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Frantz VOLTAIRE Historien, fondateur du CIDIHCA [Centre International de Documentation et d’Information Haïtienne, Caribéenne et Afro-canadienne] 2007 Une brève histoire des communautés noires au Canada LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALES CHICOUTIMI, QUÉBEC http://classiques.uqac.ca/

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Frantz VOLTAIREHistorien, fondateur du CIDIHCA [Centre International de Documentation

et d’Information Haïtienne, Caribéenne et Afro-canadienne]

2007

Une brève histoiredes communautés noires

au Canada

LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALESCHICOUTIMI, QUÉBEChttp://classiques.uqac.ca/

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http://classiques.uqac.ca/

Les Classiques des sciences sociales est une bibliothèque numérique en libre accès développée en partenariat avec l’Université du Québec à Chicoutimi (UQÀC) depuis 2000.

http://bibliotheque.uqac.ca/

En 2018, Les Classiques des sciences sociales fêteront leur 25e anni-versaire de fondation. Une belle initiative citoyenne.

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Politique d'utilisationde la bibliothèque des Classiques

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L'accès à notre travail est libre et gratuit à tous les utilisa-teurs. C'est notre mission.

Jean-Marie Tremblay, sociologueFondateur et Président-directeur général,LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALES.

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Un document produit en version numérique par John Peter ADOLPHE, bénévole, étudiant en sciences économiques à l’Université d’État d’Haïti,Membre du REJEBECSS-Haïti. Page web :http://classiques.uqac.ca/inter/benevoles_equipe/liste_adolphe_john-peter.html Courriel: John Peter ADOLPHE : [email protected]

à partir du texte de :

Frantz VOLTAIRE

Une brève histoire des communautés noires au Canada

Montréal : Les Éditions du CIDIHCA, 2007, 57 pp.

[Autorisation formelle accordée par la direction du CIDIHCA de diffuser ce LIVRE, en accès libre dans Les Classiques des sciences sociales.]

Courriel : CIDIHCA INFO : [email protected]

Polices de caractères utilisée :

Pour le texte: Times New Roman, 14 points.Pour les notes de bas de page : Times New Roman, 12 points.

Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2008 pour Macintosh.

Mise en page sur papier format : LETTRE US, 8.5’’ x 11’’.

Édition numérique réalisée le 4 avril 2020 à Chicoutimi, Québec.

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Merci aux universitaires bénévolesregroupés en association sous le nom de:

Réseau des jeunes bénévolesdes Classiques des sciences socialesen Haïti.

Un organisme communau-taire œuvrant à la diffusion en libre accès du patrimoine intel-lectuel haïtien, animé par Ren-cy Inson Michel et Anderson Layann Pierre.

Page Facebook :https://www.facebook.com/Réseau-des-jeunes-bénévoles-des-Classiques-de-sc-soc-en-Haïti-990201527728211/?fref=ts

Courriels :

Rency Inson Michel : [email protected] Anderson Laymann Pierre : [email protected]

Ci-contre : la photo de Rency Inson MICHEL.

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Frantz VOLTAIREHistorien, fondateur du CIDIHCA [Centre International de Documentation

et d’Information Haïtienne, Caribéenne et Afro-canadienne]

Une brève histoiredes communautés noires au Canada

Montréal : Les Éditions du CIDIHCA, 2007, 57 pp.

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UNE BRÈVE HISTOIREDES COMMUNAUTÉS NOIRES

DU CANADA

Frantz VOLTAIRE

Par

Editions du CIDIHCAMontréal, 2007

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Quatrième de couverture

Retour à la table des matières

Cet essai sur l’histoire des communautés noires vient combler une lacune. En effet, les livres canadiens ne font que rarement mention de la présence des Noirs au Canada. Le Noir, dans l’imaginaire des Ca-nadiens, est encore perçu comme un immigrant récent. Les travaux pionniers de Marcel Trudel, de Robin Winks, de Colin A. Thompson ou encore de Dorothy Williams, Daniel Gay et James Walker entre autres nous révèlent cependant que la présence des noirs remonte au début de la colonisation, L’histoire des Noirs fait ainsi partie inté-grante de l’histoire du Québec et du Canada.

Frantz Voltaire est un historien et a réalisé plusieurs documentaires historiques.

Les Éditions du CIDIHCA

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Les Éditions du CIDIHCA remercient le Conseil des Arts du Cana-da ainsi que la SODEC de l’aide accordée à son programme de publi-cation.

Le Conseil des Arts du CanadaThe Canada Council for the Arts

Frantz VoltaireUne brève histoire des communautés noires du Canada

ISBN : 978-2-89454-249-1Dépôt Légal : 2007© Éditions du ClDlHCA

Mise en pages : MANUEL SALGADO (www.papyruz.com)

©CIDIHCA, 2007430, rue Sainte-Hélène, bureau 401Montréal (Québec), H2Y 2K7Canada

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Note pour la version numérique : La numérotation entre crochets [] correspond à la pagination, en début de page, de l'édition d'origine numérisée. JMT.

Par exemple, [1] correspond au début de la page 1 de l’édition papier numérisée.

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[57]

Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Table des matières

Quatrième de couvertureIntroduction [5]

Chapitre 1. Bibliographie sélective sur l'histoire des Noirs au Canada [9]

Chapitre 2. Les Noirs en Nouvelle-France [15]Chapitre 3. Les Noirs dans les Maritimes [29]Chapitre 4. Le Haut-Canada [37]Chapitre 5. Les Noirs dans l'Ouest canadien [45]Chapitre 6. Les communautés noires canadiennes de 1860 à 1960

[49]Chapitre 7. L’immigration noire contemporaine [53]

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

INTRODUCTION

Retour à la table des matières

Cet essai sur l’histoire des communautés noires vient combler une lacune. En effet, les manuels scolaires et les guides pédagogiques ne font que rarement mention de la présence des Noirs au Canada. Le Noir, dans l’imaginaire des Canadiens, est encore perçu comme un immigrant récent. Les travaux pionniers de Marcel Trudel, de Robin Winks, de Colin A. Thompson ou encore de Dorothy Williams, Da-niel Gay et James Walker entre autres nous révèlent cependant que la présence des noirs remonte au début de la colonisation. L’histoire des Noirs fait ainsi partie intégrante de l’histoire du Québec et du Canada.

Cet ouvrage poursuit un triple objectif.Cet ouvrage permet d’intégrer l’histoire des Noirs aux grands évé-

nements qui ont façonné l’histoire du Canada. En effet, la connais-sance de l’histoire des Noirs apporte des éclairages nouveaux sur l’histoire du Canada.

Par exemple, un enseignant utilisant une approche chronologique dans l’enseignement de l’histoire [6] pourra faire référence, s’il traite de la colonisation de la Nouvelle-France, au rôle de l’esclavage dans la colonie. Un autre pourra comparer les caractéristiques spécifiques de l’esclavage en Nouvelle-France par rapport à la même institution dans les colonies anglaises de l’Amérique du Nord ou dans les An-tilles. Tel autre pourra analyser la situation des esclaves noirs par rap-port aux esclaves amérindiens en Nouvelle-France.

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Il poursuit un deuxième objectif d’éducation à la citoyenneté et de sensibilisation à la diversité culturelle en faisant découvrir aux jeunes de toutes origines l’histoire des noirs au Canada. Ainsi le jeune fran-cophone découvrira que Mathieu Da Costa, un interprète noir, est ar-rivé avec Samuel de Champlain et qu’il y avait des esclaves noirs en Nouvelle-France. Le jeune des Maritimes pourra mettre en perspec-tive l’accueil réservé aux loyalistes noirs par rapport aux loyalistes blancs. Le jeune ontarien pourra mieux comprendre le rôle du Canada comme refuge pour les noirs fuyant l’esclavage aux États-Unis. Ce sera une surprise pour des jeunes de la côte pacifique d’apprendre que des Noirs ont été parmi les pionniers de la colonisation de la Colom-bie-Britannique ou encore que des Noirs venus de l’Oklahoma ont participé à la colonisation des Prairies. Le jeune immigrant s’intéres-sera aux obstacles rencontrés par les communautés noires au XXe

siècle dans leur processus d’intégration au Canada.Finalement, ce livre s’adresse surtout aux jeunes noirs. Cette his-

toire enracinée dans celle d’un triple traumatisme : le déracinement avec la traite négrière, l’esclavage et le racisme. Mais cette histoire est aussi celle de la résistance de communautés noires qui [7] depuis plus de 400 ans n’ont cessé de lutter pour la justice et l’égalité des chances.

