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Imagerie cardiaque : scanner et IRM © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Chapitre 11 J.-N. Dacher, G. Gahide, J. Caudron, A. Manrique IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde La sémiologie en imagerie par résonance magnéti- que (IRM) de l'infarctus du myocarde (IDM) en phase subaiguë est aujourd'hui bien établie. Dans cette revue, nous nous intéresserons essentiellement à la phase initiale de l'infarctus (2–7 jours après l'épisode de douleur thoracique). Nous envisage- rons aussi la sémiologie de l'IDM en scanner multi- détecteur, plus récemment décrite. L'IDM est une nécrose myocardique consécutive à une ischémie prolongée. Cette pathologie constitue un problème de santé publique et reste une des pre- mières causes de décès dans les pays industrialisés. La mortalité est importante et difficile à évaluer, même si le registre français « FAST MI » [1] semble montrer une diminution nette et récente de la mor- talité en phase aiguë. Le diagnostic repose principa- lement sur la clinique, l'électrocardiogramme (ECG) et la biologie. La coronarographie réalisée en urgence, souvent après un traitement préhospita- lier, permet d'identifier et souvent de reperméabili- ser la sténose coronarienne responsable. Kim et al. [2] ont mis en avant le potentiel de l'IRM dès 2000 en montrant la relation entre l'extension transmurale de l'infarctus (mesurée sur des images en écho de gradient T 1 en inversion-récupération (IR) après injection de gadolinium) et le pronostic fonctionnel. Physiopathologie Myocyte et ischémie Le cœur est un organe essentiellement musculaire dont l'unité fonctionnelle est représentée par le myocyte. Celui-ci a pour particularité de fonction- ner sans discontinuité tout au long de la vie. À cet effet, il a développé un métabolisme particulier : incapable de fonctionner sur un mode anaérobie, le myocyte s'est spécialisé dans l'extraction de l'oxy- gène circulant. La saturation en oxygène du sang de la circulation systémique est proche de 100 %. À l'état basal, après avoir traversé les tissus myocardi- ques, le sang drainé par le sinus coronaire n'est plus saturé qu'à 30 %. L'extraction d'oxygène étant pres- que maximale, toute augmentation des besoins ne peut être compensée que par un accroissement du débit coronarien : cette capacité définit la réserve coronaire. Chez le patient coronarien, cette réserve est dimi- nuée en présence de lésions hémodynamiquement significatives. Si le rapport apports/besoins est déséquilibré, dès les premières secondes, les cellu- les myocardiques perdent leur fonction contrac- tile et des modifications cellulaires surviennent. Une ischémie profonde prolongée plus de 20 minutes peut entraîner la mort cellulaire et des lésions irréversibles. L'incapacité des cellules myocardiques à se régénérer se traduit alors par la perte définitive de la portion nécrosée. Celle-ci est remplacée après quelques mois par un tissu fibreux cicatriciel. En périphérie de la zone nécro- sée, il existe une zone qui a perdu sa fonction contractile, tout en restant viable. Cette zone sidérée retrouvera spontanément, après un délai de quelques jours, une fonction contractile nor- male. Il faut différencier les concepts de sidéra- tion et d'hibernation, même si dans les deux cas, il s'agit de myocarde viable. Le myocarde hibernant

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Imagerie cardiaque : scanner et IRM© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Chapitre 11

IRM et TDM au décours

de l'infarctus du myocarde

J.-N. Dacher, G. Gahide, J. Caudron, A. Manrique

La sémiologie en imagerie par résonance magnéti-que (IRM) de l'infarctus du myocarde (IDM) en phase subaiguë est aujourd'hui bien établie. Dans cette revue, nous nous intéresserons essentiellement à la phase initiale de l'infarctus (2–7 jours après l'épisode de douleur thoracique). Nous envisage-rons aussi la sémiologie de l'IDM en scanner multi-détecteur, plus récemment décrite.L'IDM est une nécrose myocardique consécutive à une ischémie prolongée. Cette pathologie constitue un problème de santé publique et reste une des pre-mières causes de décès dans les pays industrialisés. La mortalité est importante et difficile à évaluer, même si le registre français « FAST MI » [1] semble montrer une diminution nette et récente de la mor-talité en phase aiguë. Le diagnostic repose principa-lement sur la clinique, l'électrocardiogramme (ECG) et la biologie. La coronarographie réalisée en urgence, souvent après un traitement préhospita-lier, permet d'identifier et souvent de reperméabili-ser la sténose coronarienne responsable.Kim et al. [2] ont mis en avant le potentiel de l'IRM dès 2000 en montrant la relation entre l'extension trans murale de l'infarctus (mesurée sur des images en écho de gradient T1 en inversion-récupération (IR) après injection de gadolinium) et le pronostic fonctionnel.

Physiopathologie

Myocyte et ischémie

Le cœur est un organe essentiellement musculaire dont l'unité fonctionnelle est représentée par le

