linguistique à ce moment de son cursus, il ressent la langue, d’autant plus que les ordres étaient accompagnés d’un ton sec et impartial. Le recours à des phrases du type « ahora podéis copiar la lección » ou « ahora vais a leer el texto » se révéla judicieux et assainit le climat de la classe. La tension nerveuse de l’enseignant envahit l’espace et se communique, ce qui ne permet pas l’attention détendue des élèves.

Dans une même logique, je décidai de ne plus prendre les carnets de liaison de

manière systématique pour quelque motif que cela soit de manière indifférenciée. Une série de rappels à l’ordre adressés à un même élève faisait de celui-ci une victime potentielle de ma future écriture sur le carnet confisqué en cas de récidive. Le carnet de liaison, outil important de dissuasion car constituant un lien avec les familles, devenait un attribut ostentatoire de pouvoir, ici sanctionnel. Mais la sanction doit être éducative, non punitive, et cache ou au contraire montre le peu de confiance en soi du maître. « L’autorité se gagne par l’absence de signes criants de pouvoir. »3

3 Les Cahiers Pédagogique, « L’Autorité ».

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2- Vers une pratique collective de l’autorité.

L’autorité ne s’improvise pas, elle s’installe progressivement. L’enseignant se sent seul devant cette tâche ardue, en infériorité numérique face à ses élèves, ce qui peut expliquer une autorité exagérée permettant de compenser cet isolement dans l’espace fermé de la salle de classe : personne ne pouvait, selon moi, me venir en aide en cas de non obéissance, d’où une attitude fondée sur l’excessivité (qui en fait plus en obtient davantage.) De plus, nous sommes toujours hésitants à parler de nos problèmes : « qu’en pensera-t-on ?... que je ne sais pas faire ? » Mais il faut reconnaître que nous puissions éprouver quelques incertitudes ou que nous puissions traverser des difficultés dans la gestion de nos classes, surtout en début de carrière. Exercer seul l’autorité, c’est prendre le risque qu’elle se fragilise ou qu’elle se détruise car son application excessive provoque abus et dérives.

Je m’aperçus ainsi que l’autorité de compétence se gagnait également par le biais du

travail en équipe pédagogique. Les discussions et actions communes de l’ensemble des intervenants sur une classe rendent possible l’évolution de l’autorité d’un professeur vers une autre forme de ce concept ayant plus de poids et étant moins déviée de sa finalité. Cela donne du sens aux exigences que les élèves doivent respecter, dans le travail scolaire ou dans le comportement. En effet, les paroles et actes des autres enseignants de l’équipe pédagogique convergent ainsi et traduisent les mêmes exigences. Cet apport de sens quant aux décisions, aux sanctions et à la pédagogie pratiquée est primordial si l’on souhaite que les élèves les comprennent et y adhèrent. Par conséquent, il ne faut pas non plus négliger certaines pauses dans le déroulement d’un cours pour procéder à des explications afin de clarifier et expliquer certains points de sa pédagogie.

Les collaborations, notamment avec le Conseiller Principal d’Education et les

professeurs principaux permettent d’établir une autorité reconnue. Le CPE fait d’ailleurs figure d’autorité dans les établissements auprès des élèves par son seul statut. L’élève, conscient du travail d’équipe mené par les enseignants, se sent entouré, suivi, accompagné.

De ce fait, mes actions et sanctions concernant des élèves refusant tout travail (rendant

des copies blanches de manière répétée, perturbant le cours ou ne faisant pas le travail à la maison demandé) trouvent un écho dans les bureaux des autres intervenants, ce qui contribue à renforcer mon autorité tout en la faisant appréhender d’une autre façon. Les sanctions données ne relèvent plus de mon seul jugement, ne semblent plus venir de la personne même du professeur qui peut être considéré comme « dure », et sont davantage acceptées. Et délesté d’un peu de cette autorité qui doit être exercée à plusieurs et qui ne m’accompagnait plus en cours, l’ambiance de la classe s’en ressentit.

3- Un échec relatif mais des certitudes.

Au fil des semaines, je devins plus détendu en classe, moins obsédé par l’obtention

d’une attitude parfaite des élèves, moins à l’affût du moindre détail pouvant être l’objet d’un rappel à l’ordre ou d’un laïus moralisateur, car je ne considérais pas avant les élèves comme ils étaient mais comme je voulais qu’ils fussent.

Les élèves paraissaient dorénavant prendre plus de plaisir à venir en cours d’espagnol,

soulagés du relâchement de la surveillance et de la vigilance constantes de « l’Inquisiteur ». C’est alors que l’attention des classes, la discipline et la réalisation des tâches firent de même : elles se relâchèrent. Je prendrai pour exemple la liberté prise par certains élèves

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d’interrompre le rythme du cours pour me poser des questions sans rapport aucun avec la progression (comme la signification d’un titre d’une chanson d’un groupe hispanophone bien aimé des adolescents ou la note d’un devoir non encore rendu.) En outre, la règle du lever de doigt pour demander la parole, dont la mise en place avait été difficile en début d’année scolaire, devenait irrégulière.

Etais-je devenu trop laxiste ? Je ne le pense pas. Mes changements de stratégie répétés

dans le but de trouver la bonne autorité avaient influé sur cette évolution des comportements des élèves. Nous connaissons bien l’importance de l’établissement de rituels et d’habitudes dans la classe pour que les apprenants aient des repères, permettant à l’enseignant de gérer de manière plus efficace son cours. Or, l’irrégularité introduite dans mes classes quant à ces aspects avaient rendus perceptibles ma recherche, mes hésitations, et peut-être mon incohérence par rapport à ce qui avait été annoncé en début d’année scolaire.

Il fallait donc regarder dans une autre direction, améliorer d’autres points de ma

pratique pédagogique que je savais fragiles. L’autorité excessive du début freinait la communication en classe. La solution était peut-être là : communiquer pour gagner en autorité et favoriser les apprentissages.

Nous pouvons dès lors nous demander si l’autorité est un préalable à la

communication et aux apprentissages ou si, au contraire, un échange productif en classe confère de l’autorité au professeur.

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II

L’autorité comme préalable à l’échange ou une bonne communication comme socle de l’autorité ?

A- Le modèle éducatif : information ou communication ?

1- Première approche du concept de communication en classe de langue.

Tout comme ma vision de l’autorité professorale était à rectifier, passée la prise de conscience que les modèles connus ou mes représentations n’étaient aucunement des références, mon vécu de l’enseignement depuis le point de vue d’élève ne pouvait servir de schéma transférable à mon propre exercice de l’enseignement.

En effet, je fus vite déstabilisé au début de la formation suivie à l’IUFM par la

découverte d’une tout autre conception de l’acte éducatif en classe de langue. Dès la rentrée scolaire, le décor était planté : l’enseignement des langues vivait une véritable « révolution ». Bien que le terme ne soit pas employé ici de manière vraiment appropriée puisque, bien plus qu’un changement radical, il s’agit dans les faits d’une conception différente de l’enseignement des langues et d’une manière diverse de l’appréhender par un changement de point de vue, il s’imposa à moi en raison du décalage extrême entre ce que l’on présentait de l’acte éducatif d’aujourd’hui et mon vécu des cours de collège et de lycée quelques années auparavant. Ainsi, le Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL) allait devenir notre préoccupation première et instituait un modèle résolument communicatif de l’enseignement.

Je comprenais profondément les raisons et les enjeux d’un tel modèle éducatif.

Cependant, mon cursus scolaire avait entraîné l’assimilation inconsciente de son modèle contraire : le modèle informatif, c’est-à-dire le cours magistral. Mes souvenirs des cours d’Espagnol du collège sont ceux d’heures de classe durant lesquelles nous apprenions des points de grammaire ou les diverses conjugaisons avant même d’apprendre (voir même sans jamais apprendre) à construire notre langue espagnole. De même, en 3ème, nous prenions en notes le commentaire d’un document sous la dictée du professeur.

Bien sûr, je critiquais cet enseignement (et le critique encore) pour l’état de passivité

dans lequel il met les apprenants, leur enlevant toute motivation et ne leur apprenant uniquement de la grammaire et non une langue. Mais un tel vécu de neuf ans (car l’université est en outre le lieu par excellence du cours magistral) provoque chez le professeur stagiaire des réflexes dont il est difficile de se défaire, sans oublier la déstabilisation sociocognitive que toute destruction des représentations et idées fausses induit chez l’apprenant quel qu’il soit.

Le modèle informatif, étant encore dominant dans bon nombre de disciplines et de

plus en plus présent au fur et à mesure de l’avancée dans les études, considère uniquement l’apprenant comme un récepteur de messages, réceptacle des savoirs à transmettre. De ce fait, ce type d’enseignement envisage l’apprentissage comme une information uniforme que chacun devrait comprendre mécaniquement sans que l’on s’intéresse à la relation de cette personne avec elle-même, le professeur et le monde qui l’entoure. Par conséquent, cette

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donnée empêche la réalisation d’un projet éducatif car une telle conception de communication unilatérale de l’enseignant vers l’élève sépare les apprentissages et la relation et divise le statut et la personne. Or, cette conception est inapplicable à nos classes souvent hétérogènes et à nos élèves qui ont tous un rapport différent au savoir. De plus, cette communication unidirectionnelle favorise une attitude passive de dépendance, d’attente de réception mécanique ayant pour seul objectif la mémorisation des contenus.

