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Making It L’industrie pour le développement Numéro 4, 2010 Sur la route de la prospérité ? n Les énergies renouvelables dans les pays en développement n Entrepreneuriat n Politique industrielle en Afrique n Le grand sacrifice de Kiribati

Making It: l'industrie pour le développement #4

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Le thème de ce quatrième numéro de Making It: l’industrie pour le développement est le défi auquel sont confrontés les 49 pays les moins avancés (PMA), et en particulier l’importance de renforcer la capacité productive. Dans l’article liminaire, le haut représentant des PMA aux Nations Unies, Cheick Sidi Diarra expose qu’en augmentant les ressources productives, les capacités entrepreneuriales et les liens de production, ces pays peuvent renforcer leur résistance aux chocs extérieurs et réduire leur dépendance à l’assistance extérieure. Cependant, ils ne réussiront que s’ils mettent en oeuvre de nouvelles politiques, conçoivent de nouvelles formes de gouvernance du développement, et reçoivent un support multilatéral plus efficace.

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MakingItL’industrie pour le développement

Numéro 4, 2010

Surlaroutedelaprospérité?

n Les énergiesrenouvelables dans les pays endéveloppement

n Entrepreneuriatn Politique industrielle

en Afriquen Le grand sacrifice de

Kiribati

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Nouveau magazine trimestriel.Stimulant, critique et constructif.Forum de discussion etd’échange au carrefour del’industrie et du développement.

Numéro 1, décembre, 2009lRwanda means business: interview with President Paul KagamelHow I became an environmentalist: A small-town story with global implications by

Phaedra Ellis-Lamkins, Green For Alll ‘We must let nature inspire us’ – Gunter Pauli presents an alternative business model

that is environmentally-friendly and sustainablelOld computers – new business. Microsoft on sustainable solutions

for tackling e-wasterlGreen industry in Asia: Conference participants interviewedlHot Topic: Is it possible to have prosperity without growth? Is ‘green growth’ really

possible?lPolicy Brief: Greening industrial policy; Disclosing carbon emissions

Numéro 2, mai, 2010lAprès Copenhague » : Bianca Jagger appelle à des mesures immédiates pour éviter

une catastrophe climatiquelNobuo Tanaka de l’Agence internationale de l’énergie cherche à lancer la transition

énergétique de l’industrielL’énergie pour tous » : Kandeh Yumkella et Leena Srivastava nous parlent des mesures

à prendre pour améliorer l’accès à l’énergie lCes femmes entrepreneuses qui transforment le BangladeshlPartout sous le soleil » : le PDG de Suntech, Zhengrong Shi, nous parle du pouvoir de

l’énergie solairelSujet brûlant : les avantages et les inconvénients des biocarburantslPolitique en bref : le financement des énergies renouvelables, les prix de rachat garanti

Numéro 3, juillet 2010lL’impressionnant essor économique de la Chine : Entretien avec le ministre du

commerce, Chen Demingl Jayati Ghosh au sujet de la politisation de la politique économiquel« Vers un débat plus productif » – Ha-Joon Chang demande d’accepter l’idée

que la politique industrielle peut fonctionnerlLe président de la banque mondiale Robert Zoellick, au sujet de la

modernisation du multilatéralismel« Écologisation de l’économie mexicaine » – Juan Rafael Elvira QuesadalSujet brûlant : La microfinance fonctionne-t-elle ?lPolitique en bref : Secteur privé et développement ; le pouvoir des capitaux

patients

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Le thème de ce quatrième numéro de Making It: l’industrie pour le développement estle défi auquel sont confrontés les 49 pays les moins avancés (PMA), et enparticulier l’importance de renforcer la capacité productive.

Dans l’article liminaire, le haut représentant des PMA aux Nations Unies,Cheick Sidi Diarra expose qu’en augmentant les ressources productives, lescapacités entrepreneuriales et les liens de production, ces pays peuvent renforcerleur résistance aux chocs extérieurs et réduire leur dépendance à l’assistanceextérieure. Cependant, ils ne réussiront que s’ils mettent en œuvre de nouvellespolitiques, conçoivent de nouvelles formes de gouvernance du développement, etreçoivent un support multilatéral plus efficace.

Devançant la quatrième conférence des Nations Unies sur les PMA qui auralieu en mai prochain, Debapriya Bhattacharya annonce les questions à examineret met en évidence le dilemme qui consiste à marier la croissance économique etla réduction de la pauvreté.

Notre section Zoom sur un pays porte sur les Kiribati, un archipel du Pacifique.Ce PMA est confronté à une menace contre son existence même, à cause de lamontée du niveau de la mer et de la température. Le président des Kiribati, AnoteTong, parle de l’action remarquable de son pays pour aider à sauver les réserves depoissons de l’océan Pacifique et à préserver la biodiversité mondiale.

Vous trouverez également des articles sur les alternatives à la microfinance parla banque communautaire, la tendance des énergies

renouvelables dans un monde en développement, la pertinence de l’entrepreneuriat pour le

développement économique, et plus encore.Le site Internet de MakingIt –www.makingitmagazine.net – contient non

seulement tous le contenu des versionsimprimées, mais également les articlesoriginaux et les présentations. Le siteInternet est aussi une plateformeinteractive d’échanges de points de vue etd’idées. Nous vous invitons donc, cherslecteurs, à vous joindre au débat sur lesquestions du développement del’industrie mondiale.

Éditorial

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Rédacteur en chef : Charles [email protected]é éditorial : Ralf Bredel, TillmannGünther, Sarwar Hobohm, KazukiKitaoka, Ole Lundby, Wilfried Lütkenhorst (chair), Cormac O’ReillySite Web et assistance :Lauren [email protected] de la couverture : Paresh NathDesign : Smith+Bell, UK –www.smithplusbell.comMerci à Donna Coleman pour son aideImprimé parGutenbergPress Ltd,Malta –www.gutenberg.com.mt sur un papiercertifié FSCPour consulter cette publication enligne et pour participer aux discussionsportant sur l’industrie pour ledéveloppement, rendez-vous surwww.makingitmagazine.netPour vous abonner et recevoir lesprochains numéros de Making It,veuillez envoyer un e-mail contenantvotre nom et adresse à [email protected] It: l’industrie pour ledéveloppement est publié parl’Organisation des Nations unies pourle développement industriel (ONUDI),Vienna International Centre, boîtepostale 300, 1400 Vienne, AutricheTéléphone : (+43-1) 26026-0,Fax : (+43-1) 26926-69E-mail : [email protected] © 2010 The United NationsIndustrial Development OrganizationAucun extrait de cette publication nepourra être utilisé ou reproduit sansl’accord préalable de l’éditeur

Contenus

FORUM MONDIAL6 Lettres8Aux premières lignes du changement climatique –Le natif du Pacifique Krishneil Narayan réclamedes actions pour sauver la région d'unecatastrophe imminente10 Sujet brûlant –Wim Naudé et Ranil Dissanayake nous parlent de la pertinence del'entrepreneuriat pour le développementéconomique

Affaires des affaires – actualités et tendances

ARTICLES18 Venir en aide aux pays les moins avancésPays – Debapriya Bhattacharya devance la quatrièmeconférence des Nations Unies sur les pays les moinsavancés (PMA) en mai 2011

22 La force de la communauté – Milford Bateman au sujetdes alternatives à la microfinance par la banquecommunautaire

24 ARTICLE PRINCIPALRenforcer la capacité productive – Le représentant auxNations Unies Cheick Sidi Diarra soutient que les PMAdoivent, et peuvent, produire davantage de biens et deservices de meilleure qualité

MakingItIndustryforDevelopment

Les appellations employées et la présentationréalisée des contenus de ce magazinen’impliquent en aucun cas l’expressiond’opinions de la part du Secrétariat del’Organisation des Nations unies pour ledéveloppement industriel (ONUDI) concernantle statut légal de quelconque pays, territoire, ville,région ou de ses autorités, ni concernant ladélimitation de ses frontières ou limites, niconcernant son système économique ou sondegré de développement. Les termes «développé », « industrialisé » et « endéveloppement » sont utilisés pour des raisonsde commodité statistique et n’exprime pasnécessairement de jugement sur le niveau dedéveloppement atteint par un pays ou unerégion en particulier. L’évocation de nomsd’entreprises ou de produits commerciaux neconstitue en aucun cas un soutien de la part del’ONUDI. Les opinions, données statistiques etestimations contenues dans les articles signésrelèvent de la seule responsabilité de l’auteur oudes auteurs, y compris ceux qui sont membresou employés de l’ONUDI. Vous ne devez doncpas considérer qu’elles reflètent les opinions ouqu’elles bénéficient du soutien de l’ONUDI. Cedocument a été produit sans avoir étéofficiellement révisé par les Nations Unies.

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Numéro 4, 2010

30 Énergies renouvelables : Le nouveau paysagemondial – Deux récents rapports donnent un aperçude la place des énergies renouvelables dans les pays endéveloppement34 Zoom sur un pays : Kiribati, petit pays, grandsacrifice – Entretien avec Son Excellence Anote Tong,Président des Kiribati38 Politique industrielle en Afrique : ce qui doit êtrefait – Mallam Sanusi Lamido Sanusi, Gouverneur de labanque centrale du Nigéria40 Un défi au pas de la porte – Les responsables duconseil mondial des entreprises pour ledéveloppement durable, Marcel Engel et Filippo Vegliodonnent leur vision commerciale du développement

POLITIQUE EN BREF42 Investissement dans les énergies renouvelables enInde43 Promotion des capacités d'innovation industrielle45 Biodiversité : défis politiques dans un monde enmutation

46 Le mot de la fin – Patricia Francis, Directricegénérale du programme du centre du commerceinternational nous parle du changement climatiqueet du commerce

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LETTRES

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De lamicrofinance« La microfinance fonctionne-t-elle ? » (Making It, numéro 3) peutêtre loué pour avoir mis enévidence les questions les pluspressantes concernant lamicrofinance actuellement,surtout parce qu’elle est produitepar le responsable de l’une desagences internationales dedéveloppement (ONU-DAES)ayant des intérêts dans lacroissance économique locale. Àquelques exceptions près, lesprincipales agencesinternationales dedéveloppement cherchentgrandement à minimiser lesdommages importants infligésaux économies endéveloppement et en transitionpar la microfinance, préférantsuivre l’exemple de la banquemondiale, du FMI, et de l’agenceaméricaine pour ledéveloppement international.

Un problème plus large et àplus long terme concernant lamicrofinance, que l’article auraitdû signaler davantage, surtoutdepuis que ceci est une prioritéde l’ONUDI (Nations Unies pourle développement industriel) etde certaines autres agences desNations Unies notamment laCNUCED (Conférence desNations Unies sur le commerceet le développement), est que lamicrofinance facilite ladésindustrialisation etl’infantilisation de l’économielocale des pays endéveloppement et des pays entransition. Cela arriveprécisément parce que les

institutions de microfinance nesoutiennent très largement queles microentreprises les pluspetites et les plus simples : lavente ambulante, le commercetransfrontalier, les services àfaible valeur et certaines activitésde production simples ayant trèsrapidement une valeur ajoutée.Ainsi, dans la mesure oùl’épargne locale et les transfertsde fonds sont de plus en pluscanalisés dans ce genred’activités simples, via lacroissance rapide desinstitutions de microfinance, etdonc éjectés des activitéséchelonnées et sophistiquéesassociées aux petites etmoyennes entreprises, lastructure économique de ce pays,région ou localité serainévitablement affaiblie etdétruite.

Un autre aspect de lamicrofinance si chère à sespartisans, et abordé dans cetarticle est l’émancipation desfemmes. L’auteur rentre dans cetesprit. Cependant, cet angle esten réalité un bluff. La plupart deschercheurs indépendantssoutiennent le contraire : lesfemmes sont en fait dépourvuesde leur autonomie puisqu’ellessubissent de plus en plus lapègre de la microfinance et lepéonage des micro-dettes. Enfait, ce que les défenseurs desintérêts de la microfinancevisent réellement, c’est pousser

les femmes pauvres à accepterque le marché est la seule voiepour améliorer leur situation ;oubliez l’État, les syndicats, lescollectivités, les groupes depression et ainsi de suite pourvous venir en aide comme par lepassé. Aujourd’hui, commeprévu, une femme en situationde pauvreté n’a qu’une seule voiepour s’en sortir : essayer de fairemarcher sa micro-entreprise. End’autres termes, et ceci estextrêmement important pourexpliquer la microfinance, cesont les marchés qui sontrenforcés ici, pas les femmes.lMilford Bateman, auteur de WhyDoesn’t Microfinance Work?(Pourquoi la microfinance nefonctionne-t-elle pas ?) (Voir pages22-23)

Les personnes en situation depauvreté devraient-elles avoiraccès au même niveau de créditque les personnes de classemoyenne et les nantis ? Bien sûr !Cet accès permettrait aux gens deréaliser bien plus qu’ils nepourraient avec leurs propresressources : le crédit est unservice social. Autant la classemoyenne et les nantis nedevraient pas crouler sous lesdettes/les repriseshypothécaires/le piège des cartesde crédit, autant les pauvres nedevraient pas crouler sous lesmicro-dettes. L’accès aux servicesfinanciers doit être associé à uneresponsabilité financière et à despratiques de prêt éthiques etjustes.lDan Lundmark, reçu par e-mail

DécouplageJ’ai apprécié la lecture de ladernière parution de Making Itqui a offert nombre d’articles

concis sur des sujets pertinentsdu développement industriel.Bien que les articles étaientcourts et faciles à lire, ilsexprimaient des messages clairset différenciés. J’ai surtout aiméles deux articles sur larenaissance de la politiqueindustrielle, respectivementécrits par Wilfried Lütkenhorstet Ha-Joon Chang. Tous deuxsoulignent le besoin d’unepolitique industriellepragmatique sans sous-estimerles risques considérables del’échec des gouvernements.

J’aimerais également féliciterle rédacteur en chef pour avoirmis en évidence le besoin depolitiques industriellesécologiques soulevé parLütkenhorst et par le ministremexicain de l’environnement.Découpler la croissanceéconomique desconsommations de ressourcesest probablement la tâche la plusimportante de la politiqueindustrielle au cours desprochaines décennies. Lesgouvernements devront prévoir

La section « Forum Mondial » de Making It est un espace d’interaction et de discussions, danslequel nous invitons les lecteurs à proposer leurs réactions et leurs réponses à propos de tous lesproblèmes soulevés dans ce magazine. Les lettres destinées à la publication dans les pages deMaking It doivent comporter porter la mention « Pour publication » et doivent être envoyées parcourrier électronique à l’adresse : [email protected] ou par courrier à : The Editor,Making It, Room D2138, UNIDO, PO Box 300, 1400 Vienne, Autriche. (Les lettres ou les courriersélectroniques peuvent faire l’objet de modifications pour des raisons d’espace).

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des encouragements plusefficaces pour l’internalisationdes coûts environnementaux et ledéploiement de technologiespropres et durables. Accomplircela d’une manière compatibleavec la réduction de la pauvreté,est l’un des défis les pluspressants à relever. lDr. Tilman Altenburg,Responsable de l’unité de lacompétitivité et du développementsocial à l’Institut allemand dudéveloppement, Bonn, Allemagne

L’article de Wilfried Lütkenhorst «Changement de climat pour lapolitique industrielle » (Making It,numéro 3) souligne que lesmarchés ne sont d’aucune aidepour arrêter les changementsclimatiques. Cela n’est passurprenant : les marchés sont uneinvention humaine, pas une loinaturelle. Les hommes d’affaires,les économistes et les politicienssemblent cependant réticents à lereconnaître. Étant donné leursagendas chargés, un bref résuméde certaines vérités peut être utile : lL’industrie manufacturièreproduit des biens matériels. Lesbiens matériels nécessitent desressources naturelles. Nous avonsune seule planète. La rareté desressources matérielles est doncintrinsèquement liée à lacroissance industrielle,commerce mondial ou pas. L’industrie est menée parl’entreprise privée. L’entrepriseprivée a des conséquencespubliques positives et négatives ;parmi ces dernières, la pollutionet l’utilisation de ressources nondurables. lOutre les bouleversements desprocessus naturels, (i.e lesmonocultures, l’exploitationforestière à grande échelle et lesactivités minières mal

contrôlées), l’utilisationinconsidérée des ressources raresfait monter leur prix. Ceux quisouffrent le plus des prix élevéssont ceux qui ont les revenus lesplus faibles. lUne bonne analyse du nombrecroissant des catastrophes «naturelles » montrera qu’ellessont en partie provoquées parl’Homme, et que la croissanceindustrielle y a souventindirectement contribué. Lespersonnes situées en bas del’échelle sociale souffrent le plus.

Eu égard à ces points simples,les politiques industriellespeuvent devenir plus réalistes.Parce que si le développement, ladurabilité et la sécurité humainene sont pas équilibrés, aucun destrois ne sera atteint. l Paul Hesp, Vienne, Autriche

Éclairant« Des moteurs à vapeur à laconscience humaine » (Making It,numéro 3) est effectivement unarticle très éclairant. L’élémenthumain a toujours été, par défaut,le coupable de ce qu’on appelle le« progrès économique ». À moinsque de nouvelles approches dudéveloppement économique nesoient développées, l’être humainsera toujours le coupable, endépit de nos bonnes intentions.l Anare Matakiviti, Coordinateur duprogramme énergie, UnionInternationale pour la Conservationde la Nature, Fidji

Appel deFreetown Merci pour votre envoi de lanouvelle parution de Making It.Créé en 1989, Friends of the EarthSierra Leone (FOESL, les Amis de

la Terre Sierra Leone) a suscité lasensibilisation et la protectionenvironnementale, de même quel’amélioration des conditions devie de notre société. La SierraLeone est désormais au carrefourdu développement durable. Oùallons-nous en tant que nation ?Alors que nous nous aventuronssur le chemin du développmentdurable, nous prenons consciencede la paupérisation de la SierraLeone. La majeure partie de lapopulation vit à la campagne, etl’agriculture de subsistance est lepoumon du pays. Il y a environtrente ans, Freetown étaitentourée de collines verdoyantes.Aujourd’hui, elles sont désertiqueset nues. Le taux alarmant del’abattage des arbres pour le bois,les abris, le charbon et le bois decharpente a été plus rapide que lacapacité des forêts à se régénérer.

D’importantes ressourcesnaturelles sont en danger. Dautresaspects préoccupants sont, ladégradation des terres, lasurpêche, et la pollution dessources d’eau douce causées parles déchets municipaux etl’exploitation minière. La richesseenvironnementale du pays estmenacée par une gestionmédiocre des ressourcesnaturelles. Alors que lasensibilisation générale a crû ausein de bon nombre d’ONG liées àla défense de l’environnement, ilest toujours nécessaire desoutenir la défense, ledéveloppement politique,l’autonomie des communautés etune véritable implication dans lagestion des réserves naturelles etles mesures de développement.FOESL éduque actuellement lapopulation locale au sujet du rôledes arbres dans la conservationdes sols, et modernise sesinfirmeries dans la péninsule de

la Sierra Leone et lescommunautés des montagnes.L’organisation utilise la radio,média le plus populaire pouréléver la sensibilisation à sesactivités, ainsi que pour créer unforum de discussion surl’environnement durable et lesquestions de développement.

Actuellement, plusieurs ONGagissent en Sierra Leone, maispeu d’entre elles s’occupentdirectement des problèmesmajeurs du pays, à savoirl’éducation à l’environnement etle développement durable.FOESL souhaiterait établir unecoopération Nord-Sud forte avecdes ONG de défense del’environnement, comme moyend’aider le Nord à comprendre lesproblèmes et les solutions liés àl’environnement dans le tiers-monde. lOlatunde Johnson, DirecteurExécutif, Friends of the Earth SierraLeone, (Amis de la terre en SierraLeone), Freetown, Sierra Leone

ÉlogeMaking It s’améliore à chaqueparution !!! Le numéro 3 estparticulièrement intéressant etpertinent, surtout à cause l’articleprincipal, « L’impressionnantessor économique de la Chine » -un sujet d’un grand intérêt enInde. Je crois vraiment que lecommerce et l’industrie, ainsique les décideurs politiques ettous les autres parties prenantesici, bénéficieront énormémentdes informations et analyses queMaking It peut offrir. Je vousprésente mes compliments pourl’édition de ce magazineformidable et très instructif. l Shipra Biswas, Administrateur duprogramme national ONUDI, NewDelhi, Inde

Pour toute discussion complémentairerelative aux sujets évoqués dansMaking It, veuillez accéder au site Webdu magazine, à l’adressewww.makingitmagazine.net et à lapage Facebook du magazine. Leslecteurs sont invités à parcourir cessites et à participer aux discussions etaux débats en ligne à propos dusecteur pour le développement.

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Les changements climatiques provoqués parl'activité humaine et l'augmentation du niveaude la mer ont des conséquences dramatiquessur les petits états insulaires endéveloppement (SIDS), et c'est un avenirincertain qui s'annonce pour les millions depersonnes qui vivent dans ces pays. Dansl'Océan pacifique, le niveau de la mer s'élèveraau point de submerger des îles entières, forçantles populations locale à abandonner leur terrenatale pour toujours. Des nations insulairescomme Tuvalu et Kiribati sont confrontées à lamenace la plus immédiate.