myocyte. Celui-ci a pour particularité de fonction-ner sans discontinuité tout au long de la vie. À cet effet, il a développé un métabolisme particulier : incapable de fonctionner sur un mode anaérobie, le myocyte s'est spécialisé dans l'extraction de l'oxy-gène circulant. La saturation en oxygène du sang de la circulation systémique est proche de 100 %. À l'état basal, après avoir traversé les tissus myocardi-ques, le sang drainé par le sinus coronaire n'est plus saturé qu'à 30 %. L'extraction d'oxygène étant pres-que maximale, toute augmentation des besoins ne peut être compensée que par un accroissement du débit coronarien : cette capacité définit la réserve coronaire.Chez le patient coronarien, cette réserve est dimi-nuée en présence de lésions hémodynamiquement significatives. Si le rapport apports/besoins est déséquilibré, dès les premières secondes, les cellu-les myocardiques perdent leur fonction contrac-tile et des modifications cellulaires surviennent. Une ischémie profonde prolongée plus de 20 minutes peut entraîner la mort cellulaire et des lésions irréversibles. L'incapacité des cellules myocardiques à se régénérer se traduit alors par la perte définitive de la portion nécrosée. Celle-ci est remplacée après quelques mois par un tissu fibreux cicatriciel. En périphérie de la zone nécro-sée, il existe une zone qui a perdu sa fonction contractile, tout en restant viable. Cette zone sidérée retrouvera spontanément, après un délai de quelques jours, une fonction contractile nor-male. Il faut différencier les concepts de sidéra-tion et d'hibernation, même si dans les deux cas, il s'agit de myocarde viable. Le myocarde hibernant

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126 Cardiopathies ischémiques

Ce qu'il faut retenir

• La nécrose myocardique est une lésion irréversible qui débute dans le sous-endocarde et s'étend vers l'épicarde. • L'IDM présente une forme stéréotypée de lentille convexe en dehors (rehaussement tardif). • L'infarctus transmural correspond à une lésion de plus de 50 % de l'épaisseur du myocarde, qui elle-même cor-respond à un territoire à faible capacité de récupération fonctionnelle. • La sidération est une dysfonction ventriculaire gauche faisant suite à une ischémie profonde. Elle n'inclut pas de lésion tissulaire irréversible, persiste et s'aggrave en dépit de la restauration d'une perfusion normale (syndrome de reperfusion). Elle est progressivement et spontanément réversible.

dysfonctionne suite à une ischémie chronique et récupère éventuellement après une reva scul-arisation spontanée ou thérapeutique [ 3 ].

Myocarde et genèse de l'infarctus

On distingue deux couches au sein du myocarde : sous-endocardique et sous-épicardique. Le système coronarien est un réseau superficiel (épicardique) qui se ramifie progressivement et donne des bran-ches de plus en plus grêles à mesure que l'on pro-gresse dans la profondeur du myocarde. Bien qu'il existe un réseau anastomotique, la vascularisation cardiaque du sujet sain se comporte comme un sys-tème terminal. Une occlusion aiguë entraîne la nécrose du territoire myocardique placé sous sa dépendance. La fonction contractile de repos est assurée par le myocarde sous-endocardique. Les myocytes de ce territoire vascularisé par la distalité du réseau artériel coronarien sont les plus rapidement sensibles à l'is-chémie. On explique ainsi le mode d'apparition et d'extension de l'infarctus. Il dessine ce que les Anglo-Saxons appellent le « wave-front » . La lésion apparaît en un point profond du sous-endocarde (l'épicentre) et progresse simultanément latéralement et vers l'épi-carde. Une fois constitué, l'IDM est de forme stéréo-typée : il est toujours plus large sur son versant endocardique et présente une morphologie lenticu-laire convexe en dehors. Cette extension affecte plus ou moins l'épaisseur du myocarde, selon le caractère plus ou moins proximal de la lésion coronarienne, la qualité et la rapidité de la reperfusion, et selon l'exis-tence ou l'absence d'une circulation collatérale. Lorsque l'extension concerne plus de 50 % de l'épais-seur myocardique, on parle d'infarctus transmural. Jusqu'à l'avènement de l'IRM, la transmuralité de l'IDM était un concept histologique non évaluable in vivo. La capacité de récupération fonctionnelle après revascularisation d'un territoire est directement liée à l'importance de la transmuralité. Schématiq-uement, les segments ayant plus de 50 % de nécrose ne retrouveront a priori pas de fonction contractile, alors que les segments n'en présentant que 10 % ont une forte probabilité de récupération. Les consé-quences de la reperfusion sur le myocarde ischémié mais non nécrosé sont complexes et associent

œdème et augmentation de la charge tissulaire en potassium [ 4 , 5 ]. La reperméabilisation des artères coronaires épicar-diques ne suffit pas à affirmer l'intégrité de la microvascularisation myocardique : identifier la per-méabilité ou l'obstruction ( no reflow ) de cette vas-cularisation capillaire myocardique représente un des enjeux de l'IRM [ 6 ]. La présence de no reflow est un élément de mauvais pronostic que l'on sait prédictif de remodelage ventriculaire. Un autre rôle des examens complémentaires est de faire la part entre territoires nécrotiques et viables parmi les segments akinétiques et au sein de chaque segment de l'endocarde à l'épicarde. Cette distinc-tion est essentielle pour la prise en charge thérapeu-tique : la reperfusion (endovasculaire ou chirurgicale) améliore le pronostic du patient en cas de viabilité résiduelle [ 7 ].

Du symptôme au diagnostic : les examens complémentaires

Les signes cliniques sont très variables selon les sujets. La douleur thoracique désignée du plat de la main peut manquer, notamment chez le diabétique [ 8 ], et les symptômes peuvent mimer d'autres affections. De nombreuses méthodes ont été développées pour affirmer le diagnostic, la base étant la combinaison ECG/biologie/coronarographie. La valeur diagnostique de l'ECG est excellente pour les infarctus antérieurs, mais s'amenuise dans les