En opposition à cette représentation de l’acte pédagogique intervient le modèle

communicatif qui est quant à lui relatif car il prend en compte les éléments extérieurs aux apprentissages et qui les empêchent ou les favorisent. Dès lors, l’acte éducatif est constitué des apprentissages et de la relation (à soi-même et à autrui.) Le processus d’apprentissage relève de l’échange, et l’acte d’apprendre induit la recherche de l’apprenant qui se fait acteur de ses apprentissages. Il s’agit de stimuler l’envie de recherche, de réflexion et l’intérêt par la communication en classe, facteur essentiel de l’acquisition des savoirs et des savoir-faire. Quant à la relation, la stimulation de l’aire affective et émotive, ainsi que le rapport à la fois collectif et individuel à la classe, jouent pour beaucoup dans l’apprentissage. Dans le modèle communicatif, « éducateur et élève, ensemble, sont les protagonistes, dont ils sont tous les deux destinataires et utilisateurs. Leur formation intègre savoir, savoir-faire, mais aussi savoir-être. »4 De la sorte, cela suppose une interaction et un échange en tant que condition fondamentale de la relation pédagogique.

Suite à ces considérations, je savais devoir travailler et entretenir une relation

pédagogique de type communicatif avec mes classes. Pourtant, malgré mes efforts pour aller dans ce sens, les résultats escomptés n’étaient pas satisfaisants, mon autorité exacerbée et ses conséquences en étant les principales causes.

2- Décalage de perception : l’illusion d’une bonne relation pédagogique.

Après quelques semaines d’exercice, je pensais avoir établi une certaine

communication avec les élèves, même si celle-ci n’était pas encore à la hauteur de mes espérances, mes capacités en la matière étant en construction. Mais les élèves participaient oralement et étaient souvent volontaires pour corriger des exercices, lire un texte ou aller au tableau, et paradoxalement surtout en classe de 3ème. Je parle de paradoxe car j’avais l’impression que leurs camarades débutants seraient plus actifs, motivés par la découverte d’une nouvelle langue. Au vu de cette participation active, j’en tirai la conclusion que la communication était lancée et qu’elle ne serait qu’à développer.

Mais, quand bien même la participation orale des élèves est un facteur important des

apprentissages car elle permet la mémorisation, la compréhension des erreurs faites pour pouvoir les rectifier et l’avancement dans la leçon, la communication se résume-t-elle à cela, en ce sens où il y émission et réception de messages ?

Tout d’abord les résultats obtenus par les élèves aux évaluations m’amenèrent à

réfléchir sur ma pratique et le déroulement des cours. Il est évident que nombre d’élèves ne travaillent pas suffisamment chez eux, mais je partais du principe qu’une majeure partie de l’acquisition des savoirs et savoir-faire avaient lieu en classe, permise par l’enseignant qui met en œuvre toute une série de dispositifs visant à favoriser les apprentissages, et notamment par la communication. Mais je fus tout de même surpris du peu d’acquisition de certains 4 Carlo ROMANO, Jacques SALZER, Enseigner, c’est aussi savoir communiquer.

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objectifs grammaticaux par les élèves, qui avaient pourtant été l’objet de nombreuses répétitions et d’un travail conséquent.

Avant que les objectifs grammaticaux soient transférables, ils doivent être bien sûr

appris pour être assimilés et la restitution exacte de la trace écrite ne garantit pas la bonne compréhension par l’élève de ceux-ci (dans ce cas, il s’agit souvent d’un apprentissage « par cœur » sans recherche de compréhension des phrases et de la structure de la langue.) Il subsistait par conséquent de l’incompréhension dans les classes entre les apprenants et l’enseignant.

La visite-conseil de début d’année scolaire mit ainsi en évidence cette

incompréhension possible, notamment due à la rigidité pédagogique qui s’était installée. Certains élèves en particulier intervenaient parfois pour déclarer qu’ils ne comprenaient pas. Ce type d’intervention était isolé, et comme les autres membres de la classe n’abondaient pas dans ce sens, je faisais momentanément une pause dans le cours pour procéder à une clarification des contenus puis je remettais les élèves au travail en pensant que la majeure partie de la classe avait compris. Cependant, après réflexion, ces interventions étaient le fait d’élèves que l’on a l’habitude de qualifier de « râleurs » et qui expriment les pensées d’une partie du groupe qui préfère rester muette, notamment face à l’intransigeance du professeur (ils disent tout haut ce que d’autres pensent tout bas.) Néanmoins, les élèves participaient malgré l’autorité extrême démotivante et le repérage plus fréquent des erreurs que des réussites. Alors, d’où provenait cette contradiction ?

Ce paradoxe apparent était certainement dû à une autre forme de communication qui

s’était développée entre le professeur et ses élèves qui privilégiait le dialogue non pas pendant l’heure de cours mais à la fin de celle-ci. Dans les premiers temps, je privilégiais effectivement le dialogue individuel avec l’élève qui rencontrait des difficultés ou posait des problèmes de discipline et de travail. C’est alors que je cherchais à comprendre les raisons des difficultés ou des actes et que je délivrais des conseils ou que j’exposais plus précisément mes exigences. J’étais par ailleurs convaincu que la gestion des incidents ne devait pas se faire pendant le cours au risque de montrer l’élève du doigt, de le singulariser face au groupe-classe et de l’humilier, créant ainsi les conditions d’un conflit majeur potentiel. C’est à ce moment que l’élève voyait son professeur sous un autre jour, plus compréhensif et dont la volonté première était sa réussite. Cette dimension n’est évidemment pas à négliger. Néanmoins, il convient de ne pas limiter la communication avec les élèves au dialogue en fin d’heure. Il semble donc que cette pratique initiale n’empêchait pas les élèves de s’investir dans le cours malgré ma rigidité qu’ils savaient « de façade ».

En ce qui concerne l’incompréhension dû au manque de communication, il convient de

considérer le type de relation qui s’était établi entre l’enseignant et les apprenants à cet égard ainsi que le type de guidage pratiqué lors de l’étude d’un document.

3- Le guidage.

Le guidage des élèves par le professeur lors de la découverte et de l’étude d’un

document est le moment où s’exerce principalement la communication dans la relation pédagogique. A cet instant sont mis en œuvre toute une série de dispositifs afin de permettre la compréhension du document choisi par l’enseignant, que cela soit pour la compréhension globale ou l’étude plus détaillée de celui-ci. Or, la compréhension globale constitue le moment-clé de l’étude car le maître s’assure que les points essentiels et axes directeurs du

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document sont correctement appréhendés, ou le professeur amène les élèves à la compréhension, pour pouvoir par la suite envisager le commentaire plus approfondi. A cet égard, le guidage des élèves et la réorganisation des interventions pour construire la réflexion par l’enseignant en vue de la trace écrite sont de toute importance. En outre, un mauvais guidage peut fabriquer l’incompréhension.

Aux premiers temps, ma pratique du guidage relevait davantage du dirigisme, ce qui

participait de mon autoritarisme. Ainsi, la crainte d’être débordé et ma volonté d’exhaustivité coupaient la communication avec la classe. Absorbé dans ma préparation, les fiches à la main, je portais plus d’attention à celles-ci qu’aux propos des élèves. Je tentais évidemment d’appliquer les enseignements reçus dans le cadre de ma formation, c’est-à-dire laisser la parole libre lors de la découverte d’un document, incitant les interventions par un simple « os escucho. » Cependant, les commentaires désordonnés d’élèves ne s’écoutant pas entre eux et allant du plus général au plus petit détail sans grande importance, sans essayer de compléter ou rebondir sur les propos tenus juste avant, et faisant parfois des hors-sujets ou se contentant de citer le texte, m’amenaient à retourner rapidement à ce dirigisme évoqué. Evidemment, ce n’est pas en premier lieu à l’élève de rebondir sur les dires de ses camarades (même s’il s’agit d’un réflexe à faire acquérir aux élèves pour établir l’interaction en classe) mais plutôt au professeur.

Afin de recentrer les interventions et obtenir les phrases de commentaire allant

constituer la trace écrite, je passais trop facilement de la question ouverte à la question plus fermée (sans toutefois recourir à la question n’autorisant qu’une réponse affirmative ou négative.) De plus, l’oubli d’un point de commentaire finalement dispensable (tel que le fait que le texte soit un récit, ce que les élèves ne parvenaient pas à trouver, et qui n’avait pas grand intérêt pour le commentaire du document en question5) me faisait couper la communication pour le faire jaillir.

Cette attitude confinait à l’interrogatoire, enchaînant les questions les unes après les

autres dès qu’une réponse satisfaisante avait été obtenue et qu’elle avait été répétée par un élève, et c’est au moment de la récapitulation que j’aidais le plus souvent à la construction du raisonnement avec des liens logiques. D’autre part, le comportement de sévérité adopté (yeux baissés, mains derrière le dos, allers et venues devant le tableau…) était caricatural du policier attendant des aveux. Je n’étais pas avec les élèves, j’étais seulement en face d’eux. Je décidai pour remédier à cette situation de laisser la préparation rangée et d’adopter un mot d’ordre simple, « tant pis » (« tant pis si le commentaire n’est pas exhaustif, tant pis si les phrases dites ne correspondent pas en tous points à ce qui avait été prévu.») Mon attitude en fut transformée et je fus plus à l’écoute des élèves, construisant le commentaire avec eux.