Les réfugiés climatiques constitueront, selontoutes probabilités, la catégorie la plusnombreuse de personnes déplacées pour desraisons environnementales, mais aussi cellequi connaîtra la croissance la plus rapide.Tuvalu est le premier pays qui a été contraintd'évacuer des résidents en raison de l'élévationdu niveau de la mer. De nombreux habitantsde l'île ont également migré au sein duterritoire, abandonnant les îles extérieures lesplus basses pour gagner l'atoll de Funafuti,plus vaste.

Un vieil homme des Îles Salomon m'a dit, «Ils parlent de nous faire déménager. Mais noussommes liés à cette terre. Est-ce qu'ilsemporteront nos cimetières avec nous ? Nousne sommes rien sans notre terre et sans nosancêtres. »

Je suis moi-même un jeune habitant duPacifique, j'ai vingt-trois ans et j'ai toujoursvécu à Fiji : je sais à quel point notre terre estimportante pour nous. Nos terres sontétroitement liées à notre culture plusieurs foismillénaire, à notre identité, nos traditions etnotre sentiment d'appartenance. Aujourd'hui,dans toute la région Pacifique, des milliers de

personnes observent, impuissantes, les effetsdu changement climatique qui leur arracheune partie de leur vie.

Dans différents endroits, les habitantsenvisagent de quitter les îles les plus bassesaprès avoir été touchés par des catastrophesmétéorologiques ou par le changementclimatique qui a des conséquences néfastessur les ressources en eau et en nourriture. Lecas le mieux connu de ce phénomène est sansdoute celui des Îles Carteret à Bougainville, enPapouasie-Nouvelle-Guinée, où Ursula Rakovaet Tulele Peisa, l'ONG locale, aident desfamilles à déménager sur des terres donnéespar l'Église, sur l'île principale de Buka.

La climatologie, en évolution rapide, a misen évidence la nécessité d'appliquer desobjectifs bien plus exigeants en matière deréduction des émissions de gaz à effet de serre: les politiques actuelles ne suffisent pas àéviter des conséquences catastrophiques pourles nations des atolls. Plutôt qu'un objectif dedeux degrés, l'Alliance des petits étatsinsulaires (AOSIS) dont fait partie la plupartdes pays des îles du Pacifique, appelle à fixerune cible « bien en-deçà de 1,5 degré Celsius »et de nombreuses nations en développementdemandent à ce que les gaz à effet de serresoient stabilisés bien en dessous de 350 ppm.(Une concentration en dioxyde de carbonedans l'atmosphère de 350 parties par millionest actuellement considérée comme la limitesupérieure pour éviter un changementclimatique irréversible.)

Tandis que les politiciens continuent dedébattre des aspects techniques desprogrammes de compensation d'émissions,d'un traité mondial sur le climat et desdédommagements à apporter à l'industrie ducharbon, il est essentiel de reprendre contactavec la dimension humaine de cetteproblématique. Nous ne devons jamais perdrede vue le fait que le changement climatiquetouche avant tout des personnes. Lechangement climatique est une question desécurité humaine, car il sape les droits humainsà la vie, la sécurité, la nourriture, l'eau, la santé,l'habitat et la culture. Parce qu'ils ne prennentpas en charge le changement climatique avecl'urgence qu'il mérite, les pays développés sonteffectivement en train de violer les droitshumains de millions de personnes parmi lesplus pauvres au monde, notamment les peuplesdes îles du Pacifique.

Alors que nos dirigeants et nosgouvernements n'assument pas leursresponsabilités vis-à-vis de cette menaceimminente, un groupe de jeunes leaders desîles du Pacifique et de l'Australie répondent auxappels de ces nations insulaires défavorisées.Project Survival Pacific (PSP) est une initiativeentièrement conduite par des jeunes et est axéesur la conviction que le monde doit écouterceux qui sont en première ligne sur le front duclimat. Elle s'active à aider les peuples insulairesdu Pacifique à s'adapter au changementclimatique en apportant son leadership et entransmettant des compétences essentielles, touten jouant le rôle de porte-voix pour la région duPacifique dans le domaine du changementclimatique. Elle vise en effet à renforcer lacapacité des délégations des pays du Pacifique àdéfendre leurs intérêts lors des négociations

KRISHNEIL NARAYANest un jeune leader duPacifique qui se bat contre le changementclimatique et fait partie de l'équipe presse de ProjectSurvival Pacific.

En première ligne sur le front du climat

L’industrie est responsable de près de 40 % des émissions globales deCO2, qui est l’un des principaux contributeurs de l’effet de serre.Krishneil Narayan, habitant d’une île du Pacifique, lance un cri d’alarmepour sauver la région du désastre qui la menace.

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internationales, notamment lors desconférences des Nations Unies sur leschangements climatiques (la Conférence desParties).

L'année dernière, PSP a ainsi accompagnéune délégation de jeunes habitants des îles duPacifique au Sommet de Copenhague. Cetteannée encore, PSP sera aux côtés de jeunes duPacifique pour les aider à se rendre auSommet de Cancún au Mexique, afin que lesvoix des peuples du Pacifique ne soient pasnoyées sous la cupidité des nations plusnombreuses et plus puissantes.

En juin 2010, PSP et de jeunes leaders duPacifique sensibilisés à ces questions ontlancé ensemble le tout premier Programmede leadership climatique du Pacifique.Pratiquement tous les participants avaient ététémoins de l'inondation de villages entiers, del'élévation du niveau de la mer, de ladisparition des côtes et de la dégradationimmédiate et visible de l'environnementnaturel quel qu'il soit, sans parler de l'érosiongalopante de la richesse culturelle de larégion. Pourtant, ils ne cessaient d'espérer ;espérer survivre à ce long combat ; espérer unmeilleur environnement et une vie plus richedans le futur.

Ils voulaient également poser les questionssuivantes aux peuples des nationsindustrialisées.

Avec l'augmentation des émissions de gaz àeffet de serre, qui transforme le climatmondial et entraîne ainsi l'élévation du niveaude la mer, des modifications du rythme dessaisons, la mort des coraux, l'érosion des côteset la réduction des zones de pêche, nous,habitants des îles du Pacifique, voudrionssavoir que ce que feraient les économiesindustrialisées si la situation était inversée.

Voudriez-vous que nous nous inquiétionsde votre survie et de celle de vos enfants, ouque nous vous considérions tout juste commeun dommage collatéral dans la préservationde votre confort de vie ?

Des systèmes technologiques durables ontété développés, capables de fournir à lapopulation du monde entier de l'énergie enquantité bien plus grande que ne le fontactuellement les techniques émettrices de gazà effet de serre ; ils ont été mis au point mais

pas encore déployés en raison d'un coût perçucomme trop élevé. Par exemple, les océans dumonde possèdent plusieurs fois l'énergierequise par la population mondiale, et cetteénergie peut être recueillie avec des émissionslimitées.

Que ressentiriez-vous si vous étiez uncitoyen des îles du Pacifique, que vous saviezque des alternatives énergétiques à faiblesémissions de carbone sont plusieurs foiscapables d'assurer à la population mondialedes modes de vie productifs et satisfaisants, etainsi de vous sauver de la destruction, mais

que ces alternatives étaient considérées commeun sacrifice économique trop important pourêtre adoptées ?

Pendant des milliers d'années, les habitantsdes petits états insulaires ont été globalementles gardiens responsables de leurenvironnements, protégeant près d'un quartdes océans du monde et assumant cetteresponsabilité avec le plus grand sérieux. Nousavons également joué un rôle majeur dansl'évolution de l'industrie du transportmaritime et celle du tourisme à l'échellemondiale : aujourd'hui, le tourisme représenteen effet entre 45 et 80 % du produit intérieurbrut de la plupart des petits états insulaires.

Nous souhaitons continuer d'accueillir desvisiteurs sur nos îles, et nous voulonsbénéficier d'une part du mode de vie luxueuxdont tant de gens profitent dans les paysdéveloppés. Un mode de vie qui peut êtremaintenu sur la base de sources d'énergiealternatives et durables, capables de contribuerà la réduction du taux sans précédentd'émissions de gaz à effet de serre. n

« Ils parlent de nous fairedéménager. Mais noussommes liés à cette terre. Est-cequ'ils emporteront noscimetières avec nous ? Nous nesommes rien sans notre terre etsans nos ancêtres. »

Fais-moiconfiance

fiston.Polluer c’est

pas bonpour toi

Nord

Sud

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FORUM MONDIAL

WIM NAUDÉ est chercheur à l'Université desNations Unies – Institut mondial pour larecherche sur l'économie du développement(UNU-WIDER) et a dirigé son projet dePromotion des capacités d'entrepreneuriat. Il estle rédacteur d'Entrepreneurship and EconomicDevelopment, et co-rédacteur d'Innovation,Entrepreneurship and Development.

Les entrepreneurs, que The Economist aqualifiés de « héros » en mars 2009,semblent, après un examen plus attentif,n'avoir que peu d'utilité, voire peu decapacités, dans de nombreux pays endéveloppement. Il y a trente ans, Nathan Leffétait d'avis que « l'entrepreneuriat n'était plusun problème » ni une « contraintesignificative pour le rythme dudéveloppement » dans les pays endéveloppement. Comme les économistes dudéveloppement aiment le faire remarquer, lagrande majorité des entrepreneurs des paysen développement sont souvent à la tête demicro et petites entreprises (MPE) souventinformelles, qui ne contribuent que peu à laréduction de la pauvreté et à la croissance. Lapromotion enthousiaste de l'entreprise laissed'autant plus perplexe que les preuvesstatistiques du lien de causalité entreentreprise et croissance s'avèrent faibles etambiguës. Les résultats ne semblent pas très

solides si l'on examine les définitions, lespériodes, la qualité des données et lesméthodes d'estimation : la causalité inverséen'est pas loin. Certains économistesrapportent même une relation négative entrel'activité entrepreneuriale et la croissanceéconomique.

Ajoutez à cela le risque que des politiquesde soutien bien intentionnées aient au finaldes conséquences négatives. On pensenotamment au clientélisme, à la corruption, àla recherche de rentes et au maintienartificiel de sociétés inefficaces et peuproductives. De plus, comme l'a observé leprofesseur William Lazonick, les politiquesqui « mettent trop l'accent sur l'entreprisecomme clé du développement économiqueprennent le risque de nuire aux processuscollectifs et cumulatifs de l'apprentissageorganisationnel, indispensable àl'innovation. » D'autre part, les politiquesgénérales d'incitation à la créationd'entreprise peuvent encourager un nombredisproportionné d'entrepreneurs « peu

talentueux », ce qui conduirait les banques àréduire l'envergure globale des crédits.

Dans la mesure où les entrepreneurspeuvent être potentiellement dépourvusd'utilité ou de compétences, et où lespolitiques d'incitation peuvent êtreparsemées de pièges, les gouvernements, lesdonateurs, les Nations Unies et les agences dedéveloppement doivent progresser avecprudence. Un projet de recherche du WIDER,conduit sur deux ans, s'est attaché àcomprendre comment l'entreprise pouvaitêtre encouragée en faveur du développement,et pourquoi elle était un moteur importantde ce processus. Cet article fait part decertaines des idées qui ont émergé du projet.

Pourquoi l'entrepreneuriat compteEn dépit de cette introduction plutôtpessimiste, le projet a confirmé l'importancedu rôle de l'entrepreneuriat. La raison de laprécarité de la relation entre entrepreneuriatet développement économique dans lesétudes empiriques tient au fait que ces étudess'appuient très souvent sur des indicateursinadaptés de l'entrepreneuriat et dudéveloppement, ou bien sur des échantillonsde taille trop limitée. La plupart d'entre ellesmesurent le développement en termes decroissance économique, de revenu parhabitant ou de productivité. Si cesindicateurs ont leur importance, ledéveloppement économique, et pluslargement le développement humain, vontau-delà de la croissance ou des mesuresmonétaires des performances. Les problèmesde données et de mesure minant toujoursaujourd'hui les recherches pour despolitiques de l'entrepreneuriat, la récentetendance, modeste mais stable, en faveur desexpériences de terrain randomisées et del'étude de l'entrepreneuriat et du bien-êtrehumain, est bienvenue.

Si de nombreux économistes ne sont paspour encourager l'entrepreneuriat dans lespays en développement, tous ne partagentpas cet avis. Beaucoup considèrent les MPE, ycompris les entreprises informelles et « desurvie », comme importantes dans la luttecontre la pauvreté. Dans les pays endéveloppement, la croissance de l'emploi

Entrepreneuriat etindustrialisation :prudence !

Dans chaque édition, d'éminents contributeurs examinent l'un dessujets controversés du moment. L'entrepreneuriat est-il importantpour les pays en développement ? Si oui, quel est la meilleure manièrede le soutenir ?

« Des politiques de soutienbien intentionnées aient aufinal des conséquencesnégatives. »

SUJET BRÛLANT

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dans le secteur des MSP est souventsignificative. La majorité des MPE des paysen développement sont dirigées par desfemmes : cette structure joue doncpotentiellement un rôle important pourl'autonomisation des femmes ainsi que lasanté et le bien-être des ménages.

Le projet WIDER a étudié l'entreprise sousl'angle des différentes situations quepouvaient rencontrer les entrepreneurs : descontextes de forte croissance offrant despossibilités d'innovation, aux conjoncturesde conflit armé et de stagnation économique.La ténacité et le dynamisme desentrepreneurs était manifeste, qu'ils soientdes moteurs de l'innovation dans les pays endéveloppement ou qu'ils s'assurent desmoyens de survie et de résilience dans lescontextes de conflit. Un entrepreneuriat àforte croissance existe également dans lespays les moins développés. Des entreprisessurvivent à des conflits persistants parce queleur dirigeant est capable d'ajuster sonmodèle d'activités, par exemple en réduisantla sophistication technologique, enrelocalisant la chaîne d'approvisionnementet les sites de production ou en réduisant lesinvestissements à long terme. Cesajustements peuvent réduire la profitabilitévoire la taille des sociétés, mais ilscontribuent, à terme, à leur survie. Et la surviedes entreprises en période de conflit estessentielle car cette activité peut rapidementrebondir à la fin des hostilités.

Quel est le rôle des politiques ?Ce n'est pas parce que l'entreprise joue unrôle dans le développement, que lespolitiques gouvernementales doiventautomatiquement la soutenir. La mise aupoint de politiques de développement baséessur la promotion de l'entreprise est une tâchecompliquée. Pour éviter un certain nombrede pièges potentiels, il peut être utile decommencer par répondre à au moins deuxquestions.

Tout d'abord, pour quelle raison veut-onsoutenir les entrepreneurs ? Pour beaucoup,la raison se trouve dans les carences dumarché. Les marchés présentent denombreux défauts, mais c'est surtout le ‰

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est connue pour être difficile dans les pays endéveloppement. Les institutions sontendogènes et on en sait relativement peu surl'évolution conjointe des institutions et del'entreprise. Une réforme des institutionsbien intentionnée peut malgré toutengendrer des parts d'incertitudes auxrésultats indésirables, notamment leretranchement des anciennes élites et laquête de rentes.

De plus, tous les experts ne s'accordent pasà dire que la mise en place de « bonnesinstitutions » soit suffisante. Les variationsdes taux d'entrepreneuriat d'un pays à l'autre,même lorsque l'on tient compte desdifférences de qualité institutionnelle,suggèrent que des politiques spécifiquespeuvent avoir une influence sur le nombre etla qualité des entrepreneurs. Se borner àrestreindre le rôle du gouvernement àl'amélioration de l'environnement desaffaires peut ne pas fonctionner. L'entreprisea joué un rôle vital dans la croissanced'économies émergentes telles que le Brésil,la Chine et l'Inde. Ces trois pays ont encommun un score très faible et un trèsmauvais classement vis-à-vis des indicateursde la Banque mondiale. Le Brésil est classé122e, la Chine, 83e et l'Inde, 120e, sur 178 pays(classement de 2008). Par contre, on peut direque le succès de leur développement est, aumoins en partie, à mettre au crédit du soutienproactif apporté par le gouvernement à sesentrepreneurs.

En Inde, le financement par capital-risquese distingue. En Chine, la transformation etla privatisation des entreprises d'État, lesenseignements acquis auprès des entreprisesétrangères par l'encouragement desinvestissements étrangers, le soutienexplicite accordé aux entreprises high-tech et

les lourds investissements en infrastructure,notamment liées au commerce et auxtransports, sont des exemples d'intervention.Les cas de l'Inde et de la Chine sont éclairantsmais ils sont loin d'être uniques. Dans despays aujourd'hui considérés comme desterrains de libre entreprise, notamment lesÉtats-Unis, le développement du secteurprivé s'est appuyé sur un soutien proactifimportant de l'état.

« Politique industrielle »Une « politique industrielle », dans cetteoptique, est une forme de développement del'entrepreneuriat. Des politiques industriellessélectives, qu'elles soient ouvertementdésignées comme telles ou appelées «politiques de compétitivité », vont davantageoccuper le devant de la scène après la criseéconomique et financière. Lesgouvernements sont aux prises avec l'impactde l'augmentation du prix des matièrespremières, le creusement des inégalitéssociales, une croissance ralentie, unprotectionnisme jaloux et la nécessitéd'adopter des méthodes d'industrialisation àfaibles émissions de carbone. Les dangersinhérents à une grande politique industriellesélective sont bien connus et ils sont, dans denombreux cas, similaires à ceux que nousvenons d'évoquer. C'est pour cette raison qu'ilfaut faire preuve de la plus grande prudence.Les arguments en faveur d'un nouveau débatsur la politique industrielle sont de plus enplus puissants et sont notamment appuyéspar les récentes recherches et une vision plusnuancée de la façon dont le soutien auxentreprises peut jouer un rôle central dans ledéveloppement industriel.

Dans les pays en développement, le succèsde politiques de développement del'entrepreneuriat peut se mesurer par uneréduction initiale du taux d'entrepreneuriat.Cela signifierait en effet une baisse dunombre d'entrepreneurs « par nécessité » etune augmentation de la population pouvantau contraire opter pour un emploi salarié.Une bonne politique d'entrepreneuriat doitaider les personnes n'ayant que peu decapacités de gestion à quitterl'entrepreneuriat pour trouver un emploi.

cas en présence de facteurs extérieurs.L'innovation des entrepreneurs peut avoir plusd'avantages pour la société dans son ensembleque pour les entrepreneurs eux-mêmes. Enrecherchant une main d'œuvre qualifiée, ilspeuvent encourager les personnes à investirdavantage dans leur capital humain. Lesentrepreneurs montrent l'exemple en adoptantde nouvelles technologies, ils donnent desinformations aux acteurs externes sur lesactivités potentiellement profitables dans unerégion donnée, et ils ont la capacitéd'influencer l'environnement économiqueglobal en faisant pression sur le gouvernementpour obtenir des modifications desréglementations. Comprendre la motivationprincipale de la politique est essentiel pourcomprendre comment les conséquencespositives associées à l'entreprise peuvent êtreoptimisées, tout en minimisant lesconséquences négatives d'une politique desoutien (par exemple, la baisse de qualitémoyenne du vivier d'entrepreneurs, due à unaccès trop facile à l'entreprise).

Ensuite, dans un contexte donné, lesentrepreneurs peuvent-ils être concrètementsoutenus, même si la motivation est bonne ?Certains défendent l'idée que lesgouvernements ne peuvent pas augmenter lenombre d'entrepreneurs, mais tout juste eninfluencer la répartition. Ainsi, legouvernement doit se limiter à « corriger lesinstitutions » pour, par exemple, assurer laprotection de la propriété et le bonfonctionnement de l'appareil juridique,préserver la stabilité macroéconomique etpolitique et maintenir des taux d'impositioncompétitifs. D'autres pensent que la meilleureapproche consiste à améliorerl'environnement des « affaires ». La Banquemondiale publie un ensemble d'indicateurséconomiques que les pays sont encouragés àaméliorer dans leur contexte, notamment pourencourager l'entrepreneuriat.

De bonnes institutionsLa mise en place d'institutions solides estindubitablement essentielle, mais cette tâche

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« Une bonne politiqued’entrepreneuriat doit aiderles personnes n’ayant que peude capacités de gestion àquitter l’entrepreneuriat pourtrouver un emploi. »

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Pour cela, elle doit créer un contexte au seinduquel les personnes les plus talentueuses enla matière trouveront avantageux de créerleur propre entreprise, de créer des emplois,de faire croître leurs activités, d'encourager ledéveloppement de l'éducation et la migrationvers les centres urbains en recherchant unemain d'œuvre qualifiée, de contribuer à ladiversification de l'économie par ladécouverte de ses possibilités de production,et de jouer le rôle de pionnier et defacilitateur dans l'adoption de nouvellestechnologies.