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Chapitre 11. IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde 127

autres territoires. Le signe précoce est le sus-décalage de ST (« STEMI » dans la littérature anglo-saxonne pour désigner l'infarctus du myocarde avec éléva-tion de ST, « NSTEMI » pour l'infarctus sans déca-lage du segment ST), suivi de l'apparition d'une onde Q de nécrose, et d'une inversion des ondes T. La pratique intensive de l'IRM dans les suites des syndromes douloureux thoraciques montre toutes les limites de l'ECG.L'apparition des marqueurs biologiques sériques a permis d'améliorer la sensibilité diagnostique. De nombreuses recherches ont mis à la disposition du clinicien des marqueurs de plus en plus sensibles et spécifiques de la nécrose des myocytes cardiaques. Actuellement, le dosage des troponines T ou I car-diaques constitue la référence. Cependant, l'éléva-tion de ces protéines n'est pas pathognomonique de l'ischémie myocardique : les troponines peuvent être élevées dans d'autres types de souffrance myo-cytaire (myopéricardite) ainsi que dans certaines situations pathologiques (insuffisance cardiaque, embolie pulmonaire, insuffisance rénale) [9].En cas de syndrome douloureux avec décalage de ST, la coronarographie doit être réalisée le plus vite possible pour identifier l'artère responsable et si possible la recanaliser [10]. Le traitement médical préhospitalier est indispensable, souvent efficace, et la rapidité de la prise en charge est un élément clé du pronostic. Elle permet un diagnostic lésionnel visua-lisant le défect endoluminal coronarien. Le retentis-sement fonctionnel peut être apprécié dans le même temps par la ventriculographie.L'échocardiographie a l'avantage de son accessibi-lité et de sa facilité de réalisation, y compris chez des patients en soins intensifs. Elle a permis d'améliorer le diagnostic topographique en étudiant les troubles de la cinétique segmentaire, mais elle reste limitée dans le diagnostic de la transmuralité. L'échographie de stress (injection de faibles doses de dobutamine) permet d'estimer la viabilité résiduelle au décours de l'IDM (zones acontractiles au repos recouvrant une cinétique en situation de stress).Les techniques de médecine nucléaire (tomoscinti-graphie cardiaque synchronisée ou gated SPECT (single-photon emission computed tomography), tomographie par émission de positons au 18-fluoro-deoxyglucose) sont également performantes en matière d'analyse de la viabilité myocardique. La scintigraphie de perfusion montre parfaitement les

IDM transmuraux, mais pâtit de sa faible résolu-tion spatiale pour le diagnostic de nécrose non transmurale (sous-endocardique) [11]. La réalisa-tion d'un examen TEP au décours d'un IDM n'est pas pratiquée en France en raison du faible taux d'équipement.Depuis deux décennies, de nombreux progrès ont été réalisés en résonance magnétique cardiaque. Reproductible et fiable, l'IRM, avec son excellente résolution en contraste, sa bonne résolution spa-tiale et sa résolution temporelle correcte, a entraîné une avancée intéressante dans le bilan de la patho-logie myocardique. Elle permet d'associer une analyse morphologique et fonctionnelle avec des séquences de perfusion de premier passage et de rehaussement tardif.Dans la suite de ce chapitre, nous aborderons suc-cessivement le protocole pratique de l'examen, les séquences clés ainsi que leurs résultats et limites.

Surveillance et installation du patient

Dans notre centre, l'IRM est réalisée au moment du transfert du patient de l'unité de soins intensifs vers une unité de soins conventionnels. La salle d'examen doit être équipée de matériel de sécurité (chariot d'urgence, défibrillateur) et de fluides médicaux. La présence auprès du patient d'un médecin rompu aux techniques de réanimation durant tout l'examen est préférable [12]. On vérifie l'absence de contre-indication (pacemaker, défi-brillateur implantable). La présence d'un ou plu-sieurs stents coronariens posé(s) dans les heures qui précèdent ne contre-indique pas la réalisation de l'IRM.Le patient est perfusé. Un injecteur automatique de qualité apporte confort et reproductibilité. Un entraî-nement à la pratique de l'apnée est utile pour faire reproduire systématiquement le même mouvement de blocage du diaphragme. Celui-ci ne doit pas occasion-ner d'effort important. L'oxygène nasal n'est pas utile.La réalisation d'un examen satisfaisant passe par une installation confortable du patient. Nous préférons le décubitus dorsal avec les genoux soutenus en demi-flexion par une cale en mousse. Le signal ECG interfacé à l'IRM doit être de parfaite qualité. Les électrodes sont installées selon les consignes du

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128 Cardiopathies ischémiques

constructeur, et on choisit la dérivation qui produit une onde R positive la plus ample possible. Il faut savoir que le champ magnétique peut être responsa-ble d'une pseudocroissance de l'onde T pouvant occasionner des artéfacts. On se gardera de poser tout diagnostic sur une courbe ECG obtenue en salle d'IRM. Cette règle n'est cependant pas vraie pour l'appréciation de la fréquence cardiaque et d'éventuels troubles du rythme. L'apparition ou la majoration d'un trouble de conduction de haut grade lors des apnées doivent être recherchées, notamment en cas d'infarctus inférieur. Cela peut parfois amener à ajourner un examen. Chez un patient instable, nous complé-tons la surveillance par un monitorage des paramè-tres vitaux ; l'ECG, la PaO 2 et la pression artérielle sont surveillés à l'aide d'un module magnétocom-patible installé à côté du patient et doté d'un répé-titeur placé à la console de commande. Une surveillance vidéo est également systématique pour vérifier l'absence de mouvement inapproprié du patient. Après avoir soigneusement expliqué au patient les contraintes de l'examen, lui avoir protégé les oreilles par un casque antibruit, avoir placé des électrodes thoraciques et vérifié la qualité de la courbe ECG, l'examen peut débuter par une banale séquence de repérage du massif cardiaque sans synchronisation.

