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ANNEE N"50 JUILLET-SEPTEMBRE 1958
•
des ARRÊTSDE LA
CHAMBRE DE RÉVISION MUSULMANE
DE LA COUR D'APPEL DALGER
ARRETS de 1958 : 58 à 115
MOIS DE MAI - JUIN - JUILLET
', ^ET OCTOBRE 1958 , CtN
V '
;
publié par la
REVUE ALGÉRIENNE
REVUE DE LA FACULTÉ DE DROIT D'ALGER
LIBRAIRIE FERRARIS I
43, Rue Michelet, 43
ALGER
Publié avec le concours du Centre National de lo Recherche Scientifique
. .
^~
Editions du Centre National
la Recherche Scientifique
I. — PUBLICATIONS PERIODIQUES
LE BULLETIN SIGNALETIQUE
Le Centrede^
Documentation du C.N.R.S. publie un BULLETIN SIGNALE-
TIQUE dans lequel sont signalés, par de courts extraits classés par matières,
tous les travaux scientifiques, techniques et philosophiques,publiés- dans le monde
entier. *
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Philosophie - Sciences humaines ..;... 4.000 fr. 5.000^ fr.
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ANNUAIRE DE LEGISLATION ETRANGERE
Publié par le Centre Français de Droit Comparé, contenant des notices sur
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ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
Publié par le groupe français des Anciens Auditeurs de l'Académie de Droit
de La Haye, sous la direction de Madame Paul BASTID, Professeur à la Faculté
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La REVUE ALGÉRIENNE
Tunisienne et Marocaine
publiée par la Faculté de Droit d'Alger
comporte trois séries distinctes :
1°
La REVUE ALGERIENNE, Tunisienne et Marocaine de
Législation et de Jurisprudence proprement dite, est consacrée essentielle
ment aux questions juridiques concernant l'Algérie, le Maroc et la Tunisie.
Une première partie « Doctrine » contient surtout des études juri
diques ou sociologiques sur l'Afrique du Nord.
La deuxième partie « Jurisprudence » publie les décisions impor
tantes des Tribunaux de l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif,
en Algérie, au Maroc et en Tunisie.
La troisième partie « Législation » publie eu signale tous les textes
de lois, décrets, arrêtés, etc.. intéressant l'Algérie, le Maroc ou la Tunisie.
Cette présentation est complétée par des bibliographies et comptes
rendus d'ouvrages, et, chaque année, par une table analytique et chrono
logique des matières.
2°
Le BULLETIN DES ARRETS de la Chambre.de Révision
musulmane de la Cour d'Appel d'Alger publie in-extenso les arrêts rendus
par cette juridiction.
3°
Les ANNALES juridiques, politiques, économiques et sociales
publient des articles, études, notes ou documents d'intérêt aussi bien
nord-africain que métropolitain ou international, et portant sur les diverses
disciplines juridiques, politiques, économiques et sociales.
Sous le titre de BIBLIOTHEQUE de la Faculté de Droit d'Alger,
il estégalement'
publié, par ailleurs, une collection scientifique composée
d'ouvrages écrits par des professeurs ou des docteurs de la Faculté.
Prière d'adresser la correspondance :
— concernant la rédaction et la direction, les demandes d'abonnement, les ren
seignements sur les publications : à la Faculté de Droit, Université d'Alger, 2, rue
Michelet, Alger.
concernant le règlement et le service des abonnements et des ventes : à la
Librairie Ferraris, 43, rue Michelet, Alger - Compte chèques postauxn°
1 9.90, Alger.
BULLETIN D'ABONNEMENT
à adresser à M. le directeur de la Revue Algérienne, Faculté de Droit
d'Alger 2, me Michelet ALGER
M..
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déclare s'abonner pour un an à la Revue de la Faculté de Droit d'Alger.
Série : « Revue Algérienne, Tunisienne et Marocaine de légis
lation et de Jurisprudence ».
(1) Série : « Bulletin des Arrêts de la Chambre de Révision musul
mane ».
Série : « Annales juridiques, politiques, économiques et sociales ».
et verse le montant de l'abonnement, soit
par (1) mandat, chèque, virement, au compte de la Librairie Ferraris,
43, rue Michelet, Alger Compte chèque postal 19-90, Alger.
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REVUE ALGERIENNE
Tunisienne et Marocaine
de Législation
et de Jurisprudence
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Union Française 2.160 fr
Etranger 2.880 fr
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BULLETIN DES ARRETS
de la Chambre de Révision
Musulmane de la Cour
d'Appel d'Alger
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Numéro isolé . . 660 fr
Les ANNALES
sont publiées,
sans périodicité régulière,
par fascicules dont le prix
sera fixé au numéro
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Revue Alg. et Bulletin des Arrêts
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postaux 19-90, Alger, à la Librairie Ferraris, 43, rue, Michelet, Alger
BIBLIOTHÈQUE DE LA FACULTÉ DE DROIT
ET DES SCIENCES ÉCONOMIQUES
DE L'UNIVERSITÉ D'ALGER
Volume I Frédéric PELTIER, Professeur honoraire à la Faculté de
Droit d'Alger, Œuvres diverses (El-Boukhari, livres de l'ensemen
cement el de la Mausaqat La co-juration purgatoire Souvenirs
de voyage) (Ed. La Maison des Livres, Alger, 1949).
Volume II KlTAB ET-TANBIH (ouLivre'
de l'Admonition) d'Ech-
CHIRAZIF"
Partie : Le Rituel Traduit par G.-H. BOUSQUET,Professeur à la Faculté de Droit d'Alger (Ed. La Maison des
Livres, Alger, 1949).
Volume III P.-E. VlARD, ancien Doyen de la Faculté de Droit
d'Alger, Député, Les caractères politiques et le régime législatif dé
l'Algérie (Ed. La Maison des Livres, Alger et Lib. Recueil
Sirey, Paris, 1949).
Volume IV J. SAINT-GERMES, Professeur à la Faculté de Droit d'Al
ger, Economie Algérienne (Ed. La Maison des Livres, Alger, 1950 ;nouv. édit., 1955, même éditeur).
Volume V M.H. Fabre, Professeur à la Faculté de Droit d'Alger,Théorie des démocraties populaires (Ed. Pédone, Paris, 1950).
Volume VI L. MURRACIOLE, Avocat à la Cour d'Appel d'Alger,L'émigration algérienne Aspects économiques, sociaux et juridi
ques (Ed. Ferraris, Alger, 1950).
Volume VII G.H. BOUSQUET, Professeur à la Faculté de Droit d'Al
ger, Justice française et coutumes habiles (En vente chez l'auteur
à la Faculté de Droit, 1950).
Volume VIII F PEYRONNET, Docteur en Droit, Le vignoble nord-
africain (J. Peyronnet, édit., Paris, 1950).
Volume IX P GuiHO, Chargé de cours à la Faculté de Droit d'Alger,
Le recours contre l'auteur d'un dommage donnant droit à une
indemnité d'assurance (Domat-Montchrestien, édit., Paris, 1950).
Volume X M. PALLASSE, ancien chargé de cours à la Faculté de Droit
d'Alger, Orient et Occident, A propos du colonat romain au bas-
empire (Bosc, édit., Lyon, 1950).
Volume XI KlTAB ET-TANBIH (ou Livre de l'admonition) ,
3""
partie :
Statut personnel. Traduit par G.-H. BOUSQUET, Professeur à la
Faculté de Droit d'Alger (Ed. La Maison des Livres, Alger,
1951).
Volume XII P. FONTANEAU, Chargé de cours à la Faculté de Droit
d'Alger,L'
éleclrification de l'Algérie (Lib. Rec. Sirey, Paris, 1951)
Volume XIII KlTAB ET-TANBIH,2"'°
partie : Opérations sur patri
moine, traduit par G.-H. BOUSQUET, Professeur à la Faculté de
Droit d'Alger (Ed. La Maison des Livres, Alger, 1952).
BIBLIOTHEQUE DE LA FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES
ECONOMIQUES DE L'UNIVERSITE D'ALGER (suite)
Volume XIV Y LAYE, Docteur en Droit, Le Port d'Alger (Ed.Louis
Rives, Alger, 1951 ;2°"
édit, Collections Pratiques deDocumen
tation et Enquêtes Algériennes, Alger, 1957).
Volume XV KlTAB ET-TANBIH (ou Livre de l'Admonition), 4
partie : Droit pénal et public, index. Traduitpar G.-H. BOUSQUET,
Professeur à la Faculté de Droit d'Alger (Ed. La Maison des
Livres, Alger, 1952).
Volume XVI F. DERRIDA, Chargé de cours à la Faculté de_
Uroit
d'
Alger, L'obligation d'entretien (Lib. Dalloz, Pans, 1952).^
Volume XVII GHAZALI, Le Livre du Mariage, traduction annotée
par L. BERCHER et G-H. BOUSQUET, Professeur à la Faculté
de Droit d'Alger (A. Maisonneuve, édit., Paris, 1953),
Volume XVIII M. LAURIOL, Docteur en Droit, La s,ubrogation réelle
(Lib. Rec. Sirey, Paris, 1953) (2 volumes).
Volume XIX R.J. DUPUY, Professeur à la Faculté de Droit d'Alger,
Le nouveau panaméricanisme L'évolution du système inter
américain vers le fédéralisme (Edit. Pédone, Paris, 1956).
Volume XX G.-H. BOUSQUET, Professeur à la Faculté de Droit
d'Alger, La morale de l'Islam et son Ethique Sexuelle ( A. Mai
sonneuve, édit. Paris, 1953).
Volume XXI F GALIANI, De la monnaie (1751). Traduit et analysé
par G.-H. BOUSQUET, Professeur à la Faculté de Droit d'Alger,
et J. CRISAFFULLI (Rivière, édit., Paris, 1955).
Volume XXII KHALIL BEN Ish'aq, Abrégé de la loi musulmane
selon le rite de l'Imâm Mâlek. Traduction nouvelle par G.-H.
BOUSQUET, Professeur à la Faculté de Droit d'Alger I Le Rituel
(Edit. Alg. En-Nahdah, Alger, 1956).
Volume XXIII J.-P. BOUÈRE, Docteur en Droit, Le droit de grève
(Sirey, édit., 1958).
Volume XXIV G. SlBAND, Avocat à la Cour d'Appel d'Alger,
Répertoire alphabétique de jurisprudence musulmane1"
série :
1945-1950 (Ferraris, édit., Alger, 1957).
Volume XXV G. SlBAND, Avocat à la Cour d'Appel d'Alger,
Répertoire alphabétique de jurisprudence musulmane
2m"
série :
1950-1955 (Ferraris, édit., Alger, 1957).
Volume XXVI H. ABERKANE, Chargé de cours à la Faculté de
Droit d'Alger, Essai d'une théorie générale de l'obligation propter
rem en droit positif français (Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence, Paris, 1957).
Volume XXVII P FONTANEAU, Professeur agrégé à la Faculté de
Droit d'Alger, Avocat à la Cour. La détaxation des investisse
ments ; Les critères des investissements (Ferraris, édit., Alger, 1957).
Volume XXVIII J. LAMBERT, Professeur à la Faculté de Droit
d'Alger, Aspects de la civilisation à l'âge du fratriarcat Etude
d'histoire juridique el religieuse comparée (Impr. Charry, Alger,
1958).
— 61 —
N° 58
POURVOI. — EXPEDITION DU JUGEMENT NON JOINTE A LA
REQUETE. — IRRECEVABILITE.
Latrèche c. Kader. — T.C. Bougie, 13 juillet 1»56.
ARRET
du 5 Mai 1958
N° 59
I. — MOYEN MANQUANT EN FAIT.
II. — FILIATION. — DROIT MUSULMAN. — FILIATION LEGI
TIME.
En droit musulman, la filiation légitime, lorsque celle-ci est con
testée, résulte de la déclaration faite par le père que l'enfant est
son fils ou sa fille, la reconnaissance de paternité pouvant d'ail
leurs être tacite et résulter de la possession d'état.
III. — MOYEN INFONDE. — DECISION EFFECTIVEMENT FONDEE
SUR UN ENSEMBLE DE PRESOMPTIONS ET NON SUR UN
SEUL FAIT.
IV. — MOTIF SURABONDANT.
Consorts Deham c. Consorts Deham. — T.C. Tiaret, 11 juillet 1956.
ARRET
du 5 Moi 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen pris en sa première branche
Attendu que le jugement attaqué a confirmé une sentence
du Cadi de Trézel qui, statuant sur l'action introduite par Bel-
kheir Fatma, veuve Deham Mohamed et de ses enfants Deham
Abed et Deham Maghnia, contre dame Belkheir Zineb et ses
fils Deham Ahmed et . Baabekeur, « attribué la paternité des
dits Abed et Maghnia au défunt susnommé et a rejeté la con
testation élevée par les défendeurs à l'encontre des; prétentions
des demandeurs concernant la filiation par eux réclamée ;
Attendu qu'il lui est fait grief de n'avoir pas recherché si
Belkheir Fatma était l'épouse légitime du défunt ; Mais at
tendu que les défendeurs n'ayant jamais contesté que feu De
ham Mohamed ait été de son vivant marié avec Belkheir Fat
ma, le moyen, en cette branche manque en fait ;
— 62 —
Sur la deuxième branche
.Attendu qu'il, est reproché aux juges d'appel, d'une part,
(l'avoir considéré qu'une procuration authentique donnée par
Maghnia au de cujus le 20 mai 1946, contenait un aveu de
paternité de la part de Deham Mohamed par rapport à la
susnommée alors qu'un tel aveu même tacite doit être vrai
semblable et porter en soi la certitude que la paternité n'est
pas hors mariage ; d'autre part, d'avoir rejetécomme non per
tinente la demande d'expertise médicale formée subsidiaire-
ment par les appelants alors que la contestation de ces der
niers étant fondée sur la stérilité de Belkheir Fatma, il était
indispensable que celle-ci fût soumise à un examen gynéco
logique ;
Attendu qu'en droit musulman la filiation légitime, lors
qu'elle est contestée, résulte de la déclaration faite par le père
que l'enfant est son fils ou sa fille, la reconnaissance de la
paternité pouvant d'ailleurs même être tacite et résulter de la
possession d'état ; Attendu qu'en la cause le tribunal d'appel
a relevé à bon droit qu'en ce qui concernait Maghnia la pro
curation visée au moyen constituait un aveu de paternité de
la part de Deham Mohamed qui avait expressément accepté
la mission à lui confiée par sa fille ; qu'il en était d'ailleurs
de même de l'acte récognitif du mariage de la susnommée qui
constatait que c< Maghnia bent Mohamed » avait eu son père
pour tuteur matrimonial ;
Attendu que Deham Mohamed étant marié de façon régu
lière.et incontestée avec Belkheir Fatma, cette paternité dont
la vraisemblance n'a, au demeurant, jamais été contestée, n'a
pu consacrer une filiation « hors mariage » ; Attendu, par ail
leurs, que le tribunal qui a relevé que le litige portait uni
quement sur la filiation paternelle, a pu légalement apprécier,en vertu de son pouvoir souverain, que la demande subsi
diaire tendant à voir ordonner un examen médical de Belkheir
Fatma nétait pas pertinente ; d'où il suit que le moyen, en
cette branche, est pareillement infondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est reproché aux juges d'appel d'avoir consi
déré que le seul livret militaire délivré à Deham Abed était:de nature à faire admettre à son égard la possession d'étatd^enfant légitime du de cujus, alors que celle-ci ne pouvait
résulter que d'un, faisceau de faits ; Mais attendu que ce n'est
pas uniquement sur les mentions contenues dans le livret militaire que le Tribunal de Tiaret a fondé son appréciation
quant à cette possession d'état ; Attendu qu'il a encore relevé
notamment qu'il n'était pas contesté que ledit Abed fût lefrère germain de Maghnia et que dans ces conditions la preuvedé la filiation légitime de la susnommée par rapport à DehamMohammed entraînait nécessairement celle de la filiation dufrère ; d'où il suit que c'est bien sur un ensemble de présomptions et non sur un seul fait que le tribunal a décidé àcet égard comme il l'a fait et que dès lors le moyen est pareillement infondé ; ,
— 63 —
Sur le troisième moyen
Attendu qu'il est reproché aux juges d'appel d'avoir retenu
les témoignages recueillis lors de l'enquête ayant précédé le
jugement d'inscription à l'état civil de Deham Abed, tout endéclarant ce jugement inopposable aux contestants et de s'être
ainsi contredits dans les motifs de leur décision de ce chef ;
Mais attendu que les considérants contradictoires visés au
moyen, n'ont été donnés qu'à titre surabondant par le tribunal
qui, ayant employé dans sa motivation de ce chef, l'expression
« Attendu au surplus... » a par là même indiqué qu'il jugeait
suffisamment déterminants les autres éléments de preuve ana
lysés par lui ; d'où il suit que cel moyen est également à re
jeter ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén.).
N° 60
CONCLUSIONS. — DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS. —
EXCEPTION DE PRESCRIPTION. — PARCELLE. — CONTE
NANCE.
Il est indispensable, pour décider un litige, de statuer sur un
moyen invoqué par une partie ei contesté par l'autre. Il en est ainsi
notamment en matière de vente d'une parcelle, à propos d'une ex
ception de prescription.
De même, it doit être répondu à des conclusions portant sur la
contenance de ladite parcelle.
Consorts Zaoui ... Consorts Bahloul. — T.C. Constantine, 26 juil
let TO56.
ARRET
du 6 Moi 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique pris en ses deux branches
Attendu que le jugement infirmatif attaqué a débouté dame
Veuve Zaoui Salah et les consorts,Zaoui ben Salah de l'action
par eux introduite contre Bahloul Ali et Zaoui Mohamed pour
obtenir leur déguerpissement d'une parcelle par eux empiétée
et leur condamnation à des dommages-intérêts en réparation
du préjudice subi ; qu'il lui est fait grief d'avoir ainsi décidé,après avoir cependant reconnu l'existence d'une occupation
des appelants outrepassant les limites précisées dans leur acte
— 64 —
d'acquisition du 25 septembre 1936, sans s'expliquer,dune
part, sur la prescription décennale dont se prévalaient les ap
pelants ; d'autre part, sur les conclusions des intimés tendant
à voir dire qu'une clause de l'acte susrappelé, visant lesvaria
tions de contenance, ne pouvait s'appliquer à un empiétement
commis au-delà des limites du lot vendu ;
Attendu que des qualités et des motifs du jugement attaqué
il résulte que les appelants ayant invoqué la prescription dé
cennale pour justifier leur occupation sur la superficie qui,
d'après l'expert, avait été par eux empiétée, les consorts Zaoui
ben Salah ont conclu à voir dire que la vente ayant porté
uniquement sur la parcelle délimitée à l'acte notarié de 1936,
leurs adversaires ne pouvaient valablement proposer cette ex
ception de prescription ; Attendu que sur ces conclusions de
l'une et l'autre parties, le tribunal d'appel ne s'est expliqué ni
expressément ni implicitement, s'étant borné à déclarer que
l'accord des parties sur la cession de la parcelle occupéeau-
delà des limites de l'acte de 1936 résultait de l'inaction des
cédants de 1930 à 1953, alors que cette inaction ne pouvait être
sanctionnée que par la prescription et qu'il était donc indis
pensable pour décider le litige de statuer sur ce moyen invo
qué par une partie et contesté par l'autre ;
Attendu, par ailleurs, que ledit tribunal a fondé sa décision
non seulement sur le prétendu accord des parties mais sur une
clause de l'acte de 1936, aux termes de laquelle la contenance
de la parcelle vendue étant de 3 hectares, « toute différence
entre Ici désignation de cette terre et sa contenance réelle telle
qu'elle était connue des acquéreurs, devait faire leur perte
ou leur profit » ;
Attendu cependant qu'au sujet de cette clause, répondant
aux Conclusions des appelants qui l'avaient invoquée, les inti
més ont fait valoir qu'elle ne pouvait concerner que le lot
vendu et non le lot voisin ; que par l'effet de la dite clause,la parcelle cédée pouvait indifféremment contenir plus ou
moins de trois hectares, les acquéreurs n'étaient pas pour au
tant autorisés à occuper partie du terrain appartenant à leurs
voisins ; Attendu qu'à cette argumentation les juges d'appelse sont encore abstenus de répondre d'une façon quelconque ;d'où il suit que le moyen est fondé dans ses deux brancheset que le jugement attaqué doit donc être annulé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 61
CONCLUSIONS. DEFAIT DE REPONSE. - DENA TURA I ION
DES TERMES DU DEBAT.
Talel, et a. ,... Miloudi. T.C. Rntnu, 2f, juillet 19S».