À terme, un entrepreneuriat florissant doitproduire une économie dont la structure estdominée par le secteur des services, peupléede sociétés de haute technologie et detravailleurs hautement qualifiés.L'épanouissement de l'entreprise et unsoutien appropriés sont au cœur duprocessus de développement structurel etd'industrialisation. L'échec dudéveloppement structurel et del'industrialisation, et l'incapacité denombreux pays à être concurrentiels sontdonc, au final, le produit d'une politiquedéfectueuse de développement del'entreprise. n

Plus spécifiquement, trois aspectsessentiels du débat ont été sous-estimés : l l'entrepreneuriat existe depuis longtempssous une forme très vivante dans toutel'Afrique et toute l'Asie, dans certains casdepuis des siècles ; l les pays qui sont passés à une économieindustrielle majeure ailleurs dans le mondese caractérisaient par l'évolution dessystèmes, des structures et des loiséconomiques plutôt que parl'entrepreneuriat ; l l'entrepreneuriat ne présente pas lesmêmes avantages dans tous les systèmeséconomiques : c'est dans le cadre duvéritable capitalisme qu'il a produit lesrésultats auxquels nous l'associons enOccident.

Tout miser sur les entrepreneurs revient ànégliger les aspects difficiles maispotentiellement bien plus dynamiques dedéveloppement économique dont manquentles pays en développement. La question n'estpas « l'entrepreneuriat est-il un appui pourle développement économique ? » maisplutôt « dans quelles circonstances peut-ill'être ? »

L'impulsion entrepreneurialeIl n'est plus à démontrer que le monde endéveloppement n'est pas à courtd'entrepreneurs. Si l'entrepreneuriat estdéfini comme ce qui trouve ou crée uneopportunité économique et cherche àl'exploiter, on trouvera difficilement un seulendroit d'Afrique qui en soit dépourvu. Dansle Malawi rural d'aujourd'hui, si vous faitesun compliment sur le motif d'une robe ou lacoupe d'une chemise, on vous proposera toutde suite un coupon du même tissu, voire levêtement lui-même. Cette attitude quiconsiste à transformer les désirs en profit

RANIL DISSANAYAKE a un parcoursd'économiste et d'historien. Il se spécialiseaujourd'hui dans l'efficacité de l'aide et a conseilléle gouvernement du Malawi en la matièrependant près de quatre ans avant d'occuper unposte similaire à Zanzibar. Vous pouvezégalement le retrouver sur le blog AidThoughts.

Le récent débat sur le rôle del'entrepreneuriat dans le développementéconomique des pays les plus pauvres aumonde a été fort mal interprété. Si beaucoupse sont concentrés sur la nécessité desoutenir les entrepreneurs ou d'étendreleurs opportunités, les aspects historiques etstructurels qui constituent le contexte danslequel l'entrepreneuriat contribue audynamisme économique ont été largementignorés.

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Entrepreneuriat, capitalet capitalisme

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l'historien Chris Bayly se penche précisémentsur cette question : quelle est la particularitéde l'Europe et de l'Amérique du Nord qui onttransformé leur entrepreneuriat en entitéséconomiques transnationales de très grandeenvergure, tandis que les autres paysaccusaient un retard constant ? Il propose unéventail de caractéristiques dont certaines nesont plus valables aujourd'hui. D'autres,toutefois, le sont toujours.

La première se réfère à l'importance demettre en place des liaisons de transport,aussi bien internes lorsqu'il y a un marchédomestique, qu'externes lorsque desopportunités d'échanges existent. Cela resteun puissant facteur, notamment en Afrique :le rapport Doing Business de la Banquemondiale suggère que les coûts du transporten Afrique sont considérablement plusélevés qu'ailleurs. L'entrepreneuriat a besoinde pouvoir accéder à des marchés suffisantspour se concrétiser pleinement.

Bayly cite également le passage à desformes modernes d'agriculture, intensives etnourries d'investissements, qui ont produitle surplus nécessaire pour alimenterl'urbanisation et l'industrialisation deséconomies européennes et nord-américaines sans trop augmenter lesimportations. La sécurité alimentaire del'Afrique reste fragile, en grande partie parceque les systèmes de propriété terrienneexcluent le passage à une agriculture plusintensive et commerciale.

De plus, la stabilité (géographique etpolitique) des groupes dominants a créé unencouragement à l'investissement : la

possibilité d'accumuler les retours del'entrepreneuriat ont joué le rôled'accélérateur de sa concrétisation.

Le Mystère du CapitalLes deux autres domaines essentielsmentionnés par Bayly sont l'émergenced'institutions financières modernescapables de fournir du crédit, et lesnouvelles structures juridiques visant àstabiliser le statut légal du risque et desretours de la possession. Ces facteursconstituent la problématique centraled'Hernando De Soto dont l'ouvrage, LeMystère du Capital, est sans doute lacontribution la plus importante apportée àla question de l'entrepreneuriat dans leTiers-Monde au cours de ces vingtdernières années. L'argument de De Sotopeut se résumer ainsi : l'entrepreneuriat estlimité par la disponibilité du capital. Laforce de cet argument réside dans le fait quesa conception du capital est bien pluscomplexe que celle que l'on en agénéralement.

De Soto démontre que la valeur des actifsdétenus par le Tiers Monde est immense :plusieurs milliers de milliards de dollars.Toutefois, une faible partie seulement deces actifs peut être considérée comme un «capital », dans la mesure où elle n'est pasassociée au facteur central qui crée le capital: un système juridique fonctionnel etefficace qui reconnaît et régularise lesnotions populaires de propriété. Une foisles actifs convertis en propriété légale, ilsacquièrent un certain nombre decaractéristiques qui les convertissent encapital. Leur potentiel économique est fixédans le processus de définition légale de lavaleur qu'ils contiennent ; ils font alorspartie d'un réseau unique d'informationsqui leur permet d'être échangés, accumuléset acquis facilement ; les propriétaires sontresponsables légalement de l'actif, ce quiréduit les risques associés aux emprunts, etainsi de suite. Conjugué à un système solided'emprunt et de prêt, le capital fournit lecarburant à l'aide duquel les entrepreneurspeuvent alimenter leurs projetséconomiques.

est au cœur de l'entrepreneuriat, et lacréativité dont elle se nourrit est stupéfiante.Dans le port de Dar es Salaam, il est possiblede recharger un téléphone mobile dans depetits guichets où une batterie de voiturealimente différents chargeurs de portablespour un tarif défini. Si l'on tient compte dunombre de voyageurs qui embarquentchaque jour sur les ferries, cette activitéforme la base d'une entreprise durable.L'impulsion de l'entrepreneuriat estpuissante en Afrique. Toutefois, elle estsouvent dans l'incapacité de trouver uneexpression ou bien est limitée à de petitesentreprises.

C'est un phénomène bien connu de l'élitedu monde en développement. Dès le 18e et le19e siècles, les marchands chinois, arabes,asiatiques et africains saisissaient lesopportunités offertes par les nouvellesrelations et routes commerciales pour fairevoyager leurs marchandises dans le mondeentier et en tirer des revenus accrus. Si lesEuropéens ont généré la plus grande part dela valeur ajoutée dans ces relations, ilsrépondaient à une impulsion commerçantepuissante. De nombreux historiens ontmontré que des réussites spectaculaires ontété réalisées dans la période pré-coloniale del'Afrique, en Asie et dans le monde arabe.

Faire face aux contraintesL'entrepreneuriat est abondant, et il l'atoujours été au fil de l'Histoire. Ce n'est doncpas dans son absence qu'il faut chercher unobstacle à l'industrialisation ou audynamisme dans le parcours économiquedes pays en développement. Le problème estque l'entrepreneuriat peine à trouver unemodalité d'expression appropriée parlaquelle parvenir à l'accumulation massive età la croissance qui a caractérisé les économieseuropéennes. Nous devrions donc plutôtconsacrer nos énergies à lever les obstaclesqui freinent son expression. Une fois encore,l'analyse historique peut nous aider àdémêler certaines de ces problématiques.Dans La Naissance du monde moderne,

« D’une importance crucialepour le développementoccidental, la stabilité desgroupes d'élites leur a permisde cueillir les fruits del'investissement et del'entrepreneuriat. »

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l'absence d'un facteur décisif : l'existenced'un capitalisme stable. L'un des pointsdécisifs identifiés par Bayly pour ledéveloppement occidental était la stabilitédes groupes d'élite, qui leur a permis decueillir les fruits de l'investissement et del'entrepreneuriat.

Un argument semblable est à la racine del'analyse de Karl Marx selon laquelle lecapitalisme, en tant que système, donne auxentrepreneurs la liberté d'alimenter leprogrès économique. Marx a démontré quele capitalisme allait au-delà des marchés etdes entrepreneurs. Ces derniers onttoujours existé. On aura du mal à trouverune société qui en ait été dépourvue danstoute l'Histoire connue. Ce qui distingue lecapitalisme des systèmes qui l'ont précédéréside dans les relations spécifiques quiexistent entre ceux qui ont les moyensd'accumuler et ceux qui travaillent pour unsalaire. Pour résumer, dans le capitalisme,

quelques entrepreneurs sont capablesd'accumuler du capital et de maintenir cecapital avec une certaine stabilité, en cesens qu'il ne leur sera pas prisarbitrairement, puis de faire appel autravail d'un vivier de personnes sansemploi et dépourvues de possession pourgénérer du profit à partir du capital.Comme le capitaliste n'utilise pas sonpropre travail et qu'il récolte l'excédent derevenu une fois les salaires payés, il estencouragé à mettre en œuvre toujours plusde capital dans son bien et sa main d'œuvreafin d'augmenter les revenus générés parune main d'œuvre constante.

Incitations et potentiel Les petits porteurs et les chefs de trèspetites entreprises n'ont pas les mêmesincitations ni le même potentiel. Leurshorizons sont limités dans deuxdimensions : s'il est sa source principale demain d'œuvre, ses intérêts d'entrepreneurd'une part, et de travailleur – qui a besoinde repos et de loisir – d'autre part, ne sontpas en harmonie. Ensuite, ses actifs limitésrestreignent la quantité de capital auquel ilpeut accéder, ce qui est précisément leproblème identifié par De Soto. CommeLindsay Clinton l'a observé dans un récentarticle pour le Wall Street Journal, tout axersur les entrepreneurs ne garantit en rienque le grand nombre de personnes sansemploi en tirera un quelconque bienfait.Nous devrions plutôt chercher à permettreà un petit groupe d'entrepreneurs de bâtirdes empires économiques capablesd'employer des milliers de personnes pourconstituer la base d'une économiecompétitive.

Rien de tout cela ne sous-entend quel'entrepreneuriat n'a qu'un rôle mineur àjouer. C'est une condition nécessaire maisnon suffisante au développementéconomique, et elle est déjà satisfaite danspratiquement tous les pays. Nous devrionsplutôt nous pencher sur les conditions desoutien qui sont nécessaires pour fourniraux entrepreneurs la plateforme et lescapacités requises pour catalyser lacroissance économique et l'emploi. n

Ainsi, pour De Soto, il est erroné des'inquiéter des entrepreneurs à proprementparler. Nous devrions bien plus noussoucier de la nécessité de convertir leursactifs en capital, un processus auquels'oppose actuellement un obstacle majeur.Cet obstacle est le système juridique. Dansbien trop de pays, ce que l'on considèresocialement comme un capital privé n'estabsolument pas reconnu, ou bien sareconnaissance fait face à d'intolérablesobstacles bureaucratiques. À Haïti parexemple, posséder légalement un bien peutprendre jusqu'à 19 ans.

L'importance de la stabilitéEt pourtant, si nous parvenions à résoudreles problèmes du manque de transport, dela nécessité d'une agriculturecommercialisée, et de l'absence de systèmesjuridiques et financiers adaptés, lesentrepreneurs doivent encore faire face à

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nLes Émirats Arabes Unis et laMalaisie occupent les deuxpremières places du classement del’indice mondial de l’innovation2009/10. Cet indice couvre 132pays et compare les facilitateursqui stimulent l’innovation et lesoutputs qui sont les résultats des

des données issues d’une enquêted’opinion des dirigeants, conduitetous les ans par le Foruméconomique mondial.

En tête de liste des 132 paysconcernés par l’indice, se trouventl’Islande et la Suède. Les deuxpremiers en Afrique sont l’Afriquedu Sud et la Tunisie. En Asie : laChine, Hong Kong RAS etSingapour. En Amérique latine : leCosta Rica et le Chili. Des 15 paysles moins avancés, la Mauritanie etle Lesotho arrivent en tête.(INSEAD)

L’indice de compétitivité del’industrie mondiale 2010récemment publiée par Deloitte etle Conseil américain de lacompétitivité, est fondé sur les avisde plus de 400 hauts dirigeantsindustriels du monde entier. Ens’inspirant directement del’expérience des industriels,l’indice livre un point de vueunique sur le paysage mondial dela compétitivité.

D’après les chefs de file de lahaute industrie qui ont participé àcette étude, les moteurs les plusimportants de la compétitivitémondiale industrielle sont lesfacteurs de production classiques :la main d’œuvre, les matériaux etl’énergie.

Les quatre moteurs suivantsbénéficient de la contribution desforces gouvernementales :l’économie, le commerce, lessystèmes financiers et fiscaux, laqualité des infrastructuresmatérielles, les investissementspublics dans l’industrie etl’innovation, le système juridiqueet règlementaire.

Les trois derniers moteurs sontplus « localisés » : le réseau defournisseurs, la dynamique del’environnement local des affaires,y compris la taille du marché etl’intensité de la concurrence localeainsi que la qualité et ladisponibilité des soins de santé.

Il a été demandé aux dirigeantsd’évaluer la compétitivitéindustrielle globale de 26 pays,actuellement et dans cinq ans. Lesrésultats révèlent qu’un nouvel

ordre mondial sur la compétitivitéindustrielle a vu le jour.L’ascension de trois pays enparticulier, la Chine, l’Inde et laRépublique de Corée, semble allerde pair avec un marché asiatiquede plus en plus important. Lessuperpuissances industrielles de lafin du 20e siècle, les États Unis, leJapon et l’Allemagne, sontmaintenant à la traîne face à cestrois poids lourds asiatiques.

Un examen des autres pays surl’indice indique que plusieursnouvelles économies montent enpuissance en tant que centresindustriels. Les dirigeantsattendent notamment du Brésil,du Mexique, de la Pologne et de laThaïlande qu’ils améliorent leurcompétitivité industrielle dans lescinq prochaines années comptetenu soit de leurs ressourcesnaturelles soit des aptitudes deleur main d’œuvre. Enregistrantelles aussi des progrès significatifssur l’indice, les économies del’Europe de l’Est et de la Russiefont preuve d’un potentielcompétitif solide.

tendances

La compétitivité dans l’industrie

1 Chine 2 Inde 3 République de Corée 4 Brésil 5 États-Unis d’Amérique 6 Mexique 7 Japon 8 Allemagne 9 Pologne 10 Thaïlande– Indice de compétitivité de l’industriemondiale 2010

AFFAIRES DES AFFAIRES

activités d’innovation. Les cinqfacilitateurs sont les institutions;la capacité humaine,l’infrastructure générale et desTIC, la sophistication du marchéet de l’industrie. Les deux outputssont les outputs scientifiques et lesoutputs créatifs et de bien-être.

L’indice, produit par l’INSEAD(Institut européend’administration et des affaires) encollaboration avec laConfédération de l’industrieindienne, associe des donnéesprécises recueillies par desorganisation internationales, et

Compétitivitéindustrielle en 2015 –Les 10 premiers pays

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n Le “Economist IntelligenceUnit” rapporte que la croissanceéconomique au Moyen-Orient eten Amérique du nord s’estredressée en 2010, soutenue parles prix élevés du pétrole et uneéconomie mondiale plus solide.En 2011, les productions élevéesde pétrole et la hausse effrénéedes dépenses publiques dans lespays producteurs de pétrole,notamment en matière deprojets de développementinfrastructurel, alimentera lacroissance régionale avec un

taux moyen annuel de 4,6 %entre 2012 et 2015.

Les pays d’Afrique du nord,qui dépendent fortement del’Union Européenne (UE) commemarché d’exportations tant pourles marchandises que pour lesservices, et comme source defonds des migrants,enregistreront une croissanceplus modérée, au vu desperspectives du bilanéconomique modeste de l’UE etd’une certaine appréciation deleurs devises. Cette croissance ne

devrait pas suffire à réduire lestaux de chômage élevés parmi lajeunesse de ces pays. (EconomistIntelligence Unit)

n L’indice Ibrahim de lagouvernance africaine 2010 dévoiledes progrès récents dansplusieurs pays en matière dedéveloppement économique ethumain, mais également unebaisse dans les droits politiques,la sécurité des individus et l’Étatde droit. Dans la catégorie“Sustainable Economic

Opportunity” ( Opportunitééconomique durable), 41 des 53états africains se sont améliorés.Dix d’entre eux ont été citéscomme ayant connu desaméliorations notables au coursdes cinq dernières années :Angola, Burundi, Cap Vert,Égypte, Libéria, Malawi, ÎleMaurice, Namibie, Sierra Leone,et Swaziland. (La Fondation MoIbrahim)

Une entreprise produisant deslampes solaires résistantes, à basprix et d’une grande qualité aremporté le prestigieux PrixAshden pour l’énergie durable en2010. L’entreprise d.light designfabrique des lampes LEDrechargeables à l’énergie solaire,qui illuminent la vie des habitantsdes pays en développement, quiutilisaient jusqu’alors des lampes àpétrole ou des bougies.

Les lampes solaires sontdéveloppées et testées au siège del’entreprise en Chine à Hong KongRAS, elles sont fabriquées etassemblées à Shenzhen, en Chine,puis sont vendues dans plus de 32pays à travers le monde, avec l’Indeet l’Afrique de l’Est commeprincipaux marchés. Créée en2007, d.light a annoncé récemmentque les ventes de ses lampes ontapporté des solutions intelligentes,propres et accessibles en matièred’éclairage, à plus d’un million etdemi de personnes.

Jusqu’à maintenant, lespersonnes vivant dans les pays endéveloppement sans accès àl’électricité devaient utiliser lepétrole ou d'autres combustiblescomme sources d'éclairage. Ceux-ci produisent des émanations et dela fumée préjudiciables à la santé,fournissent un éclairage faible etprésentent un risque d’incendie.En outre, le pétrole est cher,engloutissant jusqu'à la moitié durevenu mensuel de certainsménages. Les lampes d.lightcoûtent entre 10 $ et 45 $, selon lemodèle.

Pour d.light, l’innovation dansles circuits de distribution estaussi importante que l’innovationdans la conception et latechnologie du produit. Leslampes sont commercialisées parle réseau habituel de distributeurset de marchands, mais égalementpar les entrepreneurs des zonesrurales (REs), des personnesbénéficiant d'une certaine positionsociale dans leurs communautés,qui achètent plusieurs lampessolaires à la fois chez desmarchands, puis les vendent avecbénéfice dans leurs propresvillages. Certains REs permettent àdes clients potentiels d’essayer lalampe pendant quelques joursavant de s'engager à l’acheter.

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Illuminer la vie !

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Comment décide-t-on si un pays est un PMA oune l’est pas ?Dans le système des Nations Unies et en généraldans la communauté qui traite de la définition etdu concept du groupe PMA, se tiennent desdébats sur les critères qui permettent devraiment distinguer ces pays du reste du monde.Ces critères ont connu diverses métamorphoseset ont évolué au fil du temps. Les trois critèresmajeurs utilisés pour identifier les PMA sont lessuivants :l Un critère de faibles revenus, basé sur uneestimation moyenne sur trois années du revenunational brut (PNB) par habitant (moins de 905 $pour entrer, plus de 1 086 $ pour sortir) ;l Un critère d’état du capital humain, basé surdes indicateurs de nutrition (le pourcentage dela population sous-alimentée), de santé (le tauxde mortalité infanto-juvénile), d’éducation (letaux brut d’admission à l’enseignementsecondaire et le taux d’alphabétisation desadultes) ;l Un critère de vulnérabilité économique, basésur des indicateurs de taille de la population,d’éloignement, de concentration del’exportation des marchandises, de part del’agriculture, de l’économie forestière et de la

Y a-t-il assez d’avantages à être un PMA qui mepousseraient, si j’étais président d’un pays, à ledevenir, ou la stigmatisation serait-elle siimportante que je ne le voudrais pas ?Une certaine stigmatisation y est liée parce quevous êtes perçu comme un pauvre parmi lespauvres. Lorsque cette catégorie a été créée, deuxpays ne voulaient vraiment pas s’y retrouver.L’un était le Ghana. L’autre était le Zimbabwe. Ilsont été autorisés à s’en retirer, parce que si vousne voulez pas vous y trouver, personne ne peutvous y forcer. Mais d’un autre côté, vous vousexcluez des avantages ou des préférences allouésaux pays intégrés à la liste.

Bien qu’il y ait un peu de stigmatisation, l’idéeest que vous allez utiliser cette fenêtred’opportunité fournie par les mesures de soutienet sortir de cette liste aussi vite que possible.Donc la question est, que plutôt que d’êtrereconnu comme structurellement handicapé,vous utilisez les mesures de soutien mises à votredisposition et vous en faites bon usage.

Malheureusement, et c’est là tout le problèmeactuellement, malgré l’utilisation de mesures desoutien sur une période de 30 à 40 ans, seulsdeux pays sont sortis du groupe. Le Cap Vertrécemment, et avant lui le Botswana.

Venir en aide aux paysles moins avancés

DEBAPRIYA BHATTACHARYA est un conseiller spécialdu Secrétaire Général de la Conférence des NationsUnies sur le commerce et le développement, chargé depréparer les documents de stratégie qui seront utilisésdans le processus de préparation de la conférence desNations Unies de 2011 sur les PMA.