Ce qu'il faut retenir

• La qualité du signal ECG conditionne la qualité de l'examen. • Aucune interprétation des anomalies de la repolarisa-tion cardiaque ne doit être effectuée à partir du signal ECG obtenu dans l'enceinte de l'IRM. • Dans les suites immédiates d'un IDM, l'examen impli-que la présence d'un médecin auprès du malade durant tout l'examen.

Séquences

Séquences anatomiques en écho de spin rapide, séquences sensibles à l'œdème

Les séquences pondérées T 2 utilisent typiquement une lecture de type turbo spin-écho avec ou sans saturation de la graisse [ 13 ]. On améliore le contraste endocarde-sang circulant à l'aide d'une préparation

« sang noir » obtenue par une double (ou triple) satu-ration : en cas de double saturation, la première est non sélective sur l'ensemble du cœur, la seconde est sélective et annule, dans le plan de coupe choisi, la saturation des structures fixes. Seul le myocarde reste visible dans le plan de coupe. La plupart des centres utilisent aujourd'hui des séquences STIR ( short TI triple inversion recovery ) pour la recherche de la zone à risque. Le principe de cette séquence est d'éliminer le signal issu du sang circulant ainsi que celui de la graisse. Le résultat obtenu n'est pas toujours optimal en raison du faible rapport signal sur bruit obtenu. On peut également visualiser l'œdème sur des séquences de type steady state free precession (SSFP) avec ou sans préparation particulière [ 14–16 ]. Les séquences HASTE permettent l'acquisition rapide (une apnée pour 5 à 7 coupes) d'images pon-dérées T 2 peu influencées par le rythme cardiaque. La particularité de ces séquences est de réaliser l'ac-quisition d'un demi-espace de Fourier et de recons-truire l'image par symétrie. Le temps de répétition (TR) est infini. En revanche, le temps d'écho (TE) effectif (codage du contraste au centre de l'espace de Fourier) peut être déterminé par l'opérateur. La pondération T 2 augmente avec le TE aux dépens du rapport signal sur bruit. La résolution spatiale des images en HASTE est moins bonne que celle des séquences TSE (délimitation moins nette de l'endo-carde par rapport au sang circulant), mais leur qua-lité est beaucoup plus constante. Le myocarde normal est en isosignal alors que la zone pathologi-que apparaît en hypersignal du fait de l'œdème interstitiel de l'infarctus. La quantification du temps T 2 est possible, mais rarement pratiquée [ 17 ]. Globalement, la lecture de ces séquences sensibles à l'œdème se fait par comparaison à la perfusion de premier passage et au rehaussement tardif. On considère que la zone à risque est définie par la zone œdémateuse non atteinte de rehaussement tardif. Ces séquences morphologiques permettent de mon-trer, de localiser et de quantifier l'épaisseur d'un éven-tuel épanchement péricardique fréquemment associé.

Séquences ciné-IRM segmentées (analyse de la cinétique segmentaire)

Sans bande de présaturation

Ce groupe de séquences est aujourd'hui dominé par les séquences en écho de gradient de type SSFP

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Chapitre 11. IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde 129

[18]. Les images obtenues et les variations de signal dépendent du rapport T2/T1 et possèdent d'excel-lents rapports signal sur bruit et contraste sur bruit. Elles permettent l'utilisation de TR très courts. Elles renforcent le signal du sang circulant codé en blanc, réalisant un excellent contraste myocarde/cavités, tout en conservant une très bonne résolution spa-tiale. Les constructeurs ont retenu des acronymes différents pour des séquences équivalentes : Truefisp™ (Siemens), Balanced FFE™ (Philips), Fiesta™ (General Electric).Le nombre d'images encodées par espace RR est d'autant plus grand que la fréquence cardiaque est lente, ce qui est fréquent dans les suites d'un IDM, la plupart des patients étant β-bloqués. Quinze à 25 phases sont acquises en routine. Une résolution temporelle optimale est essentielle à une mesure fia-ble de paramètres tels que la fraction d'éjection, les volumes systolique et diastolique du ventricule gau-che (VG) ou la masse ventriculaire [19]. La princi-pale limite de ce type de séquence est l'arythmie cardiaque. Si elle est trop importante, elle nuit à une acquisition de qualité.Au plan pratique, une acquisition mono- ou bipla-naire est faite au cours d'une apnée (15 à 20 secon-des) en mode rétrospectif de synchronisation. Les machines de dernière génération autorisent l'acqui-sition de plusieurs coupes en une seule apnée (acqui-sition parallèle) ; néanmoins, ces acquisitions se font aux dépens de la résolution temporelle, et le com-promis entre confort d'examen et qualité des ima-ges doit être optimisé en fonction de la machine utilisée et de la fréquence cardiaque du patient.Ces séquences sont également utilisées quand on cherche à mettre en évidence une réserve contractile par administration de dobutamine à « faible dose ».

Avec bandes de présaturation

Le « tagging » (tatouage, séquences SPAMM) per-met une étude objective et quantifiée de la déforma-tion myocardique [20]. Des bandes de présaturation, perpendiculaires au plan d'acquisition, sont appli-quées au début d'une acquisition ciné-IRM. Elles marquent le myocarde sous forme de lignes noires (spins saturés ne donnant aucun signal). Elles per-mettent de circonscrire des régions myocardiques sous forme de bandes ou de losanges. La déforma-tion des régions ainsi délimitées reflète la contracti-lité segmentaire. Un inconvénient de ces séquences est la disparition progressive des bandes de présatu-

ration au fil du temps si la fenêtre d'acquisition est trop longue. Cette fenêtre doit être essentiellement centrée sur la phase systolique (début de cycle).