Les enseignants seront libres d’utiliser ce livre en fonction de leurs propres perspectives. En effet, on ne le lira pas comme un roman, on le déconstruira en suivant sa propre narration de l’histoire. Chacun pourra ainsi adapter, réordonner ce livre suivant ses intérêts, ceux de ses étudiants ou encore en fonction de considérations régionales.

L’histoire des Noirs ne doit pas être considérée comme une histoire séparée, parallèle mais plutôt comme intégrée à l’histoire du Canada et des provinces du Québec, de l’Ontario, de la Nouvelle-Écosse et de la Colombie-Britannique. Dans cette perspective l’utilisateur sera confronté à la nécessité de rendre compte à la fois de la dynamique nationale mais aussi des réalités régionales du Canada qui n’évoluent pas au même rythme.

Nous avons choisi de présenter cette histoire de manière chronolo-gique pour en faciliter la compréhension. La documentation présentée dans cet ouvrage est indicative, l’enseignant ou l’élève pourront en fonction de leurs intérêts, continuer leurs recherches en approfondis-sant un thème ou une période particulière de l’histoire.

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Dans ce texte nous utilisons indistinctement les termes noir, afro-canadien ou africain canadien. Le terme noir fait référence au fait que des individus étaient en raison de leur pigmentation considérés comme appartenant à un même groupe humain. Dans la réalité, les communautés noires, même si elles partagent des expériences com-munes de discrimination et de racisme, se [8] différencient par la langue, la religion, l’origine géographique et l’histoire. Il faut en ce sens plutôt parler de communautés noires. Les termes afrocanadien ou africain canadien font référence à l’origine africaine de ces commu-nautés.

Finalement, les enseignants de littérature, de français ou d’anglais pourront utiliser ce texte pour initier des débats sur des thèmes comme le racisme, le sexisme, la violence, l’esclavage, la discrimination, le racisme, etc.

Le but de ce petit livre n’est pas de régler des comptes mais d’ou-vrir un débat nécessaire et critique en procurant à la fois des informa-tions et des données factuelles sur les communautés noires — et des clés de compréhension pour permettre aux enseignants, aux étudiants et au grand public d’interpréter et de s’approprier cette histoire.

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 1Bibliographie sélectivesur l’histoire des Noirs

au Canada

Retour à la table des matières

Nous ne pouvons citer dans le cadre de ce livre toutes les études réalisées sur l’histoire des Noirs au Canada. Chacun aura le loisir sui-vant les époques ou les thèmes, de faire une recherche plus approfon-die. Les ouvrages présentés dans ce chapitre le sont à titre indicatif. Le livre de James W. St G. Walker « A History of Blacks in Canada : a Study Guide » (Hull, Québec, Canadian government publishing Centre, 1980) est une excellente introduction à l’étude de l’histoire des Noirs au Canada. Ce travail propose des éléments de réflexion importants sur l’histoire, la culture et l’organisation sociale des com-munautés noires.

Le travail de référence sur l’histoire des Noirs au Canada reste l’ouvrage de Robin W. Winks « The Blacks in Canada : A History » (McGill - Queen’s University Press, 1971 ; 2nd édition 1997). Pour le Québec il faut signaler le monumental ouvrage de Daniel Gay « Les Noirs au Québec 1629-1900 » (Montréal, Septentrion, 2004).

[10]Les ouvrages comme ceux de Daniel G. Hill, « The Freedom see-

kers : Blakcs in Early Canada » (Agincourt, Ontario, Black society of Canada, 1981), de Léo W Bertley « Canada and its people of African

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descent » (Pierrefonds, Québec, Bilongo Press, 1977) aident à appro-fondir différents thèmes.

Les études de Marcel Trudel sont indispensables pour la compré-hension de l’esclavage en Nouvelle-France. Marcel Trudel vous pré-sente une synthèse de ses travaux sur l’esclavage au chapitre 9 de son livre « Mythes et réalités dans l’histoire du Québec » (Montréal, Hur-tubise, HMH, 2001, p. 175-192). Les deux ouvrages « L’esclavage au Canada français » (Québec, Presses de l’Université Laval, I960) et son « Dictionnaire des esclaves et de leurs propriétaires au Canada français » (Montréal, Hurtubise, HMH, 1990 et l’édition révisée de 1994) sont la référence en ce qui concerne l’esclavage en Nouvelle-France et au Québec. Le livre de Frank Mackey « Blacks Then, Blacks and Montreal 1780’s-1880’s » (McGill, Queen’s University Press, 2004) est le complément des livres de Dorothy Wiliams « Blacks in Montreal 1628-1986 : An urban demography » (Cowans-ville, Québec, Éditions Yvon Blais, 1986) et « The road to nova : A history of Blacks in Montreal » (Montréal, Véhicule Press, [11] 1997). Pour une approche plus romancée de l’histoire on lira avec intérêt les

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trois tomes de Paul Fehmiu Brown « Ces Canadiens oubliés » (Tome I et II, Montréal, Éditions Aquarius 1981 et Tome III, Montréal, Édi-tions des 5 continents, 1998).

Sur la présence des noirs en Nouvelle-Écosse, les travaux de John N. Gant « Blacks immigrants into Nova-Scotia 1776-1815 » (Journal of Negro History, vol. [12] 58, n° 3, 1973), de Neil Mackinnon « The unfriendly soil  : The loyalist experience in Nova Scotia, 1783-1971 » (Kingston et Montréal : McGill Queen’s University Press, 1986), de Bridgal Pachai « Bencath the Clouds of the Promised Land : The survival of Nova Scotia’s Blacks, vol. 1, 1600-1800 » ; vol. I, 1987 et « Bencath the Clouds of the Promised Land : The sur-vival of Nova soctias Blacks, vol. 2, 1800-1989 » (Halifax, Blacks education association of Nova Scotia). Le travail de Francis Henry « Forgotten Canadians : The Blacks of Nova Scotia » (Don Mills, Ontario. Longman Canada) reste une très bonne étude sur la situation des peuplements noirs en Nouvelle-Écosse.

Pour la présence des noirs en Ontario, le texte de Gary French « Men of colour : An Historical Account of the Black settlement on Wilberforce Street and in Oro [13] townships, Simcoe county, Ontario 1819-1947 » (Stroud, Ontario, Kate Books, 1978) dispose d’une ex-

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cellente documentation sur l’évolution de la communauté noire de Simcoe. Il nous fournit aussi des données sur les procédés discrimina-toires dont étaient victimes les noirs. L’ouvrage publié en 1977 par le Windsor Board of Education « Black settlement in South-Western On-tario : A source book » reste une référence pour les enseignants ainsi que le livre de Charlotte Perry « The long road : The History of the Coloured Canadian in Windsor, Ontario, 1867-1967 » (Summer Press Windsor, Ontario).

Sur la présence en Colombie-Britannique et dans les Prairies, on pourra consulter le livre de Colin A Thompson « Blacks in deep snow : Black pionners in Canada » (Don Mills, Ontario, JM. Dent and Sous, 1979). L’ouvrage de Crawford Killan « Go to source Great thing : The Black Pionners of British-Colombia » (Vancouver, Dou-glas Mclntyre, 1978), raconte l’histoire des noirs américains partis de Californie pour s’installer dans l’île de Vancouver en 1858. Le livre nous fournit aussi une abondante documentation sur les communautés noires de l’Ouest canadien.