Debapriya Bhattacharya préfigure les questions à discuterlors de la quatrième conférence des Nations Unies sur lespays les moins avancés (PMA) qui se tiendra à Istanbul enmai 2011. Une question centrale, explique-t-il, réside dans lefait que la croissance économique des PMA n'est pasparvenue à sortir les pauvres de leur condition.

pêche dans le produit national brut, du nombrede sans-abris suite à des catastrophes naturelles,d’instabilité de la production agricole etd’instabilité des exportations de biens etservices.

Par conséquent, les revenus, les ressourceshumaines et la vulnérabilité sont les troisensembles de critères qui identifient la liste desPMA. Les Nations Unies utilisent un mécanismedans lequel tous les trois ans, cette liste est revueet de nouveaux pays sont introduits, tandisqu’avec de la chance, certains pays sont retirés dela liste.Vous avez dit que l’ONU a ses procédures, sesnormes et ses chiffres et évalue qui y rentre et quin’y est pas. Pourquoi est-il important de savoirqui a un statut de PMA ?Parmi les pays en développement, ces pays lesmoins avancés ont été isolés pour bénéficierd’un soutien public et de mesures de soutieninternationales plus concentrées, et pour leurconsacrer plus d’attention afin qu’ils triomphentde leurs problèmes et de leurs handicapsstructurels, ou de leurs obstacles audéveloppement. Cette liste est donc importantepour cibler les pays qui nécessitent le plus desoutien international. ‰

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Trois pays se trouvent en passe de sortir dela liste l’année prochaine. Parmi eux, lesMaldives, un petit état insulaire menacé entreautres par le changement climatique. Ledeuxième est les Samoa et le troisième la GuinéeÉquatoriale. Ce dernier est riche en pétrole etson revenu par habitant se place parmi lesrevenus les plus élevés au monde.Comment ce groupe de pays est-il différent ousemblable à la description de Paul Collier « lemilliard du bas » concernant les personnes lesplus pauvres ?Le « milliard du bas » s’étend sur de nombreuxpays. Il s’agit d’une catégorie de populations quiforment les plus pauvres des pauvres. Mais nousne parlons pas ici des personnes pauvres. Nousparlons des pays pauvres. L’élément crucial iciest que ces pays souffrent de handicaps difficilesà surmonter en comptant uniquement sur leursefforts internes. Certains handicaps ne peuventjamais être vaincus. Par exemple, il existe desdizaines de pays sans littoral comme le Bhoutan,le Népal et certains pays d’Afrique – à faiblerevenus et enclavés. C’est un grave problèmepour eux. De même, il existe des pays insulaires,à très petite population, qui peuvent êtredévastés par un tsunami.

Ce sont des handicaps majeurs qui doiventêtre pris en considération. Haïti est un exempleclassique de la vulnérabilité de ce typed’économies. Un pays peut être touché, nonseulement par des catastrophes causées parl’homme, mais également par des catastrophesnaturelles. Le même phénomène s’est produitavec les tsunamis dans le Pacifique il y aquelques années. Donc même si vous êtes unpays développé, mais très vulnérable, vosréalisations sont très fragiles et tout choc externepeut les balayer, comme ça. C’est donc bien plusqu’une question de produit national.Cette catégorie de pays, avec ces problèmesparticuliers, sera donc le centre d’intérêt de laconférence que vous préparez pour mai 2011. Enquoi cela – la quatrième conférence ONU sur lesPMA – sera-t-il différent et quelles sont lesnouvelles réalisations auxquelles vous espérezparvenir pour aider ces pays ?Pour concevoir de nouvelles méthodes, denouvelles interventions et de nouvelles mesuresde soutien, ou encore une nouvelle générationde politiques publiques pour accélérer leprocessus de développement dans ces pays, ilfaut comprendre comment ils ont évolué aucours de la dernière décennie.

Si l’on observe ces pays de plus près, on voitqu’au cours de la décennie précédant les années2006/2007, avant que la crise alimentaire, la crisepétrolière et les crises financières etéconomiques n’entrent en jeu, ces paysévoluaient plutôt bien en termes de croissance.Ils augmentaient leurs exportations et recevaientdes niveaux relativement élevésd’investissements directs à l’étranger (IDE). Lesflux d’assistance officielle au développementavaient également augmenté à un certain niveau.Mais ce qui était très étrange, c’était que malgrétoutes les performances, apparemmentaméliorées, de ces pays et les indicateurs macro-

économiques en hausse, nous avons remarquéque le rôle du secteur industriel, des industriesde transformation à même de fournir desemplois de bonne qualité et même des emploisqui progressent, n’évoluait pas. Il y avait donc dela croissance, mais pas au sein des secteursmodernes.

En termes d’exportations, il n’y avait alorsguère de diversification des produits. Dans le casde la plupart des pays africains, une marchandiseétait dominante : soit la fabrication de textilessoit les industries extractives, pétrole ou autresressources minières. Il n’y avait aucunediversification. Dans le cas des IDE, la plupartdes investissements allaient aux mines et auxindustries extractives.

Donc, la question à se poser est : commentde nouvelles mesures de soutien peuventmodifier ces circonstances, afin d’atteindreune croissance productive intégratrice et àbase élargie ? Une croissance productivesignifie une croissance de l’industrie et unecroissance du secteur agricole. En effet,l’agriculture a été négligée durant la décennieprécédant la dernière crise alimentaire. Celasignifie également des services qui peuventsoutenir l’environnement d’investissement ettous ces autres secteurs en créant desemplois.Un environnement favorable pour lacroissance de ces secteurs se trouve-t-illargement sous le contrôle des pays riches oudes pays développés les plus importants, ous’agit-il avant tout de décisions de politiqueinterne qui doivent être prises par lesdirigeants des PMA eux-mêmes ?Nous parlons ici d’un accord, d’une ententeentre les pays développés et les PMA. Et nousavons actuellement une tierce partie, leséconomies émergentes. Donc, vous avez les paysdéveloppés, les pays en développement avancéset les pays les moins avancés. Ainsi, les trois vontse réunir pour atteindre ce que nous appelons « des responsabilités partagées maisdifférenciées ». Les objectifs sont communs,mais en termes de moyens d’y parvenir, il existedes responsabilités différenciées, en fonction dusecteur.

Les politiques internes, une bonnegouvernance, des mesures anti-corruption, unsystème juridique efficace, tout cela est trèsimportant et se trouve sous le contrôle des PMAeux-mêmes. Mais pour les moderniser, ilspeuvent avoir besoin de ressources et cesressources et expertises ne sont pas toujoursdisponibles dans le pays. De plus, connaissant lanature de leurs demandes d’investissements ouleurs dépenses publiques pour la santé etl’éducation, ils peuvent avoir besoin de soutienpour combler le manque. L’une des manières d’yparvenir est bien entendu d’obtenir davantaged’aide de l’étranger. La deuxième méthodeconsiste à obtenir de nouveaux marchés pour yvendre ses produits. La troisième consiste àattirer des investissements dans des secteurscréateurs d’emplois – le développement durablepar l’investissement dans d’autres secteurs quel’industrie extractive.

Toutes ces questions vont se croiser entermes de moyens de précipiter un changementstructurel dans ces pays, afin qu’ils soient mieuxintégrés au monde globalisé, et que les bénéficesdu développement soient diffusés jusqu’aux pluspauvres des pauvres et enfin, pour atteindrecertains des objectifs du millénaire pour ledéveloppement.Lorsque nous pensons aide, commerce etinvestissement, nous nous concentronsd’habitude sur les politiques des pays à revenus

Amérique1

Pays les moinsavancés

Les petits états insulaires en développement sontmarginalisés de l'économie mondiale par lesconséquences défavorables combinées de leurpetite taille, de leur éloignement des grandsmarchés et de leur grande vulnérabilité aux chocséconomiques ou naturels qui dépassent lescapacités nationales.

Les pays en développement sans littoral font faceà de graves contraintes sur leur développementsocio-économique général, sous forme d'unmanque d'accès territorial à la mer,d'éloignement et d'isolement des marchésmondiaux et de coûts élevés de transit.

* Aussi petits états insulaires en développement(PEID)

# Aussi pays en développement sans littoral (PDE)

1. Haiti *

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élevés, mais bien sûr comme vous l’avezsouligné, nous avons à présent ces grandeséconomies de marché émergentes quideviennent de plus en plus puissantes, avec desmarchés parfois plus importants que ceux despays riches. Comment interviennent-ils danscette discussion avec les PMA ?L’un des points de changement majeurs, lenouveau contexte pour les défis dedéveloppement des PMA qui a changé depuis ladernière conférence de 2001, est l’émergence du

sud global, les nouvelles économies émergentes.Les PMA vendent à présent plus de 50 % de leursexportations à des pays en développement. Maisle problème est que l’essentiel de cesexportations est constitué de minéraux et decarburants. Moins de 50% des exportations versles pays développés est constituée de produitsmanufacturés, y compris les textiles.

Il est question ici de qualité contre quantité.La question est de savoir comment les PMApeuvent accéder à ces nouveaux marchés

émergents avec de meilleurs produits, et si celapeut leur être bénéfique en termes dediversification et de transferts de technologie.C’est le nouveau contexte et nous y retrouvons laquestion de la responsabilité partagée.l L’article ci-dessus est une version remaniée etabrégée d’un entretien réalisé par LawrenceMacDonald pour le Centre for GlobalDevelopment (centre pour le développementmondial) et diffusé dans les Global ProsperityWonkcast.

Afrique 33 Asie etPacifique

151. Afghanistan #2. Bangladesh3. Bhoutan #4. Cambodge5. Kiribati *6. République démocratique

populaire du Laos #7. Maldives *8. Myanmar9. Népal #10. Samoa *11. Iles Salomon *12. Timor oriental *13. Tuvalu *14. Vanuatu *15. Yémen

1. Angola2. Bénin3. Burkina Faso #4. Burundi #5. République

centrafricaine #6. Tchad #7. Comores *8. République

démocratique duCongo

9. Djibouti10. Guinée Équatoriale

11. Érythrée12. Éthiopie #13. Gambie14. Guinée15. Guinée-Bissau *16. Lesotho #17. Liberia18. Madagascar19. Malawi #20. Mali #21. Mauritanie22. Mozambique23. Niger #

24. Rwanda #25. São Tomé et Príncipe *26. Sénégal27. Sierra Leone28. Somalie29. Soudan30. Togo31. Ouganda #32. République unie de

Tanzanie33. Zambie #

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De part en part de la planète, les communautéslocales des PMA ont été sérieusement touchéespar la crise financière mondiale, puisque leursmaigres acquis économiques et sociaux réalisésces dernières années ont soudainement reflués.Des appels à « l’action » de plus en plus pressantssont lancés auprès de la communautéinternationale afin de soutenir la créationd’emplois et les initiatives génératrices derevenus permettant de réparer la situation, enparticulier au sein des communautés les pluspauvres. De la même manière que lors desannées qui ont précédé la crise, la solution la plussouvent mise en avant est la microfinance qui,selon ses défenseurs, est parfaitement adaptéepour donner un coup de pouce à une relance « ascendante » et à une trajectoire dedéveloppement animée par les pauvres eux-mêmes, sous forme de travail indépendant et demicro-entreprises.

Malgré la rhétorique enthousiaste et les RPdithyrambiques qui entourent le modèle de lamicrofinance depuis ces trente dernières années,même les supporters les plus assidus de cemodèle reconnaissent désormais que lesrésultats obtenus sont en réalité très maigres.Pour les autres, l’évidence révèle que lamicrofinance fait plutôt partie du problème dudéveloppement et non de la solution : les PMAsouhaitaient un développement durable mais laplupart d’entre eux terminent sous le joug desmicro-dettes.

Le modèle dominant de la microfinancecommerciale étant de plus en plus considérécomme problématique, de nombreuses agencesde développement international, ainsi que desgouvernements de PMA, commencent à étudierdes formes d’établissements financiers locauxplus appropriés pour aider les pauvres. Leursconclusions prouvent qu’il existe de nombreuxmodèles de financement locaux etd’établissements financiers basés sur lacommunauté et que ceux-ci présentent desrésultats véritablement impressionnants entermes de développement durable et deréduction de la pauvreté.

L’exemple de la CLPL’exigence sans doute la plus importante d’unsystème de financement local dans les PMA estqu’elle ne doit pas simplement corriger lapauvreté et le sous-développement, mais qu'elledoit également inciter à l’éradication définitivede ces problèmes. Les banques dedéveloppement communautaire bien conçuessont en mesure de réaliser cela. Dans le nord del’Espagne, au Pays basque, la Caja Laboral Popular(CLP) est l’un de ces établissements, détenu etcontrôlé localement, qui a réussi à soutenir lacréation d’entreprises dans une région reculée etaffectée par un conflit historique. La CLP est unebanque de développement qui a soutenu des

entreprises coopératives en étant le pointd’ancrage autour duquel la communauté a pucommencer à se développer et à rapidementendiguer la pauvreté d’une manière socialementoptimale. Par exemple, les coopératives ont étéinstallées près des lieux d’habitation de leursmembres, ce qui limite les déplacements et leurdonne plus de temps libre pour profiter de leurvie de famille. Grâce à ses racines profondémentancrées dans la communauté et à diversmécanismes régulateurs démocratiques, la CLP aréussi à se tenir à l’écart de la corruption et de lamauvaise gestion. En définitive, en un peu plusde trente ans, une région autrefois pauvre s’esttransformée en l’une des plus riches régionsd’Europe, des plus inclusives au niveau social etdes plus dynamiques en termes de culture.

L’expérience de la CLP est-elle unique ?Certainement pas. Après 1945, des résultatslargement similaires ont été obtenus dans lenord de l’Italie par un réseau de banquescoopératives et d’établissements de créditspécialisés (ECS) qui furent décisifs pour lareconstruction de l’infrastructure physique etsociale détruite au cours de la Seconde guerremondiale. En mobilisant rapidement l’épargne,puis en la réinjectant dans des fondsd’investissement à long terme affectés poursoutenir des activités potentiellement durableset/ou à croissance rapide, en particulier pour les

entreprises coopératives, ces établissements definancement basés sur la communauté aidèrentune région ravagée par le conflit à devenirprobablement la plus avancée d’Europe auniveau économique et social. Plus importantencore, elles ont été capables de développer desméthodologies pour identifier les meilleuresperspectives d’activité et pour les soutenir avecsoin au cours des années. Dans certains cas, uneaide financière du gouvernement était nécessaire(comme dans le cas des ECS), mais cette dépensene saurait être considérée comme autre chosequ’un fantastique investissement, étant donné ledéveloppement économique et la réduction de lapauvreté qui en ont découlée.

Questions de gouvernanceStimulés par de tels exemples édifiants, unnombre croissant de PMA ont commencé à(ré)explorer l’idée de banques coopératives localeset autres établissements financiers basés sur lacommunauté. Nombre d’entre eux acceptent lebien-fondé du concept de banque coopérative,mais le problème primordial est la manière deréglementer les questions de gouvernance. Trèssouvent, dans de nombreux PMA, desétablissements financiers privés axés sur le profitsapent la confiance dans la communauté etengendrent un chaos économique. L’exemple leplus récent s’est déroulé au Nigéria, où la licence

Selon Milford Bateman,plutôt que la microfinance,ce sont les établissementsfinanciers communautairesqui peuvent aider lespopulations pauvres despays les moins avancés àsortir de la misère

Membre et chercheur de l'Institut de développementoutre-mer (Overseas Development Institute) deLondres, MILFORD BATEMAN est spécialiste desquestions d’accès au financement et dedéveloppement d'entreprise.

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Lepouvoircommunauté

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de 224 petites banques de microfinance privées aété révoquée de manière définitive par la banquecentrale pour cause de prise de risques excessifs etde mauvaise gouvernance d’entreprise.Évidemment, le modèle coopératif n’a paséchappé à des formes similaires d’abus et decorruption, telles que celles constatées parexemple à Haïti en 2002 après l’effondrement denombreuses coopératives financières. Maisl’expérience prouve que cette propriété et cecontrôle communautaires augmentent leschances de probité à la fois pour les épargnants etpour la communauté dans son ensemble, ainsiqu’à accroître son efficacité en tantqu’établissement financier.

Certains PMA ont été inspirés par la réussitedu concept des banques de développement auniveau national dans des économies émergentes,comme celle du Brésil. Au niveaucommunautaire, il existe également denombreux modèles créatifs de ce qui peut êtreentrepris. À titre d’exemple, AkwandzeAgricultural Finance (AAF), dans la province sud-africaine de Mpumalanga, est une entreprise enjoint venture à 50-50 entre une coopérativefermière privée (Liguguletfu Co-operative Ltd) etun fabricant de sucre (Tsb Sugar). AAF a été enmesure d’aider ses pauvres membres-fermiers àéchapper de manière définitive à la pauvreté entransformant leur agriculture de subsistance en

exploitations agricoles familiales avec unrendement largement supérieur au niveaud’efficience minimum. En quelques années,grâce à l’implication de plus de 900 fermiers-sucriers locaux membres de Liguguletfu, AAF aété capable d’aider les membres-fermiers àaccéder à des prêts raisonnables (16 % d’intérêts),pas seulement pour soutenir leurs activitéscourantes, mais aussi — de manière décisivepour répondre au besoin de développementpermettant de réussir sur le long terme — poursoutenir leurs plan d’expansion. Les fermierssavent qu’ils doivent croître au-delà du niveaud’efficience minimum s’ils veulent vraimentacquérir une stabilité et profiter d’un retourdécent sur leur travail. Chose importante, aucundes profits de AAF n’est reversé à des actionnairesextérieurs, ils sont réinjectés dans AAF pourdévelopper plus de services, respectant ainsi lessouhaits des membres-fermiers.

Cependant, les établissements financierslocaux motivés par le développement ne sont pasles seuls à pouvoir aider les PMA à se développer.De nombreux analystes prétendent que lapromotion de l’épargne au sein descommunautés pauvres est souvent un moyenbénéfique équivalent de traiter la pauvreté. Parexemple, aider les pauvres à économiser pour desachats importants, plutôt que de payer desintérêts élevés sur de simples prêts à la

consommation conférés par des fournisseurs demicrofinance leur serait d’une aide primordiale.Dans ce cas, les établissements concernés, baséssur la communauté, détenus et contrôlés par lesépargnants se sont très souvent avérés être labonne solution. Bien entendu, l’idée n’est pasneuve, puisqu’elle remonte au mouvement desbuilding societies (associations d’accès à lapropriété), fondé au Royaume-Uni à la fin du 18esiècle. Pendant plus de 150 ans, les buildingsocieties du Royaume-Uni ont extrêmement bienfonctionné pour la communauté locale, leurfournissant des prêts abordables pourl’acquisition de logements et le développementde petites activités. Elles se sont seulement misesà péricliter lorsqu’on les a démutualisées etcommercialisées au début des années 1990.L’expérience positive de ces établissementsd’épargne basés sur la communauté peut êtrereproduite dans de nombreux PMA — àcondition d’un soutien technique et peut-êtreégalement d’une capitalisation initiale.

Une véritable responsabilisationEn fait, il existe désormais de nombreusesexpériences en cours qui utilisent desorganisations de type unions de crédit détenuespar la communauté. Par exemple, le programme« Épargner pour le changement » de OxfamAmerica au Mali concerne plus de 300 000femmes qui gèrent plus de 4 millions de dollarsUS pour les finances de leur groupe. On aide lesfemmes à éviter les requins de la finance locauxet les établissements de microfinance à butlucratif, ce qui leur permet ainsi de commencer àépargner au sein de leur propre établissement.Elles économisent pour des postes de dépensescoûteux ainsi que pour des urgences imprévueset peuvent également accéder rapidement à desfonds abordables pour lancer ou élargir devéritables activités, contrairement à de simplesopérations commerciales. Il s’agit d’une véritableresponsabilisation, obtenue grâce à unétablissement financier détenu par lacommunauté et non d’un emprisonnementprogressif dans des micro-dettes.

La conclusion à retirer des expériences despays développés et d’ailleurs, est que lesétablissements financiers locaux sontindubitablement les mieux configurés en tantqu’entités contrôlées et détenues par lacommunauté, en particulier pour maximiser leschances de rester centré sur le développementlocal. Les coopératives financières, les banques dedéveloppement communautaires et les unionsde crédit ont été des innovations réussies dusecteur financier local dans de nombreux paysdéveloppés. Leur expérience est urgemmentnécessaire puisque les PMA sont en train deconcevoir leurs propres établissementsfinanciers suite à la crise mondiale. Par-dessustout, la leçon à tirer semble être la nécessité dereprendre les systèmes financiers locaux desmains des structures de type Wall Street et desétablissements agressifs de microfinance à butlucratif et de les rendre à leur véritablespropriétaires : les communautés et lespopulations locales. n

Le groupe Ikidia Saving forChange organise chaquesemaine une réunion àDomba, au Mali.