Suite à la lecture d’ouvrages théoriques sur la communication en classe, j’appris que

mon comportement initial relevait de la relation complémentaire rigide entre l’enseignant et l’apprenant, dans laquelle le premier donne et le second reçoit et apprend. Il s’agit d’une situation hiérarchique au sein de laquelle le professeur, guide autoritaire, n’est pas disponible aux élèves qui se retrouvent en position de dépendance, attendant sans cesse les sollicitations et l’initiative du maître pour les suivre avec acceptation6.

5 Annexe I. 6 Carlo ROMANO, Jacques SALZER, Enseigner, c’est aussi savoir communiquer.

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Cette relation complémentaire rigide peut d’ailleurs évoluer vers la relation symétrique si l’acceptation n’est qu’apparente et qu’elle s’accompagne d’un refus intérieur. Il y a dès lors affirmation d’identités différentes et rapprochement, collaboration ou au contraire opposition dans la relation enseignant-enseigné. Dans le cas d’une opposition, le risque est l’escalade symétrique qui déclenche le conflit et la rupture dans la relation pédagogique.

Tout échange de communication est symétrique ou complémentaire, mais il existe une

autre forme de relation complémentaire : la relation simple où chacun des protagonistes de la relation attend une contribution de l’autre qui accepte de la fournir. Chacun accepte ici de guider et d’être guidé à son tour, de prendre une initiative puis d’être disponible à suivre l’initiative d’autrui.

Avant que la relation complémentaire rigide qui s’était installée ne dévie vers la

relation symétrique, il fallait donc la transformer en relation complémentaire simple qui ne conçoit pas la communication comme unidirectionnelle mais comme un échange. Par conséquent, il existe une nuance de signification entre « communication » et « échange » qu’il convient de définir.

B- La communication en classe de langue.

1- Qu’est-ce que l’échange ?

Certes, communiquer c’est informer, c’est-à-dire émettre de l’information dans la mesure où le professeur doit transmettre des savoirs et des messages tels que des consignes, des réprimandes, des conseils ou des encouragements. La communication est « le véhicule permettant de réguler le fonctionnement et l’organisation en permettant des échanges entre les êtres humains du système. »7 Ces informations sont en général seulement émises par l’enseignant, considéré comme le détenteur du savoir et maître du déroulement du cours. Néanmoins, le concept de communication en classe ne se borne pas à ces aspects, en ce sens où l’élève est également détenteur d’un savoir et que la communication doit être bidirectionnelle.

En effet, l’avancement dans la leçon dépend de l’investissement des élèves qui

fournissent à l’enseignant matière à discussion, commentaire et points de langue à introduire et à travailler. De plus, l’oral et l’écrit (qu’ils soient compréhension ou expression) sont les deux versants essentiels de la classe de langue ; or, les élèves négligent souvent la dimension orale de la discipline. Sans participation, le professeur ne peut améliorer la langue orale des élèves par la correction. Par ailleurs, l’Ecole est le lieu institué pour que s’échange et se construise du savoir, et la classe constitue l’endroit où la parole est le moyen de production par lequel elle réalise ses objectifs que sont les apprentissages. L’activité communicationnelle est la condition de leur appropriation. En outre, l’intérêt d’une pédagogie communicationnelle est qu’elle réhabilite la parole de l’élève (associé généralement au bavardage, opposé à l’exigence de silence dans une salle de classe) qui devient une nécessité fonctionnelle.

L’enseignant et l’apprenant sont donc tous deux à la fois émetteurs et récepteurs de

messages : le professeur n’est plus seul transmetteur et l’élève n’est pas uniquement considéré

7 Carlo ROMANO, Jacques SALZER, Enseigner, c’est aussi savoir communiquer.

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comme récepteur de savoirs à mémoriser et à assimiler. Dans le cas où l’apprenant ne serait que guidé (comme dans la relation complémentaire rigide), il verrait sa progression et le développement de son autonomie limités, ce qui nuirait aux apprentissages. Plus que de la « communication », je parlerai ainsi davantage « d’échange. »

La métacommunication (la communication sur la communication) n’est également pas

à négliger car l’apprenant doit pouvoir disposer des codes du langage utilisé par le professeur qui possède son propre mode de communication qu’il impose à ses classes afin d’éviter l’incompréhension ou le flou.

2- Les obstacles à l’échange: autorité et dysfonctionnements de la communication.

La relation pédagogique peut être entachée de dysfonctionnements qui entravent

l’échange, et l’autoritarisme a comme conséquence une communication unilatérale en raison du ton de commandement adopté qui ne permet ni discussion, ni négociation ou explicitation. L’enseignant considère de la sorte que ses messages sont univoques alors qu’il y a possibilité qu’une partie de la classe ne comprenne pas ses énoncés et n’ose pas, dans un tel contexte, demander une reformulation ou explication, et ce malgré l’insistance du professeur qui invite les élèves à manifester leur incompréhension.

Les termes employés au début de ma prise de fonction pouvaient effectivement être

difficiles d’accès, notamment lors d’explications grammaticales telles que les emplois du subjonctif en espagnol. Tout juste sorti d’études universitaires durant lesquelles j’avais acquis les termes spécifiques à la linguistique espagnole, j’y recourrais naturellement en classe devant l’expression d’effroi des élèves. Bien que nombre de ces expressions doivent faire l’objet d’un apprentissage et que d’autres sont normalement connus à ce moment du cursus, il est nécessaire de les redéfinir et de procéder à des reformulations plus simples.

D’autre part, la passation des consignes de travail en classe ou pour le cours suivant

posait parfois des problèmes de compréhension que je ne remarquais que lors de la vérification de la réalisation des tâches. Ce problème provenait entre autres du petit tableau qui m’était assigné et qui ne me permettait que très rarement d’y noter les consignes, déjà entièrement occupé par la trace écrite et le vocabulaire d’apprentissage utilisé pendant l’heure de cours. Je donnais donc les consignes de manière orale et je les répétais plusieurs fois pour que les élèves puissent les prendre en note, mais ceux qui n’étaient pas auditifs se trompaient souvent par la suite de numéro d’exercice ou omettaient le réemploi demandé de certaines structures dans l’expression personnelle. Pour un bon suivi des consignes et une bonne compréhension de celles-ci, je devais dorénavant mieux gérer mon temps pour pouvoir effacer la trace écrite et les noter au tableau, puis les faire lire à un élève. Enfin, la demande de reformulation de ce qui est demandé permet de savoir si les consignes sont comprises. Cette technique fait appel à deux types de mémoires, auditive et visuelle, et les résultats observés en ce qui concerne la fréquence de la bonne réalisation des tâches sont dans l’ensemble positifs8. Ainsi, il n’y a pas altération du message par omissions ou ajouts de la part de l’élève.

Le sens des mots est différent pour chacun et peut aussi constituer une source

d’incompréhension. Des définitions vagues ou incomplètes donnent lieu à des interprétations diverses et à une lecture subjective des mots qui provoquent une altération progressive du message. Le problème se situe alors au niveau du décodage. Afin d’enrichir et élucider le

8 Les Cahiers Pédagogiques, « Des langues bien vivantes ».

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lexique d’apprentissage et d’éviter de passer par une traduction systématique des mots au français, il est ainsi judicieux d’illustrer le vocabulaire par des contraires, des synonymes, des paraphrases, voire même des dessins ou des gestes pour éviter les confusions et l’imprécision.

3- La réponse en retour positive.

Communiquer, c’est aussi se comprendre mutuellement, c’est-à-dire émettre puis

recevoir une réponse en retour dans laquelle le récepteur perçoit qu’il a été compris.

En fin d’heure, j’avais parfois des difficultés à savoir si tous les élèves avaient compris ce qui avait été fait et étudié en classe, malgré mon insistance à faire répéter les interventions intéressantes par ceux qui restaient le plus souvent muets et qui étaient les plus faibles, avant une récapitulation en prise de parole continue pour l’écriture de la trace écrite. Mais ce procédé de répétition ne garantit pas la bonne compréhension des phrases et des idées par l’élève répétiteur qui mobilise sa mémoire auditive et non sa réflexion par la réappropriation de l’idée.

La réponse en retour que j’obtenais alors quant à la vérification de la compréhension

était celle de l’évaluation sommative. Il fallait donc privilégier cette réponse en retour par l’évaluation formative à chaque fois qu’un objectif grammatical important était abordé et surtout par les sollicitations de l’enseignant. Ainsi, après une phase de répétition des interventions pertinentes, j’invite les élèves à reformuler une réponse presque équivalente par une question quelque peu différente. L’idée à exprimer reste la même mais doit être l’objet d’une réappropriation par une reformulation de l’élève. De même, le professeur peut faire reprendre les idées dans un ordre différent en amenant les élèves à reconstruire le commentaire à l’aide d’autres liens logiques. Ce point reste encore à travailler au vu de la fréquence à laquelle j’arrive à le pratiquer qui ne me semble pas tout à fait satisfaisante. En effet, ce procédé rend parfois difficile pour les élèves la phase récapitulative à cause de la réorganisation des idées.