— 65 —
ARRET
du 6 Mai 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le moyen unique
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a débouté les
consorts Taleb, Salmi, Daha et Oumelkheir de l'action par eux
introduite contre Miloudi Chérif pour le contraindre à démolir
un mur de c'ôture élevé par lui autour d'un terrain limitro
phe de celui sur lequel étaient édifiées leurs habitations, ter
rain qui, à leurs dires, était grevé d'une servitude de passage
à leur profit ; Qu'il) lui est fait grief d'avoir, en statuant ainsi,dénaturé les termes du débat et violé les formes de procéder,
en ce que, d'une part, il a écarté la demande des appelants
su seul motif qu'ils n'étaient pas enclavés alors que leur ac
tion n'était pas fondée sur un état d'enclave mais seulement
sur l'acquisition par eux de la servitude alléguée par l'effet
d'un usage immémorial ; que, d'autre part, il a laissé sans
réponse les conclusions des dits appelants tendant à voir dire,au principal, que cette servitude de passage avait existé depuis
un temps immémorial et subsidiairement qu'il convenait d'or
donner avant dire droit une mesure d'instruction pour établir
ce fait ;
Attendu que des qualités et des motifs du jugement attaqué,
il appert que la demande des consorts Taleb, Salmi, Daha et
Oumelkheir tendait uniquement aux fins indiquées au moyen ;
Attendu qu'en fondant sa décision uniquement sur le fait qu'il
résultait d'une expertise préalable que les demandeurs n'étaient
pas enclavés, le tribunal d'appel a donc dénaturé les termes
du débat ;
Attendu, par ailleurs, qu'en s'abstenant de répondre expres
sément ou implicitement aux conclusions susvisêes des appe
lants, il a violé les formes de procéder ; d'où il suit que le
jugement attaqué est entaché 'des vices visés au moyen et
qu'il doit dès lors être annulé ;
Par ces motifs
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N" 62
L — PROCEDURE. — LA CONTRADICTION DE MOTIFS DEMEU
REE SANS INFLUENCE SUR LA SOLUTION D'UN LITIGE
NE PEUT ETRE RETENUE COMME MOYEN D'ANNULATION.
II. — CHAMBRE DE REVISION. —- VIOLATION DU DROIT EN
MATIERE DE PRESCRIPTION. — LITIGE PORTANT SUR
— 66 —
DES IMMEUBLES RURAUX FRANCISES. — INCOMPETENCE.
III. — CHAMBRE DE REVISION. — VIOLATION DES REGLES DE
LA PREUVE. — IMMEUBLES RURAUX FRANCISES. — LE
GISLATION FRANÇAISE SEULE APPLICABLE. — INCOM
PETENCE.
Consorts Lakhal e. Consorts I.akhal. — T.C. Tiaret, 7 novembre
1956.
ARRET
du 12 Mai 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique pris en ses trois branches
Attendu que le jugement attaqué du tribunal de Tiaret a dé
bouté Lakhal M'hamed et Lakhal Rekia, enfants de feu Lakhal
Benamar, de la tierce opposition par eux formée contre un
jugement du même tribunal du 23 mars 1952 confirmatif d'une
sentence du juge de paix de Montgolfier ordonnant le déguer-
pissements de certains consorts Lakhal, héritiers de feu Lakhal
Abdelkader, oncle germain des tiers opposants, de 22 parcelles
de terre dont les consorts Benelhadj Djelloui se prétendaient
propriétaires exclusifs ; qu'il lui est fait grief d'avoir, en sta
tuant ainsi, violé les formes de procéder par, défaut et contra
diction de motifs, en outre méconnu les règles régissant la
preuve ;
Sur la première branche
Attendu qu'il est reproché au tribunal de Tiaret d'avoir dé
claré, d'une part, que les consorts Lakhal, tiers opposants, ne
produisaient aucun titre opposable aux consorts BenelhadjDjelloui, d'autre part, que les conclusions des experts abou
tissaient à considérer les dits Consorts Benelhadj Djelloui
comme seuls propriétaires des parcelles litigieuses, alors que
cette expertise à laquelle les tiers opposants n'avaient pas été
parties ne leur était pas opposable, et que le dit tribunal ne
à la fois sans se contredire rejeter les titres favorablesaux dits consorts Lakhal et accueillir l'expertise leur préju-
diciant ; Mais attendu que le fait d'avoir à tort retenu comme
valable la dite expertise, créant ainsi la contradiction dénon
cée, n'a pas été déterminante dans la solution du litige. ; At
tendu, en effet, que pour décider comme il l'a fait le tribusals'est essentiellement fondé sur cette autre considération par
lui amplement développée « que lés tiers opposants n'auraient
pu de toute façon recueillir quoi que ce soit dans la succes
sion de leur grand-père, puisqu'il résultait des actes de décèsproduits que Lakhal Benamar, père des dits tiers opposants,était décédé le 2 avril 1921, bien avant son propre père Lakhal Mohamed, mort le 8 avril 1923, et que la représentationn'existant pas en droit musulman, les enfants de Benamarn'ont donc pu recueillir par voie successorale aucun droit sur
— 67 —
les parcelles litigieuses » ; d'où il suit que la contradiction
de motifs visée au moyen étant restée sans influence sur la
solution du litige, le dit moyen, dans sa première branche,
s'avère sans portée et doit dès lors être rejeté ;
Sur ta seconde branche :
Attendu qu'il est. fait grief au jugement attaqué d'avoir dé
claré que les tiers opposants ne pouvaient exciper de la pres
cription au motif qu'ils n'avaient pas eu Vanimus domini, condition essentielle pour pouvoir prescrire, alors qu'en réalité ils
avaient invoqué la prescription trentenaire du droit français
qui est acquise alors que celui qui s'en prévaut a joui pen^
dant plus de trente ans avec la volonté de se comporter en
véritable propriétaire ; Mais attendu qu'il » été expressément
constaté par le dit jugement et qu'il n'a d'ailleurs pas été
contesté que le litige a porté sur des immeubles ruraux fran
cisés ;
Attendu cela étant, qu'en vertu des articles 18 de la loi du
4 août 1926, 1 et 3 de l'ordonnance du 23 novembre 1944, la
chambre d'annulation est incompétente pour connaître d'un
moyen pris d'une violation du droit en matière ■ de prescrip
tion ; d'où il suit que dans sa deuxième branche le dit moyen
est irrecevable ;
Sur la tro'sième branche
Attendu qu'il est imputé au jugement entrepris d'avoir re
jeté la demande d'enquête des tiers opposants, au motif que
cette mesure d'instruction n'aurait pas apporté d'autres préci
sions en dehors de celles résultant de l'enquête à laquelle il
avait déjà été procédé en exécution du jugement avant dire
droit du 7 février 1951, alors que les tiers opposants ne pou
vaient se voir opposer cette enquête à laquelle ils n'avaient
pas été parties ;
Mais attendu que s'agissant d'une contestation portant sui
des immeubles ruraux francisés, le litige est régi tant sur le
fond du droit que sur les modes de preuve par la loi fran
çaise : d'où il suit que le moyen qui, en sa troisième branche,
dénonce non une contradiction de motifs comme erronément
indiqué, mais une.
violation des règles de la preuve, ressortit
au fond même de la législation française et échappe dès lors
à la compétence de la Chambre de Révision ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén).
N° 63
/. —, PROCEDURE. — APPEL. — MOYENS ET EXCEPTIONS OU
VERTS AU DEFENDEUR.
'En droit musulman, comme en droit français, le défendeur peu
en appel invoquer pour la première fois 'tous moyens et exceptions
— 68 —
dont il ne s'est pas prévalu en première instance et qui sont de
nature à faire échec à la demande principale.
IL — PREUVE. — OFFRE DE PREUVE EN APPEL. — EXPER
TISE.
Une partie peut, en appel, offrir une preuve qu'elle n'a pas
proposée devant le premier juge.
La confirmation d'une sentence au motif que l'expert a sainement
apprécié les faits de la cause, ne saurait être considérée comme
une réponse même implicite eux critiques élevées pour la première
fois en cause d'appel contre le rapport d'expertise, critiques cons
tituant non pas de simples arguments, mais des moyens nouveaux
recevables en appel.
Hadjadj t. Zargoune. — T.C. Batna, 21 novembre 1956.
ARRET
du 12 Mai 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen :
Attendu que le jugement attaqué statuant sur l'appel de
Zapgoune Mohammed, Bouakka Mohamed, M'hiri Bahous et
Belkhelouat Mohammed, a confirmé une sentence du cadi
d'Ouargla, faisant droit sur les données d'une expertise, à l'ac
tion dirigée par les susnommés, ainsi que par d'autres co
propriétaires et. usagers d'une source, contre Hadjadj El Hadj
Mohamed qui, préposé par eux pour aménager et répartir les
eaux de cette source, et, ayant à ce titre reçu diverses som
mes, n'avait pas, à leurs dires, fourni un compte exact de ses
dépenses et s'était en outre attribué une quantité d'eau supé
rieure à celle à laquelle il avait droit ;
Attendu qu'il lui est fait grief d'une violation des formes
de procéder par défaut de motifs, d'une méconnaissance des
règles régissant la matière de la preuve et d'une insuffisance
de motifs ;
Attendu qu'il résulte des qualités et des motifs du juge
ment entrepris que le défendeur appelant, critiquant le rapport
d'expertise sur lequel était fondée la sentence du premier
juge, a conclu expressément à voir dire que l'expert n'avait
pas retenu que l'usage voulait que la personne préposée à l'aménagement d'une source, eut droit à une demi-journée d'eau
supplémentaire en rémunération de son travail ; qu'il avait
omis de mentionner dans l'apurement des comptes, certaines
dépenses de l'ordre de 77.000) francs faites par lui ; que, d'unefaçon générale, les décomptes tels qu'ils figuraient au rapport
étaient inexacts, tant en ce qui concernait le montant des dépenses qu'en ce qui avait trait à la répartition des eaux entre
les parties ; qu'enfin, une nouvelle mesure d'instruction était
nécessaire et qu'il convenait de commettre à ces fins un expert
français ; Attendu qu'à ces divers chefs de conclusions, le
— 69 —
tribunal d'appel s'est borné à répondre qtie « Hadjadj El Hadjn'avait pas rapporté la preuve de ses allégations en première
instance » et! « que l'expert avait sainement apprécié les faits »;
Mais attendu, d'une part, qu'en droit musulman comme
en droit français, le défendeur peut en appel invoquer pour
la première fois tous moyens et exceptions dont il ne s'était
pas prévalu en première instance et qui sont de nature à
faire échec à la demande principale ; Attendu, d'autre part,
qu'une partie peut, en appel, offrir une preuve qu'elle n'a pas
proposée devant le premier juge ; Attendu que le fait par
le tribunal de Batna d'avoir confirmé la sentence déférée, aumotif que l'expert avait sainement apprécié les faits de la
cause, ne saurait être considéré comme une réponse, même
implicite, aux critiques élevées pour la première fois en appel
contre le rapport d'expertise, critiques constituant non pas de
simples arguments, comme soutenu à tort par les demandeurs,
intimés, mais des moyens nouveaux recevables en appel ;
Attendu, par ailleurs, que les juges d'appel ne pouvaient pas
ser outre, sans autres motifs que ceux plus haut cités, à la
demande subsidiaire de nouvelle expertise, alors que celle-ci
était fondée sur des arguments etj sur des pièces qui n'avaient
pas été soumis au premier juge ; d'où il suit que le moyen
est fondé et que le jugement attaqué doit être annulé, sans
qu'il convienne de statuer sur le deuxième moyen qui s'avère
subsidiaire ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén.).
N° 64
POURVOI. — PLURALITE DE DEFENDEURS. — DEFENDEUR DE
CEDE. — NOTIFICATION AUX HERITIERS NON REALISEE.
— ABSENCE. D'INDICATION AU GREFFIER. — APPLICATION
DE L'ORDONNANCE DU 23 NOVEMBRE 1944, ART. 41 ET
42, AL. 2, ET DE L'ART. 397 C. PROC. CIV. — IRRECEVA
BILITE.
Tounsi Consorts Bazine. T.C. Blida, 6 décembre 1956.
ARRET
du 13 Mai 1958
N° 65
CHAMBRE DE .REVISION,— IMMEUBLE FRANÇAISE. — LOI
FRANÇAISE SEULE APPLICABLE. — INCOMPETENCE.
Senoussi Chérif. T.C. Batna, 29 mai 1957.
— 70 —
ARRET
du 13 Mai 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une méconnaissance des règles
de recevabilité des actionto en justice et d'un manque de base
légale :
Attendu que, par le jugement infirmatif attaqué, le tribunal
de Batna a déclaré recevable et pleinement justifiée une ac
tion par laquelle Chérif Mohammed Salah réclamait des dom
mages-intérêts à Senoussi Ali pour empiétement sur un ter
rain dont il est copropriétaire et détournement des eaux d'ir
rigation et demandait la liquidation de l'astreinte antérieure
ment prononcée à son profit pour le retard apporté par le
défendeur au rétablissement de la circulation des eaux dé
tournées et la fixation d'une nouvelle astreinte aux mêmes
fins pour l'avenir ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir rejeté une exception d'irrece
vabilité de l'action soulevée par Senoussi, au motif essentiel
qu'agissant dans l'intérêt de l'ensemble de l'indivision dont il
fait partie, le demandeur devait être considéré comme le gé
rant d'affaires de ses cohéritiers, ce qui rendait son action
recevable contre un tiers, bien qu'elle ait été intentée et soit
suivie par lui seul, alors que, s'agissant d'une demande de
dommages-intérêijs, Chérif ne pouvait légalement agir que
dans la limite de son droit personnel et ne pouvait, en raison
du principe suivant lequel « Nul ne plaide en France par Pro
cureur », faire état comme il l'a fait du préjudice subi par la
totalité de l'immeuble indivis ;
Mais attendu qu'aux termes des articles 18 de la loi du 4
août 1926, 2 et 38 de l'ordonnance du 23 novembre 1944, le
moyen qui ne tend en réalité qu'à dénoncer une violation de
la loi française applicable en raison de la francisation du ter
rain litigieux non contestée et résultant des titres adminis
tratifs qui lui sont afférents, échappe à la compétence de la
Chambre de révision.
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est reproché au tribunal de Batna de s'être,
pour repousser les critiques élevées par Senoussi au rapport
de l'expert, borné à énoncer que l'idoine avait évalué avec
minutie le préjudice subi par le demandeur et de n'avoir pas
par cette seule énonciation donné base légale à sa décision :
Attendu que, comme le précédent et pour la même raison,le moyen, qui tend à dénoncer un vice de fond touchant à laloi française applicable, échappe à la compétence de la Cham
bre de Révision Musulmane ;
\Par ces motifs :
Eh la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 71 —
N° 66
PROCEDURE. — QUALITES. — DISPOSITIF DES CONCLUSIONS
PRISES PAR LES INTIMES NON REPRODUIT AUX QUA
LITES. — FORMALITE SUBSTANTIELLE. — SON OMISSION
ENTRAINE LA NULLITE DU JUGEMENT ATTAQUE.
Bessedik c. Consorts Bessedik. — T.C. Mostaganem, 27 novembre
1956.
ARRET
du 19 Mai 1958
LA COUR
Au fond
Sur le premier moyen :
Attendu que le jugement attaqué, après avoir rejeté les
exceptions de péremption et de chose jugée soulevées par le
défendeur appelant Bessedik Baghdad, a confirmé une sen
tence du juge de paix d'Inkermann qui, saisi par certains con
sorts Bessedik d'une demande en partage de biens immobiliers,dirigée contre d'autres consorts Bessedik, a commis avant dire
droit trois experts à l'effet de rechercher et d'identifier les
dits biens ; qu'il lui est fait grief d'une violation des formes
de procéder en ce que les qualités n'énoncent pas le dispo
sitif des conclusions prises par les intimés ;
Attendu que la reproduction dans les qualités des notes et
conclusions déposées en cause d'appel par les parties est une
formalité substantielle dont l'omission entraîne la nullité du
jugement attaqué ; Attendu que s'il peut être, il est vrai,
suppléé par les autres énonciations du jugement et notamment
par les motifs, à des qualités insuffisantes ou erronées, ce
n'est que lorsque les erreurs ou insuffisances relevées n'ont
pas empêché les juges d'avoir une entière connaissance des
conclusions des parties et du point litigieux à résoudre ;
Attendu qu'en la cause seul figure aux qualités le dispositif
des conclusions de l'appelant et qu'il ne peut être déduit de
l'unique et bref attendu des motifs se rapportant aux conclu
sions des intimés et selon lequel les intimés ont demandé la
confirmation du jugement entrepris, que les juges d'appel ont
eu une connaissance suffisante des dites conclusions ; d'où il
suit que le moyen est fondé et que le jugement attaqué doit
être annulé sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres
moyens qui s'avèrent subsidiaires ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén.).
— 72 —
N° 67
1 — PROCEDURE — EXCEPTION DE NOUVEAUTE SOULEVEE
D'OFFICE PAR LE TRIBUNAL. — VIOLATION DES FOR
MES DE PROCEDER.
L'exception de nouveauté n'étant pas d'ordre public doit être
nécessairement proposée par les parties ; le tribunal ne peut ta
soulever d'office.
Il — MOYENS — MOYEN TENDANT A FAIRE REVISER UNE
APPRECIATION DE PUR FAIT RESSORTISSANT AU POU
VOIR SOUVERAIN DES JUGES DU FOND. — IRRECEVA
BILITE.
Consorts Defria e. Consorts Defria et a.— T.C. Orléansville, 12
décembre 1956.
ARRET
du 19 Mai 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur ie premier moyen :
Attendu que le jugement infirmatif attaqué a ordonné l'ex
pulsion de Defria Mohammed de deux pièces dans lesquelles
était exploité un commerce de volailles, légumes et fruits, tant
par son frère feu Defria Abdelkader, auteur des demandeurs-
appelants, avant son décès, que par lui-même et déclaré en
outre irrecevable comme nouvelle la demande incidente de
Megueni Kheïra, tendant à obtenir une quote-part des béné
fices de l'exploitation pour la période antérieure au décès de
son fils, le dit Defria Abdelkader ; qu'il lui est fait grief d'une
violation des formes de procéder en ce que pour décider comme
il l'a fait sur cette demande incidente le tribunal d'appel a
soulevé d'office l'exception de nouveauté ;
Attendu qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que
les appelants n'ont à aucun moment conclu à voir déclarer
la dite demande irrecevable comme nouvelle ; Attendu, ce
pendant, que l'exception de nouveauté n'étant pas d'ordre pu
blic devait être nécessairement proposée par les parties et
que le tribunal ne pouvait dès lors la soulever d'office ; d'où
il suit que le moyen est fondé et que le jugement entrepris
doit être annulé, mais seulement en ce quïl a décdié sur lademande incidente susvisée ;
Sur le second moyen pris d'une dénaturation des éléments du
débat et d'un manque de base légale :
Attendu qu'il est reproché au tribunal d'appel d'avoir apprécié que les deux locaux litigieux formaient un ensemble
commercial unique dont feu Defria Abdelkader était seul lo
cataire, alors qu'il résultait des éléments de la cause qu'il y
— 73 —
avait en réalité deux magasins bien distincts et que les pré
tentions des demandeurs étaient infirmées par les déclarationsrecueillies et les pièces produites ; Mais attendu que ce
moyen qui tend à faire réviser une appréciation de pur fait
ressortissant au pouvoir souverain des juges du fond est irre
cevable ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén.).
N° 68
MARIAGE. — DIVORCE. — INEXECUTION PAR LE MARI D'OBLI
GATIONS MISES A SA CHARGE PAR DECISION JUDICIAI
RE. — OBLIGATION DE FOURNIR A L'EPOUSE UX LOGE
MENT CONVENABLE.
Refuse légitimement de réintégrer le domicile conjugal et ne se
met pas en état d'insubordination la femme qui refuse d'habiter le
logement qu'une sentence antérieure a fait obligailon au mari de
rendre convenable, alors que le mari n'a pas exécuté cette obli
gation.
Le divorce doit, dès lors, être prononcé aux torts du mari.
Tafinni c. Amrouche. — T.C. Alg,er, § décembre 1956.
ARRET
du 20 Moi 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique :
Attendu que statuant comme juridiction de renvoi après
annulation de son jugement du 11 février 1954, le tribunal
d'Alger autrement composé a prononcé le divorce d'entre les
époux Tafiani Ahmed - Amrouche Fatma Zorah, aux torts
du mari, confié à la mère la garde de l'enfant mineur com
mun, déchargé l'épouse du paiement de la kohla et condamné
le mari à payer à son ex-femme un reliquai de dot, ainsi
qu'une pension alimentaire pour l'entretien de l'enfant ; qu'il
lui est fait grief d'avoir dénaturé les termes du débat, en ap
préciant que Amrouche Fatma Zohra bien qu'ayant refusé
de réintégrer le domicile conjugal, ne s'était pas mise en état
d'insubordination, et ce en raison de ce que le mari, tenu par
une sentence antérieure de luilournii-
un logement convenable
n'en avait rien fait, alors qu'en réalité cet état d'insubordi
nation résultait du fait qu'aux termes de la sentence susvisée
elle devait dans un délai déterminé, revenir auprès de son
— 74 —
mari et que celui-ci lui ayant régulièrement fait sommation
de réintégrer dans le dit délai, elle ne s'était pas exécutée ;
Mais attendu que le tribunal d'Alger a constaté qu'il résul
tait du procès-verbal de sommation du 27 novembre 1952, dontle sens et la portée ont été par lui souverainement appréciés,que le logement offert par Tafiani en exécution de la sen
tence du 29 septembre 1952, était celui-là même qui était oc
cupé par l'épouse avant son départ du domicile conjugal et
r.e pouvait être considéré comme un « logement convenable »
au sens indiqué par la dite sentence ; Attendu qu'il a pu,
dès lors, légalement déduire de cette constatation que Amrou
che Fatma Zohra en refusant de déférer à cette sommation
n'avait pas fait acte d'insubordination et qu'en conséquence
le divorce devait être prononcé aux torts du mari qui n'avait
pas exécuté les obligations mises à sa charge par la décision
précitée du 29 septembre 1952 ;
Attendu que, ce faisant, le dit tribunal est resté dans les
limites strictes des conclusions des parties et a donné base
légale à sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas
fondé ;
Par-ces motifs
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 69
PROCEDURE. — PEREMPTION D'INSTANCE. — CONDITIONS A
SA RECONNAISSANCE. — CONSEQUENCES.