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RENFORCER LA CAPACITÉ DE PRODUCTION

En 2007, CHEICK SIDI DIARRA a été désigné secrétaire général adjoint desNations Unies et haut représentant pour les pays les moins avancés, lespays en développement sans littoral et les petits états insulaires endéveloppement. À l’époque de sa nomination, M. Diarra assumait lesfonctions de représentant permanent du Mali auprès des Nations Unies àNew York. Au cours de sa longue carrière diplomatique, M. Diarra s’estactivement impliqué à encourager les efforts d’intégration et le programmede développement de l’Afrique au niveau international. Depuis 1982, lorsdes sommets de l’Union africaine, il est l'un des principaux négociateurspour ces questions.

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Alors que les pays les moins avancés (PMA)ressentent de plus en plus les effets de la criseéconomique mondiale, CHEICK SIDI DIARRA del’ONU explique que, pour développer leur résilience,ces pays doivent, et peuvent, augmenter leur capacitéde production. En renforçant trois élémentsessentiels, à savoir les ressources de production, lespotentiels entrepreneuriaux, et les relations deproduction, les PMA peuvent produire des biens etdes services en plus grande quantité et de meilleurequalité. Mais pour que ce processus réussisse, il leurfaut également mettre en place de nouvellespolitiques, inventer de nouvelles formes degouvernance du développement et recevoir unsupport multilatéral plus efficace.

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Avant la crise économique mondiale de 2008/2009,le groupe des pays les moins développés (PMA) avaitenregistré des avancées économiquesimpressionnantes, avec une croissance annuellemoyenne du PIB réel de 6 % au cours des cinqannées précédentes. La récente crise financière a eudes répercussions immédiates sur les pays endéveloppement étroitement liés aux marchésfinanciers mondiaux, puisque le capital s’est réfugiédans des paradis fiscaux et qu’on a constaté une fuiterapide des capitaux, depuis les marchés émergentsvers les économies plus avancées, notamment lesÉtats-Unis. Cependant, l’impact initial sur les PMA aété, d’une certaine manière, amorti, étant donné quela plupart si ce n’est la totalité d’entre eux, étaientrelativement peu intégrés sur les marchés financiersmondiaux. Néanmoins, avec l’aggravation de la crisefinancière, le gel des crédits et la baisse brutale de lavaleur marchande des richesses individuelles, lesPMA se sont enfoncés dans une crise mondiale del’économie réelle.

Selon la Conférence des Nations Unies pour lecommerce et le développement (CNUCED), la valeurdes exportations depuis les PMA vers les principauxpays importateurs a chuté de plus de 43 % en 2009,par rapport au premier semestre 2008, tandis que lavaleur mondiale des exportations n’a chuté que de 32% au cours de la même période. Cette brutale chutedu revenu des exportations est largement due audéclin des prix des produits de base et est associée àla baisse des recettes et des investissementsgouvernementaux. Selon la Banque mondiale, lestransferts de fonds vers les pays en développementont chuté de 6 % en 2009, bien qu’un légerrétablissement soit possible en 2010. Pluspréoccupant encore, est l’impact à long terme que lacrise aura probablement sur les PMA, étant donnéleur vulnérabilité économique intrinsèque et leurvulnérabilité aux chocs externes.

Questions de capacité de productionDans ce contexte, il est généralement admis que lastratégie clé qui permet de développer la résilienceinterne des PMA est de renforcer leur capacité deproduction. Les capacités de productions, telles quedéfinies par la CNUCED, sont les ressources deproduction, les capacités entrepreneuriales, et lesrelations productives, dont la globalité détermine lacapacité d’un pays à produire des biens et services etlui permet de croître et se développer. En mai 2001,la troisième Conférence des Nations Unies sur lespays les moins avancés a adopté le Programmed'action de Bruxelles en faveur des pays les moinsavancés pour la décennie 2001-2010, une stratégieglobale de réduction de la pauvreté orientée sur desrésultats, taillée sur mesure pour les besoinsspécifiques des PMA. Afin de s’assurer que les PMAbénéficient des effets de la mondialisation, leProgramme d'action de Bruxelles a identifié lerenforcement des capacités de production commel’un des sept engagements clés entre les PMA et leurspartenaires de développement.

En développant leurs capacités de production, lesPMA peuvent compter de plus en plus sur lamobilisation de leurs ressources internes pourfinancer leur croissance économique, réduire leurdépendance envers l’aide et attirer les flux decapitaux privés susceptibles de soutenir leurprocessus de développement. L’augmentation descapacités de production permettra également auxPMA d’être concurrentiels sur les marchésinternationaux de biens et de services qui vont au-delà des marchandises de base et qui ne sont pasdépendants des régimes spéciaux d’accès auxmarchés.

La capacité de production a également uneimportance capitale dans la lutte pour ladiminution de la pauvreté dans les PMA. Lespreuves se multiplient pour indiquer que les

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citéstransferts d’aide à destination des PMA sont de plus

en plus employés pour soulager les souffranceshumaines, mais qu’on ne saurait parvenir à uneréduction substantielle et soutenue de la pauvretéavec la seule solidarité internationale. Ce résultatnécessitera la création de richesses au sein des PMAet le développement de capacités internes, d’unemanière qui permettra de développer lesopportunités d’emplois productifs.

Comment les PMA peuvent-ils renforcer leur capacitéde production ?Étant donné l’ampleur des défis auxquels sontconfrontés les PMA en termes de renforcement decapacité, il est urgent que les partenaires dudéveloppement étendent leur engagement sousforme de développement du secteur privé, demodernisation de l’industrie et de promotion d’unenvironnement favorable, tel que des infrastructureset des services de qualité. En même temps, les PMAdoivent relever le défi d’améliorer leursinfrastructures matérielles, en particulier l’énergie,le transport et les communications.L'approvisionnement en énergie est primordial,puisqu’avec le transport et les communications, ilfacilite la connectivité avec les agents économiquesaux niveaux national et international.

L’infrastructure sociale est une autre composantemajeure du renforcement de la capacité, enparticulier en ce qui concerne la santé et l’éducation,qui sont directement liées à la suffisance del’approvisionnement en ressources humaines, encompétences et en capacités entrepreneuriales. Enoutre, la mise en place de systèmes financiers, lasécurisation des investissements nécessaires pour larecherche et le développement, la formationtechnologique et les systèmes d’innovation sontcruciaux pour permettre aux PMA de se confronter àla crise et d’accélérer leur modernisation.

Pour que les PMA puissent étendre leurproduction, ils doivent renforcer trois élémentsessentiels : ressources de production, capacitésentrepreneuriales et relations de production. lPremièrement, les PMA doivent utiliser et étendreefficacement leurs ressources de production com-prenant le capital humain, matériel, financier etnaturel. Les investissements dans le développementhumain sont une part essentielle du développementdes capacités de production. l Deuxièmement, une meilleure utilisation descapacités entrepreneuriales et des compétences prin-cipales des entreprises en termes de qualifications, desavoir-faire et d’informations, peut faciliter la mobil-isation des ressources de production, dont l’objectifest de transformer les matières premières en pro-duits, d’investir, d’innover, de rénover, d’améliorer laqualité des produits et même de créer des marchés. l Troisièmement, la mobilisation réussie desressources de production devra être mariée à unemeilleure utilisation des capacités entrepreneuriales,afin de diversifier les relations de production. Celainclut les relations entre les entreprises de tailles dif-férentes et similaires et peut prendre la forme de rela-tions de délocalisation ou de sous-traitance.

Dans le processus réel de développement de lacapacité de production, l’étape ultime consiste àaccumuler du capital. L’accumulation de capital reposesur une échelle élevée d’investissements étrangers etd’épargne privée, à la fois nationale et étrangère. C’estpourquoi les PMA ont besoin d’une série de mesuresincitatives pour l’épargne et l’investissement, ainsi qued’un système financier effectif et capable d’attirer et demobiliser des ressources financières et de développerles entreprises locales.

Des mesures plus poussées sont égalementnécessaires pour promouvoir les transferts detechnologie et accroître la productivité de la maind’œuvre.

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soutien Le développement des capacités technologiquespermet aux produits issus des PMA d’êtrecompétitifs sur les marchés internationaux. Ilpermet également de générer des emplois plusproductifs et de construire des relations avecl’économie mondiale.

Le rôle de l’agriculture et de l’industrieD’autre part, les stratégies de développement descapacités de production conçues par les PMA, enparticulier ceux d’Afrique, puisqu’ils représentent 33des 49 pays concernés, devront inclure l'agriculturedans leur champ d’application. L’agriculture, quidevra recevoir une nouvelle attention politiquenationale et internationale puisqu’elle requiert desinvestissements accrus et des revalorisationstechnologiques. La nouvelle génération de politiquesagricoles devrait être axée non seulement sur laproduction agricole, mais aussi sur le développementdes agro-industries et des chaînes de valeur. Il faudratrouver un équilibre entre cultures vivrières de baseet cultures commerciales, ce qui permettrait derenforcer la sécurité alimentaire tout en favorisant lacroissance des exportations.

Grâce à une série de pré-conditions et à leurscapacités d’adaptation accrue en ce qui concernel’utilisation des technologies modernes et lacommercialisation d’un nouveau savoir, les PMApeuvent sauter plusieurs étapes du développementet avancer vers un plus haut degréd’industrialisation. Le défi est d’atteindre le seuil decompétitivité des marchés mondiaux, et dans cecontexte, cela dépend beaucoup de la voie queprennent les PMA pour bénéficier de l’intégrationrégionale.

Comment l'aide peut-elle devenir plus efficace ?Au cours de leur processus de développementindustriel, la capacité des PMA à s’engager dans des

obligations financières et à mobiliser les ressourcesinternes publiques et privées, est sérieusementhandicapée par diverses contraintes structurelles.Celles-ci incluent le manque de diversification de labase économique et la grande vulnérabilitééconomique qui en découle, les niveaux de pauvretépersistants, l’inadéquation des infrastructures debase, les inconvénients géographiques et surtout lespectre lié à l’énorme disparité des ressources. C’estpourquoi la communauté internationale a fournides aides et des prêts qui ont joué un rôle vital dansle financement des investissements nationauxengagés pour atteindre les objectifs du Millénairepour le développement (OMD) dans ces pays.

Pour atteindre un bon niveau de gestion de l'aideet de l'utilisation des ressources d'aide, toutes lesparties prenantes doivent aborder les questionsd'efficacité de l'aide. Afin que l’aide apportée auxPMA soit efficiente, les donneurs doivent témoignerde leur engagement à long terme et reconnaître quele soutien financier est la stratégie à long terme laplus aboutie pour aider ces pays. Pour soutenir ledéveloppement de la capacité de production, l’aide etles autres types d’assistance doivent augmenter envolume, être livrés de manière plus efficace et êtremieux adaptés à la demande, comme par exemple,tenir compte des intérêts du secteur privé et de lasociété civile.

Étant donné que chaque pays dispose deconditions qui lui sont propres, il est nécessaire, auniveau du pays bénéficiaire, de réaliser un contrôle etune évaluation de l’accomplissement de l’aide demanière indépendante. De plus, des mesuresspécifiques aux PMA et une approche orientée selonchaque pays sont nécessaires pour valoriser lesdroits du pays, diriger l’aide vers les secteurs où sonimpact sera le plus flagrant et améliorer l’utilisationde cette aide.

En outre, les PMA ont besoin de renforcer leurs

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capacités de production afin de planifier et de mettreen place des projets, d’améliorer le contrôle etl’évaluation et de garantir une meilleurecoordination institutionnelle parmi les nombreusesagences gouvernementales impliquées dans lanégociation et l’utilisation de l’aide.

Enfin, le programme « Aide pour le commerce »et le Cadre intégré renforcé (CIR) doivent devenir lesmoteurs effectifs de développement des capacités deproduction des PMA. Ces pays doivent se voiraccorder une exonération de taxe et un accès libre dequotas pour les marchandises des principauxmarchés. Ces mesures doivent être complétées pardes règles favorisant les origines et par l’éliminationdes barrières non tarifaires. Les gouvernements desPMA doivent également bénéficier d'une flexibilitééconomique leur permettant d’adopter despolitiques agricoles, commerciales et industriellesqui promouvront la valeur ajoutée locale etl’apprentissage technologique. Il faut attribuer auxPMA des conditions d’accès élargies pour lacirculation provisoire des fournisseurs de services.

Changer les politiques de développementUne réduction durable de la pauvreté nécessite destaux de croissance économique élevés et continus,capables de créer des opportunités d’emploisproductifs pour les pauvres et de les aider àaugmenter les revenus de leur foyer. L'uniquemanière d’atteindre ces objectifs est de développerles capacités de production. Cela doit devenir lesouci primordial, aussi bien des responsablespolitiques que des partenaires de développementdes PMA. Cependant, le développement descapacités de production nécessite un changementconsidérable des politiques de développement. Ilexige une nouvelle orientation stratégique dedéveloppement et des stratégies de réduction de lapauvreté spécifiques aux PMA et en conséquence,

une nouvelle orientation stratégique de l’aide audéveloppement.

Premièrement, il existe désormais encore plus deraisons de recentrer l’attention politique sur ledéveloppement des capacités de production. Celasignifie que les politiques doivent être orientées versla stimulation des investissements productifs, laconstruction de capacités technologiques et lerenforcement des relations au sein et parmi lessecteurs d’activités et les entreprises. Lerenforcement des capacités de productionnationales devra également viser à la productiond’une gamme plus étendue de produits plussophistiqués.

Deuxièmement, il est nécessaire de construire unnouvel état développementiste. Il ne s’agit pas derevenir à l'ancien style de planification dudéveloppement, mais plutôt de trouver de nouvellesformes de gouvernance du développementappropriées au 21e siècle. De telles formes degouvernance du développement devront êtrefondées sur une collaboration stratégique entrel’État et le secteur privé qui encouragera latransformation structurelle des PMA, depuis leurstatut d’économies agraires vers celui d’économiespost-agraires.

Troisièmement, il est nécessaire de garantir unsoutien multilatéral aux PMA. Il ne s’agit passimplement de la quantité ou de la qualité de l’aidefournie. Les règles qui gouvernent les relationséconomiques internationales en ce qui concerne lesflux commerciaux, financiers, d’investissement ettechnologiques doivent être conçues de manière àsoutenir le développement des PMA. Il estégalement primordial que le soutien aux PMAn’impose pas de limite superflue aux mesures quepeuvent prendre les gouvernements pourpromouvoir le développement, la transformationstructurelle et la diminution de la pauvreté.n

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L’importance croissante des énergies renouvelables par

rapport aux sources d’énergieconventionnelles est indubitable, mais

dans quelle mesure la tendance àl’investissement et au développement deservices énergétiques propres est-elle la

chasse gardée des pays développés ?Deux rapport récents viennent nous

éclairer sur l’état des énergiesrenouvelables dans les pays

en développement.

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La fermeéolienne Kutchde Gujurat, enInde.

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Objectifs politiquesLes politiques en faveur des énergiesrenouvelables, instaurées dans quelquespays seulement au cours des années1980 et 1990, se sont étendues àbeaucoup de pays, d'états, de provinces etde villes au cours des 15 dernièresannées, notamment sur la période 2005-2010. Les pays en développementreprésentent maintenant plus de lamoitié des pays ayant des objectifspolitiques en la matière (45 sur 85 pays).

Renewables 2010 Global Status Report(Rapport 2010 sur les énergies renouvelablesdans le monde), publié par le RenewableEnergy Policy Network for the 21st Century(REN21)

Le Brésil prévoit de maintenir ou d'augmenter ses partsd'énergie totale (48 %) et d'électricité (85 %) basées sur des sourcesrenouvelables pour 2030. La Thaïlande a, elle, remonté sonobjectif en matière d'énergie primaire à 20 % d'ici à 2022. Le plannational des Philippines mise sur 4,5 GW de nouvelles capacitésen énergies renouvelables pour la période 2003-2013. Quant àl'Égypte, elle vise 20 % d'électricité en 2020, dont 12 % d'énergieéolienne. Enfin, le Kenya prévoit 4 GW d'énergie géothermiqueen 2030. Parmi les autres pays en développement ayant adopté denouveaux objectifs nationaux en 2009 figurent le Ghana,l'Éthiopie, la Jordanie, le Koweït, le Maroc et les Tuvalu.

Les énergies renouvelables jouentun rôle important dans l’accès auxénergies modernes de milliards depersonnes, qui continuent àdépendre de sources plustraditionnelles. Environ 1,5 milliards de personnes dans lemonde n’ont toujours pas accès àl’électricité et près de 2,6 milliardsde personnes cuisinent toujoursleurs repas quotidiens avec du bois,de la paille, du charbon ou dufumier. Beaucoup réchauffent leursaliments sur des feux ouvertsgénérant très peu de chaleur et plusd’un tiers de la population mondialecuisine encore comme il y a descentaines, voire des milliersd’années. En ce qui concernel’éclairage, les foyers sans électricitéutilisent généralement des lampes àpétrole, qui sont très peu efficacesdans la transformation de l’énergieen lumière. Les communications selimitent à des radios alimentées pardes piles sèches très coûteuses.Dans de nombreuses zones ruralesdes pays en développement, lesraccordements au réseau électriquepeuvent prendre des décennies ous’avérer trop onéreux.

Aujourd’hui, il existe de bonnesalternatives à l’électricité par réseauet des combustibles d’originecarbonique qui évitent d’attendrel’expansion des réseaux électriques.Cela comprend divers systèmes àbase de nouvelles énergies oud’énergies renouvelables, quipeuvent servir à la fois pour desusages spécifiques et pour unedistribution rurale générale. Il estainsi possible d’accélérer latransition vers des servicesénergétiques modernes grâce àl’accélération des systèmesd’énergies renouvelables horsréseau.

Transition ruraleL’abandon des énergiestraditionnelles en faveur de formesd’énergies plus modernes est enbonne marche dans les foyers et lespetites industries des zones ruralesd’un grand nombre de pays. Lesadjectifs « traditionnelle » et «moderne » se rapportent tous deuxau type de combustible et auxtechnologies qui les utilisent. Lebois, par exemple, peut être brûléavec très peu d’efficacité et libérer

Les énergiesrenouvelablesrurales

Quant à l'Inde, son plan actuelsur cinq ans vise 12,5 GWd'énergies renouvelables en plusen 2012 (éolien, hydroélectriquede faible capacité et biomasse) eten 2009, le pays a adopté desobjectifs de 1 GW d'énergiesolaire en 2013 et de 20 GW en2022 (dont 1 GW de PV solairehors réseau en 2017).

La Chine vise une consommationénergétique finale basée à 15 % sur lesénergies renouvelables d'ici à 2020,alors même que la demandeénergétique totale continue àprogresser à un taux annuel de près de10 % (la Chine a atteint son objectif2010 fixé à 10 % d'énergie primaireavec deux ans d'avance, en 2008). Letout dernier plan de développementprovisoire du pays table sur 300 GWd'hydraulique, 150 GW d'éolien, 30 GW de biomasse et 20 GW de PVsolaire en 2020.

Le rapport de 2010 sur les énergies renouvelables dans lemonde a identifié plusieurs tendances récentes montrant lerôle croissant des pays en développement dans l’expansiondes énergies renouvelables. Ensemble, les pays endéveloppement possèdent maintenant plus de la moitié descapacités mondiales en énergies renouvelables. La Chine esten tête sur plusieurs indicateurs de croissance du marché.L’Inde se classe, elle, au cinquième rang mondial descapacités éoliennes totales et est en train de développerrapidement plusieurs formes d’énergies renouvelablesrurales, telles que le biogaz et l’énergie solaire photovoltaïque(PV). Le Brésil produit la quasi-totalité de l’éthanol mondial àbase de sucre et se dote de nouvelles centrales à biomasse etinstallations éoliennes. Les marchés des énergiesrenouvelables progressent très rapidement dans des payscomme l’Argentine, le Costa Rica, l’Égypte, l’Indonésie, leKenya, la Tanzanie, la Thaïlande, la Tunisie et l’Uruguay, pourn’en citer que quelques uns.

La géographie des énergies renouvelables est en train dese modifier, ce qui laisse se profiler le début d’une nouvelleère. Par exemple, l’énergie éolienne n’existait que dans unepoignée de pays dans les années 1990, alors qu’elle estmaintenant présente dans plus de 82 pays. Le monopole de laproduction est en train de glisser de l’Europe vers l’Asie, avecl’engagement croissant de pays comme la Chine, l’Inde et laRépublique de Corée dans les énergies renouvelables. En2009, la Chine a fourni 40 % de la production de PV solairedans le monde, 30 % des éoliennes mondiales (contre 10 % en2007) et 77 % des collecteurs d’eau chaude solaire mondiaux.En Amérique latine, de nouveaux producteurs debiocarburants apparaissent en nombre dans des pays tels quel’Argentine, le Brésil, la Colombie, l’Équateur et le Pérou etbien d’autres technologies renouvelables se développent. Aumoins 20 pays du Moyen-Orient, d’Afrique du Nord etd’Afrique sub-saharienne ont des marchés des énergiesrenouvelables actifs.

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une grande quantité de polluantsdans un feu ouvert traditionnel, mais ilpeut également représenter uncombustible de cuisson « moderne »de grande qualité sous forme decopeaux gazéifiés et brûlés, qui serontd’une grande efficacité de combustionet génèreront très peu de pollution.Pour éclairer un foyer, le pétrole estune forme d’éclairage traditionnel quioffre peu de lumière et une faibleefficacité, tandis qu’une lampeélectrique (alimentée par le soleil parexemple) produira 100 fois plus delumière qu’une lampe à pétrole ou unebougie. L’éclairage électrique permetaux foyers de lire, de se socialiser etd’être plus productifs en soirée, mais ilest aussi synonyme d’une meilleurefréquentation scolaire chez lesenfants.

