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Examen fœtopathologique S. Triau CHAPITRE 42 L'examen fœtopathologique est indispensable en cas de mort fœtale in utero, de fausse couche spontanée et d'in- terruption médicale de grossesse. Il comprend l'examen du fœtus mais également celui du placenta, interface naturelle entre la mère et l'enfant. Effectué par un méde- cin expérimenté en fœtopathologie, il dresse le bilan le plus exhaustif possible des anomalies observées pour per- mettre un conseil génétique pertinent avec évaluation du risque de récurrence, ou déterminer l'étiologie de l'arrêt de la grossesse. Il comporte plusieurs étapes successives garantes d'un examen de qualité, dont la plus importante, l'autopsie, ne pourra être réalisée qu'une seule fois. Principes généraux La vérification anatomique est une véritable autopsie qui doit être effectuée dans un local adapté (chambre mor- tuaire, salle d'autopsie), permettant de travailler dans les meilleures conditions possibles, au calme, avec un bon éclairage. Le transport des fœtus nés sans vie n'est, jusqu'à ce jour, soumis à aucune réglementation, contrai- rement aux enfants nés vivants puis décédés. Néanmoins, l'acheminement du corps jusqu'à la salle d'examen doit respecter la réglementation en vigueur sur le transport des pièces anatomiques. De plus, il doit être effectué le plus rapidement possible après l'expulsion et dans les meilleu- res conditions de conservation possibles afin de limiter l'altération tissulaire naturelle par autolyse. Idéalement, celui-ci doit rester à une température de 4 °C et être placé dans un contenant de taille adaptée, étanche et solide, afin de le protéger des agressions extérieures. Ce transport peut être assuré par des sociétés spécialisées dans la prise en charge de produits biologiques et dotées de véhicules réfrigérés. Le corps pourra ensuite être stocké dans un réfrigérateur jusqu'à la réalisation de l'autopsie qui devra être effectuée dans le respect de la personne humaine et en limitant les différentes incisions au strict nécessaire. Il est indispensable de respecter la législation en vigueur et on veillera particulièrement à la bonne restauration tégu- mentaire du corps qui, une fois l'autopsie réalisée, pourra être présenté à la famille. Les parents, s'ils le souhaitent, pourront organiser des obsèques ou opter pour une déléga- tion du devenir du corps de l'enfant à l'établissement ayant effectué cet examen, qui procédera alors à la crémation. Outre l'autorisation d'autopsier signée par les deux parents (ou par la mère si elle est seule), le fœtopathologiste doit veiller à recueillir le consentement parental pour la réalisation des photographies, des prélèvements tissulaires à visée génétique ou pour toute étude scientifique dans le cadre d'un protocole bien établi. De même, il doit obtenir toutes les informations nécessaires au diagnostic : antécé- dents de la patiente, histoire de la grossesse, résultats des examens biologiques, traitements médicaux, comptes ren- dus échographiques, etc. L'obtention de ces renseignements peut être facilitée par l'utilisation de documents préétablis communiqués aux cliniciens en charge de la patiente. La traçabilité de l'examen fœtopathologique doit être assurée à chaque étape, avec conservation de tous les documents et constitution de livres registres. Examen du fœtus Radiographies Les radiographies sont systématiques quel que soit le terme : la petite taille d'un fœtus ou le terme précoce de la gros- sesse ne doivent pas être des arguments pour ne pas les réaliser, puisque des anomalies osseuses essentielles au diagnostic peuvent être visibles même chez des petits fœtus lors d'une association VACTERL [1] ou MURCS [2] par exemple. Indispensables dans tous les diagnostics d'ostéo- chondrodysplasie, elles permettent également de dépister des petites anomalies osseuses passées inaperçues lors des échographies et de l'autopsie, ou d'objectiver des calcifica- tions anormales (aire hépatique par exemple). Elles doivent être de bonne qualité, comprenant un corps entier de face et de profil avec des extrémités bien analysables (mains bien à plat) et des clichés du crâne. Une règle étalon devra figurer sur les radiographies en cas d'agrandissement ou de réduc- tion. L'étude de la vascularisation fœtale pourra éventuelle- ment se faire après opacification artérielle par injection de produit de contraste dans l'une des artères ombilicales. Sur les clichés du corps entier de face et de profil, on appréciera l'aspect globalement harmonieux du fœtus, la minéralisation du squelette, la maturation osseuse avec la présence des points d'ossification et la croissance des différentes pièces osseuses. On étudiera l'ossification du crâne, la taille des orbites, la distance interorbitaire, l'as- pect des canaux semi-circulaires supérieurs et la présence des conduits auditifs externes. On mesurera les os propres du nez ainsi que les diamètres bipariétal et fronto-occipi- tal. On regardera l'aspect des clavicules, des ailes iliaques et des côtes qui seront comptées (nanisme à thorax étroit, côtes courtes, fusions costales). Il en sera de même pour les vertèbres (hémivertèbres, vertèbres surnuméraires, pla- tyspondylie, vertèbres en altères) et l'étude de la courbure