En droit musulman comme en droit français, la péremption d'ins
tance n'a jamais lieu de plein droit ; elle doit toujours être for
mellement demandée ; la demande doit en être portée devant la
juridiction saisie de l'instance.
Cette instance, quel que soit le temps pendant lequel elle a été
suspendue, n'est pas périmée tant que la péremption n'en a pas élé
demandée.
Kssalhi t. Djebbar. — T.C. Guelma, 2 janvier 1957.
ARRET
du 20 Mai 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique
Attendu que le jugement confirmatif attaqué „ fait droità la demande en licitation d'un fonds de commerce d'imprimerie, introduite par Djebbar Messaoud contre Essalhi dit
— 75 —
Tiili Abdelkader ; qu'il est fait grief au tribunal d'appel
d'avoir, ce faisant, violé les formes de procéder en ce que,
d'une part, saisi d'un moyen tiré de la péremption de l'article
21 de l'ordonnance du 23 novembre 1944, il s'est borné à ré
pondre qu'il n'avait pas à apprécier si la première instance
était ou non périmée, e 0 en ce que d'autre part, il a admis que
deux instances ayant le même objet pourraient être valable
ment pendantes au mépris des règles relatives à la litispen-
dance et sans se préoccuper de la contrariété de jugements
qui pourrait en résulter ;
Sur la première branche et sur ie moyen pris d'office d'une
violation des règles régissant la matière de la pérempt'on de
l'article 21 de l'ordonnance du 23 novembre 1944 :
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, les juges
d'appel ont répondu aux conclusions da Essalhi dit Tlili ten
dant à voir dire que le premier juge devait, avant d'accueillirla demande de Djebbar, statuer sur la question préjudicielle
de péremption qui se posait en l'état d'une première instance
portant sur le même objet et ayant abouti à une sentence
avant dire droit non exécutée dans le délai prévu par le
texte susvisé ;
Attendu qu'ils ont dit, en effet, que cette deuxième action
constituait non pas une reprise d'instance mais une demande
nouvelle et que, dès lors, le juge n'avait pas à se préoccuper
de savoir si l'instance originaire était ou non périmée ; d'où
il suit que cette branche du moyen est infondée, ; Mais attendu
qu'en décidant comme il l'a fait de ce chef, le tribunal de
Guelma a méconnu les principes gouvernant la matière de la
péremption d'instance du droit musulman ;
Attendu, en effet, que cette péremption comme celle du droit
français n'a jamais lieu de plein droit ; qu'elle doit être for
mellement demandée et la demande en péremption doit tou
jours être portée devant la juridiction saisie de l'instance ;
Attendu, par ailleurs, que cette instance, quel que soit le
temps pendant lequel elle a été suspendue, n'est pas périmée
tant que la péremption n'en a pas été demandée ; Attendu qu'il
ne pouvait donc y avoir, en l'espèce, instance nouvelle dès
lors que la péremption de ia première instance n'avait pas
été prononcée par le juge qui avait rendu la décision avant
dire droit ; d'où il suit que le jugement attaqué doit êtrean-"
nulé, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la deuxième
branche du moyen qui s'avère subsidiaire ;
Par ces motifs
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 70
HABOUS. — ACQUIESCEMENT. — ACQUIESCEMENT TACITE. —
DOIT RESULTER D'ACTES IMPLIQUANT AVEC EVIDENCE
— 76 —
L'INTENTION DE SE CONFORMER AUX DISPOSITIONS DE
LA FONDATION.
Consorts Hassani e. Consorts Hassani. — T.C. Blida, 12 janvier
1957.
ARRET
du 27 Mai 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le moyen unique
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a débouté
Hassani Teghia de l'action introduite par elle ainsi que par
Hassani Aïcha et Chouhi Chibha, contre d'autres consorts Has
sani à i'effet d'obtenir l'annulation, pour défaut de désignation
d'un dévolutaire définitif d'un 7irtbous constitué à leur profit
par leur auteur commun feu Hassani Abderrahim ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir ainsi décidé au seul motif
que les demanderesses avaient tacitement acquiescé au dit
habous, alors que les faits retenus par les juges d'appel comme
fondement de leur décision n'étaient pas suffisamment dé
monstratifs de la réalité de ce prétendu acquiescement ;
Attendu que l'acquiescement à un habous peut être tacite
mais doit résulter d'actes impliquant avec évidence l'intention
de se conformer aux dispositions de la fondation ;
Attendu qu'en la cause les juges du fond ont constaté que
l'acte établi en 1925 avait été suivi d'exécution jusqu'en 1954
et que les demanderesses n'avaient invoqué pour leur défense
aucune circonstance susceptible d'avoir pu mettre obstacle à
leur droit d'agir avant l'introduction du présent litige ; At
tendu, par ailleurs, qu'il résulte des conclusions des intimés,insérées aux qualités, que led biens habousés avaient fait l'ob
jet d'un partage entre co-dévolutaires vingt-cinq ans aupara
vant ;
Attendu qu'en l'état de ces faits non contestés par les de
manderesses et de la longue inaction de ces dernières, le tri
bunal d'appel a pu légalement apprécier, comme il l'a fait,sans violer les principes régissant la matière ; d'où il suit que
le moyen n'est pas fondé :
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 71
PREUVE. — MODES DE PREUVE DU DROIT MUSULMAN. — DANS
UN LITIGE DE CARACTERE PERSONNEL ET MOBILIER, NE
S'ETENDENT PAS AUX REGLES GENERALES GOUVERNANT
— 77 —
LA CHARGE DE LA PREUVE ET, PAR SUITE, A CELLES
RELATIVES A L'AVEU.
Benzeghimi c. Benzeghimi. — T.C. Blida, 26 janvier 1957.
ARRET
du 27 Mai 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le moyen unique :
Attendu que le jugement infirmatif attaqué a, aux résultats
d'une expertise, fait droit à la demande introduite par Benze
ghimi Benaïssa contre son frère Benzeghimi Djilali pour voir
établir les comptes de l'exploitation d'un fonds de commerce
d'épicerie dont il se prétentait copropriétaire par moitié avec
lo défendeur qui, de son côté, s'en disait propriétaire exclusif,
et condamné le premier à payer au second la somma de 95.000
francs en règlement dssdits comptes ; qu'il lui est fait grief
d'avoir, pour statuer ainsi, fondé essentiellement sa décision
sur un prétendu aveu de l'intimé, alors que les déclarations
de ce dernier retenues comme étant de nature è constituer
l'avtu allégué, n'impliquaient nullement reconnaissance du
droit de copropriété de l'appelant, mais avaient été dénatu
rées et qu'au surplus elles avaient été faites non par l'intimé
lui-même mais par son conseil qui n'avait pas qualité pour
ce faire ;
Attendu que le litige ayant un caractère purement person
nel et mobilier, les réserves exprimées aux articles 2, alinéa
1"
et 38 alinéas 3 et 4. de l'ordonnance du 23 novembre 1944,notamment en ce qui concerne les modes de preuve du droit
musulman ne s'étendent pas aux règles générales gouvernant
la charge de la preuve et par suite, à celles relatives à l'aveu
dont la violation échappe à la compétence de la Chambre d'an
nulation ; d'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 72
HABOUS. — PREUVE. — PAR ACTES OU PAR TEMOIGNAGES.—
APPLICATION A UN ACTE DE RECONNAISSANCE DES HA
BOUS.
La preuve d'un habous doit, en principe, résulter d'un écrit, soit
authentique, soit privé, reçu clans ce dernier cas en présence de deux
témoins et revêtu de leurs signatures.
— 78 —
. A défaut de t)els actes, il est admis qu'il peut être établi par des
témoignages complets, pertinents el précis, ne laissant subsister au
cun doute tant sur la volonté du constituant que sur la consistance
des biens immobilCers et les modalités de la fondation.
Ne répond pas à ces principes rigoureux l'acte de reconnaissance
d'un habous dont les énonciations ne donnent pas les indications
nécessaires quant à la désignation du dévolutaire final, à l'inten
tion pieuse et au rite employé, puisqu'uussi bien il avait été consi
déré comme inopérant en tant que preuve écrite de la fondation.
Consorts Henniela c. Bouabdelli. — T.C. Tiaret, 13 mars 1957.
ARRET
du 27 Mai 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le premier moyen :
Attendu que le jugement infirmatif attaqué a, aux résul
tats d'une enquête, débouté les héritiers de da.me Miara Fatma
de la demande introduite par elle contre son frère, Miara Ta
har, pour voir prononcer l'annulation d'un habous qu'elle avait
constitué le 2 août 1942 au profit du défendeur qui, de son
côté, se prévalait d'un habous antérieur érigé à son profit par
i'
auteur commun, feu Miara Missoum, le dit/ habous ayant fait
l'objet de la part de tous les héritiers du de cujus, parmi les
quels la demanderesse, d'un acte de reconnaissance du 24 jan
vier 1942 ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir, alors qu'il avait admis qu'un
témoignage unique recueilli à la requête de Miara Tahar
n'était pas de nature à faire la preuve du habous invoqué
par ce dernier, considéré, cependant, que l'existence de ce
hahous était corroborée par les énonciations de l'acte de re
connaissance du 24 janvier 1942, perdant ainsi de vue que ce
n'était pas seulement l'existence mais la validité de la fonda
tion qui était en discussion et avait fait l'objet de la mesure
d'instruction ordonnée, et que cette validité ne pouvait êtredéduite de la reconnaissance de habous susvisée ni corroborée
par elle, dès lors qu'elle ne faisait aucune mention ni du dévolutaire légal, ni de l'intention pieuse, ni du rite employé ;
Attendu que la preuve d'un habous doit, en principe, résulter d'un écrit soit authentique, soit privé, reçu dans ce dernier cas en présence de deux témoins et revêtu de leurs si
gnatures, mais à défaut de tels actes, il est admis qu'il peut
être établi par des témoignages •
complets, pertinents et pré
cis, ne laissant subsister aucun doute tant sur la volonté duconstituant que sur la consistance des biens immobiliers et
les modalités de la fondation ; Attendu qu'en l'état de ces
principes rigoureux, le tribunal d'appel ne pouvait légalementconsidérer que l'acte de reconnaissance du 24 janvier 1942était de nature à corroborer les déclarations de l'unique témoignage recueilli à la requête des ayants droit de MiaraTahar, alors que ceux-ci avaient la charge de prouver non
— 79 —
seulement l'existence, mais encore la validité du fiabous allé
gué et que cet acte sur les énonciations duquel les juges ne
se sont d'ailleurs pas expliqués, ne donnait certainement pas
les indications nécessaires quant à la désignation du dévolutaire final, à l'intention pieuse et au rite employé, puisqu'aussi
bien il avait été considéré comme inopérant en tant que preuve
écrite de la fondation ; Attendu qu'en statuant comme ils
l'ont fait, les juges d'appel ont donc violé les règles de droit
régissant la preuve en matière de habous et n'ont pas donnébase légale à leur décision ; d'où il suit que le moyen est
fondé et que le jugement attaqué doit être annulé, sans qu'il
soit nécessaire de statuer sur le deuxième moyen qui s'avère
subsidiaire ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 73
POURVOI. — EXPEDITION D'UN ARRET ANTERIEUREMENT
RENDU EN LA CAUSE, NON JOINTE A LA REQUETE. —
IRRECEVABILITE.
Consorts Benouna e. Boukadour. — T.C. Mostaganem, 19 février
1957.
ARRET
du 27 Mai 1958
N° 74
/. — PROCEDURE. — QUALITES D'UN JUGEMENT. — REGULA
RITE. — CONDITIONS.
Si, pour être régulières, les qualités des jugements doivent con
tenir les noms, professions et demeures des parties, ainsi que les
qualités en laquelle elles agissent, les termes dans lesquels cette
désignation doit être faite, comme la place à laquelle elle doit figu
rer au jugement, n'ont rien de sacramentel.
IL — PREUVE. — SERMENT SUPPLETOIRE. — MOTIFS INOPE
RANTS EQUIVALANT A UN DEFAUT DE MOTIFS (NON).
Zamoun ... Consorts Zamoun. — T.C. Bougie, 27 février 1957.
ARRET
du 2 Juin 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une violat.'on des formes de pro
céder en ce que l'intitulé du jugement attaqué porte cemme
— 80 —
défendeur Zamoun Ahcène, alors que celui-ci était décédé au
cours de l'instance d'appel et ne mentionne pas que le second
défendeur Zamoun Mohand ait su'vi la procédure en qualité de
tuteur des enfants mineurs du défunt
Attendu que, si pour être régulières les qualités des juge-
dents doivent contenir les noms, professions et demeures des
parties, ainsi que la qualité en laquelle elles agissent, les ter
mes dans lesquels cette désignation doit être faite comme la
plaee à laquelle elle doit figurer au jugement n'ont rien de
Dacramentel et le voeu de la loi est rempli dès lors que le
dispositif des conclusions reproduit aux qualités, les motifs et
le dispositif même du jugement, révèlent sanspossibilité d er
reur que Zamoun Mohand, déjà personnellement dans la cause,
y est intervenu volontairement comme représentant légal des
héritiers mineurs du défendeur défunt ; d'où il suit que le
moyen est à rejeter ;
Sur !e second moyen pris d'une violation des règles de la
preuve et d'une inopérance de motifs équivalant à un défaut
de motifs
Attendu que, par le jugement confirmatif attaqué, le tribu
nal de Bougie a fait droit à une action en revendication in
tentée par Zamoum Taklit et Amroune Fatima à Zamoum Mo
hand et Ahcène au sujet d'une parcelle de terre dénommée
Agheghad Ouasseloum par elles acquise suivant acte notarié
du 2 janvier 1946, au motif que l'acquisition antérieure que les
défendeurs soutenaient en avoir faite n'était pas prouvée ;
Qu'il lui est reproché d'avoir refusé de déférer un serment
décisoire proposé par les défendeurs aux demanderesses, alors
que l'acceptation par ces dernières de prêter le dit serment lui
faisait une obligation de le déférer et de n'avoir motivé ,sa dé
cision sur ce point que par l'absence d'un commencement de
preuve en faveur des consorts Zamoum, alors que ceux-ci ne
demandant pas que le serment soit mis à leur charge, ce fait
était sans intérêt ;
Attendu qu'à bon droit les juges du fond ont décidé que, dé
féré à titre purement subsidiaire, le serment ne pouvait avoir
qu'un caractère suppiétoire ; que, dès lors, même son accep
tation ne lui conférait pas la nature d'un contrat judiciaire
s'imposant au tribunal ; que, d'autre part, demandeurs à l'ex
ception tirée d'une acquisition antérieure à celle des deman
deresses, les consorts Zamoum étaient légalement tenus d'en
rapporter la preuve ; que le tribunal a expressément constaté
que non seulement ils ne la rapportaient pas, mais qu'il était
même établi qu'ils n'avaient pu valablement acheter en 1939
comme ils prétendaient l'immeuble litigieux dont leur pré
tendu vendeur n'était devenu propriétaire par voie d'échange
qu'en 1941 ;
Que, par cette énoncîation, le tribunal a légalement justifié
sa décision en dehors même du motif critiqué qui ne constitue
au surplus qu'une redondance ne pouvant la vicier ; d'où
il sui-J que le moyen est infondé en ses deux branches ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. Bernasconi, Av. Gén.).
— 81 —
N°75
HABOUS. — RITE 11AXEF1TE. — VALIDATION DE LA INONDA
TION, — MOYEN NOUVEAU, MELANGE DE FAIT ET DE
DROIT. ET D'INTERET PRIVE. — IRRECEVABILITE.
Boulili c. Boutalbi. — T.C. Constantine, 7 mars 11,57.
ARRET
du 2 Juin 1958
L.î. COUR :
Au fond :
Sur le moyen unique
Attendu que Boutalbi si Brahim ayant érigé en habous, con
formément au rite hanétite, les deux tiers indivis d'un immeu
ble ainsi que deux fonds de commerce sis à Constantine à
son profit d abord, puis au profit, d'une part, de son épouse
depuis décédée, Boutalbi Behidja, pour les deux fonds et le
quart des droits dépendant de l'immeuble, d'autre part, de ses
frère et sœur, Boutalbi Tahar et Boutalbi Ounessa, pour les
trois quarts de surplus dans le dit immeuble, le jugement con
firmatif attaqué, rejetant la demande de dame Boulili Aïcha,veuve du fondateur, en caducité du habous! basée sur la vente
consentie par le constituant des deux fonds de commerce, en
a prononcé la validité ; qu'il lui est fait grief d'une violation
d-is règles du habous en ce qu'il a validé la fondation pour ie
tout, alors qu'elle était devenue caduque pour ia part dévolue
à la dame Boualbi Behidja, décédée avant le fondateur et sans
laisser d'afceb à qui seul d'après la charge habousale sa part
aurait pu revenir et cette part ne pouvant non plus accroître
celle nettement déterminée des co-dévolutaires du même de
gré ;
Mais attendu que ce moyen qui n'a pas été proposé devant
les juges d'appel, mélangé de fait et de droit et d'intérêt
privé est par suite irrecevable ;
Par ces motifs
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Bernasconi, Av. Gén.).
H° 76
TESTAMENT. — TESTAMENT VERBAL. — REGLES DU DROIT
MUSULMAN. — ETAT DE SANTE DU TESTATEUR AU JOUR
DE LA DISPOSITION. — APPRECIATION DE L'ETAT DE
PERIL DE MORT DU TESTATEUR. — LE TESTAMENT VER
BAL EST VALABLE A LA SEULE CONDITION QU'AU MO
MENT DE LA DISPOSITION LE TESTATEUR SE SOIT TROU
VE ETRE EN DANGER DE MORT.
— 82 —
La preuve de l'absence de danger de mort résulte suffisamment,
pour les juges du fond, du délai d'un mois qui „ séparé le testa
ment du décès du testateur et du fait que le témoin unique de la
disposition testamentaire n'a fait nulle mention de l'état de suntè
du testateur au jour de la libéralité, les témoins certificateurs af
firmant catégoriquement le parfait état de santé du de cujus au
jour de la disposition.
Elaggoun c. Consorts Elaggoun. — T.C. Blida, 23 février 1957.
ARRET
du 3 Juin 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le premier moyen
Attendu que statuant sur la demande des sieurs Elaggoun
Belkacem et Elaggoun Sayah tendant à la nullité d'un pré
tendu legs verbal du tiers de ses biens qu'aurait consenti feu
Elaggoun Djelloui au profit de la mineure Elaggoun Mira et
constaté par un acte de notoriété, le cadi de Laghouat a, aux
données d'une enquête, et retenant que le testateur s'était
trouvé au jour de la disposition invoquée, à l'article de la
mort, dans un état physique et intellectuel le mettant dans
l'impossibilité d'exprimer une volonté, prononcé la nullité de
ce legs ;
Que le jugement attaqué ayant confirmé cette sentence au
motif que le disposant se trouvait, lors de la disposition, en
péril de mort, il lui est fait grief d'une violation des règles
du droit musulman en matière; de testament verbal, en ce que
pour dénier l'état de danger de mort du disposant, les juges
d'appel se sont contentés de retenir que celui-ci n'était décédé
qu'un mois plus tard et que les témoins sur les déclarations
desquels était dressée la notoriété constatant le legs y affir
maient que Elaggoun Djelloui sel trouvait à ce moment en par
fait état de santé, de jugement et de discernement, alors que
cette formule n'est que de style et qurt le danger de mort ré
sulte suffisamment, nonobstant la période plus ou moins courte
de survie, de l'existence, pour le disposant, d'un danger immé
diat et réel lors de la1 disposition ou de la croyance par lui à
ce danger ;
Attendu que le tribunal de Blida .a pu valablement estimer
que ne saurait constituer une formule de style, l'affirmation
catégorique par les témoins certificateurs du parfait état de
santé du de cujus au jour de la disposition et retenir, pour
apprécier l'état de péril de mort du testateur, le temps écoulé
entre la disposition invoquée et le décès de son auteur, sa
décision écartant le legs, étant en outre fondée sur les donnéesde l'enquête au cours de laquelle le seul témoin venu affirmer
que Elaggoun Djelloui avait légué le tiers de ses biens à la
mineure Elaggoun Mira n'avait fait nulle mention à son état
de santé au jour de cette disposition ; d'où il suit qu'en déci
dant qu'il n'était pas justifié qu'au moment de cette libéralité,
— 83 —
le testateur se soit trouvé en danger de mort, condition de
validité du testament verbal, le tribunal a sainement apprécié
les éléments de preuve qui lui étaient soumis et que le moyen
est, par suite, infondé ;
Sur le deuxième moyen pris d'une insuffisance de motifs :
Attendu que ce moyen qui n'est que le corollaire du précé
dent doit, comme lui, être nécessairement rejeté ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 77
MARIAGE. — ETAT D'INSUBORDINATION DE L'EPOUSE. — SEN
TENCE ORDONNANT AU MARI LA MISE A LA DISPOSITION
DE L'EPOUSE D'UN LOGEMENT DISTINCT DE CELUI Db
LEURS PROPRES PARENTS RESPECTIFS. — IMPOSS1R1-
L1TE DU MARI DE PROCURER CE LOGEMENT. — EFFETS.