Séquences d'analyse de la perfusion myocardique

Analyse du premier passage

L'analyse de la perfusion de premier passage requiert à la fois une excellente résolution temporelle, une couverture suffisante du VG et une forte pondéra-tion T1 (afin d'optimiser la visualisation de petites quantités de chélate de gadolinium). Ces qualités sont obtenues par des séquences avec saturation-récupération (pulse initial non sélectif de 90°), idéa-lement en temps réel. Le nombre de coupes réalisables en un seul cycle dépend de la fréquence cardiaque, et sera d'autant plus limité que celle-ci est élevée.Typiquement, on peut obtenir trois coupes de 8 mm dans le petit axe, une coupe dans le plan vertical long axe et une coupe dans le plan quatre cavités.Dans notre centre, nous ne demandons pas d'apnée (ou bien une apnée courte en début d'injection), car nous analysons les images de façon qualitative et nous souhaitons privilégier une analyse assez longue de la perfusion du myocarde. L'injection de gadoli-nium (dose standard : 0,1 mmol/kg soit 0,2 ml/kg de produit de contraste semi-molaire) bénéficie de l'utilisation d'un injecteur automatique. Le débit (fonction du calibre de la voie d'abord) est idéale-ment élevé à 5–6 ml/s en fonction de la qualité de voie veineuse. Le produit de contraste apparaît d'abord dans la lumière du ventricule droit (VD), puis dans le VG. On voit ensuite le myocarde ventri-culaire gauche s'opacifier puis se laver. En cas de trouble de la microvascularisation (« slow flow », « no flow » ou « no reflow » selon la situation clinique, patient reperfusé spontanément médicalement ou non reperfusé), on met en évidence un hyposignal de topographie sous-endocardique. Les mêmes séquences sont utilisées pour la détection d'isché-mie myocardique avec un stress pharmacologique vasodilatateur (adénosine ou dipyridamole).

Rehaussement tardif

Dans l'IDM, il existe une rétention du produit de contraste au sein de la zone pathologique [2]. Cette rétention est au mieux mise en évidence par des

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130 Cardiopathies ischémiques

séquences optimisant le contraste entre myocarde sain et myocarde nécrosé contenant du gadolinium. L'IR se prête particulièrement à cette indication, car elle permet d'annuler complètement le signal du myocarde normal. Pour ce faire, les constructeurs proposent des séquences test (TI scouting) destinées à mesurer le temps d'inversion (TI) optimal (myo-carde sain aussi noir que possible) après injection.La mise en évidence de la rétention pathologique de produit de contraste dans l'IDM est optimale envi-ron 15 à 20 minutes après l'injection du gadolinium [21]. Ce délai après l'injection (et les séquences de perfusion précoce) peut être mis à profit pour faire l'analyse de la cinétique ventriculaire gauche (séquences en SSFP).Après avoir défini le TI optimal (voisin de 300 ms), on utilisera une séquence en écho de gradient seg-mentée (de type Turboflash™) avec IR [22]. Le mode d'acquisition bidimensionnel est considéré comme la référence en ce domaine, mais il est plus pratique d'utiliser des séquences 3D du même type qui permettent de couvrir l'ensemble du VG en une seule apnée. Dans la mesure où l'on risque de suré-valuer la transmuralité de l'IDM en 3D, il est conseillé de refaire des acquisitions 2D centrées après avoir repéré la lésion en 3D [23]. Cette nou-velle acquisition 2D peut éventuellement être faite à l'aide d'une séquence sensible à la phase (phase sen-sitive inversion recovery [PSIR]).

Principales séquences employées en postinfarctus : séquences sensibles à l'œdème•TSET2, STIR•Séquences fonctionnelles•SéquencesenSSFP(Truefisp™,Fiesta™,Balanced

FFE™)•Ciné-TAG•Perfusion de premier passage•Séquencesenéchodegradientrapidesensatura-

tion-récupération•Rehaussement tardif•EG (2D ou 3D) avec IR (après mesure du TI

optimal – TI scouting) ou PSIR (2D ou 3D)

Plans d'étude

On travaillera selon les trois plans de référence (ver-tical long axe [VLA], petit axe du VG [PA] et hori-zontal long axe [HLA] ou quatre cavités) afin

d'obtenir une imagerie reproductible et comparable aux autres modalités. La segmentation (en 17 seg-ments) doit suivre les règles consensuelles parues en 2002 [24]. Des coupes jointives dans le plan PA en ciné-IRM sont réalisées pour évaluer de façon pré-cise les paramètres fonctionnels du VG [25]. Selon la topographie de l'IDM, on complètera l'analyse en PA de la cinétique ou de la perfusion myocardique par des coupes dans le plan d'élection de la nécrose en HLA ou VLA.

Résultats : sémiologie IRM de l'IDM

Morphologie

On note souvent dans la phase initiale de l'IDM un épaississement du ou des secteur(s) nécrosé(s) qui peut être quantifié approximativement sur des ima-ges morphologiques de type HASTE ou plus préci-sément aux temps télédiastolique et télésystolique sur des images synchronisées de type Truefisp™. On mesurera de la même façon un épanchement péri-cardique, banal dans ce contexte.

Œdème

Les premières études de l'ischémie myocardique en résonance magnétique ont démontré l'exis-tence d'un hypersignal spontané T2 dans la zone infarcie [5]. Les comparaisons anatomoradiologi-ques ont cependant montré que la seule élévation du signal T2 surestimait l'étendue de l'IDM. L'œdème périlésionnel explique cette surestima-tion. Dans notre expérience, le temps T2 apparaît nettement augmenté au sein de l'IDM par rapport au T2 mesuré chez des sujets sains. Il est égale-ment élevé dans la zone indemne de nécrose (remote) [17].