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Examen fœtopathologiqueS. Triau

chapitre

42

L'examen fœtopathologique est indispensable en cas de mort fœtale in utero, de fausse couche spontanée et d'in-terruption médicale de grossesse. Il comprend l'examen du fœtus mais également celui du placenta, interface naturelle entre la mère et l'enfant. Effectué par un méde-cin expérimenté en fœtopathologie, il dresse le bilan le plus exhaustif possible des anomalies observées pour per-mettre un conseil génétique pertinent avec évaluation du risque de récurrence, ou déterminer l'étiologie de l'arrêt de la grossesse. Il comporte plusieurs étapes successives garantes d'un examen de qualité, dont la plus importante, l'autopsie, ne pourra être réalisée qu'une seule fois.

Principes généraux

La vérification anatomique est une véritable autopsie qui doit être effectuée dans un local adapté (chambre mor-tuaire, salle d'autopsie), permettant de travailler dans les meilleures conditions possibles, au calme, avec un bon éclairage. Le transport des fœtus nés sans vie n'est, jusqu'à ce jour, soumis à aucune réglementation, contrai-rement aux enfants nés vivants puis décédés. Néanmoins, l'acheminement du corps jusqu'à la salle d'examen doit respecter la réglementation en vigueur sur le transport des pièces anatomiques. De plus, il doit être effectué le plus rapidement possible après l'expulsion et dans les meilleu-res conditions de conservation possibles afin de limiter l'altération tissulaire naturelle par autolyse. Idéalement, celui-ci doit rester à une température de 4 °C et être placé dans un contenant de taille adaptée, étanche et solide, afin de le protéger des agressions extérieures. Ce transport peut être assuré par des sociétés spécialisées dans la prise en charge de produits biologiques et dotées de véhicules réfrigérés. Le corps pourra ensuite être stocké dans un réfrigérateur jusqu'à la réalisation de l'autopsie qui devra être effectuée dans le respect de la personne humaine et en limitant les différentes incisions au strict nécessaire.

Il est indispensable de respecter la législation en vigueur et on veillera particulièrement à la bonne restauration tégu-mentaire du corps qui, une fois l'autopsie réalisée, pourra être présenté à la famille. Les parents, s'ils le souhaitent, pourront organiser des obsèques ou opter pour une déléga-tion du devenir du corps de l'enfant à l'établissement ayant effectué cet examen, qui procédera alors à la crémation.

Outre l'autorisation d'autopsier signée par les deux parents (ou par la mère si elle est seule), le fœtopathologiste doit veiller à recueillir le consentement parental pour la réalisation des photographies, des prélèvements tissulaires

à visée génétique ou pour toute étude scientifique dans le cadre d'un protocole bien établi. De même, il doit obtenir toutes les informations nécessaires au diagnostic : antécé-dents de la patiente, histoire de la grossesse, résultats des examens biologiques, traitements médicaux, comptes ren-dus échographiques, etc. L'obtention de ces renseignements peut être facilitée par l'utilisation de documents préétablis communiqués aux cliniciens en charge de la patiente.

La traçabilité de l'examen fœtopathologique doit être assurée à chaque étape, avec conservation de tous les documents et constitution de livres registres.