Kassab t. Kasbadji. — T.C. Alger, 12 mars 1957.
ARRET
du 3 Juin 1958
LA COUR :
Au fond
Sur les deux moyens réunis pr's d'une dénaluration des éié-
mens du débat et d'un manque de base légale
Attendu que, par le jugement attaqué, le tribunal d'Alger a
infirmé la sentence à lui déférée qui déclarait Kesbadji Nas-
sira en état d'insubordination et qui, en conséquence, confiait
ia garde des enfants communs à son mari Kessab Brahim, à
qui il allouait en outre une kholaa de 100.000 francs ; qu'il lui
est fait grief d'avoir, pour statuer ainsi, énoncé qu'il ne résul
tait pas des procès-verbaux de tentative d'exécution des 25
avril et 7 septembre 1956 que le demandeur ait mis à la dis
position de son épouse un logement distinct de celui de leurs
proches parents respectifs, sous la surveillance d'un aminé,
ainsi que lui en faisait obligation une sentence duV"
mars
1956, alors que, d'une part, il ne pouvait légalement faire état
du procès-verbal du 7 septembre 1956 qui était postérieur à
la sentence frappée d'appel et que, d'autre part, le défaut de
Kesbadji Nassira devant l'agent d'exécution dont elle avait re
fusé la convocation, ne lui permettait pas de juger que le
demandeur n'était pas disposé à mettre à la disposition de
cette dernière un logement conforme aux obligations qui lui
en étaient faites ;
84
Mais attendu que le tribunal n'afait- état du procès-verbal
du 7 septembre 1956 qu'à titre purement superfétatoire, cequi
ne sautait vicier sa décision qui, par ailleurs, estlégalement
justifiée par son énonciation suivant laquelle il ne résulte pas
du procès-verbal du 25 avril 1956 invoqué, que Kessab Brahim
fut en mesure de procurer à sa femme un logement conforme
aux prescriptions de la sentence du1er
mars 1956, ce qu'il lui
appartenait de faire constater par l'agent d'exécution, même en
l'absence fautive de Kesbadji Nassira ; d où il suit que les
deux moyens sont infondés ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén).
N° 78
J — HADANA. — RENONCIATION PAR LA MERE MINEURE. —
NULLITE PRONONCEE PAR LE JUGE. — DECRET DU 12
AOUT 1936. — MOYEN NOUVEAU, D'INTERET PRIVE. —
IRRECEVABILITE.
II. — HADANA. — JUGEMENT ORDONNANT LA GARDE DE L'EN
FANT PAR SES PERE ET MERE NATURELS. — LA PARTIE
QUI N'A AUCUN LIEN DE PARENTE AVEC L'ENFANT,
N'EST PAS QUALIFIEE POUR PRETENDRE A L'EXER
CICE D'UN TEL DROIT DE GARDE.
Djaider et a. c. Kacemieta. — T.C. Alger, 16 mars 1957.
ARRET
du 9 Juin 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen :
Attendu qu'antérieurement à son mariage avec le nommé
Mohamed ben Tahar, suivi de la reconnaissance par les époux
de l'enfant Djamila, dont la femme Kacemi Oum El Az avait
accouché, celle-ci faisait abandon au profit de Djaider (ou
Djaidri)! ben Youssef et de son épouse Démine Kheira, de son
droit de hadana a que le jugement infirmatif attaqué a rejeté
la demande en validité de la renonciation à hadana, dont il aprononcé la nullité comme consentie par la mère durant sa
minorité et décidé que l'enfant devait être élevé par ses père
et mère naturels ; qu'il lui est fait grief d'une violation des
dispositions du décret du 12 août 1936, en ce qu'il a, admis que
la dame Kacemi âgée de plus de 22 ans au jour de la, renon
ciation n'avait pas toutefois atteint sa majorité, fixée à 25 ans
pour la fille non mariée, alors qu'ayant donné naissance à un
— 85 —
enfant, elle devait être assimilée à la femme mariée pour la
quelle la majorité chrématique est abaissée à 22 ans ;
Mais attendu que ce moyen nouveau et d'intérêt privé est,
par suite, irrecevable ;
Sur le deux'ème moyen
Attendu qu'il est reproché au tribunal d'Alger s'étant borné
à affirmer qu'il était de l'intérêt de l'enfant d'être élevé par
ses père et mère naturels, d'avoir ainsi écarté, sans en donner
de motifs valables, la demande d'enquête sociale devant per
mettre de déterminer, en fonction de l'intérêt de l'enfant, à
qui la hadana devait être dévolue ;
Mais attendu qu'en l'état de la nullité prononcée de la re
nonciation par la mère au droit de hadana, les demandeurs qui
n'ont aucun lien de parenté avec l'enfant n'étaient, par suite,
pas qualifiés pour prétendre à l'exercice de ce droit de garde ;
qu'il s'ensuit que le moyen s'avère sans portée utile ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén).
N 79
CAFE MAURE. —
EXPLOITATION'COMMERCIALE. — ARRETE
GUBERNATORIAL DU 16 MARS 1939. — INTERDICTION DE
CEDER. LA LICENCE. — NECESSITE D'ETRE LOCATAIRE DU
LIEU DE L'EXPLOITATION. — LE CARACTERE ILLICITE
D'UN CONTRAT DE SOCIETE EST ETABLI EN FONCTION
1- DE L'APPORT EN SOCIETE DE LA LICENCE, CE QUI
IMPLIQUE UNE CESSION .2°. DE L'ETABLISSEMENT DES
QUITTANCES DE LOYER AU NOM DE L'ASSOCIE NON TI
TULAIRE DE LA LICENCE.
Douar e. Iralni. — T.C. Tizi-Ouzou, 15 mars 1957.
ARRET
du 9 Juin 1958
LA COUR :
Au fond
Sur les deux premiers moyens réunis
Attendu que déclarant nul et de nul effet le contrat de
société invoqué par Daoud Ali qui soutenait avoir fait apport
d'un local commercial en vue de l'exploitation d'un café maure
par Iratni Amar, titulaire de la licence, le jugement infirmatif
attaqué a rejeté la demande en règlement des comptes de l'as
sociation prétendue qui dissimulait en réalité une sous-location
— 86 —
interdite par la loi ; qu'il lui est fait grief do n'avoir pas donné
de réponse aux conclusions faisant valoir le caractère licite de
l'association ayant pour objet l'exploitation commerciale d'un
Café maure, à l'exclusion de l'autorisation administrative ac
cordée personnellement à Iratni et d'avoir, sans en donner les
motifs, prononcé la nullité de cette association au regard de
l'arrêté gubernatorial du 16 mars 1939 ;
Attendu qu'en énonçant que l'arrêté susvisé interdit au titu
laire de la licence de la céder et lui fait obligation d'être lo
cataire des lieux où s'exploite le café maure, pour dire nul et
de nul effet au regard de ce texte l'association alléguée, les
juges d'appel qui admettaient ainsi implicitement mais néces
sairement que l'apport de la licence par l'associé titulaire en
implique la cession à la société et qui par ailleurs, constataient
que les quittances de loyer n'avaient cessé d'être établies au
nom de l'autre associé seul, ont fait ressortir le caractère illi
cite de la convention invoquée ; qu'en conséquence, ils n'ont
pas laissé sans réponse les conclusions visées au moyen et suf
fisamment motivé leur décision ; d'où il suit que ces moyens
sont infondés ;
Sur le troisième moyen pris d'une fouSîe application de l'ar
rêté gubernatorial du 16 mars 1939 :
Attendu que ce moyen, qui dénonce un vice de fond dansun litige personnel et mobilier, échappe à la compétence de
la Chambre d'annulation en vertu des articles 2 et 38 de l'ordonnance du 23 novembre 1944 ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst Gén.).
N°80
;. — MOTIFS. — MOTIF SURABONDANT.
11. —- MOYEN SANS PORTEE UTILE. —
IRRECEVABILITE.
Abismail c. Benali et «.— T.C. Blida, 21 mars 1957.
ARRET
du 10 Juin 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le second moyen pris d'une dénaturation des éléments dudébat
Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement attaquéque Abismail Hadjoudja a, par acte sous seings privés non con-
— 87 —
testé du 22 février 1955, cédé à la djemaâ des Atatchas une
certaine superficie de terrain en vue de l'agrandissement d'un
cimetière dont il est limitrophe, mais qu'ultérieurement il a
revendiqué le dit terrain à l'encontre de Benali Yahia au motif
que celui-ci y avait planté des palmiers en violation de l'ac
cord précité ;
Que, par le jugement infirmatif attaqué, le tribunal de Blida
a déclaré l'action du demandeur irrecevable comme intentée à
un défendeur qui justifiait par un acte sous seings privés du
10 mars 1955 n'avoir agi qu'en qualité de mandataire salarié
de la Djemaâ, alors qu'elle aurait dû l'être aux membres mê
mes de cette Djemaâ qui avaient participé à l'acte du 22 février
1955 ; Attendu qu'il lui est reproché d'avoir à cet effet con
sidéré que les énonciations de la sentence frappée d'appel éta
blissaient que l'action qui lui était soumise mettait en discus
sion la propriété de l'immeuble considéré, alors qu'au contraire
elles prouvaient que la question de propriété ne se posait pas ;
Attendu que, pour juger que l'action devait obligatoirement
être dirigée contre la djemaâ, le tribunal a relevé essentiel
lement qu'elle tendait à la résolution de la cession du droit de
propriété que le demandeur lui avait consentie le 22 février
1955 ; Que ce motif à lui seul déterminant dispense la Cour de
rechercher si le tribunal a réellement commis la dénaturation
alléguée dans le motif critiqué qui, purement surabondant,
ne saurait vicier sa décision ;
Sur le premier moyen pris d'une violation des régies de la
preuve en ce que le tribunal a fondé sa décision admettant que
le défendeur n'avait planté les palmiers sur l'immeuble litigieux
qu'en sa qualité de mandataire salarié de la djemaâ, constatée
par une procuration sous seings privés du 10 mars 1955, sur
ce que Abismail Hadjoudja qui contestait l'authenticité du man
dat ne prouvait pas sa fausseté, alors que sa simple dénégation
suffisait pour que Benali sot légalement tenu de rapporter la
preuve de l'authenticité de l'acte dont il se prévalait :
Attendu que, quelque fondé qu'il puisse être, le moyen
s'avère sans portée utile et irrecevable dès lors que le juge
ment attaqué énonçant que l'action tend à la résolution d'un
acte d'aliénation consentie à la djemaâ des Atatchas, Benali
Yahia n'avait aucune qualité pour y défendre, soit qu'il ait
planté les palmiers comme mandataire de la djemaâ, soit qu'il
ait agi pour son propre compte :
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 81
POURVOI. — EXPEDITIONS DE JUGEMENTS NON JOINTES A LA
REQUETE ET PRODUITES ULTERIEUREMENT HORS DE
LAI. — IRRECEVABILITE.
Attafi l-. Ait Mokhtar. — T.C. Sétif, 22 mars 1957.
ARRET
du 10 Juin 1958
— 88 —
N° 82
VENTE. — VENTE AVEC RESERVE D'USUFRUIT. — RESCISION
POUR CAUSE DE LESION. — VIOLATION DE LA LOI MU
SULMANE.
Le caractère aléatoire ne peul être dénié à une vente ance réserve
d'usufruit par cela seul que la valeur de l'usufruit réservé est sus
ceptible d'évaluation au moyen d'un calcul de probabilité sur la
durée moyenne de la vie humaine, les statistikues valables lorsqu'il
s'agit de la durée d'un grand nombre de personnes n'écartant pas
l'aléa inhérent à la survie toujours incertaine d'un individu déter
miné.
Doit, en conséquence, être annale, le jugement qui, au soutien cle
sa décision annulant pour cause de lésion une vente avec réserve
d'usufruit, décide que, malgré cette réserve, la vente ne présentait
pas un caractère aléatoire et qu'elle aboutissait à un enrichissement
sans cause des acheteurs du fait que, même en tenant compte des
intérêts et revenus ci prévoir vendant la durée présumable de la
vie de l'usufruitier, le prix convenu était disproportionné à la valeur
de l'impôt vendu.
Consorts iïlaagoun c. Yousfi. — T.C. Blida, S avril 1957.
ARRET
du 16 Juin 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le moyen unique pris d'une violation de la loi musulmaneen matière de rescision d'une vente pour cause de lésion :
Attendu que, par le jugement-confirmatif attaqué, le tribu
nal de Blida a, à la requête de Yousfi Naïlia, annulé pour
cause de décision une vente par elle consentie, pour le prix
de 10.000 francs, aux frères Elaagoun Ahmed et Bachir, portant sur le quart lui revenant dans un immeuble dépendantde la succession de son époux dont elle se réservait l'usufruitsa vie durant ;
Qu'au soutien de sa décision, le tribunal a décidé que mal
gré la réserve d'usufruit, la vente attaquée ne présentait pasun caractère aléatoire et qu'ulle aboutissait à un enrichissement sans cause des acheteurs du fait que, même en tenantcompte des intérêts et revenus à prévoir pendant la duréeprésumable de la vie de l'usufruitière, le prix convenu étaitdisproportionné à la valeur de l'objet vendu ;
^
Mais attendu que le caractère aléatoire ne peut être déniéa une vente avec réserve d'usufruit par cela seul que la valeurde 1 usufruit reserve est susceptible d'évaluation au moyendun calcul de probabilité fondé sur la durée moyenne de lavie humaine, les statistiques valables lorsqu'il s'agit de la durée d un grand nombre de périmes n'écartant pas l'aléa inhérent a la survie toujours incertaine d'un individu détermnié ■
— 89 —
Que le jugement attaqué a donc méconnu les règles qui gou
vernent la matière de la rescision pour cause de lésion et doit,en conséquence, être annulé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 83
APPEL. — NECESSITE DE FAIRE CONNAITRE, DEVANT LA JURI
DICTION AU SECOND DEGRE, LES GRIEFS ARTICULES
CONTRE LA DECISION ENTREPRISE. — A DEFAUT, VIOLA
TION DES FORMES DE PROCEDER.
Abdelouahab c. Consorts Boubekeur. — T.C. Blida, 11 avril 1957.
ARRET
du 16 Juin 1958
LA COUR ;
Au fond :
Sur le deuxième moyen pris d'une violât on des formes de
procX-der :
Attendu que si, par l'effet dévolutif de l'appel, la juridic
tion du second degré est saisie da l'entier examen de la cause,
encore faut-il que l'appelant, soit par conclusions ou notes,
soit par déclarations verbales insérées au plumitif d'audience,fasse connaître ses griefs contre la décision qu'il entreprend ;
Attendu que, sur la demande de Boubekeur Mohamed,acquéreur de Abdelouahab Abdelkader de droits indivis oc
cupés par Boubekeur Mahmed qui lui en interdisait la prise
de possession, le juge de paix d'Affreville prononçait con
damnation solidaire du vendeur et de l'indu occupant à des
dommages-intérêts et que le tribunal de Blida, saisi de l'appel des deux défendeurs, tout en confirmant en principe la
sentence déférée, à l'encontre de l'appelant Abdelouahab.
prononçait d'office la mise hors de cause de l'autre appelant,
Boubekeur M'ahmed, pourtant défaillant, méconnaissant ainsi
le principe susénoncé et que la violation des formes de pro
céder qui en résulte doit entraîner l'annulation de sa déci
sion de ce chef, sans qu'il soit besoin d'examiner le premier
moyen qui n'est que subsidiaire ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule le juge
ment mais seulement en ce qu'il a mis hors de cause
d'office Boubekeur M'ahmed, appelant défaillant.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 90 —
N° 84
POURVOI — EXPEDITION INCOMPLETE D'UN JUGEMENT AVANT
DIRE DROIT, JOINTE A LA REQUETE. — EXPEDITION NE
CONTENANT PAS LES QUALITES. — IRRECEVABILITE.
Tagherset c. Seghir El Hadi. — T.C. Alger, 4 mai 1957.
ARRET
du 17 Juin 1958
N° 85
MARIAGE. - PREUVE. — ENQUETE. — APPRECIATION DES TE-
MOiGNAGES. — (TEMOIGNAGES SANS CARACTERES DI
RECT, PRECIS ET PERTINENT. — PREUVE NON RAPPOR
TEE.
Si, entre musulmnas, le mariage peut êlre prouvé par enquête,
encore faut-il que les témoignages recueillis soient directs, précis et
pertinents.
L'appréciation des juges du fond en la matière n'est pas souve
raine et demeure soumise un contrôle de la chambre d'annulation.
Justifie sa décision le tribunal qui, pour éacrter la preuve d'un
mariage, relève que les dépositions recueillies en la cause à l'effet
d'établir le mariage présentent des imprécisions et un manque de
pertinence tels qu'ils ne peuvent suffire à l'administration de cette
preuve.
Zenati e. Consorts Bouzekrini. — T.C. Blida, 4 juillet 1957.
ARRET
du 17 Juin 1958
LA COUR :
Attendu que le pourvoi est régulier et recevable en la
forme ;
Au fond :
Sur le moyen unique pris d'une violation des règles de la
preuve en matière de mariage :
Attendu que le jugement infirmatif attaqué ayant débouté
Zenati Mhamed El Hadj de sa demande tendant à voir dire,au regard des consort Bouzekrini, qu'il avait, dans le cou
rant de l'année 1940, contracté mariage avec feue Bouze
krini Aïcha, au motif qu'il n'avait point rapporté la preuve
de ce mariage, il lui est fait grief d'avoir écarté les témoi
gnages de l'enKuête et de s'être fondé sur l'aveu des parties
— 91 —
consigné dans divers actes, alors qu'un tel aveu est inopérant
en matière de preuve du mariage ;
Attendu que si, entre Musulmans, le mariage peut être
prouvé par enquête, encore faut-il que les témoignages re
cueillis soient directs, précis et pertinents ;
Attendu, en outre, que l'appréciation des juges du fond
n'est pas en la matière souveraine et demeure soumise au
contrôle de la chambre d'annulation ;
Mais attendu qu'à juste titre le jugement déféré relève
que les dépositions recueillies en la cause à l'effet d'établir
le mariage de Zenati Mhamed avec feue Bouzekrini Aïcha.
présentent des imprécisions et un manque de pertinence tels
qu'ils ne peuvent suffire à l'admin:stration de cette preuve ;
Attendu, en outre, que les considérations tirées par les
juges du fond des déclarations des parties consignées dans
divers actes notariés et desquelles il résulterait que la dé
funte était, peu avant son décès survenu en 1954, « l'épouse
divorcée et non remariée d'un sieur Ouamria » ne sont que
surabondantes et sont restées sans influence sur le dispositif
et la décision attaquée ; d'où il suit que le moyen est à
rejeter ;
Par ces motifs
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Decori, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 86
/. — INTERPRETES-TRADUCTEURS. — TRADUCTIONS CERTI
FIEES. — FONT FOI EN JUSTICE DE LEUR CONTENU. —
LES TRIBUNAUX N'ONT PAS A SEFAIRE'
PRESENTER LES
TITRES EUX-MEMES.
II. — PROCEDURE. — APPEL. — L'APPELANT NE SAURAIT SE
FAIRE UN GRIEF D'ANNULATION D'UNE IRREGULARITE
DE PROCEDURE QUI NE PEUT QUE PRE.IUD1C1ER A SON
ADVERSAIRE.
111. — MOYEN NOUVEAU, MELANGE DE FAIT ET DE DROIT, NE
RESSORTISSANT QU'A DES INTERETS PRIVES.
IV. — PREUVE. — ACTE AUTHENTIQUE. — ACTES ETABLIS EN
MAHAKMA.
Un acte sous seings privés non enregistré, établi en mahakma, est
ci bon droit qualifié par le juge d'acte authentique.
Et la partie qui entend en contester la sincérité ne peut qu'en
établir la fausseté. Si elle ne le fait pas ou ne propose pas de le
faire, l'acte est reconnu à bon droit authentique.
V. — PREUVE. — POUVOIRS DU TRIRUNAL. — LE TRIBUNAL
EST APPRECIATEUR SOUVERAIN DE L'OPPORTUNITE ET
DE LA PERTINENCE DES MOYENS DE PREUVE QUI LUI
SONT SOUMIS.
Zirara e. Boussehaba. — T.C. Blida, 2 février 1957.
