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CAS CLINIQUE Figure 1. Aspect clinique de l’hémangiome parotidien droit à la première consultation (6 mois de vie). Figure 2. Échographie doppler de l’hémangiome parotidien droit. Mots-clés Keywords La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale n° 337 - avril-mai-juin 2014 | 15 Mots-clés Hémangiome – Glande parotide – écho-doppler Keywords Infantile hemangioma – Parotid gland – ultrasonography Hémangiome infantile parotidien : diagnostic Infantile parotid gland hemangioma: diagnosis S. Quesnel* * Service ORL, hôpital Robert-Debré, AP-HP, Paris. C hez l’enfant, les hémangiomes parotidiens représentent plus de la moitié des tumeurs des glandes salivaires. Ils sont présents à la naissance dans la majorité des cas et connaissent une phase proliférative durant les 6 à 8 premiers mois de l’enfant, suivie par une phase involutive complète dans 70 à 95 % des cas avant la première décennie. Leur traitement représente un challenge du fait de la proximité du nerf facial. Observation Une patiente de 6 mois est adressée en consultation ORL pour une masse sous-auriculaire droite. Cette tuméfaction a été découverte par les parents vers l’âge de 5 mois. L’examen clinique retrouve une masse sous-lobulaire droite au sein de la parotide, qui est augmentée de volume, sans soulèvement du conduit auditif externe. La peau en regard de la lésion est bleutée (figure 1). La palpation n’est pas douloureuse. L’échographie parotidienne couplée à un doppler retrouve une augmentation de taille de la parotide droite par la présence d’une formation hypoéchogène. Cette formation est polylobée, très vascularisée et mesure 23 mm de grand axe. L’examen ayant été difficile vu l’âge de l’enfant, l’exploration complète par doppler n’a pu être réalisée. Les aspects clinique et échographique sont en faveur d’un hémangiome parotidien droit. Une simple surveillance est décidée. La patiente est revue en consultation 2 mois après. La glande parotide droite est toujours augmentée de volume. La palpation retrouve une masse bien limitée et rénitente au niveau sous-

Infantile hemangioma – Parotid gland – ultrasonography

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Page 1: Infantile hemangioma – Parotid gland – ultrasonography

CAS CLINIQUE

▲ Figure 1. Aspect clinique de l’hémangiome parotidien droit à la première consultation (6 mois de vie).

▼ Figure 2. Échographie doppler de l’hémangiome parotidien droit.

Mots-clés

Keywords

La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 337 - avril-mai-juin 2014 | 15

Mots-clés Hémangiome – Glande parotide – écho-doppler

KeywordsInfantile hemangioma – Parotid gland – ultrasonography

Hémangiome infantile parotidien : diagnosticInfantile parotid gland hemangioma: diagnosis

S. Quesnel*

* Service ORL, hôpital Robert-Debré, AP-HP, Paris.

Chez l’enfant, les hémangiomes parotidiens représentent plus de la moitié des tumeurs des glandes salivaires. Ils sont présents à la naissance

dans la majorité des cas et connaissent une phase proliférative durant les 6 à 8 premiers mois de l’enfant, suivie par une phase involutive complète dans 70 à 95 % des cas avant la première décennie. Leur traitement représente un challenge du fait de la proximité du nerf facial.

O b s e r v a t i o n

Une patiente de 6 mois est adressée en consultation ORL pour une masse sous-auriculaire droite. Cette tuméfaction a été découverte par les parents vers l’âge de 5 mois.L’examen clinique retrouve une masse sous-lobulaire droite au sein de la parotide, qui est augmentée de volume, sans soulèvement du conduit auditif externe. La peau en regard de la lésion est bleutée (figure 1). La palpation n’est pas douloureuse. L’échographie parotidienne couplée à un doppler retrouve une augmentation de taille de la parotide droite par la présence d’une formation hypoéchogène. Cette formation est polylobée, très vascularisée et mesure 23 mm de grand axe. L’examen ayant été diffi cile vu l’âge de l’enfant, l’exploration complète par doppler n’a pu être réalisée. Les aspects clinique et échographique sont en faveur d’un hémangiome parotidien droit. Une simple surveillance est décidée. La patiente est revue en consultation 2 mois après. La glande parotide droite est toujours augmentée de volume. La palpation retrouve une masse bien limitée et rénitente au niveau sous-

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CAS CLINIQUE

▼ Figure 4. Aspect d’un hémangiome parotidien en IRM en séquence T2 en coupe sagittale.

▲ Figure 3. Hémangiome segmentaire avec atteinte cutanée.