Pour les Praires, on consultera les textes édités par Pat Graham et Dany Stevenson « The Black expérience in Manitoba : a collection of memories » (Winnipeg : Winnipeg School Division, n° 1, 1993). On pourra aussi lire avec intérêt l’ouvrage de John Walter Grant Mac Ewan « John Ware’s Country » (Saskatoon : Western Producer Prai-ries Books, 1976).

[14]

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[15]

Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 2Les Noirs

en Nouvelle-France

Le premier noir en Nouvelle France : Mathieu Da Costa

Retour à la table des matières

La présence des Noirs au Canada remonte aux débuts de la coloni-sation française. Mathieu Da Costa, un Mulâtre ou un Noir libre serait venu en Nouvelle-France en 1603 avec l’expédition de Pont Gravé. Plus probablement, il aurait fait partie de l’expédition organisée à l’initiative de Pierre Dugua des Monts, le nouveau titulaire du Mono-pole Royal octroyé par Henri IV II aurait accompagné Samuel de Champlain comme truchement, c’est-à-dire comme interprète. Les explorateurs français avaient l’habitude de laisser des jeunes hommes auprès des populations amérindiennes avec qui ils entraient en contact, pour apprendre la langue et les mœurs de ces communautés. La première référence à la présence de Noirs au Canada est celle du décès d’un « Nègre » à l’hiver 1606 dans l’établissement français de Port-Royal dans la péninsule acadienne.

[16]Nous ne savons pas s’il était libre ou esclave. En 1607 nous avons

des indications sur Mathieu Da Costa. En effet Pierre Dugua des Monts, le titulaire du Monopole Royal, envoie son secrétaire Jean Ral-luau à Amsterdam pour l’aider à récupérer Mathieu Da Costa capturé

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en cours d’un voyage de traite à Tadoussac en 1606 par les Hollan-dais. Mathieu Da Costa travaillait comme interprète et aurait été cap-turé lors de l’arraisonnement d’un navire de Pierre Dugua des Monts par le capitaine hollandais Henry Cornelis commandant le navire le « Lion Blanc » associé à un marchand de Rouen Nicolas de Bauque-mare. Les documents de l’époque identifient Mathieu Da Costa comme un « Naigre », « Neigre » et « Nègre ». En avril, Pierre Dugua des Monts signale dans une lettre à Nicolas de

Mathieu Da Costa arrive durant l’été de 1606en tant que membre de l'expédition Poutrincourt-Champlain.

[17]Bauquemare qu’il serait intéressé à utiliser ses services et ceux de

Mathieu Da Costa en Nouvelle-France. Au mois de mai 1608, Ma-thieu Da Costa signe un contrat, en tant qu’interprète pour 60 écus par année, l’engageant à suivre Bauquemare pendant trois ans. Le contrat devait prendre effet en janvier 1609- Il devait recevoir en attendant, la somme de trois florins par semaine, jusqu’à son engagement en jan-vier 1609- La signature d’un contrat par Mathieu Da Costa nous in-

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dique qu’il était un homme libre. Le montant de 60 écus, soit 180 livres tournoi par année, représente aussi une somme importante pour l’époque. Si au moment de sa capture en 1606 il était déjà interprète, c’est qu’il a dû au moins vivre en Nouvelle-France depuis 1603 ou 1604. Mathieu Da Costa était-il un métis portugais comme son patro-nyme semble l’indiquer ou un Nègre libre. Mathieu Da Costa apparaît au Havre en Normandie en décembre 1609 où Bauquemare l’aurait fait emprisonner. Bauquemare cède alors le contrat de Mathieu Da Costa à Pierre Dugua des Monts. Nous n’avons plus aucune référence de Mathieu Da Costa et ne savons pas s’il était revenu au Québec avec l’expédition de 1610.

Un esclave en Nouvelle-France

Le premier esclave identifié en Nouvelle-France est Olivier Le Jeune, propriété de l’un des frères Kirke ; il aurait été amené à Québec vers 1629- Il aurait été capturé à Madagascar (suivant une version) ou encore en Guinée. Il aurait été vendu à un français, Le Baillif, [18] pour la somme de cinquante écus. Cette somme correspondait, suivant Marcel Trudel, à six mois de salaire d’un artisan, soit 150 livres. En juillet 1632 à la fin de l’occupation anglaise, Le Baillif fait cadeau du jeune esclave à Guillaume Couillard. Le nouveau propriétaire l’envoie à l’école des Jésuites. Le père Le Jeune écrit ainsi : « ... au Canada, j’avais l’autre jour un petit sauvage d’un côté et un petit nègre ou maure de l’autre, auxquels j’apprenais à cognoistre les lettres. » En 1633 il est baptisé sous le nom d’Olivier Lejeune en l’honneur du commis général Olivier Le Tardif et du père Le Jeune. La dernière information sur Olivier Lejeune est l’acte d’inhumation du 10 mai 1654 où il est inscrit comme domestique de Guillaume Couillard.

Avant le XVIIe siècle, le nombre d’esclaves noirs dans la colonie reste négligeable. En effet, ce n’est qu’en 1686 que nous rencontrons un autre noir en Nouvelle-France, un certain La Liberté dont fait men-tion le recensement de l’Acadie par l’intendant Demeule. Le nom La Liberté peut très bien faire référence à un esclave affranchi ou à un Noir libre. La plupart des esclaves de la colonie étaient des amérin-diens.

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À la recherche d’esclaves noirspour le Canada

La question de l’esclavage des Noirs en Nouvelle-France est soule-vée par les autorités coloniales françaises comme un moyen pour dé-velopper la colonie. Le procureur général, François-Madeleine Ruette d’Auteuil écrit en 1688 : « S’il plaisait au Roi, d’accorder la permis-sion d’avoir dans ledit pays des esclaves [19] nègres ou autres comme il lui a plus de l’agréer aux îles de l'Amérique, ce serait le meilleur moyen pour réussir en toute sorte de manufactures... ». Il écrit plus loin que le climat n’est pas une contrainte :

« Que si l’on objecte que les Nègres n’y vivront plus à cause du froid, l’expérience fait voir le contraire puisqu’il y en a eu qui s’y sont parfaitement bien portés pendant plusieurs années et que les Anglais en ont eu grande quantité à la Nou-velle Angleterre et qu’il y eu a un grand nombre en Nouvelle-Hollande ».

À l'époque coloniale, le mot « nègre » désigne un esclave noir. Le nègre est considéré comme une mar-chandise, un bien meuble.

Il signale qu’il y a eu des Noirs au Canada « qui s’y sont parfaite-ment bien portés pendant plusieurs années ». Il précise aussi que pour tenir le Noir au chaud « leur vêtement sera de peau de castor qui, par sa fourrure les empêchera de sentir les incommodités de l'hiver et qui ne coûtera que peu, parce qu'en s’en servant ils l’engraineront ainsi ils l’augmenteront de prix ». Le procureur faisait référence ici au Cas-tor Gras. Les Amérindiens en utilisaient la peau de castor sec comme fourrure l’engraissaient de leurs sueurs. La fourrure devenait très fine

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et valait presque le double du castor sec. L’argumentation du procu-reur était que l’esclave noir pouvait être une bonne affaire puisque son vêtement d’hiver devenait une source de revenu pour le maître.