Même dans les régions les pluséloignées, de nombreuses sourcesd’énergie renouvelables tels que lessystèmes PV ménagers, les mini-réseaux hydroélectriques à faiblecapacité et les pompes solairespeuvent répondre à certains desbesoins élémentaires de la viemoderne, comme un éclairage, descommunications, de l’énergie motrice,du chauffage et du refroidissement dequalité. Plus récemment, les systèmesde production à base de biocarburantsont fait l’objet de développementsencourageants.

Le nombre de foyers rurauxalimentés en énergies renouvelablesest difficile à estimer, mais il secompte en dizaines de millions (toutesformes d’énergies renouvelablesconfondues). Les microcentraleshydroélectriques configurées àl’échelle d’un village ou d’un comtédesservent un grand nombre d’entreeux. Plus de 30 millions de foyerss’éclairent et cuisinent à l’aide debiogaz produit dans des fermenteursménagers. Environ 3 millions defoyers sont alimentés en électricité parde petits systèmes PV solaires. 40 % dela population mondiale utilise desfours de cuisson à biomasse, dont unenouvelle génération « améliorée » etplus efficace est apparue au fur et àmesure des années. Ces fours sontfabriqués dans des usines et desateliers du monde entier et plus de 160 millions de foyers les utilisentactuellement. (Rapport 2010 sur lesénergies renouvelables dans lemonde).

Global Trends in Sustainable Energy Investment 2010(Tendances mondiales de l’investissement dans les énergiesdurables en 2010), publié par le Programme des NationsUnies pour l’environnement (PNUE) et Bloomberg NewEnergy Finance

En Thaïlande, le projet d’installation d’un parcPV de 73 MW près de Bangkok nécessitera uninvestissement de près de 270 millions USD. Ce projet devrait s’achever en 2011. Les mesuresd’incitation proposées par les autoritésthaïlandaises en faveur des projets d’énergiesrenouvelables (notamment des exonérationsfiscales temporaires et des prêts à taux réduit)contribueront à la viabilité commerciale de ceprojet. L’entreprise publique du pays, ElectricityGenerating Authority of Thailand, a déclarévouloir investir 880 millions USD dans desprojets d’énergies renouvelables jusqu’en 2025.Ce choix fait écho à l’objectif du pays, qui est depuiser 20 % de son énergie dans des sourcesrenouvelables d’ici à 2023. Actuellement, cechiffre n’est que de 5 % (hors centraleshydroélectriques de grande capacité).

Les Philippines ont un secteur géothermique bien établiet sont le deuxième producteur mondial après les États-Unis. En 2009, la société géothermique EnergyDevelopment Corporation a annoncé qu'elle prévoyait dedévelopper 200 MW de nouveaux projets. Le payssouhaite doubler sa capacité en énergies renouvelables,soit 9 GW en 2020, mais ce chiffre inclut la contributionde ses centrales hydroélectriques de grande capacité.L'énergie géothermique devrait jouer un rôle majeur danscet objectif, puisque le ministère de l'Énergie estimequ'elle produira 4,5 GW d'électricité.

En dehors des « deux grands »d’AsieLes nouveaux investissements en Asie (horsChine et Inde) ont chuté à 2,5 milliards USD en2009, contre 3,1 milliards USD en 2008. Celaéquivaut à seulement 6 % du nouvelinvestissement global en Asie, ce qui montre laprédominance de la Chine dans ce total, ainsique l’échelle plus modeste des engagements encapitaux dans les autres pays. Parmi ces autrespays en développement d’Asie, Taïwan (provincede Chine) est celui qui a bénéficié du plus fortinvestissement en 2009 : 900 millions USD,contre 300 millions USD l’année précédente. LePakistan, l’Indonésie, la Thaïlande, lesPhilippines et le Vietnam viennent ensuite.

Tendances de l’investissementLes Tendances mondiales de l’investissement dans les énergies durables en 2010 confirment queces dernières années, les économies à industrialisation rapide (la Chine, le Brésil et l’Inde) onttransformé le paysage de l’investissement dans les nouvelles énergies. La Chine est devenue laprincipale destination mondiale de l’investissement dans les énergies renouvelables en 2009,tandis que le Brésil et l’Inde se classent maintenant respectivement en cinquième et huitièmeposition mondiale. Ensemble, ces trois pays ont attiré 37 % de l’investissement financier mondialdans les énergies propres en 2009. Mais qu’en est-il de l’investissement dans les autres pays endéveloppement ?

Les nouveaux investissements financiers dans les pays en développement d’Asie etd’Amérique latine (hors Brésil, Chine et Inde) ont été de 7,5 milliards USD en 2009 contre 6milliards USD en 2008, cette augmentation étant surtout ciblée sur l’Amérique latine. Enrevanche, l’Asie et l’Afrique ont vu leurs investissements baisser en 2009 par rapport à 2008. Lespays en développement de ces trois régions représentant 6,3 % du nouvel investissementmondial dans les énergies propres.

En 2009, l'Agence pakistanaisepour le développement des énergiesalternatives a annoncé sonintention de puiser 14 % desénergies nationales dans dessources renouvelables en 2022, cequi suppose un accroissement descapacités de 17 GW d'énergiesrenouvelables. La majorité d'entreelles seront probablementéoliennes.

En Indonésie, une grande partiede l'investissement dans lesénergies propres est consacré àl'exploitation du potentielgéothermique. On estime queles volcans indonésiens ont unpotentiel géothermiqueexploitable de 28 GW, même siseulement 1,1 GW de capacitéssont actuellement installées.

Le Vietnam prévoit de puiser 5 % de saproduction électrique totale dans des sourcesrenouvelables en 2020. On estime que le paysa un potentiel de 2 GW d'énergie éolienne,mais l'accès au financement freine ledéveloppement des projets.

Les énergies renouvelablesrurales (cont)

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Le gouvernement du Pérou a, lui, conclu unprocessus d'appel d'offres en novembre 2009 afinde se doter de 500 MW de capacités de productiond'énergies renouvelables en plus en 2012. Lepremier objectif formel du gouvernement entermes d'énergies renouvelables, adopté en 2008,tablait sur une contribution des énergiesrenouvelables dans la capacité de productionélectrique à hauteur de 5 % en 2013. Les projets debiomasse ont représenté 310 MW sur les 412 MWattribués au cours de la phase initiale.

Le Chili a adopté une loi stipulant que 5 % de laproduction totale des nouveaux contrats énergétiquesdevaient provenir de sources non conventionnelles.En 2024, ce chiffre devra passer à 10 % de la productionénergétique totale, soit 3 410 MW.

En 2009, le Mexique a établi un plan avec des objectifsparticuliers en termes de capacités installées et de productiond'électricité à partir du vent, de la géothermie et du biogaz d'icià 2012. Même si ces objectifs n'ont pas un caractère obligatoire,ils représentent un engagement clair des autorités envers ledéveloppement des énergies renouvelables. Ce programme viseune augmentation des capacités existantes en matièred'énergies renouvelables, qui passeraient d'environ 3,3 % dutotal en 2008 à 7,6 % en 2012, l'énergie éolienne étant laprincipale bénéficiaire.

Quant aux autorités colombiennes, ellesont émis une directive selon laquelle tous lesnouveaux véhicules devront pouvoirfonctionner à l'E85 en 2012. Le pays,deuxième producteur de biocarburantsd'Amérique du Sud après le Brésil, espèreproduire 518,6 millions de litres d'éthanol en2010. Dans le même temps, l'Argentine alancé un appel d'offres pour 1 GW d'énergiesrenouvelables dans le cadre de sa nouvelleloi sur les énergies renouvelables, quiprévoit d'extraire 8 % d'énergie de sourcesrenouvelables en 2016.

L'Afrique à la traîneL'Afrique reste un acteur relativement mineur dans lepaysage mondial des énergies propres. L'investissenta chuté à 900 millions USD en 2009, contre 1 milliardUSD l'année précédente, et le continent représentaitmoins de 1 % du total mondial.

Le ministère de l'Énergie sud-africain a lancé son premier Plan deressources intégré national en 2009, prévoyant des mesuresd'incitation au rendement énergétique ainsi que le développement etla commercialisation des énergies renouvelables. Ce plan établit desprincipes directeurs en matière d'énergie, que l'entreprise publiqueEskom et le Régulateur national de l'énergie doivent suivre. Il stipuleque 1 145 MW de l'électricité doivent provenir de projets d'énergiesrenouvelables privés d'ici à 2012. Ce plan se concentre davantage surles économies d'énergie que sur la construction de nouvellescentrales. Il est notamment prévu d'installer des panneaux solaires surles bâtiments publiques ainsi que d'équiper un million de maisons àbas prix construites par l'État avec des chauffe-eaux solairesinstantanés avant 2014.

En 2009, un accord definancement prévoyant uninvestissement de 283,4 millionsUSD par les institutions françaisesen faveur du parc éoliend'Ashegoda (120 MW) en Éthiopiea été conclu. Le coût total de ceprojet s'élève à 315 millions USD,dont 90 % sont financés par lesbanques et le reste par lepromoteur du projet, EthiopianElectric Power Corporation. Leparc d'Ashegoda, situé au nord del'Éthiopie et considéré comme lepremier de son genre dans le pays,en est aux premières étapes de laconstruction.

La prédominance de l'Amérique latineLe nouvel investissement financier dans lesénergies propres au sein des pays d'Amériquelatine (hors Brésil) s'est élevé à 3,8 milliards USDen 2009 contre 1,9 milliards USD en 2008. LeMexique en a été le principal bénéficiaire, avec 2 milliards USD dans l'année. Le Chili vientensuite avec 700 millions USD, puis le Pérou dontles investissements ont bondi de 100 à 500millions USD en 2008.

C'est l'Égypte qui a attiré le plusd'investissements, le secteur éolien étant leprincipal bénéficiaire dans ce pays. En 2009, le plus gros investissement aporté sur un projet éolien de 200 MW dansle Golfe d'El Zayt, pour 490 millions USD. Ce projet témoigne des ambitionscroissantes de l'Égypte en matièred'énergie éolienne dans la région du Golfede Suez.

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Dans ce petit villagede Tarawa dans lesîles Kiribati, lesarbres meurent enraison de la haussedu niveau de la mer.

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Les îles Kiribati (prononcé « Kiribas »), situées àmi-chemin entre Hawaï et les îles Fidji, sont l’undes pays les plus isolés au monde. Étendue sur 3,5millions de kilomètres carrés au centre de l’océanPacifique, la République de Kiribati est constituéede 33 atolls de faible altitude et d’îles de corail, pouruniquement 811 kilomètres carrés de terreémergée. Le pays est divisé en trois archipels : lesîles Gilbert (ancien nom des Kiribati), les îlesPhœnix et les îles de la Ligne. La population,d’environ 100 000 habitants, se concentreprincipalement sur les îles Gilbert, où se trouvenotamment Tarawa, la capitale. Ancienne coloniebritannique, Kiribati a obtenu son indépendanceen 1979.

Les principales activités économiques sontl’agriculture et la pêche de subsistance. Lesprincipales exportations concernent les algues, lepoisson et le coprah, c’est-à-dire la chair blanche dela noix de coco dont l’huile est extraite. Le secteurmanufacturier est très petit ; il consiste en unepoignée d’entreprises d’État de transformation decoprah et d’entreprises artisanales. Il existetoutefois un potentiel d’expansion pour le secteurde la transformation des aliments. Legouvernement négocie actuellement une jointventure avec une entreprise de pêche chinoise quipourrait voir le développement, à Tarawa, d’uneinfrastructure d’entreposage frigorifique et deconditionnement pour le thon pêché localement.

Le phosphate est l’une des seules ressourcesnaturelles disponibles et, en 1956, les Kiribati ont

instauré un fonds souverain qui agit comme uneréserve de richesses pour les revenus du paysrelatifs à l’exploitation du phosphate. Lesgisements de phosphate commercialement viablesont été épuisés au moment de l’indépendance,mais le fonds continue à générer une importantesource de financement pour les dépenses dugouvernement. L’économie est largement dominéepar le secteur public, qui dépend beaucoup de l’aideétrangère et des revenus des droits de permis depêche accordés aux nations distantes, et de l’argentque les marins travaillant à l’étranger envoient àleur famille aux Kiribati. Un petit secteurtouristique contribue à environ 25 % du ProduitIntérieur Brut.

Selon la Banque asiatique de développement, lesKiribati bénéficient d’un avantage unique parrapport aux autres pays du pacifique : de solidesréserves en devises, une tradition de gestion fiscalesaine et une importante culture qui met àl’honneur la stabilité sociale et le bien-être de lafamille. Cependant, la récente crise financièremondiale a réduit la valeur du fonds souverain et legouvernement ne cesse de piocher dans ce fondsdepuis plusieurs années ; cela n’est pas viable pourle pays. L’accroissement démographique rapide etla migration urbaine vers Tarawa-Sud fait peserune tension certaine sur les structures familialestraditionnelles. Plus de 40 % de la population estâgée de moins de 15 ans et on estime que la maind’œuvre sera passée de 45 000 personnes en 2002 à68 000 personnes en 2012. ‰

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Les Kiribati

ZOOM SURUN PAYS

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Comment réagit la population des Kiribati au faitque leur destin réside entre les mains de personnesde pays lointains ? Ils éprouvent un sentiment d’injustice, mais ilscomprennent également que, jusqu’à récemment,les gens n’étaient pas conscients des conséquencesde leurs actions. Cependant, avec ce que noussavons aujourd’hui, continuer comme si de rienn’était est absolument irresponsable et immoral.Ne pas poser de limite face à un tel acte criminel.Mais nous ne sommes pas les seuls à devoiraffronter ce futur. D’autres nations insulaires, ainsique d’autres pays et régions côtières de faiblealtitude, sont également en danger. Nous pouvonstous être les victimes du réchauffementclimatique, même les États-Unis, avec l’ouraganKatrina et les incendies en Californie.

Les Kiribati sont une nation très chrétienne.Pendant longtemps les personnes considéraientles inondations et les autres catastrophes commedes actes divins. Mais à présent, certains réalisentque le niveau de la mer augmente et que cela ne va

La communauté internationale condamne sanshésiter le terrorisme, les génocides et laprolifération nucléaire, mais pourquoi nepouvons-nous pas voir l’injustice que représentenotre inaction vis-à-vis du changement climatique? En tant que pays directement concerné par cephénomène, nous allons être l’une des premièresnations touchées par le manque d’action desautres pays. Par conséquent, nous demandons auxhabitants de cette planète de redoubler d’efforts, defaire des sacrifices.

À cet égard, les Kiribati ont d’ores et déjà fait dessacrifices. Nous avons établi l’Aire protégée des îlesPhœnix (APIP) qui a fermé une bonne partie denos eaux territoriales à la pêche. Nous avons dûmener nos propres batailles politiques internes etcombattre nos propres opinions pour parvenir àcette décision, mais cette déclaration a été trèsimportante pour nous.

La pêche représente près de 45 % des recettesfiscales du gouvernement, ainsi qu’uneimportante source de subsistance. Notre geste est

cesser de s’aggraver. Les gens se mobilisent. Ilsveulent de l’aide. Aujourd’hui, ils ont le sentimentqu’une partie de la solution devrait venir des gensqui contribuent le plus au problème. Y a-t-il un message que vous souhaiteriez fairepasser au grand public ? Nous devons mettre de côté l’idée selon laquelleune seule personne, une seule action ne peut pasfaire la différence. Un plus un plus un, etc. font unmillion. Chaque personne et chaque action estimportante. Le Pacifique est un océan. Ce que vousjetez à la mer en Californie s’échouera sur noscôtes. Par conséquent, nous devons travaillerensemble dans le même sens.

Nous demandons à la population mondiale defaire un sacrifice. Le destin de notre peuple, denotre culture et de notre histoire est en jeu. Je nepense pas que quiconque ait l’intention un jour denoyer un peuple tout entier ; c’est pourtant ce quise passe actuellement.

La changement climatique constitue un défimoral, sans doute le plus grand depuis l’esclavage.

Les Kiribati ont rejoint la liste des Pays lesmoins avancés (PMA) en 1986. Depuis, le pays afranchi deux des trois seuils qui lui permettraientde pouvoir abandonner le statut de PMA ; ceux-ciconcernent l’amélioration des revenus et ducapital humain. Toutefois, la sortie de la liste desPMA n’a pas été recommandée par l’Assembléegénérale des Nations Unies, l’organismeresponsable de la décision finale concernant cetteliste. Le pays est encore loin de franchir letroisième seuil, relatif à la réduction de lavulnérabilité économique. Au cours des dernièresannées, la production de coprah et d’algues abeaucoup fluctué, contribuant au niveau élevéd’instabilité sur le plan des exportations.

Le tourisme a également subi de brusquesfluctuations liées à la demande internationale.Peu de progrès ont été accomplis pour traiter lesprincipales contraintes de développement. Lesressources naturelles limitées, notamment les

terres et l’eau douce, entravent le développementsur les îles éparses et peu peuplées, rendant ainsidifficile l’accès aux marchés internationaux etcréant un potentiel d’économies d’échelle trèslimité.

En outre, la vulnérabilité des Kiribati face auxcatastrophes naturelles augmente au fur et àmesure que le changement climatique s’accentue.L’élévation du niveau et de la température de lamer risquent de causer une érosion du littoral,des inondations, la perte de la mangrove et desrécifs coralliens ; ces phénomènes auront desconséquences négatives sur l’approvisionnementen eau douce, sur l’agriculture et sur les stocks depoisson.

La Banque mondiale signale que la populationdes îles Kiribati dépend des systèmes de récifscoralliens en bonne santé pour protéger le littoralde leurs atolls et pour fournir un habitat auxpoissons, essentiels non seulement pour la

Entretien avec Son Excellence Anote Tong, Président des Kiribati

« C’est le destind’un peuple quiest en jeu »

La fermed'algoculturede Tabiteuea,dans les îlesKiribati.

Les Kiribati

ZOOM SURUN PAYS

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notre contribution à la biodiversité et aux stocksde poisson de mer. La conservation de nosressources halieutiques est profitable pour le restede l’océan. Les zones où la pêche est interditedynamisent les populations de poissons dans leszones voisines.

Dans le cadre de Pacific Oceanscape, nousavons réuni 16 pays afin qu’ils prennent desmesures similaires pour protéger les ressourcesde l’océan. La zone couverte par le PacificOceanscape est plus étendue que l’ensemble desterres émergées des États-Unis, du Canada et duMexique. C’est une idée pourtant tellementlogique. Les pays du Pacifique auraient dûtravailler ensemble sur ces problèmes depuis bienlongtemps. L’instauration de l’Aire protégée des îles Phœnix(APIP) va-t-elle attirer des touristes aux Kiribati ? Notre principal problème concernant ledéveloppement du tourisme a été le manque devols réguliers, mais nous y travaillons. Nous nesommes qu’à deux heures d’Hawaï. L’APIP nous a

sans aucun doute fait beaucoup de publicité, enparticulier sur le problème du changementclimatique qui touche les Kiribati, et cela estimportant ; sinon, comment pourriez-vous vouspréoccuper d’un pays que vous ne connaissez pas ?

Nous avons beaucoup à offrir aux touristes : lescharmes de notre pays sont indéniables. Notrepêche est l’une des meilleures au monde et nosrécifs de corail sont parmi les plus immaculés. Leshabitations sont peu nombreuses et la vie y esttranquille, ce qui fait de notre pays un laboratoireà taille réelle pour les recherches sur lechangement climatique. Il peut servir de basepour différentes études. Éprouvez-vous des difficultés à surveiller voseaux afin de les protéger des flottilles de pêcheillégales ? Notre zone économique exclusive est immense(3,5 millions de kilomètres carrés d’océan) et nousn’avons qu’un seul bateau de patrouille ! Donc, ils’agit d’un véritable problème, mais nous avonspassé un accord avec les États-Unis. Nous avonsplacé des observateurs à bord de leurs bateaux.D’autres pays nous prêtent également assistance.Nous envisageons d’accroître la surveillance enfaisant survoler la zone par des pays voisins. Qu’espérez-vous pour l’avenir ? Je refuse de croire qu’un individu qui possède uneconscience continuerait délibérément à agircomme si de rien n’était, en sachant que sesactions entraîneraient la mort d’autres êtreshumains.

Il est important de ne pas oublier que c’est ledestin d’un peuple qui est en jeu. Il ne s’agit pasd’ours polaires. Je pense également que les ourspolaires sont précieux, et je ne souhaite pas lesvoir disparaître. Mais je ne souhaite pas non plusvoir notre peuple disparaître.l Entretien réalisé par Rhett Butler, mongabay.com –un site Web dont le but est de susciter l’intérêt et d’éleverles consciences au sujet des territoires sauvages, de lafaune et de la flore, en étudiant l’impact des tendancesémergentes en matière de climat, de technologie,d’économie et de finance sur leur conservation et leurdéveloppement.