Enfin, la formulation fréquente des questions « ¿está claro ?, ¿vale ? », auxquelles les

élèves répondent par l’affirmative ou la négative, sert à devancer tout éventuel problème de compréhension d’un point grammatical, d’une idée ou d’une consigne. C’est alors que l’enseignant envisage de revenir sur un point qui n’aurait pas été compris (« ¿Habéis comprendido ? Bueno, no pasa nada. Lo volvemos a explicar. ¿Quién puede explicarlo a sus compañeros ? »)

Je traite ainsi déjà de la remédiation possible à l’incompréhension dans la relation

enseignant-enseigné, en me centrant sur les mots et les consignes, et que l’autorité trop forte du maître peut provoquer par l’installation d’une barrière à l’échange. A présent, intéressons-nous à tout ce qui relève de la relation à proprement parler qui peut freiner ou favoriser les apprentissages et la communication en palliant à l’autorité du professeur.

C- La remédiation.

1- La relation à l’autre et le savoir-être.

Enseigner et apprendre, c’est d’abord être une personne. Or, la relation professeur-élèves se construit au travers des personnalités en présence. De ce fait, l’échange avec la

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classe dépend de l’envie de chacun qui est elle-même créée par l’instauration de rapports enrichissants. L’autorité ne peut obliger à cet échange, bien au contraire.

Si l’aspect relationnel de l’enseignement est de première importance, le professeur doit

avant tout se connaître (qualités et défauts, points forts et points faibles, caractère et mode de fonctionnement), car l’on doit déjà être bien dans son corps et se sentir bien dans sa peau pour être à l’aise dans la relation à autrui. L’enseignant doit affirmer son identité dans la relation, ce que le statut de professeur stagiaire complique.

Alors faut-il être soi-même ou jouer un rôle ? L’espace de la salle de classe peut être

assimilée au lieu du jeu de rôles, et le professeur de langue est en représentation permanente, incitant à la communication par son jeu d’acteur (il mime, déclare, s’exclame, chuchote…) Mais est-il préférable de se fondre totalement dans un rôle (celui de la personne autoritaire en l’occurrence), dans une identité qui n’est pas la sienne ou d’être naturel ? L’enseignant qui n’a pas confiance en lui aura tendance à aller vers cette prise de rôle constante. Néanmoins, le degré d’authenticité dans la relation avec l’apprenant rend possible les apprentissages par l’adhésion de ce dernier à une personne et non à une image fermée. L’ouverture aux élèves par l’affichage d’une identité à la fois ferme (qui reste la même, est cohérente) et souple (qui s’adapte aux diverses situations) garantit en retour l’échange avec la classe qui en fera de même. Cependant, se montrer trop naturel ne permet pas de garder la distance nécessaire avec les élèves, garante du maintien de relations pédagogiques et non amicales. Ce fut la conclusion tirée de certaines expériences faites avec mes classes qui, certainement inconsciemment, suite à mon changement de comportement allant dans le sens tout juste exposé, m’ont quelquefois tutoyé, s’en excusant aussitôt. Dès lors, il faut essayer d’arriver à la plus grande coïncidence entre l’être et le paraître, autrement dit entre l’être et le savoir-être.

D’autre part, il est primordial de reconnaître la personne, de faire preuve de respect et

d’écoute envers ses élèves qui attendent de l’attention plus que des savoirs. Il faut notamment savoir faire preuve d’empathie et de compréhension (sans toutefois tomber dans l’excès face à certains qui se trouvent toujours des justifications et des excuses pour tout.) Ainsi, le déni de la personne est l’ennemi de bons rapports avec les apprenants, et afin d’entretenir une bonne communication, je m’obligeai pendant l’heure de cours à regarder chaque élève au moins deux ou trois fois (exercice au demeurant extrêmement difficile) pour prendre en compte tous les membres de la classe, et aussi pour pouvoir déceler dans les regards la construction d’une idée prête à être exposée.

En outre, je pense que la notion de justice est toute relative : bien qu’ayant établi des

règles dans la classe et que la valeur d’équité entre les élèves reste une obligation pour le professeur, celui-ci doit également savoir adapter ses exigences et tenter de comprendre certaines situations. L’autorité du professeur peut être soumise à quelques variations de sévérité ou de souplesse s’il ne veut pas courir le risque de créer une rupture avec des élèves en grande difficulté, que ces difficultés soient d’ordre scolaire ou social. La communication avec ces élèves est à privilégier. Il m’a notamment été donné l’occasion d’être confronté à ces problèmes avec une élève dont le contexte familial particulier avait entraîné un rejet total de l’Ecole et de la figure masculine. L’adoption d’une attitude compréhensive par le maître, pourtant difficilement applicable en raison du comportement irrespectueux de la personne en question, a permis d’obtenir quelques résultats, bien que modestes.

Dans une même logique, la négociation, qu’il est au début délicat d’envisager par le

professeur qui souhaite imposer son autorité, doit être pratiquée avec parcimonie. Le recours à

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la négociation dit ainsi aux élèves : « je prends en compte votre opinion, vos raisons, je tente de les comprendre, et je vous consulte avant de prendre moi-même la décision qui me revient. » Le point souvent objet de négociation est celui de la date des évaluations. Loin de fragiliser l’autorité de l’enseignant, cette pratique la renforce par la reconnaissance des élèves.

Tous les aspects du rapport à autrui jusqu’ici développés convergent vers le rôle de

l’affectivité dans la relation enseignant-enseigné qui est un moteur d’apprentissage. En opposition à mes premières représentations de la perception possible du professeur par les élèves (« peut importe qu’ils m’apprécient ou non, leurs sentiments envers ma personne n’aura aucune incidence sur la qualité de l’enseignement et les apprentissages »), l’affectif en classe parasite ou favorise l’acquisition des savoirs et des savoir-faire. En effet, les contenus transmis apparaissent toujours au travers d’une relation (comme le fond apparaît à travers la forme qui lui donne du sens.) Il existe donc deux niveaux propres à toute communication : le contenu et la relation. Les contenus reçus sont par conséquent emprunts de la relation. « Communiquer n’est pas seulement échanger des messages, mais aussi mettre en jeu et en cause son moi social et affectif »9. La bonne acquisition des savoirs entre donc dans une logique d’attirance ou de répulsion vis-à-vis de la personne du professeur.

Il s’agit de créer un climat propice à l’échange et par là même aux apprentissages. A

cet effet, l’approche des apprentissages et de la communication par le jeu suscite la participation dans une atmosphère plus sereine et moins imprégnée de l’autorité du professeur.

2- L’approche par le jeu.

Face au peu d’initiatives prises parfois à l’oral par mes élèves, surtout en 4ème, je

m’attelai à diversifier les approches pour les susciter ou les relancer, en tentant de pallier à l’autorité des débuts qui avait pu installer une certaine crainte de l’enseignant. En outre, afin d’éviter l’ennui, il est toujours judicieux de changer plusieurs fois de techniques visant à relancer la participation orale et l’intérêt dans une même heure de cours.

Dans cet esprit, j’entrepris des expériences de jeux en classe pour créer un climat plus

détendu où les élèves seraient moins focalisés sur l’évaluation du professeur de leurs interventions, comme s’il s’agissait d’une pause dans les apprentissages alors qu’il n’en est rien.

Tout d’abord, je mis en place le jeu des enchères. Certains élèves possèdent souvent

les idées nécessaires à l’élaboration du commentaire d’un document ou ont la matière pour participer à des débats, corriger ou compléter les phrases d’un camarade, mais ceux-ci n’osent pas intervenir. Le système des enchères de mains et d’idées permet dans ce cas de redonner du rythme au cours et d’obtenir la participation des moins volontaires. Cette opération permet entre autres de ne pas avoir à interroger toujours les mêmes élèves et de pouvoir choisir parmi plusieurs réponses potentielles : « ¡Subasta ! A ver, ¿cuántas manos se levantan para contestar ? Una, dos, tres… ¿Quién llega a siete? », et ainsi de suite jusqu’à ce que nombre d’élèves aient une idée à proposer à la classe et que le professeur puisse solliciter en premier les plus faibles et les plus muets. Ce recours aux enchères, que j’avais observé dans les cours de ma conseillère pédagogique de lycée et que j’avais transféré à mes classes, donne de bons résultats, les élèves se prenant facilement au jeu.

9 Les Cahiers Pédagogiques, « La Communication dans la classe ».

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De même, le jeu de la phrase la plus longue permet à la fois d’obliger les élèves à construire et formuler des phrases plus complexes et de ne pas faire de l’approche de certains documents, dont la teneur linguistique est limitée, des supports ennuyeux. Je l’utilisai par exemple lors de l’étude de cartes comme celle des autonomies espagnoles ou celle des pays hispanophones d’Amérique latine. Ce jeu permettait de mobiliser un lexique important de la situation géographique et spatiale avec de nombreux adverbes de lieu.

Grâce à ces dispositifs, ma volonté était également de me défaire d’un rôle informatif

autoritaire pour aller vers un rôle souple d’organisateur de l’information. Cependant, ces dispositifs ne sont pas applicables à toute situation et à tout support. Le recours au jeu comme moyen ludique d’apprentissage compense l’autorité du professeur par un apport d’échange avec les élèves et entre eux.

3- L’autorité obstacle et vecteur d’échange et la communication source d’autorité.

L’autoritarisme constitue par conséquent un frein à l’échange et à la compréhension en

classe par l’installation d’une relation complémentaire de type rigide entre enseignant et enseignés et qui rapproche l’acte pédagogique du modèle informatif, loin des instructions officielles pour l’enseignement de l’espagnol : « Le professeur doit pratiquer une pédagogie active, c’est-à-dire une pédagogie qui faciliterait en particulier à l’oral aussi bien qu’à l’écrit l’expression personnelle et la communication, où comme au collège il organiserait son cours de manière à laisser une grande place à l’expression orale. » Néanmoins, sans une autorité ferme imposée des le début de l’année scolaire, l’échange entre les différents protagonistes de la relation pédagogique ne peut avoir lieu dans la mesure où cette autorité permet de créer les conditions préalables à la communication (silence propice à l’écoute et à la réflexion, règles de la communication auxquelles les élèves doivent obéir pour des échanges ordonnés, respect de la parole d’autrui.)