Examen du fœtus

Radiographies

Les radiographies sont systématiques quel que soit le terme : la petite taille d'un fœtus ou le terme précoce de la gros-sesse ne doivent pas être des arguments pour ne pas les réaliser, puisque des anomalies osseuses essentielles au diagnostic peuvent être visibles même chez des petits fœtus lors d'une association VACTERL [1] ou MURCS [2] par exemple. Indispensables dans tous les diagnostics d'ostéo-chondrodysplasie, elles permettent également de dépister des petites anomalies osseuses passées inaperçues lors des échographies et de l'autopsie, ou d'objectiver des calcifica-tions anormales (aire hépatique par exemple). Elles doivent être de bonne qualité, comprenant un corps entier de face et de profil avec des extrémités bien analysables (mains bien à plat) et des clichés du crâne. Une règle étalon devra figurer sur les radiographies en cas d'agrandissement ou de réduc-tion. L'étude de la vascularisation fœtale pourra éventuelle-ment se faire après opacification artérielle par injection de produit de contraste dans l'une des artères ombilicales.

Sur les clichés du corps entier de face et de profil, on appréciera l'aspect globalement harmonieux du fœtus, la minéralisation du squelette, la maturation osseuse avec la présence des points d'ossification et la croissance des différentes pièces osseuses. On étudiera l'ossification du crâne, la taille des orbites, la distance interorbitaire, l'as-pect des canaux semi-circulaires supérieurs et la présence des conduits auditifs externes. On mesurera les os propres du nez ainsi que les diamètres bipariétal et fronto-occipi-tal. On regardera l'aspect des clavicules, des ailes iliaques et des côtes qui seront comptées (nanisme à thorax étroit, côtes courtes, fusions costales). Il en sera de même pour les vertèbres (hémivertèbres, vertèbres surnuméraires, pla-tyspondylie, vertèbres en altères) et l'étude de la courbure

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rachidienne. Les os longs seront mesurés et comparés aux normes données par des tables de croissance établies en fonction du terme. On recherchera des fractures en faveur d'une ostéogenèse imparfaite [3] (fig. 42.1), des incur-vations pour un nanisme campomélique [4], un nanisme thanatophore [5] (fig. 42.2) ou toute autre anomalie. On

regardera l'aspect des métaphyses et des épiphyses (chon-drodysplasie ponctuée) [6] et, pour les mains, celui des métacarpiens et des phalanges (hypoplasie du premier métacarpien dans le syndrome de Smith-Lemli-Opitz [7], brachymésophalangie des cinquièmes doigts dans la tri-somie 21) (fig. 42.3).

Photographies

Tout comme les radiographies, elles doivent être sys-tématiques et de bonne qualité, permettant leur exploi-tation ultérieure (dossier patient, staff, publications, congrès). On veillera à effectuer une déclaration à la CNIL s'il s'agit de photographies numériques. Quel que soit le support choisi (argentique ou numérique), le recueil du consentement parental est maintenant indispensable.

Si les fœtus parviennent habillés, nous préconisons de faire une à deux photographies initiales qui pourront être remises aux parents s'ils le souhaitent (travail de deuil). Tous les autres clichés porteront sur un corps nu préa-lablement lavé et séché, avec un bon éclairage (banc de photographie), une règle étalon et un fond de couleur neu-tre. Après ablation du clamp au niveau du cordon ombili-cal, on réalisera des photographies du corps entier de face et de dos (fig. 42.4 et 42.5), du corps entier de profil (droit et gauche), de la tête de face, du profil droit, du profil gau-che, des organes génitaux externes, des mains et des pieds (faces dorsales, palmaires et plantaires).

Fig. 42.1. – Radiographie, fractures osseuses (ostéogenèse imparfaite).

Fig. 42.2. – Radiographie, incurvations osseuses (nanisme thanatophore).

Fig. 42.3. – Radiographie, brachymésophalangie du cinquième doigt (flèche) (trisomie 21).

Examen fœtopathologique 439

Toute anomalie sera systématiquement photographiée. Il en sera de même lors de la dissection avec réalisation de photographies in situ et/ou sur banc de photographie après extraction de l'organe.