Le 1er mai 1689 Louis XIV autorise dans une lettre, au gouverneur Brisay de Denonville et à l’intendant [20] Bochart-Champigny l’im-portation d’esclaves noirs au Canada. « Sa Majesté est bien aise de leur dire qu’elle consent que les habitants fassent venir des Nègres comme il proposent... ». La guerre entre la France et l’Angleterre, qui durera de 1689 à 1697 jusqu’à la signature du traité de Ryswick, inter-dit de fait toute importation d’esclaves. On retrouvera ainsi peu de Noirs en Nouvelle-France entre 1689 et 1697. Parmi les quatre noirs dont on a retrouvé les traces, deux ont été capturés sur les Anglais comme Jacques Leber, natif de Guinée. Un autre esclave, Louis âgé de 24 ans, appartient à un marchand, Le Compte Dupré et serait origi-naire de Madagascar. De 1689 à 1713, si l’on retrouve peu d’esclaves africains au Canada, cela tient aux conflits entre la France et l’Angle-terre, mais surtout à l’importance du marché antillais qui accapare le commerce des esclaves. En 1685 un édit de Louis XIV, le Code Noir, transforme la servitude.

Le Code Noir est venu sanctionner l’esclavage dans les Antilles françaises. L’esclave dans la tradition du droit romain est un bien meuble, une chose. Le dispositif mis en place par le Code Noir, sous prétexte d’améliorer la condition servile vise à rendre la servitude ac-ceptable. Le Code Noir légalise et légitime l’horreur de la traite et l’esclavage. L’intendant Randot par une ordonnance en date du 13 avril 1709 légalise l’esclavage en Nouvelle-France :

« Nous, selon le bon plaisir de Sa Majesté, ordonnons que tous les panis... et les Nègres qui sont achetés et qui le seront dans la suite appartiendront en pleine propriété à ceux qui les ont achetés, comme étant leurs esclaves ; faisons défense aux panis et [21] nègres de quitter leurs maîtres, et à qui que ce soit de les débaucher sous peine de cinquante livres d'amendes. »

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Ce texte deviendra la référence de l’esclavage au Canada, il sera invoqué en 1793 par les habitants de Montréal dans la requête présen-tée à la chambre d’Assemblée pour défendre l’esclavage. Un édit du roi publié en décembre 1721 interdit aux enfants mineurs mais éman-cipés de vendre leurs esclaves noirs. Cet édit enregistré au Conseil Supérieur le 19 juin 1748 proclame que : « les Nègres esclaves qui se sauvent des colonies ennemies de l’État aux colonies françaises, et les effets qu’ils y apportent, appartiennent à Sa Majesté seule ».

Il n’y a désormais plus de refuge possible pour les esclaves fuyant les colonies anglaises pour se réfugier au Canada.

La première personne noire connue à avoir vécu au Canada, était un natif de Madagascar qui fut amenée par le commandant britannique David Kirke lors de son invasion de la Nouvelle-France. Il fut vendu par la suite à Olivier Le Tardif, clerc en chef de la colonie française. Quand le Québec revint aux mains des Français en 1632, Le Tar-diff qui avait souvent collaboré avec les Britan-niques, fut obligé de fuir. Il vendit alors son es-clave à un résident de Québec et le garçon fut éduqué dans une école fondée par le père Le Jeune, un Jésuite. On le baptisa plus tard du nom d'Olivier Le Jeune dont le prénom rappelle celui du clerc en chef français et le nom, celui du prêtre jésuite. Olivier Le Jeune mourut le 10 mai

1654.

[22]Le gouverneur La Jonquière déclare le 16 juillet 1750 que « tout

Nègre est esclave, quelque part qu’il se trouve ». Depuis l’arrivée d’Olivier Le Jeune, l’esclavage est devenu au Canada une institution avec ses fondements juridiques.

Mgr de Saint-Vallier, premier évêque de Québec décrète que l’es-clavage est héréditaire. Il est vrai que l’Église est propriétaire d’es-claves. Mgr de Saint-Vallier dans son catéchisme de 1702 proclame la nullité du mariage entre un esclave et une personne libre. Dans la re-

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présentation populaire le noir est devenu le symbole de l’altérité. Il est marqué du sceau de l’infamie dont il ne pourra plus se libérer. Avec le Code Noir et la réglementation juridique, il y a désormais une ligne infranchissable qui sépare le « Blanc » du « Noir ». Avec la mise en place de la réglementation juridique se développe une obsession de la pureté raciale qui condamne toute union interraciale comme souillure

Un encan d’esclaves.

[23]de la matière blanche, transgression de l’ordre naturel. L’esclave noir est considéré comme un bien meuble, associé à un animal domestique.

L’épistolière Marie Elizabeth Begon qualifie « ses nègres » Jupiter et Pierre ainsi que son cheval, de trois « meubles inutiles », dans une lettre datée du 25 décembre 1748. L’esclave noir est devenu une mar-chandise, un bien qui se vend, se revend, se loue. Il peut être offert en garantie de paiement d’une dette et laissé en héritage.

En 1747 « le lieutenant civil et criminel de Québec » est requis de permettre aux futurs acheteurs du Noir Neptune de « prêter serment de procéder en leurs âmes et conscience à “l’estimation du nègre” dont ils dresseront le procès verbal » (in Esclavage français…, p. 114).

Comme toute marchandise, l’esclave noir doit être inspecté et ven-du en bon état. La gazette de Québec du 23 février 1769 annonce la vente d’une « négresse de 25 ans » et un « nègre de 23 ans » qui ont

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belle allure dans leurs habits de livrée. La dépersonnalisation de l’es-clave commence lors de la vente. Il est étampé au feu chaud. On a le cas de l’esclave Jean Pierre 13 ans, qui est vendu à Québec par le né-gociant Jean Corpion en 1755 et dont on précise qu’il est étampé des lettres « C.L. ».

En Nouvelle-France, l’institution de l’esclavage n’a pas eu la même importance qu’aux Antilles ou dans les colonies du Sud des États-Unis. Les esclaves en Nouvelle-France ont été plus souvent des Amérindiens qui coûtaient moins cher que les esclaves noirs. Les pra-tiques par contre sont les mêmes. Durant la guerre de 1745, on capture un couple d’esclaves et leur bébé ; [24] les parents deviennent la pro-priété de l’officier Lacorne St-Luc alors que le bébé est acheté par le marchand Joseph-Jacques Gamelin pour la somme de 500 livres. D’autres esclaves sont achetés sur les marchés de la Louisiane ou de Saint-Domingue.

Dans la relation du maître et de l’esclave, le bon esclave se doit d’être soumis, obéissant, fidèle et pieux et c’est à ses conditions que le maître lui devra de la reconnaissance. En 1755 le commandant Chaus-segros de Léry définit ses « Nègres » comme des serviteurs craintifs mais dévoués et loyaux. Le bon esclave est celui qui accepte la sou-mission, le mauvais sujet est celui qui se rebelle.

Le syndrome Marie Angélique

Les esclaves noirs n’ont jamais accepté la servitude et en effet à la moindre opportunité ils s’enfuyaient. L’histoire des Noirs est aussi celle de la résistance des esclaves. Dans toutes les colonies et déjà sur les navires

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Marie-Joseph Angélique, l'esclave d'un riche marchant de Montréal du nom de De Francheville, marqua, le 11 avril 1734, l'une des épisodes les plus dramatiques de l'époque. Ayant appris qu'elle était pour être vendue, Marie-Joseph mis feu à la maison de son propriétaire dans le but de faci-liter sa fuite. Mais le feu en se propageant finit par détruire 46 édifices dont l'Hôtel-Dieu. On la captura en juin 1734. Elle fut alors torturée, paradée dans les rues de la ville et

enfin pendue.

[25]négriers les esclaves se rebellaient. Dans l’imaginaire des Noirs au Canada, Marie-Joseph Angélique personnifie le refus de la servitude.

Marie-Joseph Angélique, une esclave noire est jugée, trouvée cou-pable, condamnée et exécutée le 21 juin 1734 pour avoir mis le feu à Montréal. Denyse Beaugrand-Champagne a publié en 2004 un ou-vrage « Le procès de Marie-Joseph Angélique » (Montréal, Libre ex-pression, 2004) en analysant à partir des archives judiciaires le procès de Marie-Joseph Angélique accusée, jugée et condamnée à mort sur la base de la déclaration d’un enfant de cinq ans d’avoir mis le feu à Montréal le 10 avril 1734.