Toutefois, une autorité-pouvoir ne doit pas subsister et doit évoluer vers une autorité

de compétence, notamment par l’installation d’une bonne communication au sein de la classe qui viendrait la renforcer. En outre, la recherche et les apprentissages que permet l’établissement de bonnes relations de communication imposent l’écoute et le calme qui n’appellent pas l’exercice de l’autorité pour des problèmes d’ordre disciplinaire.

Comment dans cette mesure arriver à concilier autorité et communication sans passer

d’un extrême à l’autre ? Car s’il y a évolution obligatoire de l’autorité initiale au service d’une pédagogie communicationnelle, il convient de trouver le juste milieu entre les deux aspects fondamentaux de la relation pédagogique puisque, comme démontré précédemment, autorité et communication peuvent réciproquement se détruire ou s’enrichir. En somme, qu’est-ce qu’une bonne relation pédagogique ?

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III

La juste distance entre autorité et communication : qu’est-ce qu’une bonne relation pédagogique ?

A- Les dilemmes de la communication.

1- La participation orale et l’interaction.

Le professeur vit des contradictions permanentes entre la nécessité d’établir son autorité sur la classe et le besoin de communication. En effet, l’enseignant se retrouve dans une position inconfortable, en ce sens où il doit réprimer tout écart de conduite défavorisant l’échange tout en ayant besoin de la coopération active des élèves et leur investissement dans la communication, en veillant donc à entretenir l’envie de participer oralement et à ne pas couper toute prise de parole.

La règle de base à respecter est celle du silence de rigueur pour créer les conditions

propices au travail. La parole synonyme de bavardage est alors dérangeante. Mais ce silence doit en même temps être régulièrement interrompu quand une participation orale est sollicitée. Le silence peut dans ce cas devenir pesant pour le professeur qui le considère comme un signe du manque d’intérêt porté au cours et à la matière qu’il enseigne, d’indifférence ou de résistance, voire même le reflet possible des mauvais choix de l’enseignant dans les supports proposés ou de sa mauvaise pédagogie pour susciter les interventions. Or, la participation orale est soumise à deux règles essentielles : le lever de doigt pour demander la parole et l’écoute du locuteur à qui le professeur a donné la parole.

Dans mes classes, principalement en 3ème, les interventions spontanées (sans demande

de prise de parole) étaient courantes. Voulant faire observer la règle du lever de doigt, j’admonestais les élèves recourrant à ce type d’intervention, mais mes rappels à l’ordre n’avaient qu’un effet limité. Alors je décidai de ne prêter aucune attention à ces élèves et à leur propos jusqu’à ce qu’ils lèvent la main, convaincu que l’adoption de cette attitude dans ce cas particulier aurait plus d’impact, ce qui fonctionne pour ceux voulant fortement participer en classe.

Toutefois, comment contrôler la prise de parole sans limiter les échanges et brider la

spontanéité, et donc le plaisir et l’envie de s’investir dans le cours ? Muni de la volonté d’imposer les règles de la communication, je fus ainsi confronté à des caractères affirmés qui ne supportaient pas d’avoir à être repris sur leur manière de participer au cours qui partait d’un bon sentiment. L’idée proposée était souvent bonne, mais mon rappel à l’ordre pour la faire répéter après demande de parole faite au professeur les vexait, et ils renonçaient à s’exprimer malgré mes encouragements, et la classe perdait alors une pensée pertinente. Par la suite, il m’arrivait à cause de cela de tout de même prendre en compte ces interventions spontanées, rompant momentanément les règles imposées, ce qui introduisait de l’incohérence dans ma pratique pédagogique et fragilisait mon autorité. J’opte donc à présent pour une ligne de conduite reprenant les principes des débuts, au risque de faire taire certains qui, à mesure

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de l’avancement dans l’année, se verront obligés de respecter les règles s’ils souhaitent réellement soumettre leurs idées.

De même, comment gérer les tempéraments extrêmement actifs et qui souhaiteraient

qu’on leur donne sans cesse la parole ? Il n’est effectivement pas rare que dans une classe un petit nombre d’élèves lèvent constamment la main pendant l’heure de cours pour quelque motif que cela soit (pour répondre à une question, ajouter un point de réflexion, demander quelque chose n’ayant aucun rapport avec l’activité en cours…) Face à cette situation, je sollicite bien sûr fréquemment leur participation, mais je laisse aussi l’opportunité aux autres d’intervenir. Ainsi, j’attends que d’autres élèves aient le temps de se manifester, ce qui exaspère et décourage parfois les plus volontaires qui voient le professeur espérer une participation autre alors qu’ils sont les seuls pendant un moment à lever la main. Ils perçoivent souvent cet acte comme un déni de leur personne, ce qui n’est aucunement le cas. Il convient à cette occasion d’expliquer que « no es una clase particular y todos tienen el derecho de expresar sus ideas. » Il faut faire comprendre à l’élève qu’il a été vu et que son envie de participation est encouragée (par un regard ou une phrase), mais que la parole cette fois-ci ne lui sera donnée que plus tard, lorsque d’autres auront exposé leur réflexion.

Un autre point problématique de la communication opposé à l’autorité de l’enseignant

est celui du bavardage. En effet, la seule communication acceptée en classe est celle que le professeur organise autour d’un sujet prédéfini, tout le reste constituant du bruit parasite à une bonne communication et aux apprentissages. Cependant, on ne peut éviter que les élèves aient recours à un autre type d’échange entre eux. Les élèves ressentent un besoin impératif de discuter de sujets étrangers à l’activité ou de parler de cette activité sur un mode critique. Le professeur doit évidemment faire en sorte de limiter ces conduites et imposer son autorité, mais toute communication entre les apprenants échappant au contrôle de l’enseignant n’est pas préjudiciable aux apprentissages. Outre le fait qu’il est vital pour l’élève d’avoir quelques moments de répit dans le cours durant lesquels il s’échappe, certains échanges sont en rapport avec les savoirs en cours d’acquisition : les élèves peuvent construire une idée à deux, se demander un mot de vocabulaire oublié ou de l’aide pour éviter de commettre une erreur avant d’intervenir, s’enquérir de précisions sur un point qui n’a pas été compris…

Vis-à-vis de ces conduites que je considérais comme déviantes, je rappelais les élèves

à l’ordre en leur signalant que pour toute question ou explication ils devaient s’adresser uniquement à moi qui me posais comme l’organisateur des échanges. Je ne tolérais aucun son parasite et me considérais par là comme seul interlocuteur des apprenants pour de telles demandes. Néanmoins, cette requête rendait impossible l’interaction qui est pourtant l’une des compétences à travailler en classe de langue.

Alors quel type d’échanges entre les apprenants doit-on tolérer ou voire même inciter ?

Si les règles de la communication sont respectées avec trop de rigueur, elles privent l’élève de liberté et d’émotions profitables à l’investissement dans la discipline enseignée. Certains documents de nature humoristique provoquaient naturellement les réactions amusées ou indignées des élèves qui éprouvaient sur le moment l’envie d’échanger leur sentiment qu’il est nécessaire de laisser s’exprimer, car si l’élève ressent le besoin d’émettre une critique ou un commentaire il n’est pas disponible pour apprendre. La meilleure solution serait alors de profiter de ces réactions pour faire jaillir l’expression des sentiments et émotions adressés à toute la classe et source d’apprentissages (notamment au moyen des tournures affectives : « a mí me gusta, me choca, me extraña, me sorprende, me hace gracia… ») Il m’est encore difficile de mettre en place ces outils de communication auxquels les élèves préfèrent

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fréquemment l’habituel « este documento resulta… » qu’ils réservent pour la conclusion, malgré mon insistance à ce qu’ils emploient les tournures indirectes.

Mais, dès lors, comment ne pas complètement canaliser la communication didactique

sans prendre le risque de fragiliser l’autorité du professeur et de défavoriser les apprentissages par la déviance de la communication vers des échanges improductifs ? Je dirais tout simplement en autorisant certaines formes d’échange naturel et profitable aux apprentissages et à l’interaction, et en le faisant savoir. Le soufflage entre les élèves est notamment accepté et incité. La conversation ne devient bavardage que lorsqu’elle échappe au contrôle de l’enseignant qui se pose comme le garant des échanges et de leur contenu.

A présent, il convient de s’intéresser plus précisément à un autre dilemme de la

communication qui entre en relation directe avec l’exercice de l’autorité du professeur dans mon cas : la gestion de l’erreur.

2- La gestion de l’erreur : norme langagière et idée, correction et valorisation.

La correction des interventions par le professeur est le moment où peut s’exprimer de

manière exagérée l’autorité de l’enseignant. En effet, le ton sec adopté lors de cette correction, accompagné de la coupure systématique de la parole de l’élève à chaque fois qu’une erreur grammaticale ou syntaxique est commise, peut décourager les élèves et les réduire au silence. Ils pourraient également ainsi perdre le fil de leur pensée, coupés dans leur élan, l’esprit alors tourné vers leur autocorrection plus que vers l’idée qu’ils voulaient proposer. Le maître donne dans de tels cas plus d’importance à la correction de la forme au lieu de valoriser la réflexion et l’effort fourni.