« La pêche représenteprès de 45 % des recettesfiscales du gouvernement,ainsi qu'une importantesource de subsistance.Notre geste est notrecontribution à labiodiversité et aux stocksde poisson de mer. »

sécurité alimentaire de leur nation, maiségalement pour leurs exportations. Au retour deson récent voyage sur certaines des îlesexcentrées, Aranteiti Tekiau, un documentalistedu ministère de la Pêche et du Développementdes ressources marines a déclaré : «Malheureusement, nous avons observé unblanchissement des coraux à Tamana. Il se peutque les habitants des îles excentrées ne s’enrendent pas compte ou ne sachent pas ce dont ils’agit, mais cela a des conséquences bien réellessur leurs vies et sur les moyens de subsistanceque l’océan leur fournit. Si la santé des corauxdécline, l’abondance du poisson déclinera elleaussi. Le poisson constitue notre principalesource d’alimentation et notre principal apport enprotéines. À Kiribati, nous accordons uneimportante toute particulière à la santé de noscoraux. »

Ribwanataake Awira, le secrétaire du ministère

de la Pêche et du Développement des ressourcesmarines, a déclaré à la Banque mondiale : « Unehausse des températures est l’un des principauxfacteurs qui affecteront le corail tel que nous leconnaissons. Même si la hausse n’est que de 1degré, le corail va commencer à mourir. Cela estune grande inquiétude pour nous, en particulierdans une région comme celle les îles Kiribati, oùnous dépendons exclusivement de la croissanceet de la santé des récifs. »

Cette dépendance vis-à-vis du poisson n’est pasexagérée. On estime que chaque habitant desKiribati consomme entre 72 et 207 kg de produitsde la mer par an. Par ailleurs, les Kiribati couvrentla plus grande zone économique exclusive duPacifique, avec plus de 3,5 millions de kilomètrescarrés d’océan et de ressources halieutiques, quiselon des estimations, valent plus de 150 millionsde dollars chaque année sur le marchéinternational.

Ces éléments rendent la décision des Kiribatid’interdire la pêche sur plus de 11 % du totaldu territoire national (soit 400 000 kilomètrescarrés) d’autant plus remarquable. L’aireprotégée des îles Phœnix (APIP) a récemmentété inscrite par l’UNESCO comme l’un descinq nouveaux sites du patrimoine mondialpour sa « nature immaculée et son importanceen tant que route et réserve migratoire ».L’APIP fait partie de l’initiative plusambitieuse du président Anote Tong, PacificOceanscape, qui prévoit de cesser l’exploitationde 38,5 millions de kilomètres carrés d’océanafin de contribuer à l’amélioration de la gestiondes ressources halieutiques, à la protection et àla conservation de la biodiversité, àl’approfondissement de la compréhensionscientifique de l’écosystème marin et à laréduction des conséquences négatives desactivités humaines. n

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Anote Tong,Présidentdes Kiribati

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Depuis la révolution industrielle, l’activitémanufacturière est considérée, dans tous les pays,comme une source majeure de croissanceéconomique. La volonté incessante de développerle sous-secteur d’activité reflète les profitsuniversels que celui-ci apporte à une économie.Pour les pays d’Afrique, l’industriemanufacturière fournit une alternativerationnelle pour relancer le développement grâceà l’exploitation optimale et durable de sesimportantes ressources humaines et naturellessur le long terme. Cependant, malgré cesressources abondantes, l’Afrique reste lecontinent le plus pauvre et le moins développé aumonde.

Plus de 80 % de la population africaine vit avecmoins d’un dollar américain par jour. De plus, letaux de croissance moyen à l’échelle du continentse situe en dessous des 7 % nécessaires àl'accomplissement des Objectifs du millénairepour le développement. L’Afrique continue àjouer un rôle marginal dans le commercemondial : d’après la Commission économique desNations Unies pour l’Afrique, seuls 3 % deséchanges commerciaux en 2009 ont été réalisésavec l’Afrique et sa maigre contribution à la valeurajoutée manufacturière (VAM) mondiale esttoujours en déclin.

Les politiques industrielles des états africainsn’ont manifestement pas été centrées sur lemoteur de croissance dans lequel le continent

possède un avantage comparatif : l’industriemanufacturière. Il faut impérativement etrapidement établir un diagnostic stratégique,aussi bien à l’échelon national que régional, dansle but d’identifier et d’évaluer les défis auxquelsfont face l’industrialisation et la diversification del’économie africaine.

La combinaison de mesures politiquesL’Afrique doit trouver la combinaison de mesurespolitiques appropriée qui inversera les perpétuelsmauvais résultats du secteur de croissance : lesous-secteur de l'industrie manufacturière. À cetégard, les conditions essentielles à une croissanceéconomique sont notamment desenvironnements macroéconomiques et politiquestables, un marché des changes stable, uneinflation à un seul chiffre ainsi qu’une bonnegouvernance d’entreprise.

Le manque de fonds disponibles pourl’investissement constitue un défi majeur. Dansce contexte, le marché du crédit a besoin d’êtredébloqué grâce à des interventions innovantes. Ledéveloppement de la capacité intérieure réduira lerisque de prêt au sous-secteur de l’industriemanufacturière. Ce développement est crucial auvu de la nécessité pour l’Afrique de réduire sadépendance envers les ressources extérieures afinde financer son développement. La diminutiondes fonds apportés par les donateurs ainsi que lalassitude de ces derniers ont été amplifiés par la

Le gouverneur de la Banque centrale du Nigéria, M. Mallam Sanusi Lamido Sanusi,identifie les ingrédientsessentiels à l’élaborationd’une combinaison demesures politiques qui aidera l’Afrique à prendreconscience de son potentielde production.

Politiqueindustrielle enAfrique : ce qui

doit être fait

En juin 2009, M. MALLAM SANUSILAMIDO SANUSI a été nommé 10egouverneur de la Banque centrale duNigéria. Lors de sa prise de fonction, il amis en œuvre une importante etspectaculaire restructuration de laréglementation bancaire et comptableau Nigéria. Auteur prolifique, il a écrit et publié de nombreux articles sur la banque, la politique, la religion et la société.

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MakingIt 39

crise économique. Par conséquent, les effortsdestinés à mobiliser les ressources locales doiventêtre intensifiés en augmentant le taux d’épargnenational ainsi que l'assiette des revenus, enrenforçant l’efficacité de la perception des impôtset en éradiquant la corruption. Les banquescentrales peuvent soutenir ces efforts grâce à desinterventions ciblées.

Une source de recettes supplémentaires endevise étrangère pour le pays réside dans le faitqu’aujourd’hui beaucoup d’économiesémergentes sont devenues de gros importateursde ressources naturelles. Cette demandecroissante en ressources naturelles rendl'amélioration de la gestion des ressources encoreplus indispensable.

Un environnement propiceUne attention toute particulière doit égalementêtre apportée à la création d'un environnementfavorable qui provoquera une amélioration de la

méthode des facteurs globaux de productivité(FGP), en supprimant notamment les droits

de douanes et les barrières commerciales,afin de permettre un commerce entre les

états et la construction d’infrastructuresrentables. Les politiques monétaires doivent

être concentrées non seulement sur lastabilité des prix, mais également sur le

développement des secteurs et des activitéséconomiques qui favorisent réellement lacréation d’emplois. Le manque d’infrastructuresest toujours élevé par rapport au reste du monde.Selon une estimation récente, l’Afrique doitinvestir 31 milliards de dollars américains par andans le but de combler ses lacunes en termesd'infrastructures.

Le défi technologique qui attend l'Afrique esttout aussi important. Des pépinières d’entrepriseet des parcs scientifiques, qui sont cruciaux pourla croissance, devront être créés dans le but desoutenir les entreprises d’information, decommunications, d’informatique, debiotechnologie, d’électronique et de technologiede précision. L’Afrique devra prendre exemple surle centre numérique (Digital Hub) construit en2003 en Irlande qui abrite une plate-formed’innovation basée sur la connaissance et tournée

vers les contenus numériques et la recherchetechnologique. Cette initiative a largementcontribué à la récente et spectaculairecroissance économique de l’Irlande.

« Nouvelle agriculture »L’agriculture offre un immense espoir pour lecontinent en tant qu’élément clé de sa stratégie dedéveloppement puisqu’elle offre de l’emploi àplus de 70 % des habitants de l'Afrique, qui encompte 1 milliard. D’autant plus que s'il est bienexploité, le secteur agricole pourrait devenir untremplin durable pour cette industrialisation tantattendue. L’agriculture peut fournir les matièrespremières à l’industrie tout en promouvantl’intégration verticale ascendante. Cependant,l’agriculture africaine a besoin de s’éloigner d’uneagriculture composée de petits exploitants ou deformes commerciales segmentées et loin d'êtreoptimales qui agissent seules, pour se tourner vers

une « nouvelle agriculture » qui s'appuiera sur lessystèmes intégrés, la production différenciée et lagestion du risque. Pour cela, la stratégie desactivités agricoles en Afrique doit passer d’uneméthodologie rudimentaire à une approche de lachaîne de valeur agricole (CVA) qui, à son tour,devra être intégrée dans le contexte de laperspective de la chaine de valeur mondiale.L’approche de la CVA couvre toutes les activitésimpliquées dans l’acheminement des produitsagricoles depuis le champ du fermier jusqu’à latable du consommateur. Cela implique laproduction primaire et la recherche decontributions, de financements, de capacité detransformation, de l’accès aux technologies et aumarché ainsi qu'au commerce. De grandesinjections de fonds seront nécessaires pourfinancer la chaine de valeur. Par conséquent, ledéblocage de l’accès au financement bancairepour l’agriculture ainsi que le développement desapproches de répartition du risque sont cruciauxpour stimuler les innovations dans les prêtsaccordés à l’agriculture. En retour, celaaugmentera la production agricole et,éventuellement, l'industrialisation du continent.

L'utilisation des principes de compétitivitédans le but de motiver les fermiers africains àconsidérer la production et la transformation desproduits agricoles comme une industrie,permettrait d'amener la production agricole à uneplus grande échelle. Les communautés ruralesqui cultivent des terres agricoles avec une valeurcommerciale élevée et en grande quantitédevraient être intégrées et désignées en tant quecentres industriels de la chaîne de valeur agricole.Cette approche offrira des opportunités dediversification de la gamme de produits etaccroîtra le commerce entre états africains.

Effets multiplicateursLe financement du développement destechnologies autochtones dans le butd’augmenter leur valeur ajoutée et l'atténuationdes pertes après la récolte, en transformant lesproduits agricoles en produits manufacturés degrande qualité, sont des ingrédients essentielspour l’industrialisation de l’Afrique. Le résultatsera spectaculaire puisque de nombreusesindustries de transformation des aliments serontconstruites et engendreront des effetsmultiplicateurs concomitants sur les emplois et lacréation de richesses, la réduction de la pauvretéet la promotion des technologies autochtonesdans l’industrie manufacturière et detransformation des aliments.

Avec plus de 70 % de sa population âgée demoins de 30 ans, l’Afrique est l’un des continentsles plus jeunes au monde. Cela a desconséquences sur son développement. D’unepart, il existe une main d’œuvre peu utilisée quipeut être embauchée afin d’augmenter lerendement. D’autre part, cette population de plusde 700 millions de jeunes gens représente unmarché animé et dynamique pour les biensmanufacturés. Il est impératif d'instaurer uncadre précis pour la politique industrielle afin depromouvoir et de susciter la croissanceéconomique et le développement de l'Afrique.n

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Jusqu'alors, les efforts engagés pour faire reculer lapauvreté dans les pays en développement étaientclairement divisés entre l'aide allouée par lesgouvernements d'une part et les échanges et lecommerce destinés à dynamiser les économies deces pays et créer une prospérité individuelled'autre part. Ce monde n'existe plus. À présent, cesdeux aspects sont en train de converger pour créerune nouvelle mosaïque en perpétuelle évolution.

De plus en plus, la réduction de la pauvreté etl'incitation au développement offrent denouvelles opportunités mais également denouveaux défis au monde des affaires. Les affairesne peuvent pas prospérer dans un pays en échec.En ayant une meilleure compréhension despréoccupations socio-économiques etenvironnementales des pays en développement,les entreprises sont mieux à même de gérer lesrisques sur lesquels repose leur licenced'exploitation. Par ailleurs, les entreprises peuventtirer parti des opportunités considérables offertespar l'expansion des marchés, en développant desmodèles commerciaux inclusifs. Il s'agit denouvelles entreprises viables sur le plancommercial, qui favorisent l'accès aux biens et auxservices pour les plus pauvres et qui augmententles perspectives d'emploi au sein descommunautés à faibles revenus.

Même si la pauvreté mondiale a diminué d'uncinquième depuis 1990, il devient de plus en plusdifficile de continuer à faire baisser le taux depauvreté. L'une des principales raisons à cela estque l'on s'attend à ce que la population de laplanète augmente de moitié d'ici à 2050, pouratteindre neuf milliards d'habitants. Chaquesemaine, environ trois millions de personnesaffluent dans les villes des pays endéveloppement.

Ce défi est déjà à notre porte. Les NationsUnies ont signalé que, l'année dernière, le nombrede personnes souffrant de la faim n'avait jamaisété aussi élevé dans toute l'histoire de l'humanité.La croissance démographique, la flambée du prixdu blé et des autres cultures, ainsi que la criseéconomique mondiale sont quelques unes desprincipales causes de ce phénomène.

La demande mondiale en énergie et enressources naturelles augmente sous la nécessitéde suivre les besoins de la population croissante etde plus en plus urbanisée des pays endéveloppement et de satisfaire les aspirations desclasses moyennes de ces pays. Ce phénomène necesse d'accentuer les tensions pesant sur lesécosystèmes de la planète.

Pour améliorer les moyens de subsistance touten préservant l'environnement, il sera nécessairede transformer notre système actuel en uneéconomie plus inclusive, à faible empreintecarbone et plus économe en ressources. Cettetransformation requerra de réaliser desinvestissements massifs dans les nouvelles villesvertes, dans l'énergie, l'eau et les systèmes detransport. Elle doit être du ressort du monde desaffaires. Les entreprises sont les mieux placéespour construire des infrastructures efficaces. Ilsera absolument essentiel que les entreprisesaugmentent massivement leurs investissementsdans ces projets faramineux, étant donné qu'ellesgénèrent à elles seules 85 % des mouvements descapitaux dans le monde.

Les entreprises qui seront les mieux à mêmede répondre à la demande croissante en matièred'alimentation, de santé et d'abri seront les grandsvainqueurs de demain. Dans un récent rapport duConseil mondial des affaires pour ledéveloppement durable (WBCSD), ungroupement de 200 entreprises mondiales,l'organisation met un point d'honneur àcoordonner l'action des entreprises sur tous cesfronts.

Le WBCSD souligne qu'en intégrant lespopulations à faibles revenus àl'approvisionnement, la production, ladistribution et la commercialisation des biens etdes services, les entreprises pourront accéder à denouveaux marchés tout en générant de nouveauxemplois et de nouveaux revenus et endéveloppant la base de compétences techniquesde la main d'œuvre locale. De plus, lesconsommateurs les plus pauvres auront accès àdes produits et services abordables adaptés à leursbesoins quotidiens.

Marcel Engel et Filippo Veglio, du Conseil mondial des affaires pour le développementdurable (WBCSD, World Business Council for Sustainable Development), imaginent unpartenariat florissant pour la croissance économique et le bien-être environnemental.

Un défi au pas de la porte : une visioncommerciale du développement

MARCEL ENGEL est le directeur du domained'intervention pour le développement et du réseaurégional du WBCSD, et FILIPPO VEGLIO est ledirecteur adjoint du domaine d'intervention pour ledéveloppement du WBCSD.

Les membres du WBCSD proviennent de plus de 35pays et de 22 secteurs industriels majeurs. Le WBCSDconstitue une plate-forme permettant aux entreprisesd'étudier le développement durable, de partager leursavoir, leurs expériences et leurs meilleures pratiques,ainsi que d'effectuer des recommandationscommerciales concernant ces préoccupations aucours de divers forums et auprès des gouvernements,des organisations non gouvernementales etintergouvernementales. Ph

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Toutefois, nous devons aller au delà des effortsréalisés par les entreprises et trouver des solutionsà grande échelle et axées sur le marché. Pour cela,les entreprises ont besoin que les gouvernements,au niveau régional, national et mondial, posent lescadres réglementaires nécessaires àl'épanouissement des marchés, notamment dansles pays en développement.

Les réglementations, en particulier, doiventêtre conçues pour faire respecter les principes de laloi, favoriser l'entrée dans l'économie formelle etéradiquer la corruption, fournir des formations etun accès aux capitaux, notamment pour les petiteset moyennes entreprises, et réaliser desinvestissements clés dans les routes, les ports,l'énergie et les systèmes de télécommunications,c'est-à-dire les infrastructures vitales au commercede tous les jours. Et enfin, les réglementationsdoivent promouvoir un marché juste et compétitif.

Les gouvernements, la société civile et lesentreprise doivent se préparer à unir leurs forcesdans le but d'établir les conditions-cadresadaptées à un développement rapide, généralisé etdurable.

Une bonne gouvernance est égalementfondamentale pour gérer les enjeuxenvironnementaux et sécuritaires mondiaux,ainsi que pour restaurer la stabilité financièremondiale.

La tâche que représente le développementdurable est bien trop ample et compliquée pourque les entreprises puissent la mener à bienseules. Par conséquent, des partenariats doiventêtre conclus, même avec d'anciens adversaires.

En effet, l'ancienne relation conflictuellequ'entretenaient les entreprises et lesorganisations non gouvernementales (ONG) setransforme petit à petit en un dialogue constructif.Il est nécessaire de conclure des partenariats et descollaborations ainsi que de réunir les entreprises,les gouvernements et la société civile autour d'unemême table afin de trouver des solutionsinnovantes pour résoudre les difficultés telles quela distribution d'eau potable, l'assainissement etbien d'autres services pour les habitants les pluspauvres des bidonvilles ou des villages isolés.

Dans le but de promouvoir une plus grandecoopération entre ces différentes entités, leWBCSD a établi des partenariats avec des partiesprenantes de tous bords, aussi bien des banquesmultilatérales de développement que des ONGenvironnementales.

Les ONG, tout comme les agences dedéveloppement, les gouvernements et la sociétécivile, doivent changer la manière dont ils voientle monde des affaires. Le commerce ne doit plusêtre considéré comme un simple fournisseur deressources. Il doit être vu comme un moteur deprogrès social et économique et un partenaireprivilégié dans l'effort commun pour bâtir unmonde plus inclusif et plus durable.

Parce qu'en définitive, le monde ne doit pasêtre divisé par de faux choix entre la croissanceéconomique d'un côté et le bien-êtreenvironnemental de l'autre. La croissanceéconomique et le bien-être environnemental sontinterdépendants. Nous devons les choisir tous lesdeux. n

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POLITIQUE EN BREF

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Par WENDY STEPHENSON, PDG de TheConverging World, organisation caritativebritannique d’investissements liés aux missions.

Chez The Converging World (TCW), nousréalisons des investissements liés aux missionsdans le domaine des énergies renouvelables.Ces investissements ont pour but de créer unimpact écologique positif, en plus d’apporterune rentabilité financière, destiné à soutenirnotre travail de développement durable avec lescommunautés du monde entier. Toutefois,nous rencontrons les mêmes difficultés quebien d’autres investisseurs dans ce domaine etnous avons besoin de mesures d’incitationstables et durables.

Le fossé énergétique dont on parle si souventest train de se rapprocher. En Inde, où nousréalisons des investissements dans le secteuréolien, on parle de « peak coal ». Le paysconnaît déjà un déficit net de production de 15% et toute la population n’a pas accès àl’énergie. D’ici 2020, la production énergétiquedevra doubler, mais il n’est plus certain que lecharbon puisse subvenir aux besoins de lanation. Les énergies renouvelables ne sontdonc pas seulement une question dechangement climatique : elles peuventcontribuer à un développement économique etsocial stable et garantir l’approvisionnementen énergie, ce qui est crucial pour maintenir lapaix et éviter des mouvements sociaux.

Lorsque nous avons installé nos deuxpremières éoliennes en Inde il y a deux ans, laseule mesure d’incitation qui existait était unfinancement « carbone » par le biais d’unedemande de crédits carbone réglementés parle Mécanisme de développement propre. Cettepratique, prenant souvent la forme d’une «compensation carbone », est essentielle à laviabilité financière du projet. Cependant, ellen’est pas parfaite du fait de sa lenteur et de sacomplexité excessive. Nous sommes engagésdans ce processus depuis maintenant trois ans.

Notre projet a absolument besoin d’unfinancement carbone – nous en avons eu lapreuve maintes et maintes fois – mais nousperdons chaque jour plus de crédits carboneessentiels. Il n’existe même pas de processusd’appels. Compte-tenu de cette expérience,nous allons devoir chercher une solutionalternative pour nous aider à financer noséoliennes.

Qu’en est-il des autres incitationsrèglementaires et fiscales ? Au Royaume-Uni, letarif de rachat a eu un effet positif immédiatsur le photovoltaïque (PV) solaire et lesfournisseurs remplissent leurs carnets decommande. Nous devons faire tout ce que nouspouvons et cela pourrait être une success storypour le Royaume-Uni comme ça l’a été pourbeaucoup d’autres pays. Mais commentfinancer de telles politiques dans les pays endéveloppement ? Sir Nicholas Stern pense quenous devons réduire le CO2 par les moyens etdans les moments les plus économiquespossibles.

