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36 | STANCE BOAT TRIP Moe apporte tout son style au waveriding sur une droite exceptionnelle.

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36 | STANCE Moe apporte tout son style au waveriding sur une droite exceptionnelle. STANCE | 37 Photo: Jody Mac Donald Texte : Gavin Mac Clurg Josh Mulcoy, excellent surfer, donc excellent waverider en kite. 38 | STANCE STANCE | 39 BOAT TRIP 40 | STANCE STANCE | 41 trip. Heureusement, Moe et Josh étaient en pleine forme et prêts à partir au carton. Le chef a préparé un repas exquis pour remonter le moral des troupes et les préparer aux conditions des jours à venir. 42 | STANCE

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Moe apporte tout son style au waveriding sur une droite exceptionnelle.

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Une expédition dans l’inconnu à bord du Best OdysséeJe suis sur l’eau de façon quasi permanente, et ce depuis 1999. Ça fait déjà presque 10 ans que j’ai passé complètement investit dans cette singulière poursuite de l’aventure. A la voile, j’ai traversé, parfois plusieurs fois, trois océans, des douzaines de mers, vogué autour du Cap Horn et bien au-delà. Des sentiers battus jusqu’à l’inconnu total difficilement imaginable. En 2006, nous avons pris notre envol depuis l’Italie sur « Discovery », le bien nommé catamaran Lagoon 570. Nous sommes partis jusqu’en 2011 au minimum, en quête des plus belles et plus secrètes destinations de kite que la planète ait à nous offrir, des destinations vierges, que peu de personnes ont vu ou verront.

Photo: Jody Mac DonaldTexte : Gavin Mac Clurg

Josh Mulcoy, excellent surfer, donc excellent waverider en kite.

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urant deux semaines en juin, nous avons été rejoints par des légendes du waveriding, Mauricio Abreu, Moehau Goold, Josh Mulcoy et Clinton Bolton. John Bilderback et sa femme Alexis étaient de la partie pour shooter

et filmer, de même que notre photographe à plein temps Jody MacDonald. Quelques amis aussi sont venus partager l’aventure, Scott Wisenbaker et Chris Smith. Derniers chanceux, notre équipage bien sur composé du capitaine (moi-même), et des chefs, Hannah Grant et Lars Williams, que nous avons débauché cette année au deuxième restaurant le mieux noté du monde, le « The Fat Duck ».Notre mission était simple, trouver des vagues (plus c’est gros mieux c’est), et du vent( plus il y en a, plus c’est joyeux).

Si vous me permettez de prendre quelques raccourcis dans mon récit, laissez- moi tuer le suspense en vous disant qu’on a scoré du gros durant notre mission. Grâce à mon expérience, et ça fait un moment que je ne fais que ça, on se débrouille pas mal pour trouver des swell consistants, je ne parle pas la de petits beach breaks clapoteux, mais bien sur de gros tubes bien creux qui enroulent pour toujours le reef, avec un line up venté à souhait pour permettre de dropper lesdites vagues dans les meilleures conditions, et croyez-moi, ce n’est pas une tâche facile. Beaucoup d’éléments entrent

en jeu, et même si tout est réuni, tu peux te faire complètement ramasser. Rien est gagné d’avance.Tout commence avec de solides prévisions météo. A peine dix jours avant que tout le monde ne rejoigne le Discovery, les supposés fiables alizés qui soufflent d’habitude de l’est étaient complètement inexistants. Je parle ici du calme plat, le vrai. Mais une grosse cellule de haute pression au nord, et une magnifique dépression bien creuse à notre sud semblaient nous projeter directement dans ce que les météorologues appellent « the squash zone ». Zone que d’ailleurs ces mêmes personnes déconseillent fortement à tous les navigateurs. Mais nous sommes dans une expédition de kite. Nous vivons pour ces fameuses « squash zones » !

Je peux toutefois maintenir un semblant de suspense quant à notre destination, qui malheureusement ne pourra être divulguée. Appelons là Polynésie. Plus précisément Polynésie Française, mais c’est une surface approximativement grande comme l’Europe entière, cette dernière info ne vous en dit donc pas énormément plus qu’au début. Mais c’est comme ça. En 14 jours, nous avons surfé et kité sur les vagues les plus hallucinantes que j’ai jamais vues. En général, nous les avions pour nous tous seuls, mais on doit reconnaître qu’à quelques reprises nous avons été rejoints par une

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poignée de locaux, majoritairement de jeunes enfants. Ces gosses rident avec tout ce qui leur tombe sous la main, et ils déchirent complètement, leur niveau est hallucinant. A chaque spot sur lequel nous nous arrêtions, ils venaient vers nous à la rame avec de grands sourires, et serraient la main à tout le monde sans exception. Nous n’avons jamais ressenti la moindre expression de localisme, même lorsque nos caméras étaient de sortie. Je dois admettre que je ne suis pas un vrai surfer, mais je sais que les étrangers sont rarement aussi bien traités sur des spots world class. Ce que nous voulons pour rien au monde, est donc de dévoiler leur secret.