Le régime anglais

Lors de la Capitulation de 1760, l’article 47, rédigé par le Gouver-neur Vaudreuil-Cavagnial, stipule que : « les Nègres et panis des deux sexes resteront en leur qualité d’esclaves, en la possesion fes Français et Canadiens à qui ils appartiennent. Il leur sera libre de les garder à leur service dans la colonie ou de les vendre ».

L’esclavage restera en vigueur au Canada jusqu’à son abolition officielle en 1834. En 1799, une requête présentée à la chambre d’As-semblée rappelle le fondement juridique de l’esclavage : l’ordonnance de l’intendant Raudot en 1709 en vigueur au moment de la conquête ; la loi du parlement anglais de 1732 faisant référence au recouvrement des dettes mentionne les esclaves comme des biens que l’on peut sai-

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sir ; une loi de 1790 assure aux sujets de sa majesté qui quitteront [26] les États-Unis le droit d’amener leurs esclaves au Canada et de les vendre douze mois après leur arrivé. On retrouve cependant de moins en moins d’esclaves au Canada à cette époque. Le 6 juillet 1802 on procède à l’Hôtel-Dieu de Québec à l’inhumation de la Noire Marie-Louise-Jeanne « Thomme » qui appartenait ci-devant à feu le négo-ciant Jean Orillat. Le 23 octobre 1812, à l’âge de 88 ans on inhume à Longueuil la Noire Marie-Elisabeth, ancienne esclave des Lemoyne.

L’esclavage disparait peu à peu. Le 28 août 1833, l’esclavage est aboli dans l’Empire britannique avec une période d’apprentissage qui devait durer jusqu’au 1er août 1840 pour les esclaves ruraux. Un des derniers témoins devait être la Noire Catherine Thompson, inhumée à Vaudreuil le 30 juin 1840.

Le traité de Paris de 1763 marque la fin des hostilités entre l’An-gleterre et la France. Dans son article 4, la France cède à l’Angleterre, l’Acadie, le Canada, Terre-Neuve et le Cap-Breton. Les habitants de la Nouvelle-France restent propriétaires de leurs biens et donc de [27] leurs esclaves. Les Anglais sont aussi des esclavagistes et ce n’est pas étonnant dans les ventes d’esclaves de retrouver les noms de proprié-taires anglais. En avril 1785, William Ward vend trois esclaves à William Campbell qui les revend au mois de mai au docteur Charles Blake. Sarah vendue en 1785 par Hugh Mc Adams à Charles Lepal-lieur, devient en 1789 la propriété de James Morrison. Marie Bulkey en 1788 appartient à John Lagord qui la vend à Pierre Joinville. L’es-clave Rose acquise dans un encan en mars 1795 par Lambert St-Omer est vendue au Curé Louis Payet qui la vend en 1796 à Thomas Lee. Que le propriétaire soit anglais ou français ne change rien au statut de l’esclave.

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En novembre 1763 le premier gouverneur anglais de Québec écri-vait à un ami de New York et signalait qu’on ne pouvait compter que sur les esclaves noirs pour le travail domestique. Ce n’est qu’en 1793 qu’une loi du Haut-Canada interdira l’entrée des esclaves dans la pro-vince. L’esclavage, cependant, restera en vigueur au Canada jusqu’à son abolition officielle en 1834.

[28]

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 3Les Noirs

dans les Maritimes

Les loyalistes et leurs esclaves

Retour à la table des matières

Avant l’arrivée des loyalistes anglais au Canada, le nombre d’es-claves noirs était limité. Entre 1776 et 1785, le nombre d’esclaves noirs va augmenter considérablement. On considère que plus de 2000 esclaves auraient été amenés par les loyalistes. James Walker estime le nombre d’esclaves à 300 à peu près pour le Bas-Canada, à 500 pour le Haut-Canada, et à 1200 pour la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick. On retrouve aussi quelques esclaves noirs à l’Île du Prince-Édouard, à Pile du Cap-Breton et à Terre-Neuve. La plupart des esclaves étaient des artisans ou des serviteurs. La majorité des loyalistes disposaient de peu d’esclaves. On retrouve cependant quelques riches loyalistes avec des dotations importantes d’esclaves comme le colonel Matthew Elliot avec ses 60 esclaves à Amherstburg en Ontario ou encore Andrew Barclay avec 57 esclaves près de Shel-burne en Nouvelle-Écosse. [30] Il s’agissait essentiellement d’artisans ou de domestiques qui en cas de besoin pouvaient être vendus ou loués par leurs propriétaires.

La majorité des Noirs venus au Canada étaient cependant des Noirs libres. La grande majorité s’établira dans les Maritimes et plus spécia-lement en Nouvelle-Ecosse, contribuant à la création de la plus an-cienne communauté noire du Canada. L’esclavage existait en Nou-

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velle-Écosse depuis le XVIIe siècle puisqu’on trouve une annonce de vente d’esclaves à Halifax en 1652 soit 4 ans après la fondation de la ville en 1649. À la veille de l’arrivée des loyalistes, il y avait en Nou-velle-Écosse, 106 esclaves noirs pour une population de 3022 habi-tants.

Les loyalistes noirs

L’indépendance des treize colonies anglaises d’Amérique du Nord allait entraîner le départ vers l’Amérique du Nord Britannique des loyalistes anglais. Entre 1776 et 1785 plus de 40 000 loyalistes vont s’établir en Nouvelle-Écosse. Quelque 3 500 loyalistes noirs se sont ainsi retrouvés en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick qui ve-nait d’être créé en 1784. Il s’agissait du plus grand

Les « Black Pioneers »,premiers Noirsdans la Révolution Américaine.

[31]groupe de Noirs libres dans une seule région en Amérique. La plupart des loyalistes noirs s’étaient battus contre les Américains dans les rangs de régiments noirs formés par les Anglais comme le régiment éthiopien ou celui des Pionniers noirs « The Blacks Pionners ». Ils avaient reçu la promesse en s’installant en Nouvelle-Écosse de rece-voir des terres mais ces promesses ne se matérialiseront pas. Les terres reçues ne leur permettaient pas de subvenir à leurs besoins, étaient

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éloignées ou de mauvaises qualités. Beaucoup de loyalistes noirs, ne disposant que de peu de ressources, devront travailler comme ouvriers agricoles sur les terres des loyalistes blancs. Les loyalistes noirs ont aussi créé des centres de peuplement. Dans les Maritimes, Birchtown en Nouvelle-Écosse, deviendra la plus importante et influente commu-nauté de Noirs libres en dehors de l’Afrique. En 1784 Birchtown avait une population de près de 1521 noirs. Dans les Maritimes, des petites communautés noires se constituent à Charlottetown dans l’île du Prince-Édouard ou près de St-John au Nouveau-Brunswick. Ces pe-tites communautés noires seront vite marginalisées, Les loyalistes Noirs privés du droit de vote et de participation à l’Assemblée seront victimes de discrimination.

Richard Pierpoint,un grand héros Noir et

[32]

L’exode vers la Sierra Leone

Beaucoup de loyalistes noirs déçus du traitement reçu en Nouvelle-Écosse décidèrent d’envoyer un des leurs, Thomas Peters, à Londres pour présenter leurs doléances. On leur avait promis des terres et ils se retrouvaient dans une situation proche de l’esclavage, obligés de tra-vailler pour les colons blancs.

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Thomas Peters était un loyaliste noir, ancien sergent des « Pion-niers noirs » qui s’était battu avec les troupes britanniques contre les Américains. Il avait immigré à la Nouvelle-Écosse en 1784 et était devenu le chef des loyalistes Noirs de Digby. Face aux obstacles ren-contrés par les loyalistes Noirs dans la zone de Digby, il essaya avec les siens de s’établir sans plus de succès au Nouveau-Brunswick.