En Inde, la modification récente despolitiques règlementaires et fiscales sur les

Investissement dans les énergiesrenouvelables en Inde

« Les investisseurs, qu’ils’agisse d’entreprises, defondations ou de ministères,doivent être plus nombreux àenvisager les investissementsliés aux missions. »

« La beauté du modèle de The ConvergingWorld réside dans le fait que le processus deréinvestissement augmentera continuellementl’approvisionnement en énergies vertes,diminuera les émissions de carbone etfavorisera le financement du développementsocial de toutes les communautésbénéficiaires même si aucun nouveaufinancement n’est prévu pour ces régions. »

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MakingIt 43

POLITIQUE EN BREF

Par LYNN K. MYTELKA, professeur au Centrede recherche économique et social et deformation de Maastricht (UNU-MERIT), auxPays-Bas.

L'innovation est un processusd'apprentissage, d'adaptation et dechangement dans la technologie, lesstructures organisationnelles et lespratiques institutionnelles, dans lequell'application du savoir joue un rôle central.Dans l'industrie, notamment au sein despays en développement, c'est le processuspar lequel des entreprises créent et utilisentleurs connaissances pour maîtriser etmettre en place la conception, ledéveloppement et la production de biens etde services qui leur sont nouveaux, qu'ils lesoient ou non pour leurs concurrents, leurpays ou le monde. L'accès auxconnaissances et aux informations, lapossibilité de rétroconcevoir des produitsexistants, d'assimiler et d'adapter destechnologies importées, de transférer lesconnaissances des universités et desinstituts de recherche vers les producteurset les utilisateurs et de travailler en réseaupour résoudre les problèmestechnologiques sont autant de pratiquesfaisant partie du processus d'innovation.

Les processus industriel de demaindevront être économes en énergie et eneau, résistants et durables. Il est essentiel derenforcer la capacité d'innovation del'industrie pour répondre à ces objectifs.

De nombreuses organisations nationaleset internationales ont encouragé larecherche dans le but d'améliorer lacompétitivité et les capacités d'innovationde l'industrie. Les études de cas d'uncertain nombre d'institutionsinternationales actives en Europe, en Asieet en Afrique ainsi que leur rôle dans lerenforcement des systèmes d'innovation

nationaux montrent que les méthodes desoutien et de promotion de l'expansionindustrielle des pays en développement ontbeaucoup changé au cours de ces trois ouquatre dernières décennies.

Dans le contexte actuel, l'accès à un grandnombre d'informations, l'accent mis sur laformation continue et l'innovation dans lessecteurs industriels récents outraditionnels, ainsi que le travail en réseauet la collaboration par des échanges deconnaissances, de la recherche conjointe etdes partenariats technologiques, sontdevenus des aspects cruciaux duportefeuille contemporain de programmesde soutien et d'instruments politiques enfaveur de l'innovation industrielle. Il en vade même pour l'engagement dans unprocessus de dialogue et d'évaluationcontinu, qui permet à l'ensemble duprogramme d'atteindre ses objectifs grâce àdes changements adaptatifs dans lescentres eux-mêmes, ainsi que dans leursactivités.

Quelques exemples tirés de trois étudesde cas :lL'Institut international pour latechnologie des logiciels (UNU-IIST), situéà Macao (Chine), est l'un des centres derecherche et de formation de l'Universitédes Nations Unies. Sa mission est d'aiderles pays en développement à renforcer leurenseignement et leur recherche dansl'informatique, ainsi que leur capacité àproduire des logiciels. L'expérience del'UNU-IIST est un bon exemple de la façondont un centre, qui n'était pas conçucomme un réseau, peut intégrer uncomportement de mise en réseau dans sesstructures organisationnelles et sespratiques institutionnelles antérieures.

Après s'être d'abord concentré sur laChine et ses pays voisins, l'UNU-IIST a,au milieu des années 1990, étendu ses

Promotion des capacitésd’innovation industrielle

énergies renouvelables donnent la possibilitéd’augmenter les retours sur investissement enla matière. Malgré tout, emprunter en Indecoûte cher, puisque les taux s’élèvent à 12 % etles prêts, considérés comme personnels (et noncomme un financement d’infrastructure),doivent être remboursés sur sept ans. Parailleurs, le montant des emprunts étrangersaffectés à un projet est limité et les taxes sontdésespérément élevées.

Mais il reste un espoir : l’Inde a récemmentinstauré de nouvelles mesures d’incitation et lafiscalité est en cours de révision. De plus, larécente visite en Inde du Premier ministrebritannique David Cameron a débouché surun accord de forum indo-britannique desPDG. Cet événement pourrait permettre auxdeux pays de trouver ensemble le moyen desurmonter certains des obstacles commerciauxactuels et d’inciter les investissementsétrangers dans ces énergies renouvelablessalutaires.

Nous essayons actuellement de collecter desfonds au Royaume-Uni mais nous avonstendance à nous retrouver entre les donneurset les comités d’investissement. Les comitésd’investissement des fondations et desorganisations caritatives sont souvent chargésde rechercher le meilleur rendement possibledu marché. Ce que nous offrons chez TCW,c’est un investissement avec une rentabilitéfinancière modeste mais des avantages sociauximportants, voire cruciaux.

Les investisseurs, qu’il s’agisse d’entreprises,de fondations ou de ministères, doivent êtreplus nombreux à envisager les investissementsliés aux missions. Dans notre cas, l’instrument(les crédits carbone) à notre disposition estdifficile, voire dysfonctionnel. Des mesuresd’incitations fiscales et financières se profilentà l’horizon, mais elles sont souvent trop lenteset le secteur financier peut les anéantir du faitdu manque de financement des infrastructureset des taux d’intérêt élevés.

La solution la plus simple serait que lesinvestisseurs acceptent un rendementfinancier moindre pour obtenir de biensmeilleurs résultats d’un point de vue social etenvironnemental. Les investissements liés auxmission sont peu connus et peu utilisés, maisils pourraient faire une grande différence pourle déploiement crucial des énergiesrenouvelables. n ‰

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POLITIQUE EN BREF

activité de formation à des pays d'Asie.En 1995, il a ensuite commencé desformations de deux semaines en Afriquefrancophone, financées par la Banquemondiale. En 1996, l'UNU-IIST a étenduses activités à l'Amérique latine et aprogressivement intégré à son agenda derecherche la conception et ledéveloppement d'un programmeuniversitaire de développement formel delogiciels. Ensuite, avec 11 universitéspartenaires des pays industriels, il acommencé à former des professeursd'université issus des pays endéveloppement.

Son choix du travail en réseau a permis àl'UNU-IIST de fonder le Centre degouvernance électronique avec le soutienfinancier du gouvernement de Macao, deMicrosoft Corporation, du PNUD, duCentre d'Asie-Pacifique des Nations Uniespour le développement des TIC, du Fondsd'activités conjoint de l'UNU et du Fondsinternational pour le bien-être desanimaux. Ce centre compte plus de 25partenaires, dont les ministères de huitpays en développement et de la Républiquede Corée, leurs universités (à l'exception detrois), ainsi que des universitésaméricaines, britanniques, canadiennes etégyptiennes.lL'expérience du Réseau entrepriseEurope de l'Union européenne montrecombien il est important de s'engager dansun processus de dialogue et d'évaluationcontinu, qui permet à l'ensemble duprogramme d'atteindre ses objectifs grâce àdes changements adaptatifs dans lescentres eux-mêmes, ainsi que dans leursactivités.

Depuis 2001, ce réseau a adapté sonmodèle original pour étendre sa gamme deservices et ainsi accroître sa viabilité, créerde nouvelles incitations financièresdestinées à stimuler le transfert detechnologie entre les nations, définir uneclientèle cible et avoir une meilleurevisibilité auprès d'elle, et enfin élaborer demeilleurs systèmes de suivi pour s'assurerque les services ont l'impact souhaité.

Le Réseau entreprise Europe a nonseulement renforcé son rôle de soutien auxpetites et moyennes entreprises (PME),

mais aussi développé ses études d'impact etrenforcé son système de rétroaction «Écouter les entreprises », ce qui lui apermis d'en apprendre plus et plusrapidement sur la façon dont ses servicesinfluent sur les PME. Depuis 2007, leréseau ainsi renouvelé a intensifié sesservices de coopération commerciale et detransfert de technologie, émis ou diffusé 11500 propositions de partenariat, organisédifférents événements de courtageauxquels 15 000 PME ont participé et établi1 525 accords de partenariat signés. lL'objectif du Projet de développementdes entreprises rurales d'énergie enAfrique (AREED) du Programme desNations Unies pour l'environnement est dedévelopper de nouvelles entreprisesd'énergies durables utilisant destechnologies énergétiques propres,efficaces et renouvelables. Par le biaisd'organisations locales partenaires, dontbeaucoup sont des organisations non

« Les méthodes de soutien etde promotion de l'expansionindustrielle des pays endéveloppement ont beaucoupchangé au cours de ces troisou quatre dernièresdécennies. »

Installation de dispositifsfavorisant l’efficacitéénergétique dans un hôtelde Chavuma, en Zambie.Une initiative d’AREED.

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POLITIQUE EN BREF

gouvernementales africaines, l'AREEDpropose aux entrepreneurs ruraux etpériurbains du Mali, du Ghana, de laTanzanie, du Sénégal et de la Zambie, desservices de développement et de conseilassociés à un financement de start-ups. Cesoutien financier et technique intégrépermet aux entrepreneurs de planifier et destructurer leurs entreprises en vue de leurcroissance. En outre, il rend possibled'éventuels investissements pard'importants partenaires financiers aveclesquels l'AREED travaille.

L'expérience de l'AREED montre qu'unsoutien au développement des entrepriseset un financement d'amorçage peuventréussir à améliorer l'accès à l'énergie, maisque bien souvent, cela ne suffit pas àorienter les entrepreneurs vers les marchésruraux. Une grande partie des utilisateurspotentiels qui ne pouvaient pas sepermettre de payer les produits et servicesdes entrepreneurs de l'AREED à l'avancen'ont pas pu être atteints. Pour répondre àce problème, l'AREED s'est impliquédavantage auprès des institutions demicrofinance et des banques locales pourfaciliter l'apport de financement aux clientsou futurs clients des entreprises d'énergiespropres.

La biodiversité est la l'ensemble de la vie et desprocessus naturels de la Terre, comprenant ladiversité au sein des espèces, entre les espèces etdes écosystèmes. Elle fournit de la nourriture etdes médicaments, de l'air pur et de l'eau propre,une protection contre les catastrophesnaturelles et des espaces verts aux humains. Desétudes montrent que la biodiversité estgravement menacée par la perte d'habitats, lesespèces envahissantes, la pollution, lechangement climatique et la surexploitation. Sir John Beddington, principal conseillerscientifique des autorités britanniques etprofesseur de biologie des populationsappliquée à l'Imperial College de Londres arécemment tenu plusieurs conférences sur « labiodiversité et les écosystèmes dans un mondeen mutation ».

Selon lui, « nos difficultés à fournir del'énergie, de l'eau et de la nourriture saines,propres et abordables en quantité suffisante à

notre population mondiale croissante, qui migrevers les villes, sont intimement liés à notredifficulté à atténuer le changement climatique età nous y adapter. De toute évidence, toutesolution efficace à ces difficultés doit continuer àtenir compte de l'importance du maintien de nosriches écosystèmes. Les scientifiquescomprennent mieux les avantages sous-jacentsdu bon fonctionnement des écosystèmes,notamment pour la séquestration de notrecarbone, la purification de notre eau et lapollinisation de nos cultures. Nous devonsimpérativement continuer de porter cesquestions à l'attention des décideurs politiques ».

Le graphique ci-dessus montre l'interrelationcomplexe entre l'approvisionnement ennourriture, en énergie et en eau dans le cadre duchangement climatique. Beddington sedemande s'il s'agit d'une « tempête parfaite » quipourrait engendrer des mouvements civils et desconflits. n

Questions clés1. Est-il possible de nourriréquitablement, sainement etdurablement neuf milliardsde personnes ?2. Peut-on faire face à lafuture demande eneau ?3. Peut-on fournirassez d'énergie aunombre croissant depersonnes sortant dela pauvreté ?4. Peut-on atténuer lechangement climatiqueet s'y adapter ?5. Peut-on faire tout celadans le contexte de la luttecontre le déclin de la biodiversitéet de la préservation des écosystèmes ?

Biodiversité : défis politiquesdans un monde en mutation

Increased demand 50% by 2030 (IEA)

Energy

WaterIncreased demand

30% by 2030

(IFPRI)

FoodIncreased demand

50% by 2030

(FAO)

Climate Change

Augmentation de la demande

50 % d’ici 2030 (IEA)

Énergie

Eau

(IFPRI)

Alimentation

(FAO)

Climatique

t

Changement

Augmentation de la demande 30 % d’ici 2030

Augmentation de la demande 50 % d’ici 2030

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MakingIt46

LE MOT DE LA FIN

Pour vous donner un avant-goût du prochainnuméro qui traitera du commerce, Making Its'est entretenu avec PATRICIA FRANCIS,directrice générale du Centre du commerceinternational (CCI), à propos de l'empreintecarbone du commerce et de ses conséquencessur les pays les moins avancés.

Selon vous, quel impact le changementclimatique a-t-il sur le développement etquel est le rôle du commerce ?Le changement climatique est l'une des plusgraves menaces pour l'humanité et donc leprincipal enjeu du développement pour cesiècle. Les pays les moins avancés (PMA) ontpeu contribué au changement climatique etpourtant ce sont eux qui en subissent lesdures conséquences et sont les moins parés às'y adapter. Le commerce peut aider les paysen développement à s'adapter, en générantdes recettes d'exportation et en accédant à latechnologie. Il peut également limiter lechangement climatique, en diffusant destechnologies à faible émission de carbone.

Maintenir un commerce ouvert et sansdiscrimination constitue donc une politiqueefficace contre le changement climatique. La mission du CCI, « Export Impact for Good »(Impact des exportations pour de bon) couvrebien cet objectif.Devrions-nous nous inquiéter de l'empreintecarbone du commerce ?Le commerce représente une part de plus enplus importante du PIB mondial. Il stimule lacroissance économique et donc les émissionsde gaz à effet de serre. Par conséquent, lecommerce, et notamment le transport demarchandises autour du monde, est unecause du changement climatique. Cependant,90 % des marchandises faisant l'objetd'échanges internationaux sont transportéespar la mer. Le transport maritime est unmode de transport efficace, qui n'émet que 10à 15 grammes de CO2 par tonne-kilomètre.

La décision des consommateurs del'hémisphère nord « d'acheter local » afin deréduire les émissions liées au transport peut,au premier abord, sembler une décisionintuitive. Toutefois, des études montrent queles denrées alimentaires importées del'hémisphère sud peuvent souvent avoir uneempreinte carbone plus faible que lesproduits cultivés dans l'hémisphère nord.C'est le cas des fruits et légumes de contre-saison provenant de certains pays endéveloppement, qui bénéficient deconditions de culture plus favorables quedans l'hémisphère nord. Dans des cas bienprécis, les faibles émissions de la productionagricole dans des climats plus chaudspeuvent largement compenser les émissionsliées à leur transport vers les marchés duNord.

Le principal moteur de la croissance à forteémission de carbone n'est pas le commerce,mais le manque de réglementationconcernant l'utilisation du carbone. Lesobstacles fondamentaux auxquels nousrestons confrontés pour réduire ce niveau dedépendance, sont le maintien dessubventions sur les combustibles fossiles etl'absence d'accord multilatéral sur latarification du carbone. Qu'entendez-vous par croissance à forteémission de carbone ?La croissance économique est liée auxémissions de dioxyde de carbone et d'autresgaz à effet de serre car le type de technologieutilisé pour favoriser la croissanceéconomique a un rapport direct avec leniveau des émissions par unité de PIB. Lespays développés disposant de technologiesplus perfectionnées produisent donc enémettant de plus faibles quantités decarbone.

Néanmoins, il existe également desimportateurs nets de biens deconsommation en provenance de Chine et

Changement climatique et commerce

Patricia Francis,directrice générale duCentre du commerceinternational (CCI).

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LE MOT DE LA FIN

d'autres économies émergentes, oùl'intensité en carbone de la production estplus élevée. Même si ces produits sontconsommés en Europe, les émissions deleur production sont comptabilisées côtéchinois. Nous savons, grâce aux recherchesde l'Institut Carnegie, que l'Europe réussitainsi à « externaliser » plus d'un tiers deses émissions vers les pays endéveloppement. L'attribution desresponsabilités liées à ces émissionsnécessite un débat plus poussé. Lesconséquences sont évidentes pour lesnégociateurs du changement climatique,mais aussi pour les consommateurs, quisont de plus en plus nombreux à vouloiren savoir plus sur la quantité de carboneémise lors de la fabrication d'un bien deconsommation ou d'une prestation deservice. Des obstacles au commerce apparaissent-ils du fait du changement climatique ?Les développements les plus rapidesconcernent le secteur privé. Les détaillantsinscrivent les informations relatives aucarbone sur les produits, notamment lesdenrées alimentaires. Ils ont donc besoinque leurs fournisseurs leur donnent desinformations sur les émissions de lachaîne logistique.

Désormais, les grandes entreprises fontdes déclarations publiques sur leursémissions et investissent en faveur de leurréduction. Cette décision est motivée à lafois par la nécessité de réduire les coûts,mais aussi de faire preuve deresponsabilité environnementale etd'autres engagements éthiques. Je penseque cette tendance va s'intensifier et segénéraliser dans le monde des affaires. Qu'est-ce que cela implique pour lesexportateurs des PMA ?Les exportateurs agroalimentaires aveclesquels nous travaillons en Afriques'inquiètent du fait que les normesd'étiquetage carbone se développent sansleur participation. Il existe différents plans,chacun ayant généralement sa propreméthode. Comme ils ne sont pasharmonisés et ne se reconnaissent pas l'unl'autre comme « équivalents », lesexportateurs doivent faire face aux coûts demultiples certifications, y compris sur les

mêmes marchés de destination. Parailleurs, ces méthodes de certification sontcomplexes et nécessitent des données quin'existent pas toujours dans les pays endéveloppement, ce qui peut donner lieu àdes mesures incertaines.Cela rend-il le consommateur « roi » ?En effet, le consommateur et le détaillantfixent certaines règles du jeu importantespour le commerce. Les consommateursapportent des changements positifs, mais ilspeuvent aussi avoir une influence négative etne pas résoudre les problèmes clés.

Les étiquettes d'empreinte carbone desproduits peuvent sembler rassurantespour les consommateur éthiques, maiselles ne tiennent pas compte desémissions liées au transport vers lessupermarchés ou à la préparation desaliments, deux activités à forte émission decarbone. Par ailleurs, les consommateurséthiques sont enclins à la « compensationmorale », par laquelle ils font le choix d'unachat écologique mais se permettentensuite un achat plus néfaste, comme celuid'un billet d'avion pour un week-end loinde la ville.Comment ce problème est-il associé à laréduction de la pauvreté et au travail duCCI ?Le marché de la consommation durable esten pleine expansion. Les marchés desproduits biologiques et du bois certifié, parexemple, valent aux alentours de 50 milliards USD, les pays endéveloppement représentant 2 % de cechiffre. Les agriculteurs et leurcommunauté bénéficient tous deux decette hausse des revenus et d'unenvironnement plus propre. Toutefois,nous devons veiller à ce que lesconsommateurs et les détaillants neremettent pas en cause pas ces perspectivesavec des plaidoyers et des normesmalvenus se développant par desméthodes discriminatoires et opaques.

Le CCI et ses partenaires dedéveloppement travaillent dur dans lecadre de ce programme d'assistancetechnique environnementale pourrenforcer la compétitivité des pays endéveloppement sur ce nouveau marchéexigeant. n

MakingIt 47

Bateman, Milford – Why Doesn’t Microfinance Work?:The Destructive Rise Of Local Neoliberalism

Birdsall, Nancy and Savedoff, William – Cash OnDelivery Aid: A New Approach to Foreign Aid

Chang, Ha-Joon – 23 Things They Don’t Tell You AboutCapitalism

Daniels, Steve – Making Do: Innovation in Kenya’sInformal Economy

Ellwood, Wayne – No-Nonsense Guide toGlobalization

Fues, Thomas and Wolff, Peter (eds.) – G20 and GlobalDevelopment: How can the new summitarchitecture promote pro-poor growth andsustainability?

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Leonard, Annie – The Story of Stuff: How OurObsession with Stuff Is Trashing the Planet, OurCommunities, and Our Health – and a Vision forChange

Naudé, Wim (ed.) – Entrepreneurship and EconomicDevelopment

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Parkin, Sara – The Positive Deviant: SustainabilityLeadership in a Perverse World

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www.unohrlls.org – United Nations Office of the HighRepresentative for the Least Developed Countries,Landlocked Developing Countries, and Small IslandDeveloping States

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Un magazine trimestrielle pourstimuler le débat sur les problèmesdu développement global

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