Examen externe

L'examen externe, premier temps de la vérification ana-tomique, permet de recueillir de nombreuses informa-tions indispensables au diagnostic. Après l'inspection des téguments pour évaluer le temps de rétention intra-uté-rin (macération), le fœtus est pesé puis mesuré (mètre de couturière, pied à coulisse). Les données recueillies sont comparées avec des normes établies en fonction du terme : poids, taille vertex-coccyx, taille vertex-talons, périmè-tre crânien, longueur du pied. L'examen anatomique est réalisé étape par étape, de façon systématique afin de ne rien oublier, en commençant par l'extrémité céphalique : forme et taille du crâne, aspect des fontanelles, mobilité des sutures, équilibre des trois étages de la face, aspect du nez (racine, ailes du nez, position des narines, perméabilité des choanes), du philtrum, des oreilles (forme, position, taille, perméabilité des conduits auditifs externes), de la bouche (forme, taille, lèvres), des yeux (globes oculaires, iris, taille des fentes palpébrales, distance intercanthique interne, dis-tance intercanthique externe, distance interorbitaire), de la langue, des gencives, du palais et de la luette.

La distance intermamelonnaire est mesurée, de même que le périmètre thoracique, abdominal, la longueur du cordon par rapport à l'ombilic en précisant le nombre de vaisseaux et sa distance par rapport au sexe en cas d'in-sertion basse évocatrice d'un syndrome de Fraser [8]. L'examen du tronc se termine par la palpation des apo-physes épineuses.

L'étude de la région pelvienne permet de déterminer le sexe du fœtus, les organes génitaux externes devant être en adéquation avec les organes génitaux internes. Toute ambiguïté sexuelle est soigneusement décrite en détaillant l'aspect de la vulve, du scrotum, du pénis ou du clitoris. En cas de micro- ou macropénis, la taille de ce dernier est mesurée de la base d'implantation périnéale jusqu'à son extrémité. La recherche d'un hypospadias peut être faci-litée en appuyant sur la vessie pour faire uriner le fœtus. L'aspect de l'anus est décrit en cas d'anomalie (atrésie, absence, sténose, béance, obturation par une membrane, fistule, cloaque).

Les membres doivent comporter des segments har-monieux avec une mobilité articulaire normale. Après avoir vérifié l'aspect des doigts, des mains (pli palmaire transverse unique) (fig. 42.6), des orteils et des ongles, l'examen externe se termine par le cathétérisme systéma-tique de tous les orifices (perméabilité des choanes, des conduits auditifs externes, du vagin et de l'anus).

Fig. 42.4. – Corps entier de face (nanisme thanatophore). Fig. 42.5. – Corps entier de dos (nanisme thanatophore).

440 Pathologies fœtales acquises

Autopsie

Orientée en fonction des données échographiques et réa-lisée selon un plan propre à chacun, l'autopsie débute par une incision verticale mento-sterno-pubienne en Y inversé de part et d'autre de l'ombilic, permettant de récliner la paroi thoracique et abdominale tout en préser-vant la vessie et les artères ombilicales.

Thorax

Après avoir vérifié l'intégrité des coupoles diaphragma-tiques, les côtes sont sectionnées, le diaphragme coupé dans sa partie antérieure au ras du gril costal, la région acromioclaviculaire désarticulée et le plastron thoracique récliné, permettant l'abord de la cage thoracique. Avant toute dissection, on s'assure de l'absence d'épanchement séreux et on vérifie les rapports anatomiques des diffé-rents organes : le thymus doit être présent en position cen-trale, en avant du cœur et du tronc veineux innominé, son absence devant faire évoquer un syndrome de Di George [9]. Le cœur est à gauche entre des poumons de lobula-tion normale (absence d'isomérisme), pointe à gauche, la veine azygos à droite du rachis, l'aorte à gauche. Le thy-mus est réséqué, laissant apparaître le péricarde, les vais-seaux de la base du cœur et la veine brachiocéphalique gauche dont l'absence devra faire rechercher une veine cave supérieure gauche. L'ablation du péricarde permet d'aborder l'artère pulmonaire, l'aorte de même diamè-tre située initialement plus en arrière, ainsi que le canal artériel. Les vaisseaux partant de la crosse aortique sont

repérés (tronc artériel brachiocéphalique se divisant en artère sous-clavière droite et carotide primitive droite, carotide primitive gauche, artère sous-clavière gauche), de même que les retours veineux (veines caves, veines pulmonaires). Après détermination du situs auriculaire et visualisation des artères coronaires interventriculaires, on apprécie le volume ventriculaire.