Les point break Polynésiens sont tout sauf amicaux. Nous avons tous vu ces images de Teahupoo et le carnage que ça peut engendrer. La Polynésie est bénie par les vagues, mais les fonds sur lesquels elles déroulent sont très peu profonds et excessivement acérés et découpés. N’espérer même pas venir ici si vous n’êtes pas complètement sur de ce que vous avez à faire. Nous avions 4 personnes qui avaient beaucoup d’expérience, nous en avons perdu 2 suite à de malencontreuses rencontres avec le reef, et ce dès le deuxième jour de l’expédition. Nous avons quitté une île avant la fin de la journée et navigué jusqu’à la passe d’une autre (désolé, vous n’aurez vraiment aucun nom) que nous avons franchie avec comme témoin le lever de soleil tropical qui commençait à éclairer les bleus et les violets de l’océan Pacifique. Ces « îles » sont en fait un peu plus qu’un vaste lagon encerclé par une barrière de corail parsemé de temps à autres de micro-îles et de petits motus habillés de quelques cocotiers et de sable rose et blanc. Dans certain cas, des passes navigables permettent au trafic maritime d’entrer et de sortir du lagon, et si tout se passe bien, c’est dans le coin que l’on devrait trouver les vagues.

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on boulot en tant que capitaine est avant tout d’assurer la sécurité de chacun. Imaginez ma surprise quand, à peine rentré dans la passe juste derrière un magnifique voilier, et loin d’être arrivé, Mulcoy se jette à l’eau par-dessus

bord avec son surf, suivi de près par Goold, Bolton et Abreu. Ils étaient tous dans un état second, comme en transe. Je leur gueulais dessus « qu’est ce que vous branlez ! Ça va pas la tête ! », puis je levais les yeux pour voir Mulcoy déjà surplombé d’un tube massif en gauche, une grimace sur le visage, il finit son ride juste au pied du bateau. Il n’y avait personne d’autre à l’eau. Nous avions cette place pour nous seuls.

Les flashs commençaient à crépiter et l’atmosphère devenait magique. Et c’était juste notre premier stop. Une des meilleures vagues que j’ai jamais vue et on commençait à peine. Malheureusement pour Abreu et Bolton, la partie fut de courte durée. D’abord Bolton qui a été un peu trop intime avec le corail, a littéralement rebondi par-dessus le reef, se rayant une grande partie du ventre et du dos. Un pro out. Ensuite Mauricio en a pris une sur la gueule et a du être secouru par Josh et Moe à cause d’une grosse entaille à la tête. Dès qu’ils l’eurent ramené à bord, nous l’avons allongé au sol pour stopper l’hémorragie et levé l’ancre en direction d’un endroit où nous espérions trouver une clinique digne de ce nom. Inutile de dire que le choc fut assez violent car il nous demanda une bonne vingtaine de fois ce qui s’était passé et comment il était sorti de l’eau. Deux pros out.La petite ville avait une clinique, et en un éclair, Clinton et Mauricio étaient sur pied, recousus, et relâchés après que le corps médical leur ait notifié, bien sur, de ne pas se remettre à l’eau avant la fin du

trip. Heureusement, Moe et Josh étaient en pleine forme et prêts à partir au carton. Le chef a préparé un repas exquis pour remonter le moral des troupes et les préparer aux conditions des jours à venir.

Troisième jour. Nous optons pour aller explorer le lagon intérieur, une vaste étendue d’eau cristalline brillante et peu profonde qui a la particularité de couvrir toutes les nuances de bleu qui existent sur terre. Bleu ciel, bleu turquoise, bleu pastel, bleu marine, pour ne citer que les standards. Du bleu de toutes sortes, entouré de bleu, surplombé de bleu. Nous nous sommes glissés derrière le reef et nous avons pu décoller nos ailes à proximité d’une langue de sable sur un petit îlot. L’ensemble est bien en dessus de mes talents descriptifs littéraires, je ne perdrais donc pas mon temps à commenter quelque chose qui sera quoi qu’il arrive retranscrit en dessous de la réalité. Le rôle de l’œil est de capturer la lumière et les couleurs pour les traduire en messages envoyés en tant qu’informations à notre cerveau de façon à pouvoir les catégoriser et les ranger correctement, le tout ayant comme finalité de se comporter de manière civilisée. Je ne peux pas parler du cerveau des autres, mais le mien a expérimenté je pense une sorte de court circuit. Les couleurs, la distance, et les formes semblaient étrangères à ma compréhension. Peut-être que cet endroit n’existait pas pour de bon. Peu importe ce problème de perception, il y a Moe qui envoie de gros air par-dessus la langue de sable dans 30cm de flotte qu’on ne peut d’ailleurs même pas voir tant elle est translucide. De son côté Scott balance de gros kiteloops, magie des couleurs entre sa Naish orange et les cocotiers verts profond. Ok, on va dire que finalement tout est réel, peut-être que le chef m’a glissé un bout d’acide dans la bouffe…