Les loyalistes noirs étaient venus dans les Maritimes attirés par les promesses de recevoir des terres et de devenir des sujets britanniques. Or non seulement les terres reçues étaient de médiocre qualité, mais beaucoup d’entre eux n’ayant pas reçu de terres devaient travailler sur les terres des colons blancs. De plus, les loyalistes Noirs n’avaient ni le droit de vote ni le droit de siéger dans les jurys. Face aux restric-tions imposées par les colons blancs, les loyalistes Noirs continuèrent de protester, d’envoyer des pétitions à l’assemblée locale et à Londres. En 1790, ils envoient Thomas Peters en Angleterre. Peters, après un voyage mouvementé, arrive à Londres. Il rencontre Granville Sharp, abolitionniste anglais, qui le persuade d’aller s’établir au Sierra Leone. En effet, la compagnie de la Sierra Leone administrait un terri-toire, en Afrique de [33] l’Ouest, qu’elle voulait coloniser avec des Noirs libres. Thomas Peters retourna en 1791 en Nouvelle-Écosse en compagnie de l’agent de la compagnie John Clarkson. Ils recrutèrent 1200 loyalistes noirs disposés à partir. Les élites blanches locales s’opposèrent à ce départ massif, qui confirmait les doléances des loya-listes noirs. Mais il y avait surtout pour eux la perte des travailleurs qualifiés dans une colonie faiblement peuplée. En effet, comme ne pouvaient partir ni les esclaves, ni ceux qui étaient endettés, seule l’élite de la communauté quitta les Maritimes. Le 15 janvier 1792, 1200 loyalistes noirs s’embarquaient sur 15 navires dans le port d’Ha-lifax en direction de la Sierra Leone. Ils constituaient près du tiers des loyalistes noirs arrivés en Nouvelle-Écosse en 1783.

Les principaux dirigeants des loyalistes Noirs Thomas Peters, Da-vid Georges, Bastien King, Adam et Catherine Abernathy s’éta-blissent en Sierra Leone. Avec le départ du tiers des loyalistes noirs et de l’élite de la communauté, beaucoup d’églises et d’écoles fermèrent leurs portes. Ceux qui restèrent allaient devoir s’installer près des villes où ils pouvaient trouver du travail sur les fermes des colons blancs, et surtout à Halifax comme ouvriers et domestiques.

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Les Marrons

Il faut signaler l’arrivée aussi d’un autre groupe d’émigrants noir vers la même époque en Nouvelle-Écosse. Il s’agit des marrons de la Jamaïque. Le séjour de la majorité des marrons sera de courte durée en [34] Nouvelle-Écosse, mais leur présence est encore célébrée par les Noirs de la Nouvelle-Écosse. Plus de cinq cents marrons de la Ja-maïque sont arrivés en 1796 à Halifax où ils ont été employés dans les travaux de fortification de la ville. Les marrons de la Jamaïque étaient des esclaves fugitifs qui avaient fui dans les montagnes. Le gouverne-ment colonial après une guerre implacable contre eux avait fini en 1795 par reconnaître leurs droits. En 1796, sous la pression des Blancs de la Jamaïque, plus de cinq cents d’entre eux après avoir abandonné leurs armes seront embarqués à bord de trois navires en direction d’Halifax.

Établis à Preston avec leur organisation militaire ils seront em-ployés aux travaux de consolidation des fortifications de la Citadelle d’Halifax. Peu de temps après, puisque tous les marrons refusant les conditions de vie et les restrictions imposées, partiront pour la Sierra Leone.

Les réfugiés de la guerre de 1812

Pour les esclaves noirs américains, l’Angleterre était considérée comme l’ennemie de l’esclavage. Des milliers de noirs se retrouvèrent ainsi dans le camp britannique lors de la guerre de 1812 contre les États Unis. Après la guerre un grand nombre d’entre eux s’établira en Nouvelle-Écosse. En effet, en 1813 le gouverneur Sherbrooke de la Nouvelle-Écosse parlait des Noirs comme fournissant un travail utile « a large accession of useful labour to the agricultural and the coun-try ». En avril 1814, le vice-amiral anglais Lord [35] Cochrane invi-tait, dans une proclamation, tous les Américains à s’établir comme des sujets libres de sa Majesté dans les possessions anglaises de l’Amé-rique du Nord et des Antilles. Les esclaves fugitifs interpréteront cette proclamation comme une invitation à venir s’établir au Canada. La

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demande de main- d’œuvre était telle dans les Maritimes que les réfu-giés noirs seront dans l’ensemble accueillis favorablement.

Plus de 2000 Noirs s’établirent dans les Maritimes avec des concentrations à Preston, la plaine de Hammond, Lock Lomond près de St-Jean et Halifax où des Noirs fondent Africville près de Halifax en 1815. Africville restera un quartier noir jusqu’à sa destruction au XXe siècle.

[36]À partir de 1815 avec l’afflux d’immigrants écossais et irlandais,

les Noirs ne sont plus les bienvenus en Nouvelle-Ecosse. L’Assem-blée de la Nouvelle-Écosse mettait ainsi fin en 1815 à l’immigration noire qu’elle avait pourtant encouragée en 1812. En 1816 le gouver-neur Dalhousie déclarait que les noirs étaient « slaves by habit and occupation » et que « their idea of freedom is iddleness and they are therefore incapable of industry » (James Walker p. 42). Les Noirs de la Nouvelle-Écosse seront confrontés au dilemme de partir ou d’ac-cepter de vivre comme des parias. Un groupe de 95 personnes par-tirent en 1821 s’établir dans la colonie de Trinidad et Tobago. La plu-part décidèrent cependant de rester et de lutter. Les communautés

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noires de la Nouvelle-Écosse, confrontées à la montée de l’intolérance des populations blanches seront de plus en plus isolées. La vie de ces communautés pendant plus de cent cinquante ans s’organisait autour des églises et des écoles noires devenues des centres de résistance au racisme et à la discrimination.

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 4Le Haut-Canada

Les réfugiés noirs

Retour à la table des matières

Au moment de l’adoption par l’Assemblée du Haut-Canada, de la loi sur l’abolition graduelle de l’esclavage en 1793, plus de cinq cents esclaves vivaient dans le Haut-Canada. La loi était le résultat d’un compromis entre les propriétaires d’esclaves et ceux qui y étaient op-posés. L’esclavage n’avait pas eu la même importance qu’aux États-Unis, car il s’agissait plutôt d’esclavage domestique. La promesse d’indemnisation allait favoriser l’extinction graduelle de l’institution jusqu’à son abolition officielle en 1834.

En 1793 le Congrès américain votait la loi sur les esclaves fugitifs. Cette loi permettait aux propriétaires d’esclaves en fuite de récupérer leurs esclaves dans les États du nord où il n’y avait plus d’esclavage. Des milliers d’esclaves fugitifs, pour échapper à la répression, allaient s’enfuir vers le Canada considéré comme une terre d’asile. En 1829 le gouverneur du Haut-Canada [38] déclare à un groupe de Noirs de Cin-cinnati demandant asile dans le haut Canada : « Tell, the Republicains on your side of the line that we do not know men of their colour. If you come to us, you will be untitled to all the privileges of the rest of the Majesty's subject ». Beaucoup de Noirs se sentant menacés par les restrictions imposées décident d’émigrer au Canada, au Liberia et en Haïti. La majorité, cependant, lors de la convention de Philadelphie de

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1830 opte pour le Canada avec l’appui des Quakers comme Benjamin Lundy, fondateur du journal abolitionniste « The antislavery alpha-bet ».