La dissection du cœur se fait in situ en suivant le trajet sanguin ou, pour certains, sur cœur fixé après extraction du bloc cœur-poumon en cas de malforma-tion. L'oreillette droite est ouverte verticalement via les veines caves permettant de visualiser le sinus coronaire, le foramen ovale et une éventuelle communication inter-auriculaire. Le ventricule droit est ensuite recoupé pour étudier les valves tricuspides et pulmonaires, le tronc pulmonaire, les artères pulmonaires et le canal artériel. La dissection du cœur gauche s'effectue en ouvrant l'oreillette gauche selon un plan horizontal que l'on pro-longe jusqu'à la pointe, dégageant ainsi la valve mitrale. La dernière recoupe, le long du septum interventricu-laire, aborde la chambre de chasse et l'orifice aortique en continuité avec la valve mitrale et objective une éven-tuelle communication interventriculaire. Au-dessus des trois valvules aortiques en nid de pigeon se trouvent les deux orifices coronaires. L'ensemble cœur-poumon est extrait en coupant le bloc pharyngolaryngé, les vaisseaux du cou, l'œsophage et l'aorte le long du rachis, puis sec-tion du tout au ras du diaphragme. Après cathétérisme de l'œsophage (fig. 42.7) et des bronches souches droite et gauche à la recherche d'une atrésie, l'œsophage est ouvert pour éliminer une fistule, de même que le larynx, la trachée, les bronches souches (fig. 42.8), l'aorte et ses branches collatérales.

Abdomen et pelvis

Comme à l'étage thoracique, la vérification anatomique in situ constitue le premier temps de l'examen : les artères ombilicales droite et gauche de calibre identique enca-drent une vessie de volume normal. Les gonades doivent être en place, de même que le caecum, l'appendice, l'es-tomac, la rate, le pancréas et le foie, avec une vésicule biliaire à droite de la veine ombilicale dont on vérifiera le trajet et la perméabilité.

Après avoir noté la position du méconium et l'absence de mésentère commun, on procède à l'ablation du tube digestif en le coupant au ras du rectum et en le déroulant jusqu'au duodénum à la recherche d'une duplication, d'une atrésie ou d'un diverticule de Meckel. Le duodénum est ensuite sectionné puis ouvert jusqu'au pylore. La pression de la vésicule laisse sourdre de la bile à travers la papille duodénale, éliminant ainsi une atrésie de la voie biliaire principale. L'étage sus-mésocolique est prélevé en mono-bloc après section des ligaments triangulaires, falciforme, du petit omemtum, de la veine cave inférieure et de l'œso-phage au niveau du cardia emportant le foie, l'estomac, le pancréas, le cadre duodénal et la rate. Ces organes sont ensuite disséqués sur planche, pesés, recoupés et mis en cassette pour étude anatomopathologique.

Fig. 42.6. – Pli palmaire transverse unique (flèche) (trisomie 21).

Examen fœtopathologique 441

L'abord de la région rétropéritonéale, facilitée par cette éviscération, permet d'étudier les reins, les surrénales, les uretères dont le calibre et le trajet sont notés, les organes génitaux internes, l'aorte et sa bifurcation ainsi que les muscles psoas.