— 92 —
ARRET
du 23 Juin 1958
LA COUR :
En la forme :
Sur l'excep.ion d'irrecevabilité du pourvoi proposée parBous-
sehal'a Mohamed et t'rée de ce que Zirara Ali n'a joint à -a
requête qu'une traduction s gnée de l'interprète judiciaire, de la
sentence du cadi du 13 mai 1955, frappée d'appel, alors que
vérifier l'exactitude de cette traduction il eut été nécessaire
de produire également l'original de cette décision :
Mais attendu que les traductions dûment certifiées par un
interprète traducteur font foi en justice de leur contenu si
bien que les tribunaux n'ont pas à se faire présenter les
titres eux-mêmes ; d'où il suit que l'exception est infondée
et le pourvoi recevable - ;
,Au fond :
Sur ie premier moyen
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a fait droit
à la demande introduite par Boussehala Mohamed contre
Zerara Ali pour revendiquer la propriété d'une terre sise
en bordure d'un cimetière entourant un sanctuaire, et obtenir
le déguerpissement du défendeur qui l'avait indûment occu
pée ; qu'il lui est fait griefd'avoir-
statué non pas à l'encon
tre du seul Zirara Ali mais à l'encontre de celui-ci et d'autres
personnes considérées comme ses mandants, alors cependant
que seul, le dit Zirara avait été assigné ;
Mais attendu, d'une part, que ce dernier, en sa qualité d'appelant, ne saurait se faire un grief d'annulation d'une irré
gularité de procédure qui ne pouvait de toute façon que pré-
judcier à son adversaire ; Attendu, d'autre part, que le
moyen mélangé de fait et de droit, nouveau et d'intérêt privé
est irrecevable devant la Chambre de Révision et que le
fait par le tribunal de Blida d'avoir décidé d'office, fût-ca
même à tort, l'appel recevable ne peut suppléer l'absencede toute exception élevée à cet égard par l'intimé intéresséà le faire ; d'où il suit que le moyen est à rejeter ;
Sur les deuxième et cinquième moyens réunis pr's d'une vio
lation des règles de la preuve
Attendu qu'il est reproché au tribunal d'appel d'avoir con
firmé la décision du premier juge, alors que celle-ci était
fondée, d'une part sur la connaissance personnelle et les renseignements secrets de ce magistrat, d'autre part, sur une
simple attestation contenant les déclarations d'un certain
nombre de personnes, attestation considérée à tort comme
constituant une « preuve testimoniale » ;
Mais attendu que mélangés de fait et de droit, nouveaux
et ne ressortissant qu'à des intérêts privés, les deux moyens
sont irrecevables ;
— 93 —
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est imputé aux juges d'appel d'avoir qualifié
d'authentiques des actes produits par le demandeur intimé,alors qu'il s'agissait en réalité d'actes sous-seings-privés non
enregistrés ; Mais attendu que les dits juges ayant constaté
que ces actes avaient été établis en la mahakma de Guerrara
ont pu dire à bon droit qu'ils étaient authentiques ; Attendu
que l'appelant qui n'en contestait la sincérité ne pouvait
qu'en établir la fausseté, ce qu'il n'a pas fait ni proposé de
faire ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen pris d'une violation des règles de la
preuve en ce que le tribunal d'appel a rejeté comme nonperti-
ner'e et inadmissible l'offre de preuve du défendeur appelant :
Attendu qu'ayant apprécié que cette offre portait sur des
faits imprécis et en tout cas d'ores et déjà contredits par
les propres déclarations de l'appelant, d'où il résultait que
l'intimé avait depuis longtemps joui du terrain litigieux en
y effectuant des labours et des plantations d'arbres fruitiers,le dit tribunal qui est appréciateur souverain de l'opportunité
et de la pertinence des moyens de preuve qui lui sont sou
mis, a pu, à bon droit, décider comme il l'a fait de ce chef,
sans pour autant violer les règles régissant la matière de la
preuve ; d'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 87
/. — CHEFAA. — CHEFAA KABYLE. — CONSIGNATION. — AP
PLICATION DE LA LOI MUSULMANE, DANS LE SILENCE
DE LA COUTUME.
La loi musulmane est toujours applicable dans le silence de la
coutume en matière de chefaa kabyle.
Elle exige que la consignation, pour être suffisante et valable,
porte sur l'intégralité du prix de la vente à l'acte d'acquisition,
même s'il a été stipulé entre les contractants qu'une fraction de ce
prix était déléguée à d'éventuels créanciers antichrésisles des ven
deurs.
IL — CHEFAA. — CONSIGNATION. — CONSIGNATION INSUFFI
SANTE EQUIVALANT A UN DEFAUT DE CONSIGNATION.
— MOYENS SANS PORTEE UTILE.
Consorts Hettal c. Consorts Hettal. — T.C. Tizi-Ouzou, 15 février
1957.
ARRET
du 23 Juin 1958
— 94 —
LA COUR
Au fond :
Sur le quatrième moyen
Attendu que le jugement infirmatif attaqué a débouté dame
Lekhal Oumessaad et ses trois enfants Hettal Mohamed, Ra
bah et Kaci béni Ali de la demande en chefaa introduite
par eux contre les consorts Hettal ben Saïd, relativement à
la vente d'une parcelle consentie à ces derniers par la veuve
et les enfants de Hettal Mohamed ben Amar, suivant acte des
17 février et 8 avril 1955 ; qu'il lui est fait grief d'avoir, pour
décider ainsi, apprécié que la consignation effectuée par les
retrayants était insuffisante, alors cependant qu'elle était
égale à la partie du prix d'acquisition réellement versé aux
vendeurs et qu'elle était, en outre, assortie de la promesse
des dits retrayants de payer entre les maîns des créanciers
antichrésistes des aliénateurs, le solde du prix intégral,comme prévu à l'acte susvisé ;
Mais attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la
loi musulmane toujours applicable dans le silence de la cou
tume en matière de chefaa kabyle, exige que la consignation
pour être suffisante et valable porte sur l'intégralité du prix
de la vente prévu à l'acte d'acquisiiton, même si, comme en
l'espèce, il a été stipulé entre les contractants qu'une fraction
de ce prix était déléguée à d'éventuels créanciers antichré
sistes des vendeurs ;
Attendu que les juges d'appel ont, en la cause, expressé
ment proclamé ce principe qu'ils ont appliqué et dont ils
ont fait le fondement de leur décision qui, dès lors, est léga
lement justifiée ; d'où il suit que le moyen est infondé ;
Sur les premier, deuxième et tro'sième moyens réunis :
Attendu qu'il est reproché aux juges d'appel d'avoir, d'une
part, apprécié que les retrayants n'avaient pas la qualité deco-indivisaires ; d'autre part, omis de répondre à des con
clusions des demandeurs tendant à être autorisés à rappor
ter la preuve de l'indivision par eux alléguée ; de troisième
part, insuffisamment motivé leur appréciation quant à lamultiplicité des terrains, portant le nom de « El Mechataa >
et à la déduction qui en a été faite par eux de l'existenced'un partage de la terre litigieuse du même nom ;
Mais attendu que ces trois moyens s'avèrent sans portée
utile, dès lors que le jugement attaqué a déclaré irrecevable la demande en chefaa au motif essentiel d'une consigna-
gion insuffisante équivalant à un défaut de consignation ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 95 —
N" 88
I- — HABOUS. — HABOUS CONSTITUE EN ETAT DE DERNIERE
MALADIE. — CONDITIONS DE SA NULLITE.
Seules sont exigées comme conditions nécessaires de la nullité
d'un habous constitué en état de dernière maladie, celles qui ont
été mises en évidence par la formule du serment supplétoire or
donné pur le juge à l'effet d'affirmer que le fondateur était atteint
depuis plusieurs années d'une maladie chronique et qu'il se trou
vait, à l'époque où avait été rédigé l'acte de habous, dans la phase
aiguë de cette maladie, la constatation de l'affaiblissement des fa
cultés intellectuelles du fondateur n'étant pas, en pareil cas, jugée
indispensable.
IL — PREUVE. — SERMENT SUPPLETOIRE. — LES PRESOMP
TIONS JUSTIFIANT LA DELATION D'UN TEL SERMENT
RESSORTENT DE L'APPRECIATION SOUVERAINE DES JU
GES DU FOND. — INCOMPETENCE DE LA CHAMBRE D'AN-
NULA TION.
Kellalba c. Consorts Kellalba. — T.C. Blida, 11 avril 1957.
ARRET
du 24 Juin 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu que le jugement attaqué a déféré à Kellalba Mo
hamed et Kellalba Abdelkader, demandeurs à l'action intro
duite par eux contre Kellalba Zohra pour voir prononcer la
nullité d'un habous constitué au profit de celle-ci par leur
sœur commune, Kellalba Kheira, un serment supplétoire à
l'effet d'affirmer que la fondatrice était atteinte depuis plu
sieurs années d'une maladie chronique et qu'elle se trouvait
à l'époque où avait été rédigé l'acte de habous dans la phase
aiguë de cette maladie ; qu'il lui est fait grief d'avoir ainsi
décidé alors que pour pouvoir annuler un tel habous il fallait
également rapporter la preuve que la constituante ne jouis
sait plus à l'époque susvisée de l'entière possession de ses.
facultés intellectuelles, preuve qui ne pouvait découler du
serment tel que déféré ;
Mais attendu que contrairement à ce qui est soutenu, seu
les sont exigées comme conditions nécessaires de la nullité
d'un habous constitué en état de dernière maladie, celles qui
ont été mises en évidence par la formule du serment pré
rappelé, la constatation de l'affaiblissement des facultés in
tellectuelles du fondateur, n'étant pas en pareil cas jugée
indispensable ; d'où il suit que le moyen est infondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est reproché au tribunal d'appel d'avoir con
sidéré qu'il y avait des présomptions en faveur des intimés,alors que les seules présomptions existant en la cause résul-
— 96 —
taient du certificat médical, produitpar l'appelante et que,
dès lors, c'était à celle-ci qu'aurait dû être déféré le serment
supplétif ; Mais attendu que les juges du fond apprécient
souverainement l'existence de présomptions justifiant la dé
lation d'un tel serment, et que leur appréciation sur ce point
échappe au contrôle de la Chambre d'annulation ; d'où il
suit que le moyen est irrecevable ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 89
/. — MARIAGE. — PAIEMENT DE LA DOT. — ACTE DE NOTO
RIETE. — VALIDITE. — DEFAUT DE REPONSE A CON
CLUSIONS. — ANNULATION.
Encourt l'annulation la décision d'un tribunal qui, requis de dire
sans valeur une notoriété non coniradictoirement établie, n'a ré
pondu ni expressément , ni implicitement, à cette demande.
II. — PREUVE. — ACTE DE NOTORIETE. — NE PEUT SUPPLEER
LA PREUVE TESTIMONIALE.
Un acte de notoriété ne peut être opposé à ceux qui n'y ont pas
été parties, ni suppléer une preuve régulière. En droit musutman,
la preuve, testimoniale est admissible en principe en toute matière.
Doit être annulée la décision par laquelle un tribunal, rejette une
offre de preuve par témoins au motif qu'un commencement de
preuve à l'encontre d'une partie résulte d'une notoriété à laquelle
il était demeuré étranger.
III. — MARIAGE. — PAIEMENT DE LA DOT. — IL PEUT ETRE
DEROGE PAR DES CONVENTIONS PARTICULIERES AU
PAIEMENT PAR MOITIE EN DEUX FOIS.
Selon un usage généralement suivi, la moitié de la dot (naqd)
esl exigible dès la conclusion du mariage et l'antre moitié (kali,
seulement après sa consommation.
Il peut être dérogé à cet usage par des cnoventions particulières.
On ne doit pas donner à cet usage la valeur d'une règle stricte et
absolue.
Bechouiref t. Afifi. — T.C. Oran, 19 juin 1957.
ARRET
du 24 Juin 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le quatrième moyen pris d'une violation des formes deprocéder :
Attendu que, saisi de l'appel d'une sentence qui, sur lademande de Afifi Rabia, épouse répudiée de Bechouiref Mo-
— 97 —
hamed, en paiement notamment du reliquat de sa dot, le tri
bunal d'Oran admettait par le jugement confirmatif attaqué
comme commencement de preuve en faveur de la deman
deresse les énonciations d'une notoriété établie à sa requête
et rejetait l'offre du défendeur de prouver par témoins la
consistance de la dot, son exigibilité avant la consommation
du mariage et son paiement intégral ;
Attendu que les qualités de cette décision portent que
Bechouiref a requis le tribunal de dire sans valeur cette
notoriété non contradictoirement établie ;
Attendu qu'à ces conclusions le tribunal n'a répondu ni
expressément ni implicitement, la violation des formes de
procéder qui en résulte devant entraîner l'annulation de sa
décision ;
Sur les premier, deuxième, cinquième et sixième moyens réu
nis :
Attendu qu'un acte de notoriété ne peut être opposé à ceux
qui n'y ont pas été parties, ni suppléer une preuve régu
lière ; qu'en droit musulman, la preuve testimoniale est ad
missible en principe en toute, matière ;
Attendu qu'au mépris de ces principes, le tribunal d'Oran
a, pour rejeter l'offre de preuve par témoins, décidé qu'un
commencement de preuve résultait à l'encontre de Bechoui
ref Mohamed d'une notoriété à laquelle il était demeuré
étranger, que cette violation des règles de la preuve doit
également entraîner l'annulation de sa décision ;
Sur le septième moyen :
Attendu que si, selon un usage généralement suivi, la moi
tié de la dot (naqi) est exigible dès la conclusion du maria
ge et l'autre moitié (kali) seulement après sa consommation.
il peut être dérogé par des conventions particulières et qu'en
donnant à cet usage la valeur d'une règle stricte et absolue.
le tribunal a méconnu les principes régissant la matière ;
que, de ce chef, sa décision doit être annulée, sans qu'il soit
nécessaire de statuer sur les deux autres moyens qui ne
sont que subsidiaires ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 90
POURVOI. — EXPEDITION DU JUGEMENT NON JOINTE 1 LA
REQUETE. — PRODUCTION HORS DELAI. — IRRECEVABI
LITE.
Mahi i. Consorts Benguenane. — T.C. Mascara, 15 février 1957.
ARRET
du 30 Juin 1958
— 98 —
N° 91
SUCCESSION. — INVENTAIRE. — RETRAIT SUCCESSORAL. —
DROITS HEREDITAIRES AYANT FAIT L'OBJET D'UN HE
TRAIT SUCCESSORAL. — EFFETS.
Mansour e. Fridjet. — T.C. Batna, 20 février 1957.
ARRET
du 30 Juin 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le moyen unique
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a débouté
Mansour Abdallah des fins de la demande introduite par
lui contre les consorts Fridjet pour voir déclarer nul, com
me ne précisant pas la consistance exacte des biens de la
succession de feu Fridjet Salah, l'inventaire dressé par le
cadi le 10 juillet 1953. les dits biens ayant fait l'objet pour
partie d'une vente à lui consentie par la sœur du défunt,Fridjet Sassia, suivant acte notarié du 21 avril 1948, puis
d'une action en retrait successoral dirigée contre lui par Frid
jet Sassia, à laquelle il a été fait droit par jugement du 23
mai 1950 et arrêt confirmatif du 19 avril 1951 ;
Attendu qu'il lui est fait grief d'avoir dénaturé la demande
en s'àbstenant de vérifier les titres dont se prévalait Man
sour au soutien de ses prétentions et en se bornant à affir
mer que son action prétendument fondée sur l'acquisition
réalisée le 21 avril 1948 était irrecevable ;
Mais attendu que le dit Mansour Abdallah a bien précisé
qu'il agissait comme venant aux droits de Fridjet Sassia,sœur du défunt, en suite de l'acquisition qu'il avait faite de
ses droits héréditaires par acte du 21 avril 1948, droits ayant
fait, par la suite, l'objet de l'action en successoral
exercé par Fridjet Sassi, frère de la venderesse ;
Attendu, d'ailleurs, que le demandeur a lui-même recon
nu dans sa requête en annulation « qu'à tort et par erreur »,ii avait déclaré agir en la qualité sus-indiquée ; Attenduqu'en statuant comme ils l'ont fait, les juges d'appel sont
donc restés dans le cadre du débat tel qu'il leur a été pré
senté par le dit Mansour Abdallah et qu'ils n'ont aucune
ment dénaturé la contestation soumise à leur appréciation ;d'où il suit que le moyen est infondé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, la rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 99 —
N" 92
J. — MOTIFS. — CONTRARIETE DE MOTIFS. — VIOLATION DES
FORMES DE PROCEDER. — APPLICATION EN MATIERE
DE MANDAT.
Un tribunal ne peut sans se contredire toul à la fois reconnaître
l'inopposabilité au mandant- de la transaction passée en son nom
par un mandataire sans qualité et en admettre la validité à son
égard, en raison d'un engagement de porte-fort auquel il était resté
étranger.
II.
111.
IV.
CONCLUSIONS. DEFAUT DE REPONSE.
- MOYEN NOUVEAU, D'INTERET PRIVE.
LITE.
1RRECEVABI-
- PREUVE. — OFFRE DE PREUVE. — SA PERTINENCE RE
LEVE DU POUVOIR D'APPRECIATION SOUVERAIN DES JU
GES DU FOND.
Hihi i. El Amri. — T.C. Batna, 27 février 1957.
ARRET
du1"
Juillet 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu que, pour rejeter la demande de Hîni Youssef en
revendication d'une parcelle « Es Souareg ,/, le jugement
confirmatif attaqué a validé une transaction, qui en recon
naissait la propriété au défendeur, El Amri Benazouz, dont
il disait que le demandeur l'avait tacitement ratifiée et a
fait droit à l'exception de prescription invoquée ; qu'il lui
est fait grief d'une violation des formes de procéder, ensem
ble contrariété et défaut de motifs en ce que, tout en recon
naissant que le mandataire ayant conclu la transaction au
nom du demandeur avait ainsi excédé son mandat, il a
néanmoins, en raison de l'engagement personnel de porte-
fort pris par ce mandataire en la convention, validé la tran
saction ;
Attendu que le tribunal de Batna ne pouvait tout à la
fois sans se contredire reconnaître l'inopposabilité au man
dant de la transaction passée en son nom par un mandataire
sans qualité et en admettre la validité à son égard, en raison
d'un engagement de porte-fort auquel il était resté étran
ger, la contrariété dans les motifs de sa décision en résultant
constituant une violation des formes de procéder ;
Sur Se deuxième moyen prfc également d'une v-olation des
formes de procéder et d'une méconnaissance de la loi musul
mane en matière d'obligat on
Attendu que la ratification expresse ou tacite d'une con
vention implique nécessairement sa prise de connaissance par
— 100 —
celui de qui elle émane ; qu'en se bornant à constater que la
transaction remontait au 7 août 1919 pour affirmer qu'il était
invraisemblable que le demandeur l'ait ignorée et que par
son inaction prolongée il l'avait ratifiée tacitement, sans
autrement énoncer les éléments de fait d'où résultait cette
connaissance que déniait expressément Hahi Youssef, le tri
bunal a laissé ses conclusions sans réponse véritable ; que,
par suite, sa décision de ce chef manque de base légale ;
Sur le troisième moyen pris d'une violation de la loi musul
mane en matière de prescription en ce que le tribunal a admis
l'exception de prescrption soulevée par El Amri Benazouz, alors
que sa possession ne s'éta-lt pas exercée en verfu d'un juste
titre
Attendu que ce moyen nouveau et d'intérêt privé est, par
suite, irrecevable ;
Sur le quatrième moyen pris d'une violation des règles de
ia preuve :
Attendu qu'il est fait grief au tribunal d'avoir écarté l'of
fre du demandeur de prouver que son père avait laissé en
succession des droits dans la parcelle « Es Souareg ,/, au mo
tif que non proposé devant le premier juge, elle n'était pas
de nature à aller à l'encontre de la prescription acquisitive
du défendeur, alors d'unis part qu'une- preuve peut être
valablement offerte pour la première fois en cause d'appel et,
d'autre part, que l'exception de prescription ne constituait pas
un obstacle à l'admission de cette preuve ;
Mais attendu que les juges du fond en se bornant à cons
tater que l'offre de preuve n'avait pas été proposée en pre
mière instance et en la rejetant comme non pertinente, ont,
au contraire, reconnu ainsi qu'elle pouvait être valablement
formulée pour la première fois devant eux et qu'ils ont usé
de leur pouvoir souverain d'appréciation pour en dénier la per
tinence ; d'où il suit que le moyen doit être rejeté ;
Attendu que les erreurs de droit relevées au premier et
deuxième moyens ne sont pas de nature à modifier au fond
la décision déférée qui se trouve justifiée par les autres
moyens ; d'où il suit qu'il n'y ^ heu à renvoi ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule, par voie
de retranchement, les chefs de la décision attaquée qui ont
validé la transaction susvisée et constaté sa ratification par
Hihi ; et, pour le surplus, rejette. Dit n'y avoir heu à renvoi.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 93
EAUX. — REGIME DES EAUX. — DROIT A L'USAGE DES
EAUX. — DENATURATION DES ELEMENTS DU DEBAT
(NON).
— 101 —
Reste dans la limite stricte d'une demande qu'il ne dénature pas.
le tribunal qui, saisi de conclusions tendant à voir dire qu'une
enquête avait établi l'usage immémorial de l'eau d'un canal, ra
cherche si le demandeur a non un droit de propriété mais un droit
d'usage sur les eaux litigieuses d'une source née sur ta propriété
du défendeur.
IL — EAUX. ~ SERVITUDE DE CHERB. — LOI DU 16 JUIN 1851.— MOYEN SANS PORTEE, EN L'ESPECE.
Dés lors qu'il s'agit de déterminer si des droits de propriété.
d'usufruit ou d'usage existaient dès avanl 1851 au profit des pro
priétaires de deux parcelles sur les eaux d'une source captée par
un canal d'irrigation, et qu'il esl prouvé que le demandeur ne peul
se prévaloir de droits antérieurs à 1851, ce dernier peul être léga^
lement débouté des fins de sa prétention sans aborder la diseuse
sion instaurée par lui sur le droit de cherb, devenue sans intérêt.
III. — EAUX. — PRESCRIPTION. — LOI DU 16 JUIN 1851. — LA
PRESCRIPTION DE DIX ANS DU DROIT MALEKITE NE
S'APPLIQUE PAS A LA SERVITUDE DE CHERB.