En effet, il était plus facile d’immigrer au Canada à la fois pour des considérations géographiques, proximité du territoire, que religieuses et linguistiques. En effet, depuis 1780 il existait de petites communau-tés de noirs libres le long de la frontière canado-américaine. Georges Washington se plaignait déjà en 1786 que les Quakers de Philadelphie aidaient les esclaves américains à fuir au Canada.

Le chemin de fer de la liberté

Le terme « underground railroad » est apparu avec le développe-ment des premiers chemins de fer. En fait il s’agissait d’une série de routes, caches, sentiers de forêts, maisons et refuges qui permettaient aux esclaves en fuite de passer au Nord et au Canada. Le mot d’ordre était « Follow the Drinking Gourd » nom donné à la constellation de la Grande Ourse par les esclaves en fuite, c’est-à-dire dire remonter vers le Nord.

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La majorité des réfugiés noirs au Canada venait des états du Mary-land, de la Virginie et du Kentucky. Probablement, les réfugiés du Sud profond, le « Deep South », étaient capturés avant d’arriver au Nord. La plupart des réfugiés noirs étaient cependant libres avant leur arri-vée au Canada. Leurs motivations étaient plus complexes que celles des esclaves. En effet, l’augmentation de l’immigration européenne aux États-Unis allait conduire à l’exclusion des Noirs libres de cer-tains champs d’activités économiques. Les émeutes raciales à Cincin-nati, Detroit, Philadelphie, New York, la destruction d’écoles et d’églises ont poussé des milliers de Noirs à fuir vers le Canada. Des restrictions légales ont été mises en place dans plusieurs états du Nord, par exemple, le paiement d’une taxe de 500$ pour assurer leur bonne conduite. Les Noirs libres ne pouvaient aller dans les écoles ou les universités blanches et ne pouvaient être membres d’un jury. Des milliers de Noirs libres viennent s’installer au Canada dans les vil-lages frontaliers qui leur permettaient de [40] maintenir le contact avec les États-Unis et d’aider les esclaves fugitifs. Benjamin Lundy, lors d’un voyage au Canada en 1832, découvrait plusieurs villages noirs comme Amherstburg avec 300 habitants ou encore Chatam avec plusieurs centaines de Noirs libres. La population noire de l’Ontario était évaluée à 10 000 personnes. Vers 1820 on estimait la population noire à plus de 2 000 personnes à Chatam, 1 000 à Toronto, 1 000 à Hamilton, 1500 à Ste-Catherine, 4 000 à Windsor et plus de 800 à Amherstburg. Les réfugiés noirs ne bénéficiaient, contrairement aux loyalistes noirs, d’aucune assistance gouvernementale.

Josiah Henson et le Underground Railroad.

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« The second fugitive slave act » devient en septembre 1850 une loi après sa signature par le président Fillmore. Cette loi permettait la capture et la remise en esclavage de tout ancien esclave. Avec la si-gnature de la loi, plus de 3000 noirs passent au Canada. Jusqu’à la guerre civile de 1860 des milliers de Noirs vont s’enfuir [41] au Cana-da. La société anti-esclavagiste estimait en 1860 le nombre de Noirs en Ontario à 60 000 environ. Certains chercheurs modernes évaluent la population noire de l’Ontario à cette époque aux alentours de 40 000 personnes.

Dans le Bas-Canada, à la même époque, la population noire est de quelques centaines de personnes d’origine américaine, pour la plupart, et établis surtout à Montréal. En dehors des Noirs américains venus chercher refuge, on ne retrouve que quelques individus en provenance des Antilles comme cet Hilaire dit L’Amour venu d’Haïti en 1787, ou encore Narcine Goudrin de la Nouvelle-Orléans. À Québec, de jeunes adultes noirs fréquentent en 1841, une école pour Noirs seulement. La ville de Montréal continue d’administrer le cimetière des « Nègres » jusqu’en 1820. Si les noirs n’exercent que quelques petits métiers, quelques-uns arrivent à passer la barrière de couleur comme ce Bau-dreau du faubourg Saint-Roch à Québec qui possède une maison d’en-tretien public avec trente employés. Mais il s’agit d’exception, le ra-cisme ambiant tend à maintenir les Noirs comme une main-d’œuvre bon marché reléguée dans des activités de domestiques, cochers, jour-naliers, cuisiniers, travailleurs agricoles, etc.

Jusqu’à la guerre de Sécession les Noirs Américains continuent d’émigrer au Canada où ils trouvent un refuge contre l’esclavage.

La principale organisation d’aide aux réfugiés et fugitifs était constituée par une organisation blanche « The Anti-slavery society of Canada » pour qui l’esclavage était le plus grand péché commis contre l’humanité [42] par la société occidentale. Cette organisation était dirigée par le Dr Michael Willis et Thomas Herring.

Les Noirs américains réfugiés au Canada avaient constitué aussi les réseaux d’aide aux fugitifs extrêmement efficaces. La plus célèbre des activistes noirs reste Harriet Tubman qui avait trouvé refuge à Sainte Catherine en Ontario en 1851. Elle aurait accompagné plus de

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300 esclaves en fuite au Canada au cours de ses voyages clandestins. Josiah Henson aurait de son côté fait passer 118 réfugiés au Canada.

Avec la guerre civile on vit un mouvement de retour. On ne dis-pose pas de chiffres sur ces retours vers les États-Unis, mais l’on sait que tous les hommes noirs de Buxton en état de porter les armes sont partis s’engager comme volontaires dans les armées de l’Union. On sait aussi que les abolitionnistes noirs comme Josiah Henson de Dawn, Thomas Carey de Toronto ont organisé des groupes de volon-taires noirs pour aller se battre contre les Sudistes esclavagistes.

Harriet Tubman

Après la guerre des milliers de noirs sont retournés aux États-Unis. Plusieurs occuperont [43] des postes importants aux États-Unis comme Mifflin Gibbs de Victoria qui deviendra juge dans l’Arkansas ou encore James T. Rapier de Buxton, élu sénateur de l’Alabama.

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Après la guerre de Sécession plusieurs milliers de Noirs réfugiés au Canada retourneront aux États-Unis où ils retrouveront leurs fa-milles et des possibilités économiques plus favorables qu’au Canada.

Presque toute l’élite noire ontarienne quittera le Canada. Parmi ceux qui restent, on peut citer deux cas intéressants, celui de l’homme d’affaires William Hubband élu au conseil municipal de Toronto et qui sera même à un moment le maire suppléant (acting mayor) de To-ronto. Wilson Abbot né libre en Virginie arrive au Canada en 1835. Il sert dans la milice durant la rébellion de 1837, fait fortune dans l’im-mobilier et I siège au conseil municipal de Toronto (Toronto City Council). Il fonde en 1838 le Colored Wesleyan Methodist Church. Un de ses fils, Anderson Abott, après avoir étudié la médecine à l’Université de Toronto serait le premier noir à pratiquer la médecine d’abord comme volontaire dans les armées de l’Union et après à Cha-tam en Ontario. En 1874 il est le coroner de Kent County. Il est aussi le président d’un institut noir le « Chatam’s Wilberforce Educational Institute ».

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 5Les Noirs

dans l’Ouest canadien

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PARMI LES AVENTURIERS ENGAGÉS DANS LE COM-MERCE DE la traite des fourrures avec les amérindiens on retrouve des Noirs comme Jean-Baptiste Point-du-Sable né à Saint-Domingue (Haïti) fondateur d’un poste de traite vers 1779 qui deviendra Chica-go, ou encore Pierre Bouga, Nègre libre marié à une Amérindienne de la nation des Ojibways qui travaillera comme interprète et négociant en chef de la Compagnie du Nord-Ouest sur la rivière rouge au Mani-toba. Le plus célèbre négociant en fourrure reste Sir James Douglas. Il était le fils d’un riche planteur anglais de la Jamaïque et d’une esclave noire. Il arrive dans le Bas-Canada vers 1820 et entre au service de la Compagnie du Nord-Ouest. Il est promu vers 1845 agent principal de la Compagnie de la Baie d’Hudson vers 1845 à l’île de Vancouver. Il devient en 1851 le premier gouverneur de l’île de Vancouver. En 1858, il est le gouverneur de la Colombie-Britannique. Il sera anobli en 1866 par la reine Victoria, et décède en 1877 à Victoria.