Je correspondais tout à fait à cette description de l’enseignant qui reprend les élèves

sur la norme langagière et ne prenais pas assez en compte l’aspect pertinent des interventions et les réussites de l’élève. Mais comment travailler avec l’erreur sans fragiliser la communication ? Et comment concilier norme langagière et impératif de communication ?

Tout d’abord, même si l’amélioration de la langue des apprenants est une exigence

pour le professeur, les apprentissages doivent se faire en situation de communication, ce à quoi l’enseignant doit donner la priorité. C’est ainsi que j’entrepris de ne procéder à la correction des interventions ou d’inviter la classe à réfléchir sur une erreur qu’après que l’élève ait terminé ses propos, évitant de couper l’échange par un repérage trop sévère de l’erreur.

De plus, bien que le professeur doive proscrire l’erreur et les contre-sens, il convient

tout de même de valoriser l’élève par un repérage des réussites l’invitant à poursuivre les efforts avant de procéder à la correction. Une erreur de conjugaison ou de personne occultait par exemple à mes yeux les efforts de formulation d’une phrase complexe ponctuée de liens logiques et dont l’idée était pertinente.

Quant aux valorisations qui permettent d’encourager et de faire évoluer la perception

du professeur et le ressenti de son autorité, elles ne doivent pas se limiter à un « ¡muy bien ! » constant qui perdrait de son sens et de ses effets. Je fis donc l’effort de les diversifier et d’établir une sorte d’échelle dans l’expression des réussites des élèves et de ma satisfaction : « ¡está bien !, ¡muy bien !, ¡requetebién !, ¡eso es !, ¡genial !, ¡guay !, ¡perfecto !, ¡excelente !... »

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Il existe également une alternative à l’intervention orale du professeur afin de faire

comprendre à l’élève son erreur pour qu’il la corrige ou afin de valoriser l’élève sans pour autant couper l’échange. Il suffit pour cela de passer par les canaux de communication non verbaux.

B- Créer un climat de confiance : vers une autorité bienveillante.

1- La communication non verbale : outil pédagogique et disciplinaire.

La communication au sens large désigne l’émission, volontaire ou non, de messages à l’égard de quelqu’un d’autre. Dès lors, ces messages empruntent également des canaux de communication non verbaux. Notre attitude, notre posture, nos gestes, nos mimiques, notre regard, notre voix, voire même notre aspect extérieur et notre habillement envoient des messages et font sens auprès de celui qui les perçoit. Il est donc impossible de ne pas communiquer puisque même le refus d’entrer en relation avec autrui par une attitude fermée envoie déjà un message.

Or, la communication non verbale permet d’allier deux composantes de l’acte

pédagogique, autorité et communication : les canaux de communication non verbaux constituent en effet à la fois des outils pédagogiques (de contact, d’échange) et disciplinaires (de gestion de classe.)

Tout d’abord, la posture que j’adoptais au départ de rigidité, les mains derrière le dos,

traduisaient un certain malaise du maître qui se communique à la classe et imprègne l’atmosphère de travail. Je tentai ainsi plusieurs attitudes possibles pouvant signifier l’aisance, le bien-être avec la classe (ce qui était le cas après quelques semaines de cours) : mains dans les poches, gestes signalant l’ouverture aux élèves comme lorsqu’il faut donner la parole à un élève (mouvement du bras dans sa direction avec la paume de la main ouverte, buste penché en avant pour signifier l’écoute.) J’essayai également l’assise sur le bureau ou une table au milieu des élèves dans une salle dont les tables étaient disposées en U de manière à communiquer la détente et la relaxation.

De même, le déplacement du corps dans l’espace permet d’établir le contact avec les

élèves, sans toutefois tomber dans l’excès du va-et-vient continuel stressant ou signe d’angoisse. Se placer à l’extrémité de la salle, loin d’un élève qui ne parle pas assez fort, ce qui ne garantit pas l’écoute et la compréhension de tous, oblige celui-ci à hausser la voix pour que le professeur l’entende, de même que la classe. Cela évite d’avoir à couper la parole de l’intervenant pour lui dire l’habituel « habla más alto por favor. »

Par ailleurs, concernant la gestion de l’erreur, les mimiques et grimaces, tout comme

certains gestes, permettent d’économiser des mots et de ne pas interrompre l’échange, faisant comprendre au locuteur initié à ce code l’erreur à rectifier.

Le sourire est également à afficher le plus souvent possible pour créer un climat de

détente et installer le plaisir de l’acte pédagogique. Il peut aussi remplacer la valorisation orale, tout comme le geste (hochement de tête pour une bonne réponse…)

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Le regard, outil important du professeur qui établit un contact avec les élèves sans avoir à recourir aux mots, possède des vertus à la fois pédagogiques et disciplinaires car il peut encourager l’élève ou au contraire le rappeler à l’ordre par la gamme très étendue de sentiments qu’il sert à exprimer. En effet, le regard peut signifier l’incertitude, le doute (par un haussement de sourcil par exemple), l’enthousiasme ou encore la désapprobation et la défense lorsqu’il se fait dur. De plus, balayer la classe du regard sert à avoir un contrôle disciplinaire sur tous les élèves, mais aussi à percevoir des messages des élèves qui eux aussi utilisent les canaux non verbaux de la communication (pour percevoir leur incompréhension, leur intention de participer ou leur hésitation à intervenir en raison de leur doute ou d’un manque de confiance en soi.) Dès lors, geste et regard peuvent être combinés à deux fins différentes : maintenir la communication avec un élève et en réprimander un autre sans passer par le discours qui interrompt l’échange avec le premier (une main se tourne vers l’élève intervenant lui signifiant qu’il est écouté alors que le regard se pose sur cet autre élève dissipé.) Par conséquent, le regard neutre est l’ennemi d’une bonne communication et ne renvoie qu’à l’autorité du maître.

De ce fait, il convient de moduler son regard, tout comme sa voix, outil lui aussi de

communication et de gestion de classe. Le ton monocorde de sévérité et de rigidité ne doit être de mise en toutes circonstances. En outre, il est nécessaire de poser sa voix et de varier les intonations selon le message que l’on souhaite délivrer de défense, de satisfaction ou d’encouragement.

L’enseignant doit par ailleurs veiller à ce que ses mots n’entrent pas en contradiction

avec les messages non verbaux qu’il envoie au risque de plonger les élèves dans l’incompréhension et de ne pas obtenir l’effet désiré. Ainsi, une réprimande accompagnée d’un sourire qui se veut sarcastique pourrait énerver l’élève au lieu de le réduire au silence ou faire percevoir le rappel à l’ordre comme un encouragement puisque le professeur semble amusé.

L’utilisation de tous ces éléments de la communication non verbale participe de

l’instauration d’un climat de confiance entre le groupe-classe et le maître car ils montrent pour beaucoup la bienveillance du professeur envers ses élèves. La confiance est un point crucial de la bonne transmission et acquisition des savoirs et des savoir-faire ainsi que de l’installation d’une communication saine et profitable au sein de la classe, opposé à la crainte que peut provoquer une autorité trop forte. Regard, gestes et voix, outils de contrôle du groupe et régulant les échanges, permettent de trouver le juste milieu entre autorité et communication et d’arriver à s’approcher d’une bonne relation pédagogique.

Dans le but de consolider le climat de confiance favorable aux apprentissages, il faut

également se pencher sur le rôle de l’humour dans la relation pédagogique qui peut compenser une autorité trop présente.

2- Le rôle de l’humour.

Le rire en classe me faisait peur, et mon absence d’humour avec mes classes participait

de ma rigidité pédagogique et entravait la communication. Pour moi, l’espace de la classe était le lieu du sérieux et je craignais que les rires ne dévient à mes dépends. J’avais donc l’habitude de les réprimer, croyant qu’ils entraîneraient la perte de mon autorité sur le groupe. On entend d’ailleurs souvent le conseil « attends un peu avant de rire avec tes élèves, impose

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d’abord ton autorité. » Mais quand les règles et le respect ont été installés, il n’y a plus à craindre de rire et d’utiliser l’humour pour favoriser les apprentissages et la communication.

La prise de parole et les apprentissages sont plus aisés dans une atmosphère détendue.

Le rire, associé à la notion de plaisir, met en confiance les élèves et installe la complicité entre l’apprenant et l’enseignant. Mais rire suppose une bonne maîtrise de l’outil et il faut éviter les excès comme la moquerie ou le sarcasme créateurs d’humiliation. Pour cela, le professeur doit rire « avec » les élèves, jamais « contre », pour que s’installe la complicité. Et si les élèves rient sans que cela soit voulu, se mettre à rire avec eux permet de détourner la situation. De même, il ne faut pas se forcer à être drôle au risque d’être soi-même la risée des élèves si l’humour déployé n’atteint pas sa cible. En l’occurrence, je me crois doué d’un certain sens de l’humour, mais il est vrai que j’avais du mal à le montrer et à l’utiliser en classe.

Le recours à l’humour est opportun lorsqu’il concerne ma maladresse évoquée

auparavant. En effet, l’autodérision dans de pareils cas ou un simple regard complice échangé avec les élèves permettent de détourner la situation à son profit et d’éviter la déviance vers un exercice de l’autorité inapproprié. L’enseignant autorise alors les rires ou les provoque, et ils n’échappent pas ainsi à son contrôle, instaurant une petite pause récréative dans la leçon dont la fin est signalée par la remise au travail de la classe.