Exposant en principe que, depuis la promulgation de la loi du
16 juin 1851, les sources en Algérie font partie du domaine'public,
un tribunal juge à bon droil implicitement qu'aucun droit sur ces
eaux ne pouvait plus être acquis par prescription à partir de cette
date.
La prescription d'usage d'une servitude au préjudice d'un fonds
qui existe en droit malékite à l'issue de dix années de libre exer
cice, si elle peut s'appliquer pour l'acquisition de toute autre ser
vitude, ne saurait être étendue à la servitude de cherb.
Bensi c. Mokrane. — T.C. Tlemcen, 12 mais 1957.
ARRET
du V Juillet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu qu'après annulation de son précédent jugement du
4. janvier 1955, le tribunal de Tlemcen, statuant comme juri
diction de renvoi, c infirmé une sentence du juge de paix de
Dra-el-Mizan qui <* fait droit pour partie à l'action engagée
par Benyacoub Hadj Ali contre les consorts Mokrane pour
faire reconnaître son droit à l'usage de l'eau d'une source née
sur la propriété des défendeurs, et obtenir réparation du
préjudice que ces derniers lui avaient causé en l'empêchant
d'utiliser cette eau pour l'irrigation de deux parcelles ; qu'il
est fait grief audit tribunal d'avoir, en décidant comme il l'a
tait, d'une part, perdu de vue que Bensi Yacoub ne se pré
valait pas d'un droit de propriété sur la source litigieuse,mais seulement d'un droit à l'usage des eaux et d'avoir ainsi
dénaturé les éléments du débat ; d'autre part, considéré que
la loi du 16 juin 1851 avait aboli le droit de cherb alors que
— 102 —
si les eaux de source sont nées, comme en l'espèce, sur des
terres melfc non francisées, ce droit continue à subsister sans
qu'il y ait, d'ailleurs, de distinction à faire entre riverains et
non riverains ;
Sur la première branche :
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, le tribu
nal de Tlemcen a recherché si Bensi Yacoub avait non pas
un droit de propriété, mais un droit d'usage sur les eaux liti
gieuses ; Attendu que, ce faisant, il est resté dans les limites
strictes de la demande qu'il n'a pas dénaturée, Bensi Yacoub
ayant en dernier lieu seulement conclu à voir* dire que « l'en
quête ordonnée avait établi l'usage immémorial à l'eau du
canal » ; d'où il suit que le moyen en cette branche est in
fondé ;
Sur la deuxième branche
Attendu que le tribunal de Tlemcen, se conformant à l'ar
rêt d'annulation du 2 janvier 1956, a expressément indiqué
qu'en l'état de cette décision « la discussion portant sur
l'exercice du droit de cherb tel qu'il était réglementé par le
droit musulman, n'était en l'espèce que subsidiaire, puisqu'il
s'agissait de déterminer en premier lieu si des droits de pro
priété, d'usufruit ou d'usage existaient dès avant 1851 au pro
fit des propriétaires des deux parcelles sur les eaux de la
source captée par le canal d'irrigation » ; Attendu qu'ayant
apprécié aux résultats de l'enquête, que le dit Bensi Yacoub
ne pouvait se prévaloir de droits antérieurs à 1851, il a pu
légalement le débouter des fins de ses prétentions sans abor
der la discussion instaurée par lui sur le droit de cherb qui
était devenue sans intérêt ; d'où il suit que le moyen en
cette branche s'avère sans portée utile ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir
considéré que la servitude de cherb pour être acquise par
prescription devait avoir été exercée avant la loi du 16 juin
1851, alors qu'en droit malékite l'usage d'une servitude au
préjudice d'un fonds se prescrit toujours par dix ans de
libre exercice ;
Mais attendu que le tribunal de Tlemcen ayant posé en
principe que depuis la promulgation de la loi du 16 juin 1851.les sources en Algérie font partie du domaine public, a implicitement jugé à bon droit qu'aucun droit sur ces eaux ne
pouvait plus être acquis par prescription à partir de cette
date ; Attendu que la prescription de dix ans visée au moyen,
si elle peut s'appliquer pour l'acquisition de toute autre ser
vitude, ne saurait être envisagée dans le cas particulier del'espèce ; Attendu qu'en statuant comme il l'a fait, ledit tribunal s'est donc strictement conformé aux principes de droitmusulman régissant le prescription en pareille matière ; d'oùi! suit que le moyen est infondé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp ; Siragusa, Subst. Gén.)
— 103 —
N° 94
I. — TRANSACTION. — DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS
RELATIVES A L'EXISTENCE DE LA CONTREPARTIE. — LA
CONTREPARTIE ETANT UNE DES CONDITIONS INDISPEN
SABLES A L'EXISTENCE MEME DE LA TRANSACTION. CE
DEFAUT DE REPONSE DOIT ENTRAINER L'ANNULATION.
IL — PREUVE. — PREUVE PAR ENQUETE. — TEMOIGNAGES. —
DEPOSITIONS JUGEES DENATUREES PAR LA CHAMBRE
DE REVISION. — LA JURIDICTION DE RENVOI NE PEUT
PLUS FONDER SA DECISION SUR DE TELS TEMOIGNAGES.
Amrioul ,.. Consorts Amrioui. — T.C. Tizi-Ouzou, 22 février 1957.
ARRET
du 7 Juillet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen :
Attendu qu'après annulation de son précédent jugement du
12 novembre 1954, le tribunal de Tizi-Ouzou, statuant comme
juridiction de renvoi, a confirmé une sentence du juge de
paix de Dra-el-Mjzan qui a débouté Amraoui Rabah de la
demande introduite par lui contre les consorts Amraoui ben
Ali pour obtenir leur déguerpissement d'une parcelle dont
ils se disaient propriétaires par l'effet d'une transaction sui
vie d'une longue possession ; qu'il lui est fait grief d'avoir
ainsi décidé sans s'expliquer de façon suffisante sur les
conclusions de l'appelant tendant à voir dire que la transac
tion invoquée était sans contrepa.-tie et partant inadmis
sible ;
Attendu qu'à de telles conclusions le tribunal de Tizi-
Ouzou s'est en effet borné à répondre que « de l'enquête à
laquelle avait procédé le premier juge, il résultait bien qu'une
transaction était intervenue, aux termes de laquelle Amraoui
Rabah avait renoncé à la parcelle litigieuse », omettant ainsi
de donner les précisions demandées sur l'absence alléguée
de la contrepartie considérée à bon droit comme une des
conditions indispensables à l'existence même de la transac
tion ; d'où il suit que le moyen est fondé et que le juge-
gement attaqué doit être annulé ;
Sur le deuxième moyen pris d'une dénaturation des témoi
gnages recueillis au cours d'une enquête
Attendu que, pour statuer comme il l'a fait, ledit tribunal
s'est fondé essentiellement sur les dépositions de deux té
moins dont l'arrêt de la Chambre de révision du 21 février
1956 annulant le jugement du 12 novembre 1954 a dit qu'elles
avaient été dénaturées ; Attendu que, par application de
l'article 47, paragraphe 2, de l'ordonnance du 23 novembre
1944, la juridiction de renvoi ne pouvait plus faire état de
— 104 —
i
ces témoignages, étant tenuede-
jse conformer sur ce point
à la décision de l'arrêt susvisé
";'
d'où il suit que le moyen
est pareillement fondé et que le vice dénoncé est de nature
à entraîner lui aussi l'annulation du jugement entrepris ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp,. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 95
PROCEDURE. — APPEL. — DEMANDE NOUVELLE. — CAS OU
LA DEMANDE NOUVELLE EST PERMISE EN APPEL.
Il est permis de former en appel des demandes nouvelles,lorsque
celles-ci servent de défense à l'action principale et qu'ellestendent
au rejet total ou partiel de la prétention du demandeur principal
en s'attaquant au droit de ce dernier.
Déliai c. Bouhadi. — T.C. Orléansville, 5 mars 1957.
ARRET
du 7 Ju'llet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le moyen unique :
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a fait droit à
l'action introduite par dame Bouhadi Kheïra contre son ex
époux, Déliai Mostefa, pour obtenir l'augmentation de la pen
sion alimentaire mise à la charge de ce dernier à titre de part
contributive à l'entretien des deux enfants mineurs com
muns confiés à la garde de la mère, et déclaré irrecevable
comme nouvelle la demande formée par ledit Déliai Mostefa,
appelant incident, pour voir attribuer la garde desdits enfants;
Attendu qu'il lui est fait grief d'avoir ainsi décidé quant
à cette dernière demande, en se fondant sur les dispositions
de l'article 464 du Code de procédure civile, alors qu'il s'agis
sait en l'espèce non pas d'une demande nouvelle mais d'un
moyen nouveau qui, présenté en vue de faire écarter la de
mande principale, était, aux termes mêmes du texte susvisé,
recevable en appel ;
Attendu qu'il est, en effet, permis de former en appel, des
demandes nouvelles lorsque celles-ci servent de défense à
l'action principale et qu'elles tendent au rejet total ou partiel
de la prétention du demandeur principal en s'attaquant au
droit de ce dernier ;
Attendu qu'en la cause la demande de Déliai était précisé
ment de nature, si elle était admise, à faire rejeter totale
ment la demande principale de son ex-épouse dont le droit
— 105 —
à. pension devait nécessairement disparaître si la garde desenfants communs était confiée au père ; d'où il suit qu'en
statuant comme ils l'ont fait, les juges d'appel n'ont pas
donné base légale à leur décision, qui doit, dès lors, êtreannulée ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 96
/. — PROCEDURE. — TAXATION DES DEPENS. — OMISSION DE
LES LIQUIDER ET D'EN INDIQUER LE MONTANT DANS LE
DISPOSITIF DU JUGEMENT. — N'EST ,PAS DE NATURE A
ENTRAINER LA NULLITE DE LA DECISION ET NE PEUT
DONNER OUVERTURE A POURVOI EX ANNULATION.
IL — CONCLUSIONS. — DENATURATION (NON). — APPLICATION
A UNE TRANSACTION NON EXECUTEE PAR UNE DES
PARTIES.
Ne dénature pas une convention transactionnelle entre parties au
motif qu'elle a omis de tirer les conséquences de fait et de droit
que devait nécessairement entraîner la non exécution de son enga
gement par l'une des parties, la décision qui apprécie « que de l'en
quête résultait, l'existence du règlement de comptes sans réserve au
cune », et encore « qu'il n'était pas établi par l'appelant qu'il
lui fût dû d'autres sommes particulièrement du chef de l'inexécu
tion de la convention ou qu'il résultât de cette inexécution un pré
judice pour lui... »
Bendaoud ... Guelmaoui. — T.C Bône, 11 avril 1957.
ARRET
du 15 JuilJet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu que le jugement confirmatif attaqué a débouté Ben
daoud Ali des fins de l'action par lui introduite contre son
ex-locataire Guelmaoui Tahar, pour entendre condamner ce
dernier au paiement de diverses sommes dues au titre de
loyers et de consommation d'eau, demeurées impayées, ainsi
qu'à celui de dommages -intérêts en réparation du préjudice
lésultant de la non exécution par le défendeur d'une tran
saction intervenue entre parties pour mettre fin à la location
par un règlement amiable ; qu'il lui est fait grief d'avoir,en violation de l'article 18. paragraphe 5, de l'ordonnance du
— 106 —
23 novembre 1944, omis de liquider les dépens et d'en indi
quer le montant dans son dispositif ;
Mais attendu que l'omission de taxer les dépens qui est
certaine au jugement attaqué n'est cependant pas de nature
à entraîner la nullité de cette décision et ne peut donner
ouverture à pourvoi en annulation ; d'où il suit que le moyen
est infondé ;
Sur le deux'ème moyen pris d'une violation des formes de pro
cédure, ensemble défaut de motifs, manque de base légale
Attendu qu'il est reproché au tribunal d'appel d'avoir dé
naturé la convention transactionnelle non contestée interve
nue entre parties en omettant de tirer les conséquences de
fait et de droit que devait nécessairement entraîner la non
exécution par Guelmaoui de son engagement de vider les
lieux en fin juin 1955 ; Mais attendu que, contrairement à ce
qui est soutenu, ledit tribunal, loin de perdre de vue cette
partie de la question litigieuse, l'a examinée en restant dans
le cadre des conclusions des parties auxquelles il a répondu
sans les dénaturer; en appréciant notamment « que de l'en
quête résultait l'existence du règlement de comptes sans
réserve aucune... » et encore « qu'il n'était pas établi par
l'appelant qu'il lui fut dû d'autres sommes particulièrement
du chef de l'inexécution de la convention ou qu'il résultât
de cette inexécution un préjudice pour lui... » ; d'où il suit
que le moyen est pareillement infondé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 97
HADANA. — INTERET DE L'ENFANT. — CONCLUSIONS LAIS
SEES SANS REPONSE (NON).
Répond expressément aux conclusions visant l'intérêt de l'enfant
le jugement qui déclare qu'il était « de l'intérêt de l'enfant » que
la hadana fut confiée à son père et ce, d'autant plus, est-il précisé,
qu'il avait été établi que la mère « ne demeurait pas constam
ment à son domicile ».
Ouazane ... Guemar. — T.C. Orléansville, 3 avril 1957.
ARRET
du 21 Juillet 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique :
Attendu que le jugement confirmatif attaqué ayant faitdroit à l'action introduite par Guemar Abdelhamid contre son
— 107 —
ex-épouse, Ouazane Fatma, pour obtenir la garde de l'enfant
mineur commun, jusque-là confiée à la mère, il lui est fait
grief d'avoir violé les formes de procéder, en ce qu'il aurait
laissé sans réponse les conclusions de la défenderesse appe
lante visant l'intérêt de l'enfant ;
Mais attendu que le tribunal d'appel a, au contraire, expres
sément répondu aux dites conclusions en déclarant qu'il était
« de l'intérêt de l'enfant » que la hadana fût confiée au père,
et ce d'autant plus, a-t-il précisé, qu'il avait été établi que
la mère « ne demeurait pas constamment à son domicile à
Vialar » ; d'où il suit que le moyen est infondé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Ferracci, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 98
/. — PROCEDURE. — QUALITES. — LA DESIGNATION DU MA
GISTRAT RAPPORTEUR EST UN ACTE D'ADMINISTRATION
INTERIEURE DONT LA CONSTATATION AUX QUALITES
N'EST PAS EXIGEE.
IL — MOTIFS. — CONCLUSIONS A FIN DE RENVOI. — APPRE
CIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND DE L'UTILITE
OU DE L'INUTILITE D'UN RENVOI.
III. — CONCLUSIONS. — REPONSE A CONCLUSIONS. — LE TRI
BUNAL N'A PAS A REPONDRE PAR AVANCE A UNE AR
GUMENTATION DONT IL N'EST PAS SAISI.
Chemlal c. Ferhal. — T.C. Alger, 29 avril 1957.
ARRET
du 22 Juillet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une violation des formes de pro-
méder en ce que les qualités du jugement attaqué ne mention
nent pas le nom du magistrat chargé par ie Président de faire
rapport, ce qui ne permet pas à la Cour de vérifier si M. Canac,
qui a lu le rapport, était bien celui qui ava't été dés gné par
le Président :
Mais attendu que la désignation du magistrat rapporteur
n'est qu'un acte d'administration intérieure dont la constata
tion aux qualités n'est pas exigée; Qu'au surplus, renoncia
tion du jugement attaqué ainsi libellé : « Ouï M. Canac,
juge commis en la lecture de son rapport écrit » démontre
rait, si besoin était, l'inanité du moyen qui doit, dès lors,
être rejeté ;
— 108 —
Sur le second moyen pris d'une insuffisance de motifs et d'un
défaut de réponse :
Attendu que, par le jugement confirmatif attaqué, le tribu
nal d'Alger, à la requête des héritiers Ferhal intervenants
en suite du décès de leur auteur Ferhal Ali demandeur ori
ginaire, a condamné Chemlal Saïd à rétabilr sous astreinte
l'égout commun aux parties qu'il avait obstrué ; qu'il lui est
reproché d'avoir, au seul motif qu'il était suffisamment éclairé
sur les faits de la cause, passé outre à des conclusions par
lesquelles le défendeur appelant sollicitait le renvoi de l'af
faire à une date assez éloignée pour lui permettre de verser
aux débats le rapport de l'expert Prost commis dans une
autre instance relative aux mêmes immeubles et d'avoir en
outre omis de répondre à l'argumentation tirée des conclu
sions dudit expert qui se trouvaient analysées dans les écri
tures de Chemlal déposées le 8 décembre 1956 ;
Attendu qu'en refusant de renvoyer l'affaire au motif qu'il
était suffisamment éclairé, le tribunal a légalement justifié
sa décision sur la demande de renvoi dont il appréciait sou
verainement l'inutilité ;
Que, d'autre part, le dispositif des écritures déposées sur
ie bureau du tribunal le 8 décembre 1956 ne fait pas état des
conclusions ■ de l'expert Prost, ni de l'argumentation qu'enten
dait en tirer le défendeur ;
Que le tribunal qui n'en était donc pas saisi n'avait pas
à y répondre par avance ; d'où il suit que le moyen est
infondé en ses deux branches ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 99
PROCEDURE. — EXPERTISE. — DEFAUT DE REPONSE A CON
CLUSIONS. — ANNULATION.
Saisi de conclusions tendant à faire juger qu'un rapport d'exper-
tse doit être, tenu pour nul en raison du défaut d'inscription de son
auteur sur la liste des experts agréés, viole les formes de procéder
le. tribunal qui homologue le Iravail de l'expert sans s'expliquer sur
le moyen qui lui était opposé.
Kerraf c. Adjel. — T.C. Mascara, 3 mai 1957.
ARRET
du 28 Juillet 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'un défaut de réponse :
Attendu que, par le jugement attaqué, le tribunal de Mascara a déclaré que Adjel Djelloui était réellement l'associé de
— 109 —
Kherraf Mohamed pour le commerce des alfas, malgré la
contestation de ce dernier, et a fait partiellement droit à
l'action par laquelle il réclamait paiement de sa part de bé
néfices dans deux affaires traitées dans l'intérêt commun ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir fondé sa décision sur \".
rapport d'un expert commis en première instance et ce, sans
répondre à des conclusions de Kherraf tendant à faire juger
que ledit, idoine n'étant pas inscrit sur la liste des experts
agréés, son rapport devait être tenu pour nul ;
Attendu qu'il est patent que le tribunal de Mascara a ho
mologué dans sa majeure partie le travail de l'expert, sans
s'expliquer sur le moyen qui lui était opposé, et qu'il avait
lui-même reproduit dans l'exposé des faits qu'il avait à juger;
Que cette omission constitue une violation des formes de
procéder qui doit entraîner l'annulation du jugement atta
qué, sans qu'il y ait à examiner le second moyen du pourvoi
qui n'est que subsidiaire ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 100
I. _ PROCEDURE. — TIERCE-OPPOSITION. — NECESSITE D'IN
FORMER TOUTES LES PARTIES INTERESSEES.
La tierce-opposition étant de nature à faire infirmer le juge
ment à l'égard de toutes les parties intéressées, il importe à cel
les-ci d'être légalement informées des attaques que le tiers-oppo
sant dirige contre le jugement.
IL — PROCEDURE. — JUGEMENT PRONONÇANT UNE INTERDIC
TION. — N'EST PAS,EN' PRINCIPE, SUSCEPTIBLE DE
TIERCE-OPPOSITION.
Un jugement prononçant une interdiction est constitutif d'un état
nouveau, valable erga omnes et comme tel non susceptible de tierce-
opposition, sauf en cas de dol ou de fraude démontrée.
Procureur Général (pourvoi dans l'intérêt de la loi) u. Hadj Saïd
et a.— T.C. Blida, 18 juillet 1957.
ARRET
du 29 Juillet 1958
LA COUR :
En la forme :
Attendu que le pourvoi formé dans l'intérêt de la loi, par
M. le Procureur Général, est recevable ;
— 110
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une violation des formes de
procéder
Attendu que la tierce-opposition étant de nature à faire
infirmer le jugement à l'égard de toutes les parties intéres
sées, il importe, à celles-ci, d'être légalement informées des
attaques que le tiers-opposant dirige contre le jugement ;
Attendu qu'en recevant en la forme la tierce-opposition^de
El Hadj Saïd Saïd malgré que celui-ci n'ait pas appelé à
la procédure divers consorts Naaloufi qui avaient été deman
deurs à l'interdiction du sieur Naaloufi Amor, les juges du
fond ont méconnu le principe sus-rappelé, une telle mécon
naissance devant entraîner l'annulation de leur décision ;
Sur le deuxième moyen pris d'une violafon des formes de
procéder
Attendu que le jugement prononçant une interdiction est
constitutif d'un état nouveau valable erga omnes et comme
tel non susceptible de tierce-opposition, sauf en cas de dol
ou de fraude démontrée ;
Attendu qu'en accueillant, en l'absence de tout dol ou
fraude démontrée, la tierce-opposition du sieur El Hadj Saïd
Saïd ben Salah à la sentence du 17 juillet 1944 qui a pro
noncé l'interdiction de Naaloufi Amor, les juges du fond ont
violé les formes de procéder applicables ; d'où il suit que de
ce chef encore, le jugement attaqué doit être annulé ;
Par ces motifs
Reçoit comme régulier en la forme le pourvoi formé, dansl'intérêt de la loi, par M. le Procureur Général ; Au fond,
le dit fondé. En conséquence, prononce l'annulation dans l'in
térêt de la loi du jugement attaqué ; dit que, conformément
aux dispositions de l'article 51 alinéa 2 de l'ordonnance du
23 novembre 1944, le présent arrêt vaudra transaction pour
les parties.