Troubles de la cinétique segmentaire

Ils sont analysés sur les séquences ciné-IRM et/ou SPAMM (quantification possible). Le myocarde ventriculaire normal s'épaissit de façon homogène sur tout son pourtour et présente un mouvement complexe de torsion, raccourcissement et contrac-

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Chapitre 11. IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde 131

Fig. 11-1. Acquisition en mode ciné-IRM dans le petit axe en médioventriculaire (temps diastolique et systolique).Cinétique myocardique normale. Épaississement concentrique sur l'ensemble du pourtour.

a b

Fig. 11-2. Acquisition en mode ciné-IRM dans le plan HLA (temps diastolique et systolique).Dyskinésie latérobasale : expansion paradoxale du myocarde au temps systolique.

tion (fig. 11.1). Une zone lésée ne présente ni épais-sissement ni raccourcissement concentrique. On distingue l'akinésie et l'hypokinésie, qui sont res-pectivement l'absence et la diminution de l'épaissis-sement systolique, de la dyskinésie, qui est un mouvement paradoxal d'expansion au temps systoli-que (fig. 11.2, vidéos 11.1 et 11.2).Toute zone akinétique n'est cependant pas une zone nécrosée. Il peut exister de part et d'autre de la zone nécrosée des régions sidérées. Après la reperfusion, elles vont progressivement récupérer, souvent après plusieurs semaines.

Vidéos 11-1 et 11-2. Ciné-IRM petit axe ( Vidéo 11.1) chez une femme de 41 ans ayant présenté un infarctus récent : hypokinésie inférieure, hypokinésie vue dans le plan VLA ( Vidéo 11.2).

Les séquences ciné-IRM permettent aussi d'appré-cier l'état valvulaire. Par exemple, lors de l'atteinte d'un pilier mitral par l'infarctus, il peut survenir une insuffisance mitrale qui se traduira par un hypo signal rétrograde au sein de l'oreillette gauche. Cet hypo-signal témoigne d'un déphasage protonique lié au caractère turbulent du jet de reflux.

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132 Cardiopathies ischémiques

Ce qu'il faut retenir

• L'imagerie de premier passage sert à déceler une ano-malie de la microcirculation (micro-obstruction vasculaire). • La zone de no reflow est un territoire non viable qui sous-estime la taille de l'IDM. • Sa présence a une valeur pronostique défavorable.

Imagerie myocardique de premier passage

Les chélates de gadolinium sont les seuls produits utilisables en pathologie humaine. Il faut savoir que de nombreux produits de contraste sont employés chez l'animal, dont certains ont une affinité très forte pour les cellules myocardiques nécrosées [ 26 ]. Les sels de gadolinium utilisés en IRM humaine effectuent un premier passage vasculaire qui permet une étude de la microvascularisation. Ils diffusent très rapidement dans le secteur interstitiel et se trou-vent ensuite piégés au sein de la nécrose et de son œdème adjacent (retard de clairance ou du wash out ). Le no reflow correspond à une région qui reste hypo-perfusée malgré la restauration d'un flux artériel coronaire épicardique de qualité [ 27 ] ( fig. 11.3 ). Tout IDM ne s'associe pas à ce type de lésion. Elle correspond histologiquement à la persistance d'une obstruction microvasculaire et peut paradoxalement être aggravée par la reperfusion coronaire. L'existence d'une zone de no reflow est de mauvais pronostic : elle apparaît liée à une recrudescence des complica-tions cardiovasculaires. La zone de no reflow est une zone non viable qui sous-estime la taille de la nécrose et les séquences de perfusion ne doivent pas être uti-lisées pour apprécier la taille de l'IDM [ 28 ].

Fig. 11-3. Série d'images acquises dans le plan petit axe après injecciné-IRM. Le contraste apparaît dans la lumière du VD, puis dans celle du VGdu segment inférolatéral : no reflow (trouble de la microcirculation).

La littérature n'est pas consensuelle à propos de la définition de ces obstructions microvasculaires. Certains retiennent l'existence d'un retard de perfu-sion sur ces séquences de premier passage, d'autres ne considèrent le diagnostic que lorsqu'il existe une per-sistance de l'hyposignal sur les séquences de rehausse-ment tardif. Les deux anomalies forment en fait un continuum, correspondant à un retard de perfusion dans le premier cas, à une non-perfusion dans le second, l'hyposignal persistant ( no flow ou no reflow ) étant bien entendu de valeur pronostique plus péjora-tive que le simple retard de perfusion ( slow flow ).

Rehaussement tardif

On cherche à mettre en évidence une rétention anor-male de produit de contraste au sein de la nécrose. Elle commence par une séquence de TI scouting , lit-téralement « explorateur de TI », qui évalue le TI

tion veineuse d'un bolus de gadolinium en saturation-récupération

. Il opacifie ensuite le myocarde ventriculaire gauche à l'exception

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Chapitre 11. IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde 133

a

c

b

d

Fig. 11-4. TI scouting sur une coupe PA passant en médioventriculaire chez un patient de 24 ans ayant présenté un infarctus apical.Le TI est augmenté sur chacune des images successives (a, b, c, d). Il est nécessaire de choisir, pour la réalisation de la séquence en écho de gradient IR, le TI pour lequel le myocarde normal est le plus noir possible (en l'occurrence la seconde image) b).

optimal, variable selon le contraste résiduel dans le myocarde sain et la fréquence cardiaque (fig. 11.4).La séquence en écho de gradient T1 avec IR (réglé sur le résultat du TI scouting) est réalisée 15 à 20 minutes après l'injection (fig. 11.5 et 11.6). L'IDM et son œdème adjacent apparaissent dans la majorité des cas en hypersignal franc. La présence de l'œdème explique la discrète surestimation de la nécrose par ces séquences en phase subaiguë [3,29]. À distance de l'IDM, il a été montré une excellente corrélation entre la taille de l'hypersignal, sa trans-muralité et la lésion histologique [11].La zone nécrosée apparaît comme une plage en hypersignal, qui présente l'aspect de wave-front. En phase aiguë, les contours de l'IDM sont parfois flous et irréguliers, alors que l'hypersignal tardif semble mieux délimité dans l'infarctus chronique.