Système nerveux central et œil

Le prélèvement de l'encéphale, du fait de sa lyse rapide, justifie à lui seul l'urgence de l'examen fœtopathologique. Le cuir chevelu est récliné après une incision bitemporale complétée par une recoupe perpendiculaire cervico-occi-pitale facilitant l'abord de la fosse postérieure. La mobilité des sutures est vérifiée, de même que l'aspect des fonta-nelles. La boîte crânienne est ensuite ouverte en trèfle en passant par les sutures et les fontanelles. La faux du cer-veau, le chiasma optique, l'hypophyse, les nerfs crâniens, la tente du cervelet et la moelle cervicale haute sont suc-cessivement sectionnés alors que l'on extrait l'encéphale par un délicat mouvement de bascule de la tête. Compte tenu de son extrême fragilité, le cerveau doit être mani-pulé le moins possible : son examen détaillé sera réalisé ultérieurement après une fixation formolée d'au moins 3 semaines. La base du crâne est décrite en repérant le relief des canaux semi-circulaires supérieurs dont toute anomalie devra faire suspecter une association CHARGE

[10]. En cas d'anomalie cérébrale, les yeux sont systéma-tiquement prélevés en veillant à bien respecter les paupiè-res, de même que la moelle épinière.

Prélèvements

L'examen histologique des différents organes doit être systématique : thyroïde et parathyroïdes, larynx, thymus, cœur, poumons, reins, surrénales, estomac, pancréas, rate, foie, gonades, moelle cervicale, encéphale, yeux, mus-cle strié, peau, ainsi que de l'os et du cartilage dans les ostéochondrodysplasies, les retards de croissance et les anasarques.

Du tissu fœtal sera conservé à –80 °C pour la biologie moléculaire, indispensable en cas de suspicion de maladie métabolique : muscle, foie, poumon, rein, thymus, pointe du cœur. Lors d'anasarque, il peut être utile de congeler des urines, du liquide d'ascite, péricardique, ou pleural pour étude biochimique. De même, divers prélèvements pour-ront être faits pour la bactériologie, la virologie ou la para-sitologie. Enfin, on veillera à prélever du tissu non altéré et vivace (ou du chorion placentaire si le fœtus est macéré) pour pouvoir réaliser un caryotype si celui-ci n'a pas été fait en prénatal, indispensable en cas de syndrome polymalfor-matif, de mort fœtale in utero, d'anasarque ou d'anamnios.

Examen du placenta

L'examen du placenta, adressé à l'état frais (non for-molé) avec le fœtus, est indissociable de l'examen fœtal.

Fig. 42.7. – Atrésie de l'œsophage (flèche) (association VACTERL).

Fig. 42.8. – Fistule œsotrachéale (flèche) (association VACTERL).

442 Pathologies fœtales acquises

Il permet de réaliser un caryotype selon un protocole éta-bli avec le cytogénéticien dans les morts in utero réten-tionnelles, mais également d'effectuer des prélèvements virologiques, bactériologiques et parasitologiques.

On procède, là encore, étape par étape : le diamètre et la longueur du cordon sont mesurés et la zone d'inser-tion sur la galette placentaire précisée (centrale, para-centrale, marginale, vélamenteuse). On apprécie le degré de spiralisation (lisse, hypertorsadé), la couleur, le nom-bre de vaisseaux (artère ombilicale unique), la présence de nœuds ou de faux nœuds. Deux prélèvements sont réalisés pour étude histologique en régions distales et proximales. L'aspect et la couleur des membranes sont précisés, de même que leur mode d'insertion placentaire (placenta extrachorial). Avant d'être sectionnées au ras du parenchyme et prélevées en partie pour étude anatomopa-thologique, le petit côté est mesuré. En cas de grossesse gémellaire, la membrane interamniotique, si elle existe, doit être examinée au microscope pour déterminer la cho-rionicité. Le placenta est ensuite mesuré dans ses trois dimensions, et sa configuration précisée. Il est pesé et son poids comparé avec celui attendu en fonction du terme de la grossesse. On décrit les aspects des plaques basale et choriale [hématome décidual basal, brides amniotiques (fig. 42.9), cheminement des vaisseaux allantochoriaux,

thrombose sous choriale, etc.] avant d'effectuer des cou-pes sériées tous les centimètres à la recherche d'anomalies parenchymateuses (thrombose intervilleuse, infarctus, foyers de nécrose ischémique avec dépôts fibrinoïdes, kyste trophoblastique, etc.). Trois zones non pathologi-ques sont prélevées, de principe pour étude histologique du tissu placentaire.

Fig. 42.9. – Brides amniotiques (flèches).

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