16 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 337 - avril-mai-juin 2014

D i s c u s s i o n

Les hémangiomes parotidiens sont les tumeurs parotidiennes les plus fréquentes chez l’enfant et touchent préférentiellement les filles (1). Les hémangiomes parotidiens peuvent être isolés et se présenter comme une lésion focale. Une coloration bleuâtre ou violette de la peau au niveau de la région pré-auriculaire est un signe clinique très évocateur d’hémangiome parotidien, mais cette présentation est inconstante (50 % des cas). Bien que ce type de lésion puisse être visible dès la naissance, l’hémangiome connaît une phase de croissance rapide qui le rend cliniquement parlant au cours des 6 premiers mois de vie de l’enfant (2). Les hémangiomes parotidiens peuvent également avoir une répartition dite segmentaire et occuper la région innervée par la branche mandibulaire du nerf trijumeau (figure 3). Dans ce cas, il y a toujours une atteinte cutanée et, dans 29 % des cas, une atteinte des voies respiratoires (3). Dans la majorité des cas, l’examen clinique couplé à une échographie de la région parotidienne suffit pour poser le diagnostic. À l’échographie, l’hémangiome est habituellement hypoéchogène par rapport au tissu parotidien et se présente comme une masse hypervascularisée avec une anomalie de flux au doppler. Dans les cas atypiques, l’IRM peut être utile et apporter des informations complémentaires quant à la taille, à l’extension et aux rapports avec les structures adjacentes. À l’IRM, l’hémangiome apparaît isointense en séquence T1 et hyperintense en séquence T2, avec ou sans suppression du signal de la graisse (figure 4) [4].

Concernant le traitement, 2 attitudes peuvent être envisagées. La première attitude consiste en une surveillance clinique simple. Cette approche ne se justifie que pour les patients chez qui existe une croissance minimale de la lésion sans retentissement clinique. Dans certains cas, une croissance rapide de la tumeur peut engendrer, en plus des problèmes esthétiques, des signes d’insuffisance cardiaque congestive en cas de shunt vasculaire important. De plus, l’obstruction ou la compression des structures adjacentes (méat auditif externe par exemple) et l’ulcération de l’hémangiome exposent à de graves complications (5). Ces cas doivent donc faire l’objet d’un traitement curatif. Les corticoïdes ont longtemps été le traitement de choix des hémangiomes parotidiens, que ce soit par voie générale ou en injection intra-lésionnelle. Ces 2 modes d’administration ont montré des résultats variables, avec, pour la voie systémique, de fréquents effets secondaires et un effet rebond à l’arrêt du traitement (2, 6). Pour les patients présentant des contre-indications à un traitement par corticostéroïdes ou en échec de traitement, un traitement par interféron alfa-2a pouvait être proposé. Ce traitement ne doit plus être recommandé pour ce type de pathologie étant donné les effets secondaires neurologiques à type de diplégie spastique irréversible (2). En 2008, le propranolol a montré son efficacité dans l’inhi-bition de la croissance des hémangiomes infantiles (7). Depuis,

lobulaire droit. Le conduit auditif externe est normal, il n’y a pas de paralysie faciale et la peau en regard de la masse est normale. Une seconde échographie est réalisée. Celle-ci retrouve la formation hypoé-chogène parotidienne droite, polylobée, bien délimitée, mesurant 26 × 20 mm et très vascularisée au doppler (figure 2, p. 15).Devant la faible augmentation de volume et l’absence de compli-cation, une simple surveillance est proposée pour cet hémangiome parotidien droit. Il a été expliqué aux parents la possible augmentation de taille avant une involution, puis la disparition complète dans la majorité des cas.

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CAS CLINIQUE

La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 337 - avril-mai-juin 2014 | 17

de nombreuses études ont montré l’efficacité du propranolol dans la prise en charge des hémangiomes infantiles sévères ou compliqués (2, 8). Ce traitement a peu d’effets secondaires comparé au traitement de référence que représentaient les corti-coïdes (8). Ce traitement apparaît à l’heure actuelle comme le traitement à utiliser en première ligne dans les cas d’héman-giome compliqué, mais il nécessite une courte hospitalisation pour vérifier l’absence de contre-indication et la bonne tolérance à l’instauration du traitement (glycémie capillaire, tension artérielle, électrocardiogramme).

Le traitement chirurgical est à réserver aux hémangiomes paroti-diens échappant à toute thérapeutique médicale et dont l’évo-lution conduit à de graves complications (saignement, ulcération, compression des voies aériennes). Le risque de paralysie faciale

postopératoire est augmenté du fait de l’infiltration de la vasculari-sation de l’hémangiome au sein de la parotide et de la périnèvre (2).