On peut mettre en évidence un hypersignal étendu aux muscles papillaires ou à la paroi du VD. L'aspect en front de vague est très caractéristique d'une lésion ischémique et doit être différencié de l'aspect nodulaire volontiers sous-épicardique rencontré dans les myopéricardites aiguës [30].

Comment porter le diagnostic de viabilité/non-viabilité

La sémiologie IRM est riche et basée sur trois signes complémentaires.•Le premier et plus ancien signe est l'épaisseur

pariétale ; un segment myocardique aminci de moins de 4 mm est typiquement non viable. On peut rapprocher de l'amincissement la dyskinésie

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134 Cardiopathies ischémiques

Fig. 11-5. Séquence de rehaussement tardif (PSIR) réalisée dans le plan quatre cavités 15 minutes après injection de gadolinium (même patient que pour la figure 11.4).Infarctus transmural antéro-septo-apical. Notez le myocarde normal septal et de la paroi latérale en hyposignal franc.

ou expansion paradoxale d'un ou plusieurs seg-ments du muscle cardiaque en systole.

•Lesigneoriginalàl'IRMestlerehaussement tar-dif [31]. Il signe l'absence de viabilité, et il est préférable de parler de séquences de rehaussement tardif plutôt que de séquences de viabilité, qui est un abus de langage. Ce rehaussement tardif est exprimé en termes de transmuralité et d'extension

a

Fig. 11-6. Comparaison d'une séquence de viabilité classique (end'un IDM transmural dans le territoire latéral avec atteinte des deu

segmentaire. On peut réaliser une appréciation visuelle [32] ou quantifiée par des outils logiciels qui ne sont pas disponibles sur les machines de routine.

•Enfin,onpeutmesurer laréserve contractile des zones dysfonctionnelles, d'épaisseur normale ou subnormale avec rehaussement tardif non trans-mural, à l'aide d'une stimulation inotrope utili-sant de la dobutamine à faible dose (≤ 15 γ/kg/min) [33]. Le but est d'augmenter la fréquence cardiaque d'au moins 10 % de sa valeur de base. Idéalement, on arrête les β-bloquants 48 heures avant l'examen, mais dans cette situation de post-infarctus on préfère réaliser la stimulation ino-trope chez un patient sous β-bloquants pour des raisons de sécurité. Le débit d'administration de la dobutamine doit être extrêmement précis, et il est préférable d'utiliser un perfuseur magnéto-compatible. Ce matériel peut être installé à côté du patient à l'entrée de l'anneau et permet d'évi-ter de très longues tubulures induisant un espace mort et une longue latence entre l'augmentation du débit et la réponse fréquentielle. Les condi-tions de sécurité sont maximales même si le risque est très faible (un médecin pour l'examen, un autre pour surveiller le patient et administrer un β-bloquant intraveineux en cas de mauvaise tolé-rance ou de tachycardie) [12]. Il faut disposer d'un chariot d'urgence, de gaz médicaux, d'un

b

haut) et d'une séquence PSIR (en bas) chez un patient porteur x muscles papillaires.

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Chapitre 11. IRM et TDM au décours de l'infarctus du myocarde 135

défibrillateur. Le patient est monitoré (fréquence cardiaque, pression artérielle, PaO 2 , caméra) et régulièrement interrogé sur ses sensations. On répète des séquences en Balanced FFE™ dans les plans d'élection guidés par la clinique et les séquences de repos préalables. En cas de viabilité,

Ce qu'il faut retenir

• La séquence de rehaussement tardif (dite de viabilité) caractérise le territoire infarci sous la forme d'une plage en hypersignal. • La viabilité doit être appréciée une quinzaine de minutes après l'injection de gadolinium. • L'utilisation d'un TI optimal permet d'annuler le signal myocardique afin de majorer le contraste entre territoires sain et infarci. • Le volume de la plage en hypersignal est corrélé avec celui de l'infarctus, même si, en phase aiguë, il est discrè-tement surestimé. • Les trois éléments sémiologiques de la viabilité sont l'épaisseur du myocarde, le rehaussement tardif (avan-tage exclusif de l'imagerie en coupe, essentiellement de l'IRM) et la réserve contractile sous inotrope (dobu-IRM).

on observe une réponse contractile de segments qui étaient hypo- voire akinétiques au repos ; les segments viables doivent être quantifiés, et on considère souvent une reperfusion justifiée à par-tir de deux segments viables.

Diagnostic différentiel

L'IRM est souvent utilisée au décours d'un syn-drome douloureux thoracique pour lequel le diag-nostic d'IDM n'est pas retenu. Différentes situa tions peuvent être rencontrées.