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lus tard dans la journée, nous avons navigué à travers le lagon jusqu’à une petite île de 12 miles de long dont la forme ressemble à celle d’une petite banane recouverte de palmiers. Encore un spot qui n’a jamais été ride auparavant. Nous avons foulé des douzaines et des douzaines de

terrains de jeu vierges depuis le début de l’expédition en 2006, mais cet endroit se glisse facilement dans le top ten. Nous avons ancré Discovery dans 3 mètres d’eau plus clair qu’une piscine. Le vent restait stable et puissant et malgré cela le plan d’eau était plat comme une patinoire, et ce à perte de vue. Scott se cale une petite session au coucher du soleil pendant que le reste du gang visitait l’élevage de perle noire. La visite comprenait la photo d’un requin tigre de 5 mètres qui a été attrapé juste à l’endroit où nous ridons. Content de savoir ça une fois que les ailes sont rangées.

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À ce moment du trip, les jours commençaient à devenir assez vague. Souvenirs sur souvenirs, la frontière entre réalité et imaginaire devient floue. Nous ne savons plus vraiment ou nous en sommes. Un jour nous sommes sur une droite, le jour suivant après une courte navigation nous sommes sur une gauche, en kite, puis en surf. Le vent ne lâchait pas, un vrai miracle, 24 heures sur 24, 25 nœuds réguliers. Parfois une journée écrase les précédentes, puis est à son tour balayée par une encore plus magique. Comment c’est possible encore ? Et encore ? Mais quel jour sommes-nous ? Juste pour m’assurer de ne pas être le seul dans cet état, nous jouons à « devinez quel jour de la semaine nous sommes », et pas une seule personne n’a eu la bonne réponse. Rassurant. On attrape des dorades, aileron jaune, et des bonites. Lars les découpe avec expérience à l’aide de ses lames japonaises, et quelques instants après nous sommes envahis de toutes sortes de sashimis et de sushi, accompagnés de sauces maison.

Josh et son aisance naturelle dans les vagues. Harmonie...

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t il y a nos pros. Chacun est un personnage unique, comme si le kite n’attirait que des spécimens hors norme. Leur énergie positive

et leur humilité est contagieuse et s’attrape encore plus facilement qu’un rhume. On ne peut rien y faire, à part être complètement impressionné, et c’est à plusieurs reprises qu’ils nous ont laissé sans voix, à la fois à l’eau et hors de l’eau. Ce sont juste des gars qui adorent rider plus que tout au monde, et qui ont toutes les caractéristiques qui rendent les amitiés solides, des personnalités qui sont ni plus ni moins que des trésors. Ils travaillent dur, ils rident dur, et ils apprécient et vivent leur vie d’une façon qui pénètre leur voisinage proche. Leur passion et leur énergie, pour le kite, mais aussi pour la vie est contagieuse. Josh Mulcoy a ridé des vagues durant sa vie entière, de la Norvège à l’Ecosse, de l’Indonésie à la Californie. Moe est un habitué de Teahupoo, et c’est une légende dans le coin. Durant ces deux semaines, nous avons pu les admirer, mais nous avons pris et appris le meilleur d’eux.

Le soir, on se raconte des histoires et on se marre, puis on se met à rêver aux jours prochains, puis soudain nous nous retrouvons sur une autre île, à poireauter sur un aéroport inconnu, et tout se finit brutalement.La Best Odyssey continue sa route. Une autre aventure à son actif. Encore plus de vague et de vent se profilent à l’horizon, et que c’est excitant d’anticiper le futur. Notre expédition en Polynésie est une aventure qu’aucun de nous n’oubliera jamais.

La Best Odyssey est une expédition kite qui dure 5 ans, menée par Offshore Odyssey. Pour plus de renseignements et pour voir les meilleurs moments vidéo du trip, rendez-vous sur :www.ffshoreodysseys.com

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