C o n c l u s i o n

L’hémangiome parotidien représente environ 50 % des tumeurs parotidiennes de l’enfant. L’évolution spontanée est la régression complète avant l’âge de 10 ans dans 70 à 95 % des cas. Le diag-nostic est clinique et peut être complété par une échographie, voire une IRM dans les cas atypiques. Dans la majorité des cas, l’abstention thérapeutique couplée à une surveillance est l’attitude à adopter compte tenu de l’involution spontanée de ces tumeurs. Le propranolol est devenu le traitement médical de choix dans les cas d’hémangiomes avec complications. ■

1. Bentz BG, Hughes CA, Lüdemann JP, Maddalozzo J. Masses of the salivary gland region in children. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2000;126(12):1435-9.2. Weiss I, O TM, Lipari BA, Meyer L, Berenstein A, Waner M. Current treatment of parotid hemangiomas. Laryngos-cope 2011;121(8):1642-50. 3. O TM, Alexander RE, Lando T et al. Segmental heman-giomas of the upper airway. Laryngoscope 2009;119(11): 2242-7.

4. Roebuck DJ, Ahuja AT. Hemangioendothelioma of the parotid gland in infants: sonography and correlative MR imaging. Am J Neuroradiol 2000;21(1):219-23.5. Greene AK, Rogers GF, Mulliken JB. Management of parotid hemangioma in 100 children. Plast Reconstr Surg 2004;113(1):53-60.6. Buckmiller LM, Francis CL, Glade RS. Intralesional steroid injection for proliferative parotid hemangiomas. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2008;72(1):81-7.

7. Léauté-Labrèze C, Dumas de la Roque E, Hubiche T, Boralevi F, Thambo JB, Taïeb A. Propranolol for severe hemangiomas of infancy. N Engl J Med 2008;358(24): 2649-51.8. Hermans DJ, Bauland CG, Zweegers J, van Beynum IM, van der Vleuten CJ. Propranolol in a case series of 174 patients with complicated infantile haemangioma: indications, safety and future directions. Br J Dermatol 2013;168(4):837-43.

Références bibliographiques

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

Formation

■ DU audioprothèses implantables chez l’adulteResponsables : Pr Bernard Meyer, Pr Olivier Sterkers

– Cours théoriques : 3 modules de 2 jours et demi : Physiologie de l’audition – Bilan et prise en charge des surdités – Présentation des prothèses auditives traditionnelles et des différents dispositifs implantables (implant d’oreille moyenne, prothèse à ancrage osseux, implant cochléaire) : principe du traitement du signal, indications, technique chirurgicale, principe généraux des réglages, complications, suivi.

– Travaux dirigés (sur 2 jours) : suivi de réglages et de bilans de patients implantés cochléaires dans le Centre référent pour l’implant cochléaire

chez l’adulte en Île-de-France (hôpital de la Pitié-Salpêtrière) – Ateliers pour une première approche des réglages pour les 4 fabricants en fonction des demandes et en alternative, il pourra être proposé un atelier pratique de dissection des rochers.

Autorisation d’inscription pédagogique préalable à l’inscription admi­nistrative, avant le 31 octobre 2014, et renseignements pédagogiques : Mme Fontaine, Dr. I. Mosnier. Groupe hospitalier de la Pitié-Salpétrière, unité d’otologie, implants auditifs et chirurgie de la base du crâne – Bâtiment Castaigne – 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris Cedex 13. Tél. : 01 42 16 26 03. Fax : 01 42 16 26 05. Email : [email protected] ou [email protected]

Agenda

■ Vertiges, révisions acceléréesSaint-Étienne, les 11, 12 et 13 septembre 2014CHU de Saint-Étienne, hôpital Nord, plateau de biologie, Salle 2P

Organisateurs : Pr Jean-Pierre Sauvage, Dr Pierre Bertholon

Programme :Rappel anatomo-physiologique – Examen clinique d’un patient vertigineux – Apport des explorations complémentaires – Le vertige positionnel paroxystique bénin – La maladie de Ménière – La migraine – Les autres

vertiges périphériques – Les vertiges centraux – Le déséquilibre et la chute de la personne âgée – Cas cliniques interactifs.

Droits d’inscription : 330 € (300 € avant le 1er juillet 2014), comprenant participation, déjeuners et diaporamas des communications.

Renseignements et inscription :Pierre Bertholon. Secrétariat ORL, bâtiment B, hôpital Nord, CHU Saint-Étienne, 42055 Saint-Étienne Cedex 2. Tél. : 04 77 12 04 96 ou 04 77 12 77 94. Fax : 04 77 12 78 54. E-mail : pierre.bertholon @univ-st-etienne.fr