(MM. Décori, Prés., Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 101
1. — CONCLUSIONS. — DEFAUT DE REPONSE (NON). — DIVORCE.
Il n'a pas à être répondu à des conclusions tendant à ce qu'il soit
donné acte au mari de ce qu'il offre à son épouse un domicile
séparé de ses parents et de son autre épouse, dès lors que les juges
du fond constatent que le mari avait été impuissant à faire jusque
là habiter l'épouse clans un domicile séparé.
H. — PROCEDURE. — REQUETE N'INDIQUANT PAS LES PIECES
QUI N'AURAIENT PAS ETE COMMUNIQUEES ET AYANT
SERVI AU TRIBUNAL POUR FONDER SA CONVICTION. -
ABSENCE DE JUSTIFICATION. REJET.
— 111 —
111. — MOYEN. ~ MOYEN MANQUANT EN FAIT. — DIVORCE.
Ne se trouve pas, en état d'insubordination et se voit à bon droitallouer une pension alimentaire d'abandon accompagnant le pro
noncé du divorce, l'épouse dont le mari n'a pas rempli les obliga
tions mises à sa charge en vue du retour à son domicile.
Chergui t. Rahmani. — T.C. Alger, 16 juin 1956.
ARRET
du 6 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le moyen unique pris, en sa première branche, d'un défaut de réponse :
Attendu que le jugement confirmatif attaqué ayant pro
noncé le divorce entre les parties, aux torts et griefs exclu
sifs du mari, et alloué à Rahmani Zahia une pension alimen
taire, il lui est fait grief de n'avoir pas répondu aux conclu
sions de Chergui tendant à ce qu'il lui soit donné acte dece qu'il offrait à la défenderesse-intimée un domicile séparé
de celui de ses parents et de son autre épouse ;
Mais attendu que dès lors qu'ils ont constaté que Chergui
avait été impuissant à faire habiter Rahmani Zahia dans un
domicile séparé, les juges du fond n'avaient pas à répondre
aux conclusions visées au moyen qui, en ladite branche, doitêtre rejeté ;
Sur la deuxième branche du moyen prise d'une violation des
formes de procéder
Attendu qu'il n'est pas indiqué dans la requête, les pièces
qui n'auraient pas é,té communiquées et sur lesquelles le
tribunal aurait fondé sa conviction ; d'où il suit qu'en cette
branche le moyen est à rejeter faute de justification ;
Sur le moyen pris en sa troisième branche d'une violation des
principes régissant le divorce :
Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir
prononcé le divorce au profit de l'épouse et de lui avoir alloué
une pension alimentaire d'abandon malgré quelle se soit
trouvée en état d'insubordination ;
Mais attendu que dès lors qu'ils ont considéré que le mari
n'avait pas rempli les obligations mises à sa charge en vue
du retour à son domicile de dame Rahmani Zahia, celle-ci
ne pouvait être considérée comme se trouvant en état d'insu
bordination ; d'où il suit qu'en cette troisième tranche, le
moyen manque en fait ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Décori, Prés., Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 112 —
N° 102
MOYENS. — MOYEN MANQUANT EN FAIT.
Ounoughi c. Belhadj. — T.C. Sétif, 10 mai 1957.
ARRET
du 8 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le moyen unique pris c'e violation:] des formse de procéder:
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu en la re
quête, le jugement confirmatif attaqué énonce les dates de
toutes les audiences successives au cours desquelles l'affaire
a été appelée, reproduit le dispositif des conclusions échan
gées par les parties et enfin ne laisse pas sans réponse des
conclusions tendant à la désignation d'un expert chargé de
rechercher si, comme l'affirme Oughouni dit Nougha Hadj,la vente de leurs droits successifs à Belhadji Ali par Bougha
Saad et Lakhdar portait bien sur l'intégralité de la succession
immobilière de Nougha Belkheir, dès lors qu'il énonce expres
sément que le contraire résultant de l'état des transcriptions
qui lui est soumis, le tribunal, sans recourir à la mesure
d'instruction sollicitée, doit déclarer irrecevable l'action en
retrait successoral des droits vendus intentés par ledit Ounou
ghi dit Nougha Hadj ; d'où il suit que le moyen manquant
en fait en ses trois branches, doit être rejeté.
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au. fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 103
I. — MOYEN NOUVEAU. D'INTERET PRIVE, PRIS DE LA VIO
LATION DE L'ARRETE DU 9 JUIN 1831. — IRRECEVABI
LITE.
II. — CHAMBRE DE REVISION. — INCOMPETENCE. — LITIGE
DE NATURE PERSONNELLE ET MOBILIERE, REGIE PAR LA
LOI FRANÇAISE.
111. — MOTIFS. — MOTIFS SUFFISANTS.
Le fait pour une partie cle dénier la remise d'une somme d'argent
peut être constitutive de sa mauvaise foi lorsque les juges d'appel,en vertu de leur pouvoir souverain d'appréciation, retiennent que
cette remise avait réellement eu Heu.
Bey ... Bouuttonra. — T.C. Sétif, 10 mai 1957.
— 113 —
ARRET
du 8 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu qu'analysant en un contrat de louage, non de prêt
d'argent, la convention sous seings privés rédigée en français
et signée des parties aux termes de laquelle en vue de la
location d'un local d'habitation, Bouattoura Abdelkader avait
remis à Bey Amar une somme de 500.000 francs dont 150.000
francs destinés au règlement des frais d'achèvement de la
construction, les 350.000 francs de solde devant être rem
boursés après imputation du montant du loyer, le jugement
infirmatif attaqué qui a considéré que cette convention était
confirmée par les témoins de l'enquête effectuée en première
instance, a condamné Bey Amar au remboursement de la
dite somme de 350.000 francs, sous déduction des loyers échus
et au paiement de celle de 5.000 francs à titre de dommages-
intérêts ; qu'il lui est fait grief d'une violation de l'arrêté
du 9 juin 1831 en ce qu'il a rejeté le moyen pris de ce que
Bey Amar, illettré en français, ne pouvait se voir opposer
la convention sous seings privés, au motif que sa connais
sance de la langue française avait été constatée par le pre
mier juge, alors qu'aux termes de l'arrêté susvisé la conven
tion, pour être valable, aurait dû être traduite en arabe ;
Mais attendu que pas plus en première instance que devant
les juges d'appel, Bey Amar ne s'est prévalu de l'arrêté du
9 juin 1831 ; d'où il suit que le moyen nouveau et d'intérêt
privé est par suite irrecevable ;
Sur le second moyen pris d'une dénaturation de la convention
sous se'ngs privés du1er
février 1950
Attendu qu'en raison de sa nature purement personnelle
et mobilière, la contestation soumise aux juges du fond était,
en principe, régie par la loi française ; d'où il suit que le
moyen qui, touchant au fond même du droit, ne se prévaut
pas d'un point particulier d'usage ou de coutume échappe
à la compétence de la Chambre d'annulation, en vertu des
articles 2 et 38 de l'ordonnance du 23 novembre 1944 ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que pour condamner Bey Amar à des dommages-
intérêts les juges d'appel le déclaraient de mauvaise foi en
déniant la remise effectuée entre ses mains par Bouattoura
Abdelkader de la somma de 350.000 francs ; qu'en effet, ayant
appréciésouverainement comme résultant des éléments de
preuve qui leur étaient soumis que cette remise avait réelle
ment eu lieu, ils pouvaient légalement en déduire que les
dénégations de l'appelant Bey Amar démontraient sa mau
vaise foi ; que, ce faisant, ils ont donné motifs suffisants à
— 114 —
leur décision de ce chef ; d'où il suit que le moyen est
infondé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. : Siragusa, Subst. Gén.)
N° 104
I. — PROCEDURE. — ORDONNANCE DU 23 NOVEMBRE 1944, ART.
41, ALINEAS 3 ET 5. — PIECES JUSTIFICATIVES A JOIN
DRE A LA REQUETE. — LA PRODUCTION D'UN ACTE DE
MARIAGE NON NECESSAIRE A LA JUSTIFICATION D'UN
MOYEN DU POURVOI EST INUTILE.
IL — PROCEDURE. — APPEL. — RECEVABILITE. — DELAI DE
TRENTE. JOURS DE LA. RECEPTION DE L'AVERTISSE
MENT. — REMISE A PERSONNE OU A DOMICILE DANS LE
CAS DE SIGNIFICATION PAR L'AOUN.
Ne respecte pas ces principes et viole les formes de procéder le
jugement qui admet la recevabilité d'un appel sans examiner le
point, contesté, de savoir si l'une des parties u. été ou non avertie
a son domicile.
Djerrah c. Consorts Abdelmajid. — T.C. Bône, 27 janvier 1957.
ARRET
du 13 Octobre 1958
LA COUR :
En la forme :
Sur l'exception d'irrecevabilité; soulevée par les défendeursau pourvoi
Vu l'article 41, alinéas 3 et 5, de l'ordonnance du 23 no
vembre 1944 ;
Attendu que la production de l'acte de mariage de DjerrahTayeb et de Abdelmajid Lakri n'est pas nécessaire à la justification du moyen du pourvoi ; d'où il suit que l'exceptiontirée de la non production de cette pièce est infondée et
que le pourvoi est recevable ;
Au fond :
Sur le moyen unique pris d'une violation des formes de pro
céder
Attendu que la sentence en date du 5 avril 1956 déféréeau Tribunal de Bône a fait l'objet d'avis de décision en datedu 7 du dit mois, signifiée le 3 mai 1956 à la personne deAbdelmajid Mahmoud, ainsi qu'il résulte de la copie délivrée
— 115 —
par le greffier du tribunal de Bône des récépissés de ces avis
de décision ;
Attendu qu'aux termes de l'article 41 du décret du 17 avril
1889 auquel renvoie notamment l'article 16 de l'ordonnance
du 23 novembre 1944 en ce qui a trait aux formes et délais
de cette voie de recours, l'appel des jugements contradictoi
res rendus en premier ressort est recevable dans les trente
jours de la connaissance qui est donnée aux parties par un
avertissement délivré conformément aux article 20, 27 et 33
du dit texte et qu'il résulte de l'ensemble des dispositions
de ce dernier article que lorsque, comme en la cause, l'aver
tissement est signifié directement par l'aoun, cette dernière
s'effectue valablement par remise à personne ou à domicile;
Attendu qu'en déclarant recevable l'appel interjeté le 3
juillet 1956 par Abdelmajid Brahim et Abdelmajid Lakri sans
faire porter leur examen sur le point de savoir si les avis
donnés à Abdelmajid Mahmoud, qu'ils disaient être le frère
de l'appelant Abdelmajid Brahim, l'avaient été ou non à
domicile, les juges du fond n'ont pas observé les formes de
procéder applicables, ce qui doit entraîner l'annulation de
leur décision ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén).
N° 105
/. — MOYENS. — MOYEN MANQUANT EN FAIT. — SIMPLE ER
REUR MATERIELLE.
II. — PROCEDURE. — DEPENS. — TAXATION. — L'OMISSION DE
LA TAXE DES DEPENS N'INFLUE PAS SUR LES DISPOSI
TIONS QUI ONT STATUE AU FOND ET NE DONNE PAS
OUVERTURE A ANNULATION.
III. _ POURVOI. — EXPEDITION D'UN RAPPORT D'EXPERT
CONTENANT UNE TRADUCTION DONT L'EXAMEN EST IN
DISPENSABLE A L'APPRECIATION DE LA PERTINENCE
D'UN MOYEN, NON JOINTE A LA REQUETE. — IRRECE
VABILITE.
Belabbès c. Benahmed. — T.C. Mostaganem, 28 mai 1957.
ARRET
du 15 Octobre 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen, en sa première branche
Attendu que le jugement confirmatif attaqué ayant ordon
né la restitution par Belabbès Aïcha à Benhamed Fatma de
— 116 —
facultés mobilières successorales dont la garde lui avait ete
confiée, il lui est fait grief d'une violation des formes de
procéder en ce que, contrairement aux énonciations des qua
lités, il ressort des motifs de cette décision qui doivent être
préférés, que le Ministère public a été entendu en ses réquisi
tions après la mise en délibéré de la cause ;
Attendu que les motifs énoncent à cet égard : -s Le Ministère
Public entendu après en avoir délibéré conformément à la
loi » et qu'il en résulte à l'évidence que l'interprétation indi
quée au moyen n'est que le résultat d'une simple erreur maté
rielle procédant d'une omission dans la ponctuation de la
phrase, laquelle doit se rétab'ir ainsi : « Ls Ministère Public
entendu ; après en avoir délibéré conformément à la loi » ;
d'où iî suit que le moyen, en cette branche, manque en fait ;
Sur la deuxième branche prise également d'une violation des
formes de procéder en ce que les juges d'appel, contrairement
aux prescriptions de i'arlicle 1 8 de l'ordonnance du 23 novem
bre 1944, n'ont pas arrêté la taxe des dépens :
Attendu, à la supposer réelle, que cette omission ne sau
rait influer sur les dispositions qui ont statué au fond et
donner à leur égard ouverture à annulation ; d'où il suit
que le moyen, en cette branche, est infondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est reproché au tribunal de Mostaganem
d'avoir dénaturé un acte de Cadi du 21 octobre 1952 en con
sidérant à tort qu'il n'en résultait pas que Benhamed Fatma
avait pris possession des facultés mobilières dont Belabbès
Aïcha était gardienne ;
Attendu qu'à l'appui de ce moyen, la demanderesse invo
que la traduction de l'acte de Cadi ci-dessus opérée par l'in
terprète commis en qualité d'expert à ces fins, par avant diredroit du tribunal de Mostaganem du 26 avril 1955, maisqu'elle ne produit pas le rapport de l'expert où figure cette
traduction dont l'examen serait indispensable à l'appréciation
de la pertinence du moyen, qui est, dès lors, irrecevable par
application de l'article 41 de l'ordonnance du 23 novembre
1944 ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi. Au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 106
INTERDICTION. — ACTE AU'l I1ENTIQUE PASSE PAR UN ALIENE.
— ANNULATION.
En droit musulman, l'annulation d'un acte authentique passé par
un aliéné antérieurement à son interdiction doit être prononcée dès
lors que les causes de l'interdiction existaient déjà notoirement à
cette époque.
La constatation par les juges du fond que l'état cle démence de
l'aliéné était connu dans la région qu'il habitait suffit à caractéri
ser sa notoriété.
Consorts Adel c. Consorts Benamar. — T.C. Blida, 6 juin 1957.
— 117 —
ARRET
du 15 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur les deux moyens réunis pris d'une violation de la loi et
des coutumes musulmanes et d'une inopérance de motif équi
valent à un défaut de motif :
Attendu que, par le jugement infirmatif attaqué, le tribu
nal de Blida a déclaré valable un emprunt contracté par Adel
Abdelkader auprès de Benamar Mohamed suivant acte nota
rié du 21 août 1951, au motif que, s'il résultait bien de l'en^
quête du premier juge que Adel était déjà alors dans l'étatde démence qui a motivé son interdiction judiciaire interve
nue le 19 septembre suivant, et que, si cet état était notoire
dans la région de Marengo-Montebello où il habitait, il n'étaitpas établi que Benamar Mohamed, domicilié à Blida, en ait
eu connaissance, que ce dernier avait pu traiter avec d'au
tant plus de confiance que Adel lui avait précédemment déjà
emprunté de l'argent qu'il avait exactement remboursé à la
date fixée et que le contrat était passé devant notaire ;
Mais attendu qu'en droit musulman l'annulation d'un acte
même authentique passé par un aliéné antérieurement à son
interdiction doit être prononcée dès lors que les causes de
l'interdiction existaient déjà notoirement à cette époque ;
Que la constatation par les juges du fond que l'état de dé
mence de Adel était connu dans la région qu'il habitait suffit
à caractériser sa notoriété, sans qu'il y ait à prendre en con
sidération son ignorance possible par Benamar domicilié
dans une autre région ; d'où il suit qu'en statuant comme il
l'a fait, le tribunal de Blida a méconnu les principes régis
sant la matière de l'interdiction judiciaire, le jugement atta
qué devant, en conséquence, être annulé ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; Au fond, annule.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 107
CHAMBRE DE REVISION. — MOYEN TIRE DE CE QUE LA GES
TION D'UN EDIFICE RELIGIEUX, DEPENDANT COMME TEL
DU DOMAINE DE L'ETAT, RESSORTIT A L'AUTORITE AD
MINISTRATIVE. — CONTESTATION PERSONNELLE ET MO
BILIERE. — INCOMPETENCE.
Par application des articles 2 et 38 de l'ordonnance du 23 no
vembre 1944, la Chambre de révision ne peut connaître de la vio-
— 118 —
talion du droit régissant les musulmans de l'Algérie, sur le fond
comme sur la compétence, que dans les matières réservées.
Keguieg ... Siari. — T.C. Mostaganem, 28 mai 1957.
ARRET
du 15 Octobre 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le moyen unique
Attendu que le jugement infirmatif attaqué ayant fait droit
aux prétentions de Siari Mokhtar, tendant à se voir reconnaî
tre la qualité de gardien du mausolée de Sidi Abdelkader
Bou Remadia, à l'exclusion, du défendeur, Reguieg Abdelka
der, dont l'expulsion des lieux était en tant que de besoin
ordonnée et à qui il était fait, défense de percevoir les offran
des des pèlerms, il lui est fait grief d'une violation des règles
de ia compétence ratione materiae en ce que la gestion d'un
édifice religieux, dépendant comme tel du domaine de l'Etat,ressortit à l'autorité administrative ;
Mais attendu que, par application des articles 2 et 38 de
l'ordonnance du 23 novembre 1944, la Chambre de révision ne
peut connaître de la violation du droit régissant les musul
mans de l'Algérie sur le fond comme sur la compétence que
dans les matières réservées ; d'où il suit que la contestation
soumise aux juges du fait étant purement personnelle et mo
bilière, comme telle régie en principe par ïe dit article 2,paragraphe 2, échappe à la compétence de la Chambre d'an
nulation ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 108
MOTIFS. — MOTIFS DE FAIT. — POUR ASSORTIR UNE DECI
SION JUDICIAIRE, DOIVENT ETRE SUFFISAMMENT PRE
CIS ET PERTINENTS ET NE PAS PROCEDER PAR VOIE
D'AFFIRMATION PURE ET SIMPLE.
Méconnaît ce principe de droit le tribunal qui, après avoir écarté
comme non déterminants les dires des témoins pour ordonner une
expertise qui se révélait infructueuse, s'est borné à affirmer ensuite
qu'il résultait « du transport effectué sur les lieux par le premier
juge et des témoignages par lui recueillis, un commencement de
preuve sérieux en faveur des intimés. »
Saci c. Ould Kaddour et Consorts. — T.C. Mascara, 31 mai 1957.
— 119 —
ARRET
du 20 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu que, sur la demande de Mohamed ben Kaddour et
consorts, en revendication d'une parcelle de terre en la pos
session de Saci ould Ali et Larbi ould AU, le jugement atta
qué a, aux données d'une enquête réalisée par le premier ju
ge, dont il déduisait l'existence d'un commencement de preuve
en leur faveur, déféré aux demandeurs intimés un serment
supplétif ; qu'il lui est fait grief d'une insuffisance de motifs
en ce qu'il n'a pas précisé les éléments du commencement de
preuve ainsi retenu ;
Attendu que, pour avoir base légale, les décisions judiciai
res doivent être assorties de motifs de fait suffisamment pré
cis et pertinents et ne pas procéder par voie d'affirmations
pures et simples ;
Qu'en méconnaissance de ce principe de droit, le tribunal,
après avoir écarté comme non déterminants les dires des té
moins pour ordonner une expertise qui se révélait infruc
tueuse, s'est borné à affirmer ensuite qu'il résultait « du trans
port sur les lieux par le premier juge et des témoignages par
lui recueillis, un commencement de preuve sérieux en faveur
des intimés », et que l'insuffisance de motifs qui en résuite
doit entraîner l'annulation de sa décision, sans qu'il soit besoin
d'examiner le deuxième moyen, qui n'est que subsidiaire ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.)
N° 109
/. — MOTIFS. — LES MOTIFS ENONCES PAR UN TRIBUNAL AL
SUJET DE LA COMPETENCE DE LA JURIDICTION MUSUL
MANE NE SAURAIENT VICIER LA DECISION ATTAQUEE,
DES LORS QUE SON DISPOSITIF NE STATUE QUE SUR
L'IRRECEVABILITE DE L'APPEL A LAQUELLE ILS DE
MEURENT ETRANGERS.
IL -— CHAMBRE DE REVISION. — UN REGLEMENT DE COMPTE
D'ASSOCIATION COMMERCIALE EST REGI PAR LA LOI
FRANÇAISE. — LITIGE DE CARACTERE PERSONNEL ET
MOBILIER. — INCOMPETENCE,
tII. _ PROCEDURE. —■ APPEL. — DELAI. — DECRET DU 17
AVRIL 1889, ART. 41.
Seule la remise à l'intéressé de l'avis de décision prescrit par
— 120 —
ce texte fait, à l'exclusion de toutes autres formalités, courir le.
délai d'appel.