L’humour facilite également la mémorisation de la leçon car il sollicite l’aire affective

et émotive de la personne. Le choix par le professeur de documents de nature humoristique crée ainsi le plaisir, et donc l’apprentissage. Ceci se note par la réaction en général intéressée des élèves pour l’activité en cours sur le document en question. Je m’efforce par conséquent de proposer le plus souvent possible ce genre de documents en sachant à l’avance qu’il faudra faire comprendre l’humour qu’il utilise et savoir provoquer le rire au moment opportun, tout en analysant les procédés humoristiques mis en œuvre : « Navidades con Mafalda »10, « Humor y moral » (bandes dessinées), « La perrita Pipín » (publicité vidéo), dessins animés de Mafalda…11 C’est alors que le professeur peut s’autoriser le rire, instant qu’il ne doit pas manquer. Je ratai notamment ce moment avec la classe de seconde à laquelle il m’avait été donné de faire cours durant le stage de pratique accompagnée, pendant l’étude d’un dessin animé de Quino (« ¡ Vaya memoria ! »), emprunt d’humour noir, créant ainsi une distance entre moi et la classe.

Il s’agit dès lors d’une autorité bienveillante du professeur par le truchement de

l’humour, et par un certain accompagnement de l’élève. A cet égard, l’enseignant ne doit pas négliger toutes les étapes du déroulement du cours visant à accompagner les élèves, à travailler avec eux, et optimiser la part importante de la communication écrite dans le développement des apprentissages et de la relation avec l’élève.

3- L’accompagnement et la communication écrite.

Afin d’arriver à se rapprocher l’autorité bienveillante et de compétence, je devais me

faire accompagnateur de l’élève dans les apprentissages, qui pourrait renvoyer à un apprentissage autonome sous la tutelle du professeur qui offre une aide individualisée. L’optimisation d’un outil parfois négligé de la communication allait m’y aider : la communication écrite entre l’apprenant et l’enseignant.

10 Annexe II 11 Annexe III

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Dans cette optique, je mis en place une fiche d’autoévaluation de l’oral trimestrielle, dont les modèles de conception m’avaient été proposés en formation disciplinaire à l’IUFM, que j’avais quelque peu modifiés selon mes critères de notation et par l’ajout d’une catégorie pour recueillir de l’information auprès de l’élève : une case où il note ce qu’il pense de sa propre participation et ce qu’il doit selon lui améliorer et comment.12 La lecture de cette catégorie « remarques » permet de mieux connaître l’élève et de l’aider dans le bon sens (certains se considèrent comme de mauvais élèves en raison de leurs interventions spontanées, d’autres se sous-évaluent et n’ont pas conscience de leurs points forts…) Dans le même but d’accompagnement et du développement de l’autonomie dans l’apprentissage, je donne à chaque élève dans les appréciations des évaluations sommatives un ou deux objectifs à atteindre pour la fois suivante en fonction d’une difficulté particulière de l’élève.13 Cet objectif, que l’élève doit prendre en compte lors de la relecture de son devoir, donne lieu à des points supplémentaires s’il est atteint. Dans cette logique, l’évaluation sommative devient aussi en partie formative : on continue d’apprendre et de s’améliorer même en fin de progression.

D’autre part, dans le but de développer l’autonomie sous tutelle des élèves, je découpe

le cours en plusieurs étapes jusqu’à l’obtention d’une trace écrite faite par eux. Avant de procéder à l’écriture de celle-ci, et après la phase récapitulative, sur le modèle de ma tutrice, je pose souvent des questions sur le document tout juste étudié auxquelles les élèves répondent par écrit. Cela oblige les élèves à une meilleure écoute. Un élève est alors invité à écrire au tableau ses réponses tandis que je passe dans les rangs pour aider à la correction individuelle. J’optai aussi pour la trace écrite lacunaire à compléter, et dont les trous correspondent aux objectifs grammaticaux et à une partie du lexique d’apprentissage. Ces dispositifs que j’alterne permettent une meilleure mémorisation de la leçon et le travail de la compétence d’expression écrite.

A la lumière de tout ce qui a été expérimenté et analysé jusqu’à présent, qu’est-ce

qu’un bon exercice de l’autorité et qu’est-ce qu’une bonne relation pédagogique ? C- Qu’est-ce qu’un bonne relation pédagogique ?

1- Autorité et/ou communication ?

La relation enseignant-enseigné est de type autoritaire dans la mesure où le professeur impose ses exigences, qu’elles soient morales ou de travail. En effet, les élèves doivent respecter les valeurs morales de l’enseignant que celui-ci explique à sa classe pour qu’elle les accepte et les partage : c’est alors qu’intervient l’échange. Ces exigences morales sans lesquelles la relation pédagogique ne peut être saine sont celles de respect, d’écoute, de compréhension, d’honnêteté et de transparence.

Ces valeurs doivent être pratiquées de manière réciproque dans la relation. En

l’occurrence, le professeur se doit d’être cohérent et transparent quant à sa pédagogie. Il détaille à ses classes ses critères de notation, et a même la possibilité de les soumettre à une élaboration commune avec les élèves. De ce fait, la classe se donne elle-même des exigences de travail. Ainsi, exigences de travail et exigences morales se fondent. Les règles de

12 Annexe IV 13 Annexe V

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fonctionnement de la classe peuvent elles aussi être soumises à l’appréciation des élèves, créant le débat et l’échange permettant à l’enseignant d’expliciter le pourquoi de telles règles : « si j’exige que…, c’est pour ou parce que… », « ceci est interdit parce que… » L’élaboration commune de critères, d’exigences ou de règles, avec une décision finale qui revient évidemment au maître, les rend vivants et leur donne du sens, et l’autorité devient bienveillante. De même, la fiche d’autoévaluation de la participation orale vient renforcer cet aspect et crée le climat de confiance dans la relation. La notation, associée au pouvoir décisionnaire et autoritaire du professeur, n’est alors plus ressentie de la sorte.

Autorité et communication se rejoignent par là même dans un rapport de presque

égalité entre l’enseignant et l’apprenant à qui l’on transfert une part de responsabilité. Par le dialogue sur les exigences, l’élève ne se retrouve pas dans la position d’infériorité d’un rapport dominant-dominé. Echange et autorité s’enrichissent et se consolident de cette manière par le juste équilibre entre distance et proximité avec l’apprenant.

Mais, dans l’objectif de trouver cette juste mesure toujours relative au groupe-classe

que l’on a en face de soi, il faut adapter l’exercice de l’autorité aux caractéristiques de celui-ci.

2- Adapter l’exercice de l’autorité et de la communication au groupe-classe.

Toute classe est particulière, et l’on ne peut adopter une attitude uniforme et avoir des

exigences semblables pour deux classes diverses du fait des tempéraments et caractères singuliers qui les composent. Pourtant, je me comportais de la même manière avec mes deux classes, ce qui avait des effets bien opposés d’un niveau à l’autre.

Ma rigidité pédagogique inhibait beaucoup plus les élèves de 4ème qui participaient

moins que les 3èmes, probablement moins impressionnables. L’échange avec la classe de 4ème devait être un aspect à privilégier davantage afin de libérer la parole et favoriser les apprentissages. De plus, les élèves débutants en espagnol, certainement accompagnés d’une certaine appréhension puisqu’il s’agit pour eux d’une langue nouvelle, et que les méthodes de travail et les exigences sont parfois différentes d’une matière à l’autre, sont à mettre rapidement en confiance. J’adoptai par conséquent une attitude plus souple puisque, d’autre part, ils ne posaient pas de réels problèmes de discipline. La communication y est à développer, la réponse en retour à cultiver, et la vitesse de l’apprentissage est plus lente.

De même, le bon calibrage de l’activité permet de diminuer le risque d’éventuels

problèmes de compréhension et de ne pas trop « faire violence » à l’élève au regard des apprentissages, ce qu’il ressentirait comme une autorité supplémentaire de la part de l’enseignant qui oblige à aller plus vite, plus loin et à apprendre toujours davantage. Angoissé par le programme à tenir, je prévoyais trop d’apprentissages dans une même séance, sur un même document ou dans une même progression. Par exemple, en 3ème, lors de l’apprentissage du subjonctif et de ses emplois, j’introduisis « querer que, desear que, aconsejar que, pedir que, tener miedo de que, quizás, tal vez, acaso, es posible que » dans une même progression, ce qui était exagéré.

Des objectifs grammaticaux et linguistiques trop nombreux saturent la communication

et empêchent le bon apprentissage. « Pour qu’une personne fonctionne au maximum de son

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activité intellectuelle, elle doit être sollicitée dans un créneau intermédiaire. »14 L’activité doit contenir des apprentissages à réactiver, connus et rassurants, sur lesquels s’appuyer pour poursuivre, et de nouveaux apprentissages en nombre raisonnable afin que l’activité soit assez difficile pour qu’elle intéresse, mais sans excès afin qu’elle ne décourage pas. Apprendre suppose que la séance comporte la réactivation des connaissances et un enjeu visant à en construire de nouvelles.