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[46]Vers 1858, le gouverneur James Douglas facilite l’immigration

d’un groupe de près de 800 noirs américains venus de Californie. Ils étaient libres, mais la reine, en application de lois raciales oppressives, les pousse à venir s’installer au Canada. La plupart restent à Victoria à la suite du chef du groupe Mifflin Gibbs. Les autres s’installent comme fermiers à Saltspring Island.

[47]En 1860, la première force de police est créée à Victoria et il s’agit

d’une milice noire qui recrute des membres parmi les nouveaux arri-vants « The pionners Riffles ».

Dans les prairies, entre 1880 et 1910, quelques centaines de noirs d’installent surtout comme fermiers. Vers 1909 plus de 200 fermiers noirs quittent l’Oklahoma pour s’établir dans le district Eldon de la [48] Saskatchewan.

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En 1910 un autre groupe de 300 fermiers noirs de l’Oklahoma vont aller dans la vallée de l’Amber près d’Edmonton en Alberta.

Le Noir le plus célèbre de la Saskatchewan sera le Dr Alfred Shadd qui travaillera comme médecin dans la province.

Le noir le plus fameux de l’Alberta est John Ware, le légendaire « Nigger John » cowboy et dresseur de chevaux célèbre en Alberta depuis son arrivée en 1882 jusqu’à sa mort survenue en 1905.

Jean Baptiste Pointe du Sable (1745-1818). Du Sable disait-on, est né homme libre à St-Marc, Saint-Dominique en Haïti. Il était le fis d'un marin français et d'une mère africaine devenue esclave. Son père l'amena en France où il reçut son éducation. Dans le début des années 1770, du Sable remonte le Missis-sippi jusque dans la région de Chicago. Là, il établit un comptoir commercial sur la rive nord de l'embou-chure de la rivière Chicago. Son commerce devint prospère et fut à l'origine de la colonie permanente de Chicago. Son comptoir commercial était le poste de ravitaillement principal pour les trappeurs, les mar-

chands, les coureurs des bois et les autochtones. Du Sable fit plusieurs voyages au Canada pour acquérir des fourrures et on raconte même qu'il était très étroitement associé aux Français de la Nouvelle-France.

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Chapitre 6Les communautés noires

canadiennes de 1860 à 1960

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Pendant tout le XIXe siècle, les communautés noires vivent re-pliées sur elles-mêmes et sont soumises à des traitements discrimina-toires, confinés aux travaux non qualifiés. Même dans les emplois de porteurs dans les chemins de fer, ils ne pourront accéder que vers les années 1950 aux postes les plus élevés. Les jeunes Noirs talentueux continueront à émigrer vers les Etats-Unis. Peu d’immigrants noirs sont arrivés au Canada durant cette période. En effet, l’Acte d’immi-gration de 1910 limitait l’arrivée d’immigrants de « certaines races ». En 1947 Makensie King déclarait encore que « the people of Canada do not wish to make a fundamental alteration of the character of our population ».

La loi de 1953 autorisait encore le gouvernement canadien a inter-dire l’entrée au pays d’immigrants non assimilables. Les communau-tés noires cependant en butte aux vexations, au racisme n’ont cessé de lutter pour s’intégrer à la société canadienne qui pourtant [50] inté-grait les immigrants européens venus massivement au Canada durant la même période.

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La croissance de la population noire canadienne reste limitée. Elle ne dépassera pas les 50 000 personnes dans les années 1950. Ces com-munautés séparées deviennent ignorées pendant plus de cent ans pour la majorité des Canadiens. De ces Canadiens oubliés pour reprendre le titre de l’ouvrage de l’historien Paul F. Brown on peut retracer quelques Noirs comme William Hall (1827- 1904) qui fut le premier Canadien décoré de la croix Victoria. En 1916 en pleine guerre mondiale, les Afrocanadiens, surtout de la Nouvelle-Ecosse et de l’Ontario, entrent dans [51] l’armée. L’armée canadienne refuse de les intégrer et crée un bataillon séparé, le bataillon n° 2 de la construction. Mais ce n’est qu’au cours de la Seconde Guerre mon-diale que les soldats noirs seront intégrés dans l’armée canadienne.

Au début du XXe siècle, Montréal voit se développer autour de la rue Saint-Antoine un quartier noir près du siège social de l’administra-tion centrale du Canadien National. Dans la métropole du Canada, les porteurs noirs du syndicat de « La Fraternité des garçons de voitures-lits » jouent un rôle important dans la petite communauté noire. Du-rant la Première Guerre mondiale, des mineurs jamaïcains sont recru-

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tés pour travailler dans les mines de charbon de la Nouvelle-Écosse. Durant la Seconde Guerre mondiale, les Antillais commencent à arri-ver au Canada.

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Une brève histoire des communautés noiresau Canada

Chapitre 7L’immigration noire

contemporaine

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La majorité de la population noire du Canada est issue de l’immi-gration récente. Cette population n’est pas plus homogène que les po-pulations d’origine européenne. Elle est diversifiée sur le plan linguis-tique (anglais, français, créole, swahili, somali, etc.), religieux, (catho-lique, protestant, musulman, religions animistes, etc.) ou encore éco-nomique.

Entre 1950 et 1965, la population noire atteignait le chiffre de 40 000 personnes venant principalement des West Indies. Depuis 1962 et plus particulièrement 1966 avec les changements des lois sur l’immi-gration, environ 10 000 personnes définies comme noires arrivent chaque année d’Haïti, des Antilles Anglaises et d’Afrique. En effet, jusqu’à la fin des années 1950, les lois d’immigration étaient discrimi-natoires. Seules des formules comme le « domestic scheme » permet-taient à des immigrantes noires des Antilles de venir travailler au Ca-nada comme employée domestique. Des étudiants et des profession-nels qualifiés ont aussi été [54] admis durant cette période. À partir de 1966, le Canada devient une terre de choix pour les immigrants an-tillais. La présence haïtienne au Québec, quelques dizaines d’indivi-dus vers 1950, devenait de plus en plus importante avec l’arrivée de professionnels haïtiens. C’est à partir de 1968 que les Haïtiens com-

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mencent à arriver massivement au Canada. Ils forment aujourd’hui une population de près de 150 000 personnes concentrées essentielle-ment à Montréal mais avec un noyau important dans la région de To-ronto et Hull Ottawa. Joseph Hensiah estimait la population noire ca-nadienne à 662 210 personnes en 2001. En effet, à l’exception de la communauté noire de Halifax, la majorité de la population noire était arrivée au pays après 1981.

Aujourd’hui, la plupart des Noirs vivent dans les grandes villes canadiennes surtout Toronto (46,81%) Montréal (21%). Les estima-tions de Statistique Canada suggèrent que vers 2017, la moitié de la [55] population des grandes villes comme Toronto, Montréal ou Van-couver sera constituée de minorités visibles. Ces minorités devien-dront, à partir de 2017, la composante majoritaire de la population des grandes villes.

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Table des matières

Introduction [5]

Chapitre 1. Bibliographie sélective sur l'histoire des Noirs au Canada [9]

Chapitre 2. Les Noirs en Nouvelle-France [15]Chapitre 3. Les Noirs dans les Maritimes [29]Chapitre 4. Le Haut-Canada [37]Chapitre 5. Les Noirs dans l'Ouest canadien [45]Chapitre 6. Les communautés noires canadiennes de 1860 à

1960 [49]Chapitre 7. L’immigration noire contemporaine [53]

Fin du texte