Méconnaît ce principe le tribunal qui fait) partir ce délai du jour
où l'intéressé a eu connaissance de la sentence entreprise, par la
notification qui lui en „. été donnée par le secrétaire greffier de
la juridiction marocaine de son domicile.
Brahim c. Ali ben Lahcen. — T.C. Oran, 5 juin 1957.
ARRET
du 20 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond
Sur le premier moyen
Attendu que, par le jugement attaqué, le tribunal d'Oran
a déclaré irrecevable comme tardif l'appel interjeté par Bra
him ben Ali contre une sentence du 18 octobre 1951 le con
damnant à payer à Ali ben Lahcène, une somme de 203.500
francs pour régler les comptes d'une association commerciale
ayant existé entre eux ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir expressément admis la com
pétence ratione materice contestée du premier juge, alors que
l'exception d'irrecevabilité de l'appel à laquelle il faisait droit
lui interdisait d'examiner cette question ;
Mais attendu que les motifs énoncés par le tribunal au
sujet de la compétence de la juridiction musulmane ne sau
raient vicier la décision attaquée, dès lors que son dispositif
ne statue que sur l'irrecevabilité de l'appel à laquelle ils
demeurent étrangers ; d'où il suit que le moyen est à reje
ter ;
Sur le second moyen pris d'une violation des règles de ia
compétence ratione materiae par fausse application des articles
5, 8 et 9 de l'ordonnance du 23 novembre 1944 :
Attendu que le tnoyen d'incompétence de la juridiction
musulmane se fonde non sur une violation des formes de
procéder, mais en application des dispositions de l'article 38de l'ordonnance du 23 novembre 1944, sur une violation dudroit qui, en matière non réservée, régit les Musulmans tant
en ce qui concerne le fond que la compétence des juridictions,d'où il résulte que le litige étant soumis à la loi française en
raison du caractère personnel et mobilier que présente un
règlement dé compte cVassocfeticta commerciale, le moyen
échappe à la compétence de la Chambre de Révision'
;
Sur le troisième moyen pris d'une violation des formes de pro
céder
Attendu que seule la remise à l'intéressé de l'avis de décision prescrit par l'article 41 du décret du 17 avril 1889 fait, à
— 121 —
l'exclusion de toutes autres formalités, courir le délai d'appel ;
Qu'en faisant partir ce délai du jour où Brahim ben Ali
a eu connaissance de la sentence entreprise par la notifica
tion qui lui en a été donnée par le secrétaire-greffier de la
juridiction marocaine de son domicile et eh en déduisant la
tardiveté de l'appel, le tribunal d'Oran a méconnu le prin
cipe susrappelé, le jugement attaqué devant, être annulé, de
ce fait ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit lé pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 110
I. — CHAMBRE DE REVISION. — ACTION J1N RESILIATION D'UN
BAIL COMMERCIAL. — LITIGE DE CARACTERE PERSON
NEL ET MOBILIER, SOUMIS A LA LOI FRANÇAISE. — IN
COMPETENCE.
IL —- CHAMBRE DE REVISION. — LITIGE DE CiRACTERE PER
SONNEL ET MOBILIER. — LE MOYEN QUI NE TEND QU'A
DENONCER UNE PRETENDUE ERREUR DU TRIBUNAL SUR
LE TEXTE DE LA LEGISLATION FRANÇAISE A APPLIQUER,
ECHAPPE A LA COMPETENCE DE LADITE CHAMBRE.
III. — CONCLUSIONS. — UN TRIBUNAL N'EST PAS TENU DE
REPONDRE A DES CONCLUSIONS QUI N'ONT AUCUN SENS,
EN MATIERE DE PREUVE EN L'ESPECE.
IV. — MOTIFS. — INSUFFISANCE. — VICE DE FOND DANSUN-
LITIGE DE NATURE PERSONNELLE ET MOBILIERE. — IN-/
COMPETENCE DE LA CHAMBRE DE REVISION.
Chergui c. Consorts Douadi. — T.C. Sétif, 28 juin 1957.
ARRET
du 22 Octobre 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen pris de l'incompétence de la juridiction
musulmane
Attendu que, par le jugement confirmatif attaqué, le tribu
nal de Sétif a fait droit à une tierce-opposition formée par
Douadi Ahmed contre une sentence déboutant son frère Ali
d'une action en résiliation d'un bail commercial consenti à
Chergui Moussa dans un immeuble dont ils sont coproprié-
— 122 —
taires et a ordonné l'expulsion tant du locataire que du sieur
Akroum Hadj que celui-ci y avait installé ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir admis la compétence de la
juridiction musulmane alors que, s'agissant d'un local com
mercial, seule la juridiction spéciale des loyers était compé
tente pour connaître du litige ;
Mais attendu que le moyen de pourvoi tiré de l'incompé
tence de la juridiction musulmane se fonde non sur une
violation des formes de procéder, mais, en application des
dispositions de l'article 38 de l'ordonnance du 23 novembre
1944, sur la violation du droit français qui, en matière non
réservée, régit les Mkisulmans d'Algérie tant en ce qui con
cerne le fond que la compétence des juridictions ;
Qu'en conséquence, en raison du caractère personnel et
mobilier qu'il présente le litige étant soumis à la loi française,le moyen échappe à la compétence de la Chambre de Révi
sion ;
Sur le second moyen pris d'une dénaturation des termes du
débat en ce que, pour rejeter l'exception d'incompétence, le tri
bunal de Sétif a énoncé que la location portait non sur un fonds
de commerce, mais sur un local dont il n'a pas précisé la nature,
mais qu'il a nécessairement considéré comme un local d'habi
tation pursqu'ii a fait ap-plicat'on de la loi du 30 décembre 1950
propre à cette catégorie de locaux, alors que les parties étaient
d'accord pour reconnaître qu'il s'agissait d'un local à usage
commercial
Attendu que le moyen qui ne tend qu'à dénoncer une
prétendue erreur du tribunal sur le texte de la législation
française à appliquer, échappe pareillement à la compétence
de la Chambre de Révision ;
Sur le quatrième moyen pris d'un défaut de réponse à des
conclusions de Chergui tendant à voir ordonner une enquête :
Attendu que, s'il ressort des qualités du jugement attaqué
que le défendeur a bien offert de rapporter par témoins la
preuve des faits « par lui articulés en première instance »
et non retenus par le magistrat cantonal, il ressort de celles
des sentences du premier juge qu'à aucun moment le défendeur n'avait articulé de faits en preuve ;
Que le tribunal n'était donc pas tenu de répondu à desconclusions qui n'avaient aucun sens ; d'où il suit que lemoyen est infondé ;
Sur le trois ème moyen pris d'une insuffisance de motifs en
ce que le tribunal n'a déduit le changement de domination deslieux loués sur lequel il a fondé la résiliation du bail litigieuxque des constatations du juge de paix, alors que, s'il avait or
donné la preuve sollicitée par le locataire, ces constatations au
raient perdu toute valeur probante ;
Attenduque^
le moyen pris d'une insuffisance de motifs,vice de fond, échappe comme les deux premiers et pour la
— 123 —
même raison, à la compétence de la Chambre de Révision ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén).
N° 111
/. — APPEL. — APPEL INTERJETE PAR UN CO-DEB1TEUR SO
LIDAIRE. — EFFETS.
Il est de principe que l'appel interjeté par l'un des co-dêbiteurs
solidaires profile aux aulres.
Ce principe, applicable même au cas d'une simple condamnation
solidaire aux dépens de première instance, l'est a fortiori lorsque
les deux défendeurs ont été solidairement condamnés par le pre
mier juge à des dommages-intérêts envers le défendeur.
11. — MARIAGE. — REINTEGRATION DU DOMICILE CONJUGAL.
— REFUS. — CONCLUSIONS. — DENATURATION. -- VIO
LATION DES FORMES DE PROCEDER.
Dénature les conclusions prises devant lui et réitérant t'offre du
mari de procurer à son épouse un logement distinct de celui de.
sa co-èpouse, le\ tribunal qui, pour passer outre, donne comme mo
tifs à sa décision que le mari n'avait fail aucune offre écrite ou
verbale de réintégration dans un appartement distinct de celui où
il loge avec sa deuxième femme.
III. — MARIAGE. — REINTEGRATION DU DOMICILE CONJUGAL.
— ASTREINTE PRONONCEE A L'EGARD DE L'EPOUSE IN
SURGEE. — LICE1TE.
Si l'exécution du jugement ordonnant la réintégration d'une épouse
au domicile conjugal n'autorise plus le mari à recourir à la force
publique pour l'y contraindre au cas où elle refuserait d'obtempé
rer, le reuours aux voies légales, tels la répudiation ou les dom
mages-intérêt^ même accordés sur la forme d'une astreinte, demeure
toujours possible.
Djaballah c. Consorts Chaîbi. — T.C. Batna, 26 juin 1957.
ARRET
du 22 C'clobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une violation des formes de pro
céder :
Attendu que le jugement infirmatif attaqué ayant débouté
Djaballah Hocine de sa demande en paiement de dommages-
— 124 —
intérêts pour refus de réintégrer le domicile conjugal, formée
à l'encontre tant de son épouse, Chaibi Rahnouna, que du
père de celle-ci, Chaibi M'ahmed, il lui est fait griefd'avon-
ainsi fait droit à l'appel incident de la dame Chaibi, alors
que ia cause n'étant pas indivisible, l'appel principal inter
jeté par son père et co-défendeur ne pouvait lui profiter ;
Mais attendu qu'il est de principe que l'appel interjeté par
l'un des co-débiteurs solidaires profite aux autres ; que ce
principe applicable même au cas d'une simple condamnation
solidaire aux dépens de première instance, l'est a fortiori
en la cause où les deux défendeurs ont été solidairement
condamnés par le premier juge à des dommages-intérêts
envers le demandeur ; d'où il suit que le moyen est infondé;
Sur le troisième moyen pris d'une dénaluration des conclu
sions :
Attendu qu'en méconnaissance de conclusions déposées le
3 juin 1957, dans le dispositif desquelles Djaballah Hocine
réitérait son offre de procurer à la dame Chaibi Rahmouna
un logement distinct de celui de sa co-épouse, ainsi qu'une
précédente décision l'y avait astreint, le tribunal a donné
comme motifs à sa décision que le mari n'avait fait aucune
offre écrite ou verbale de réintégration dans un appartement
distinct de celui où il loge avec sa deuxième femme et que
la violation des formes de procéder qui en résulte doit en
traîner l'annulation de sa décision de ce chef ;
Sur le deux'ème moyen
Attendu qu'il est fait grief au tribunal d'avoir dénié le
caractère licite de l'astreinte prononcée à l'encontre de
l'épouse insurgée ;
Attendu que si l'exécution du jugement ordonnant la réin
tégration d'une épouse au domicile conjugal n'autorise plus le
mari à recourir à la force publique pour l'y contraindre au
cas où elle refuserait d'obtempérer, le recours aux voies léga
les telles la répudiation et les dommages-intérêts même
accordés sous la forrr,'e d'und astreinte, demeure toujours
possible ; d'où il suit qu'en statuant comme il est indiqué au
moyen, le tribunal n'a pas donné base légale à sa décision
qui, de ce chef également, doit être annulée ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, annule.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Ge'u.).
N° 112
MARIAGE. — PREUVE. — ACTE DE NOTORIETE. — CONDI
TIONS.
En droil musulman, la preuve testimoniale du mariage ne peut
résulter que de témoignages directs, précis el pertinents.
— 125 —
D'autre part, le mode de preuve, exceptionnel résultant de la pro
duction d'un acte de notoriété, anciennement admis par l'usage, ne
saurait désormais, en cas de contestation sur l'existence du ma
riage, faire échec à la règle fondamentale du débat contradictoire,
nécessitant, sauf impossibilité ab.tolue, l'audition régulière des au
teurs des déclarations insérées audit acte.
Chehida u. Benali. — T.C. Oran, 3 juillet 1957.
ARRET
du 27 Octobre 1958
LA COUR :
Au fond :
Sur le premier moyen
Attendu que le jugement infirmatif attaqué ayant débouté
Chehida Mohamed de sa demande en réintégration au domi
cile conjugal de la dame Benali Haenia avec qui il disait
avoir contracté mariage, comme indiqué en un acte de noto
riété, il lui est fait grief d'une violation des formes de pro
céder en ce que le tribunal, tout en déclarant infondé l'appel
de la dame Benali, a pourtant infirmé la sentence du pre
mier juge ;
Attendu que les autres énonciations des motifs et du dis
positif du jugement attaqué, suivant lesquelles le tribunal
a infirmer la sentence du premier juge, ce au motif que la
preuve du mariage prétendu n'était pas rapportée, démontre
suffisamment que c'est par suite d'une simple erreur maté
rielle que l'appel était déclaré infondé ;
Qu'une telle erreur, non susceptible de créer un doute sur
le sens et la portée de la décision attaquée, n'étant pas denaturel- à en entraîner l'annulation, il échet de rejeter le
moyen ;
Sur le second moyen
Attendu qu'il est fait grief au tribunal de n'avoir pas infir
mé en l'état seulement la sentence du premier juge et ré
servé tous autres, moyens de preuve du mariage ;
Mais attendu que le tribunal qui apprécie les éléments de
preuve produits n'est pas légalement tenu de réserver d'of
fice d'autres moyens de preuve ; d'où il suit que le moyen
est à rejeter ;
Sur les troisième et quatrième moyens réunis pris de viola
tions des règles de la preuve :
Attendu qu'il, est reproché au tribunal d'avoir écarté les
témoignages relatant le mariage en raison de leur impréci
sion, alors pourtant que les témoins qui disaient avoir assisté
à la récitation de la fatiha, s'ils n'avaient pu indiquer le
montant exact de la dot, avaient néanmoins précisé qu'il
s'agissait d'une dot de parité ;
— 126 —
Attendu qu'en droit musulman la preuve testimoniale du
mariage ne peut résulter que de témoignages directs, précis
et concordants et que, d'autre part, le mode de preuve
exceptionnel résultant de la production d'un acte de noto
riété, anciennement admis par l'usage, ne saurait désormais,en cas de contestation sur l'existence du mariage, faire
échec à la règle fondamentale du débat contradictoire, néces
sitant, sauf impossibilité absolue, l'audition régulière des
auteurs des déclarations insérées au dit acte. ;
Qu'en appDcation de ces principes, le tribunal devant
lequel était formellement contesté le mariage allégué, a cons
taté l'imprécision des déclarations des témoins qui, entendus
lors d'une notoriété établie un mois seulement après la pré
tendue célébration de ce mariage, ne pouvaient indiquer le
montant de la dot et décidé qu'au surplus la preuve de
l'union n'était pas rapportée par des témoignages insérés
dans une notoriété non contradictoire ; d'où il suit que ces
moyens sont infondés ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Couranjou, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
N° 113
I. — PREUVE. — TOURS D'EAU. — DROITS SUR LES EAUX. —
PREUVE FONDEE SUR UN TITRE CONSTITUE PAR UN JU
GEMENT.
11. — CONCLUSIONS. — DEMANDE D'EXPERTISE. — REPONSE
IMPLICITE.
111. — MOYENS. — MOYEN SANS PORTEE UTILE.
Consorts Hemidi l. Consorts Kerrouche. — T.C. Batna, 26 juin
1957.
ARRET
du 27 Octobre 1958
LA COUR
Au fond :
Sur le premier moyen pris d'une violation des règles de lapreuve
Attendu que par le jugement attaqué, le tribunal de Batnaa, confirmant sur ce seul point la sentence déférée, décidéque les frères Hemidi Mohammed et Abdelkader béni Ahmedn'avaient auciin droit sur certains tours d'eau déterminésà prendre aux puits Ain Torche, Laine Lakbira et Ain Delaa,
— 12V —
revendiqués par les concorts Kerrouche et les ont, en consé
quence, condamnés à en délaisser 'l'usage ;
Qu'il lui est fait grief d'avoir, pour statuer ainsi, énoncéque les défendeurs ne rapportaient pas la preuve de leursdroits sur les eaux litigieuses, alors que c'était aux demandeurs qu'il incombait de prouver l'inexistence des droits qu'ils
déniaient ;
Mais attendu que le litige se réduit à savoir si les tours
d'eau contestés étaient ou non attachés aux divers immeu
bles échus à Kerrouche Salah, frère des demandeurs, lors du
partage en 1936 de la succession du propriétaire originaire
des dits immeubles et dont les frères Hemidi avaient étédéclarés adjudicataires par jugement du 11 juillet 1950, seul
titre dont ils fassent état pour faire échec à la revendication
des cohéritiers de leur vendeur ;
Qu'en décidant qu'il résultait de ce, titre que les défen
deurs ne pouvaient légitimement prétendre qu'à uns nouba
d'eau, non contestée, à prendre tous les 48 jours dans une
séguia traversant le jardin Bella Delaa, les juges du fond,loin de condamner les frères Hemidi pour défaut de preuve
de leurs droits, ont fondé ainsi leur décision sur la preuve
contraire de leurs prétentions ; d'où il suit que le moyen
est à rejeter ;
Sur le second moyen pris d'un défaut de réponse à des con
clusions des frères Hemidi tendant à voir ordonner une exper
tise à l'effet de déternvner si les tours d'eau litigieux ne se
confondaient pas avec ceux attachés aux lots attribués à leur
vendeur Kerrouche Salah lors du partage de 1936
Attendu qu'en décidant que les défendeurs n'avaient ac
quis que l'usage d'une nouba d'eau à prendre tous les 48
jours dans une séguia traversant le jardin Bella Delaa, les
juges au fond ont implicitement, mais nécessairement répon
du pour la rejeter à la demande d'expertise ; d'où il suit
que le moyen est infondé ;
Sur le troisième moyen qji repioche au tribunai de Batna de
n'avoir pas répondu aux conclusions par lesquelles les frères
Hemidi demandaient au tribunal de juger que l'expert n'avait
pas le droit de procéder comme il l'a fait à l'cud tion de té
moins :
Attendu que le tribunal ayant fondé, essentiellement le ju
gement attaqué sur son propre examen du titre des défen-r
deurs, à l'exclusion des renseignements recueillis par l'idoine,le moyen s'avère sans portée utile ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
— 130 —
d'ayant droit à titre particulier, est présumé avoir commencé
par lui-même une possession distincte de celle de son auteur,
et qu'en ca cas, le délai nécessaire pour conduire à la pres
cription est réduit à dix ans;;
que le moyen est donc infondé;
Sur <e second moyen pris d'une insuffisance de motifs en ce
que le tribunal a, sans s'en expliquer, déclaré que la possession
de Djedoui Ahmed avait été paisible, alors qu'en 1954, la de
manderesse l'avait actionné en chefaa au sujet des mêmes droits
immobiliers
Attendu que les juges du fond n'avaient pas à s'expliquer
sur le caractère paisible de la possession du défendeur dès
lors qu'en suite des conclusions de ce dernier, Bouakaz El
Hadja Baya n'avait pas contesté que sa possession présente
les qualités utiles pour conduire à la prescription et n'avait
discuté que sa durée nécessaire ; d'où il suit que le moyen
est à rejeter ;
Sur ie troisième moyen qui reproche au tribunal de Batna
d'avojr admis Djedoui Ahmed au bénéfice de la prescription dé
cennale pour l'ensemble des droits litigieux, alorj que moins
de dix ans s'étaient écoulés depuis son acquisition de 1949
Attendu que, pour combattre l'exception de prescription
décennale invoquée par Djedoui, la demanderesse, sans con
tester la possibilité légale, implicitement mais nécessairement
retenue par le tribunal, de joindre à la possession du défen
deur celle de son auteur pour parfaire le délai de 10 ans,
s'est borné à affirmer que seule la prescription quarantenaire
pourrait être utilement invoquée ; d'où il suit que le moyen,
étant d'intérêt privé et mélangé de fait et de droit, est irre-
vable en raison de sa nouveauté ;
Par ces motifs :
En la forme, reçoit le pourvoi ; au fond, le rejette.
(MM. Blachier, Rapp. ; Siragusa, Subst. Gén.).
REVUE ALGERIENNE
TUNISIENNE ET MAROCAINE
DE LEGISLATION ET DE JURISPRUDENCE
DIRECTEUR : M. le Doyen de la Faculté de Droit : André BRETON.
REDACTEUR EN CHEF : M. A. COLOMER, Professeur agrégé* à la Faculté.
SECRETAIRE GENERAL : M. Louis JACQUIGNON, Docteur en Droit.
TABLE DES MATIERES
contenues dans leN°
50
(Lés chiffres renvoient aux numéros des arrêts)
Appefl 63-83-86-95
104-109-111
Café maure 79
Chambre de révision 62-65-103-107
109-110-114
Chefaa 87
Conclusions 60-61-92-96-98
101-110-111-113
Dépens 105
Divorce 101
Efcux 93-113
Expertise 63
Filiation 59
Habous 70-72-75-88
Hadana 78-97
Interdiction ; 106
Interprètes-traducteurs 86
Irrecevabilité 58-73-81-84-90
Kabylie 87
Mariage 68-77-85-89
111-112
Motifs 59-80-92-98
103-108-109
110-115
Moyen 59-67-80-92
101-102-103
105-113-115
Péremption 69
Pourvoi 64-105
Prescription 62-115
Preuve 62-63-71-74
86-88-89-92
94-113-114
Procédure 62-63-66-67-74
96-98-99-100
101-104-105-109
Succession 91
Testament 76
Tierce-opposition 100
Transaction, 94
Vente 82