D’autre part, tout comme le niveau d’exigence est relatif au niveau de la classe, il est

nécessaire d’avoir un certain niveau de tolérance, sans quoi le professeur devient « l’Inquisiteur » à l’affût de la moindre incartade, parfois involontaire telle la règle qui tombe ou la demande d’un blanc correcteur injustement pris comme le signe d’une intention possible de copiage sur le voisin, coupant la leçon inutilement et privant les élèves d’une liberté profitable à l’envie d’apprendre. Dès lors, quelques chuchotements discrets et isolés ne nuisent pas à l’acte pédagogique.

14 Les Cahiers Pédagogiques, « La Communication dans la classe ».

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Conclusion.

Le bon exercice de l’autorité est relatif au groupe-classe auquel le professeur fait cours, et en ce point réside la difficulté de l’enseignement, d’autant plus que le public qui est le nôtre connaît une évolution dans les comportements et dans le rapport au savoir et que le concept d’autorité est en pleine redéfinition. L’autorité et la communication en classe de langue doivent sans cesse s’adapter à la classe et à ses caractéristiques, tout en sachant qu’un mauvais dosage de ceux-ci peut fragiliser la relation pédagogique et entraver les apprentissages. Pour cela, l’enseignant teste plusieurs attitudes et dispositifs visant à percevoir les limites de leur application, tout comme les élèves testent le professeur pour savoir jusqu’où son autorité s’applique. La relation pédagogique, que constitue le rapport entre l’enseignant et l’apprenant et leur rapport à tous deux au savoir, est précaire, et le maître doit trouver dans la relation la juste mesure entre autorité et communication. Ainsi, le bon exercice de l’autorité serait celui de l’autorité bienveillante qui garantit les apprentissages par l’accompagnement de l’élève et la création de bonnes conditions de travail que permet l’adaptation adéquate de celle-ci, alors justifiée et reconnue, aux diverses situations de classes (de la fermeté pour des rappels à l’ordre à la souplesse lorsque doit s’appliquer une certaine tolérance.) De même, s’approcher de l’autorité de compétence par l’optimisation des outils pédagogiques, qui permettent l’échange et l’acquisition des savoirs et des savoir-faire, contribue à la renforcer. A présent, après la destruction de mes premières représentations et la redéfinition des concepts en situation, j’appréhende l’acte pédagogique et le rapport aux élèves de manière différente. Si je tolère dorénavant une attitude moins figée, cela a des effets bénéfiques sur les apprentissages : l’atmosphère est plus sereine et la confiance et l’échange se sont développés. Certes, j’ai encore de nombreuses insatisfactions quant à ma pratique pédagogique, et ce mémoire n’expose pas de considérations et d’expériences applicables à toute classe et praticables par tout enseignant puisque la dynamique entre les trois pôles de la relation pédagogique (enseignant-enseigné-savoir) est changeante et relative aux individus en présence. De plus, la réflexion serait à continuer sur d’autres terrains, ce qui donne à l’enseignement tout son intérêt et son enrichissement : la remise en question permanente et la relation à autrui.

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Bibliographie. - Georges LAPASSADE, Guerre et paix dans la classe… La déviance scolaire, Armand Collin, 1993. - Les Cahiers Pédagogiques n° 426, « L’Autorité », septembre 2004. - Carlo ROMANO, Jacques SALZER, Enseigner, c’est aussi savoir communiquer, Edition de l’Organisation, Paris, 1990. - Les Cahiers Pédagogiques n° 437, « Des langues bien vivantes », novembre 2005 (p.25-26 : Colette SAMSON, « Intégrer les intelligences multiples ? ») - Les Cahiers Pédagogiques n° 326, « La Communication dans la classe », septembre 1994. - Les Cahiers Pédagogiques n° 393, « Accompagner, une idée neuve en éducation », avril 2001. - Jean-Pierre ASTOLFI, L’Erreur, un outil pour enseigner (p.58-61), coll. Pratiques et enjeux pédagogiques, 1997.

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Annexes.

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Annexe I

Puerta del Sol, deuxième année (p. 21), Delagrave édition, 2003

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Annexe II

Navidades con Mafalda.

Quino (argentino) Léxico.

� En lo alto ≈ encima de � Guíar (guider) � Llevar ( porter / transporter / emporter) ≠ traer (apporter) � Una alforja ≈ un bolso (une besace)

Para expresarse.

- Un abeto de Navidad - Adornar (décorer) - Enchufar (brancher) - Colocar = poner. - De repente = de golpe (soudain) - Un relámpago = un flash - Un regalo / regalar

1.Comenta con la ayuda del léxico :

Para adornar el abeto se necesitan……………………………………………………………….

2.Recuerda la regla empleada en clase y complétala:

Etre en train de + infinitif =………………………………………………………………………………

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Annexe III

Gran Vía, seconde LV2, Edition Didier, 2001.

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Annexe IV

NOM : Classe : Prénom :

Evaluation de la participation orale.

Coche la case de chaque item qui correspond le plus à ta participation orale. • Fréquence et participation durant le trimestre : 1er trimestre 2ème trimestre 3ème trimestre - au moins une fois par cours.

3

- assez souvent.

2

- très irrégulièrement.

1

• Je suis attentif(ve) à la qualité de mon expression orale (grammaire, conjugaison, lexique) :

- toujours.

3

- je n’y pense pas toujours.

2

- je ne pense pas du tout à cet aspect de l’oral car je veux surtout exprimer mon idée.

1

• Je fais attention à ma prononciation, à l’accentuation et à l’intonation (lorsque je m’exprime ou lis à voix haute) :

- je fais l’effort et je sens que je progresse.

2

- je n’y pense pas toujours ; je ne relis pas à voix haute les documents à la maison.

1

- je n’y prête aucune attention et ne fais jamais de lecture à voix haute.

0

Coche les cases qui correspondent à ton attitude en classe. • Ma prise de parole et ma participation dans le groupe . 1er trimestre 2ème trimestre 3ème trimestre - Je lève la main et j’attends d’être interrogé. Je ne coupe pas la parole aux autres.

2

- Je suis attentif(ve) en cours : je suis capable de répéter et de récapituler ce qui vient d’être dit.

2

- Je suis capable de corriger mes propres erreurs.

2

- J’aide mes camarades à se corriger ou à compléter leur idée.

2

- Je ne bavarde pas avec les voisins.

1

- Je parle assez fort.

1

- Je suis volontaire pour lire (des textes ou des consignes), ou pour corriger des exercices.

1

- Je sais construire des phrases de plus en plus complexes.

1

Fais le total de tes points et donne ton point sur ta participation. 1er trimestre 2ème trimestre 3ème trimestre Total sur 20. Mes remarques sur ma participation en classe et sur mon évolution(au cours du trimestre ou de l’année.)

…………............................ …………………………… …………………………… ……………………………

…………………………… …………………………… …………………………… ……………………………

…………………………… …………………………… …………………………… ……………………………

Ce que je pourrais faire pour progresser au prochain trimestre (objectifs.)

…………………………… …………………………… …………………………… ……………………………

…………………………… …………………………… …………………………… ……………………………

…………………………… …………………………… …………………………… ……………………………

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Annexe V Tarea de español.

I- Lección.

A- Escápate del frío.

Describe todo lo que hace el hombre del anuncio. → Utiliza estar + gerundio, ir + gerundio, seguir + gerundio.

B- Desaparecido (Manu Chao.) Resume todo lo dicho (résume tout ce qui a été dit) sobre la canción de Manu Chao.

C- Quiero vivir más.

1- Compara los años de vida de los animales. → Utiliza los comparativos, mientras que y el futuro .

2- ¿Cuánto tiempo vivirá el hombre? (Describe su vida.) → Utiliza el futuro y en vez de.

D- Humor y moral. De repente, ¿cómo reacciona la vidente y por qué?

II- Gramática.

A- Transforma las frases en hipótesis con el futuro del indicativo.

1- María no quiere cambiar de colegio. 2- Manolo no tiene muchos amigos porque es muy malo.

B- Conjuga los verbos en futuro .

1- Nosotros (hacer) deporte mientras que vosotros (quedarse) en casa para ayudar a vuestros

padres. 2- Yo (estar) ausente porque (irse) de vacaciones.

C- Reformula las frases con una negación simple o una negación doble.

1- Nadie hay en casa ya que estamos todos en el cine. 2- No duermo nunca la siesta porque me parece una pérdida (perte) de tiempo.

III- Expresión personal.

Eres un/una vidente que pasa en un programa de televisión y te diriges a los telespectadores. Haz predicciones sobre el futuro de la humanidad en general (y justifícalas), y después predice a una estrella del cine su vida futura. (Fais des prédictions sur le futur de l’humanité en général, justifie-les, puis prédis à une star de cinéma sa vie future.) → Empieza así: “¡Hola telespectadores! Soy … (inventa un nombre) y os predigo que en los años próximos ….” → 13 líneas.

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DE L’AUTORITE A LA COMMUNICATION. RESUME :

Ce mémoire constitue une réflexion sur l’équilibre fragile entre l’autorité et l’échange

en classe de langue. A la suite d’une pratique pédagogique rigide et de l’adoption d’une attitude autoritariste en début d’année scolaire, j’ai tenté de mieux appréhender ces concepts et de réfléchir sur la manière de favoriser l’échange et les apprentissages par un meilleur exercice de l’autorité. MOTS CLES : Relation, autorité, communication, bienveillance, accompagnement. Etablissement : Collège VIVANT DENON, 44 rue Léon Pernot 71 380 Saint Marcel. Classes : 4ème, 3ème.