Myocardite

Dans les suites d'un épisode fébrile, souvent chez un jeune patient, voire un enfant, la myopéricardite est un diagnostic fréquent, et ce d'autant plus que l'ECG montre des troubles diffus de la repolarisa-tion. La troponine est souvent modérément élevée. La coronarographie (ou le coroscanner) montre un réseau coronaire sain. Parfois, l'imagerie coronaire n'est pas faite car le risque de maladie coronaire est nul ou faible et le tableau clinique typique. L'IRM

est au premier plan dans cette situation clinique [ 34–36 ], car c'est le seul examen capable de faire le diagnostic positif de la maladie. Un œdème est mis en évidence en séquence T 2 au niveau de la paroi latérale (avec une prédominance apicale). Le rehaus-sement tardif est typique, épargne le sous-endo-carde, permettant d'éliminer le diagnostic d'IDM (point clé du compte rendu). Il est laminaire ou nodulaire. Une atteinte du septum interventricu-laire est un élément de mauvais pronostic. Certaines myocardites révèlent des maladies de système (sar-coïdose, par exemple).

Cardiomyopathie de Tako-Tsubo

Cette affection de mécanisme discuté se présente en tous points comme un infarctus antérieur. Le terrain est particulier ; il s'agit habituellement d'une femme âgée qui a subi un stress important. Le diagnostic est souvent suspecté pendant la coronarographie, qui trouve un réseau coronaire normal ou subnor-mal. La ventriculographie opaque montre une bal-lonisation apicale caractéristique qui a fait donner son nom japonais à cette affection : tako tsubo dési-gne en effet un filet utilisé pour la pêche au poulpe, caractérisé par un fond large (l'apex akinétique) contrastant avec un collet étroit (la base ventricu-laire normocontractile). L'IRM est fondamentale pour le diagnostic [ 37 ], car elle retrouve les anoma-lies cinétiques, et surtout montre l'absence totale de rehaussement tardif. Le pronostic de cette affection est excellent quand la phase aiguë est surmontée. Une restitution ad integrum est usuellement observée.

IDM à coronaires saines

Cette situation non exceptionnelle est également une bonne indication de l'IRM.

Faut-il évaluer par IRM tous les IDM ?

En pratique clinique en France, la majorité des patients présentant un IDM ne bénéficient pas d'une IRM. L'argument essentiel des cardiologues en charge des patients est l'absence de sanction thé-rapeutique quel qu'en soit le résultat.

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136 Cardiopathies ischémiques

Un certain nombre de points nous laissent penser que cette attitude courante est sous-optimale. L'IRM peut en effet apporter une série d'informations sus-ceptibles d'orienter la surveillance et le traitement. La présence d'un trouble microcirculatoire est un élément de mauvais pronostic, dont on sait qu'il est associé avec un remodelage ventriculaire. L'atteinte d'un pilier de la valve mitrale ou de la paroi infé-rieure du VD dans le contexte d'un infarctus infé-rieur est également un élément de mauvais pronostic élégamment montré par l'IRM. La présence d'un thrombus intracavitaire qui peut être manqué par l'échographie est un facteur de risque indéniable facilement identifié par l'IRM. Notons à ce sujet l'excellence des séquences PSIR qui montrent la nécrose en hypersignal et le thrombus en hyposignal franc.Enfin et surtout, l'extension segmentaire et en pro-fondeur du rehaussement tardif, dans le cas idéal minimisés par une angioplastie en urgence, est importante à considérer dans le suivi et le traitement du patient.

Y a-t-il une place pour le scanner ?

Le scanner n'avait aucune place dans le postinfarctus jusqu'à il y a peu. Certaines études ont cependant montré qu'il était capable de montrer le rehausse-ment tardif avec une performance voisine de celle de l'IRM. Insistons sur le fait que la rétention tardive en scanner est d'autant mieux visible qu'on majore la densité Hounsfield de la zone nécrotique en bais-sant le kilovoltage (typiquement à 80 kV, ce qui est aussi bénéfique pour l'exposition aux radiations ionisantes) et qu'on a utilisé un produit de contraste fortement concentré. Une excellente indication du rehaussement tardif en scanner se situe au sortir de la salle de cathétérisme, après une injection intra-coronaire [38]. Cette technique n'est utilisable que dans les centres bénéficiant d'une forte proximité entre les deux services.On sait également que le scanner est capable, dans l'infarctus aigu, de montrer une hypodensité du myocarde. Il est donc indispensable d'analyser le myocarde au temps artériel devant tout scanner réa-lisé chez un patient douloureux, typiquement dans une situation de « triple rule out ».

L'un des atouts du scanner est d'éliminer dans le même temps certains diagnostics différentiels (embolie pulmonaire, pneumopathie, dissection aortique).Enfin, le scanner peut être d'une grande aide à la planification d'une revascularisation difficile. Certains équipements récents à haute définition utilisant de nouveaux modes de reconstruction (reconstruction itérative) fournissent des images de meilleure qualité des coronaires calcifiées. On peut aider le cathétériseur avec le scanner en analysant la calcification, la tortuosité du vaisseau ainsi que son calibre et la longueur de la sténose dans le cas d'oc-clusions complètes [39].

Conclusion

L'IRM permet une analyse combinée de la cinéti-que et de la perfusion myocardiques sans zone aveu-gle. Les évaluations récentes en font une technique de tout premier plan dans l'évaluation de l'IDM.L'idéal serait de pouvoir la coupler avec une étude anatomique des artères coronaires et de la ou des sténose(s) responsable(s) de la lésion. L'IRM reste peu employée aujourd'hui en France dans le cadre de l'IDM pour des raisons de disponibilité. Cet état de fait pourrait rapidement évoluer compte tenu de la qualité de la sémiologie apportée par cet examen. Il n'y a pas aujourd'hui d'indication à réaliser un scanner MD du cœur au décours immédiat d'un IDM, même si certains éléments sémiologiques décrits en IRM ont été également identifiés en TDM. Une exception pourrait être le scanner au décours immédiat d'une injection intracoronaire de produit de contraste iodé.

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