104
Photo: Magali Girardin N O 12 17 MARS 2014 www.migrosmagazine.ch SOCIÉTÉ I 10 Les bâtisseurs de la Suisse d’aujourd’hui. SOCIÉTÉ I 14 Le phénomène des selfies ou le narcissisme 2.0. BIEN-ÊTRE I 81 Comment bien se préparer pour la course à pied? Pourvoyeuse de bonheur La Valaisanne Nadine Bender enfile régulièrement son nez rouge pour aller apporter des moments de rire et de tendresse à des pensionnaires d’institutions. I 102 Tout pour bien déménager ! Tout pour votre déménagement sur la page 88. Publicité Changements d’adresse: à la poste ou au registre des coopérateurs, tél. 058 574 83 37: les après-midi de 13h30 à 15h30 Edition Neuchâtel-Fribourg, JAA 2074 Marin

Migros magazin 12 2014 f ne

Embed Size (px)

DESCRIPTION

 

Citation preview

  • Photo:MagaliGirardin

    N

    O

    12 17 MARS 2014

    www.migrosmagazine.ch

    SOCIT I 10

    Les btisseurs

    de la Suisse

    daujourdhui.

    SOCIT I 14

    Le phnomne

    des selfies ou

    le narcissisme 2.0.

    BIEN-TRE I 81

    Comment bien

    se prparer pour

    la course pied?

    Pourvoyeuse

    debonheur

    La Valaisanne Nadine Bender enfile rgulirement

    son nez rouge pour aller apporter des moments de rire

    et de tendresse des pensionnaires dinstitutions. I 102

    Tout pour bien dmnager!

    Tout pour votre dmnagement sur la page 88.

    Publicit

    N

    O

    12 17 MARS 2014

    www.migrosmagazine.ch

    Changements dadresse: la poste ou au registre des cooprateurs, tl. 058 574 83 37:

    les aprs-midi de 13h30 15h30

    EditionNeuchtel-Fribourg,JAA2074Marin

  • 7.30 au lieu de 9.20

    Tout lassortiment de mueslis et de flakes

    Farmer en lot de 2

    20% de rduction, p. ex. flakes Nature, 2 x 500 g

    19.80

    Tout lassortiment de capsules Delizio

    p. ex. Lungo Crema, UTZ, 48 capsules

    1

    0

    x

    PO

    IN

    TS

    .75 au lieu de .95

    Tous les yogourts Excellence

    20% de rduction, p. ex. la vanille, 150 g

    9.90 au lieu de 14.50

    Tulipes

    le bouquet de 20

    1.80

    Crme caf Valflora

    500 ml

    OFFRES VALABLES DU 18.3 AU 24.3.2014, JUSQU PUISEMENT DU STOCK

    *En vente dans les plus grands magasins Migros.

    T

    O

    U

    T

    E

    L

    A

    D

    O

    U

    C

    E

    U

    R

  • 6.30 au lieu de 7.90

    Toutes les boules Frey Adoro, UTZ

    20% de rduction, p. ex. Adoro au lait, 200 g

    6.306.30

    Toutes les boules Frey Adoro, UTZToutes les boules Frey Adoro, UTZ

    20% de rduction, 20% de rduction,

    3.60 au lieu de 4.50

    Tous les ufs Frey au chocolat, une seule

    varit, en sachet de 165 g, UTZ

    20% de rduction, p. ex. ufs Giandor au lait

    6.20

    Assortiment Cra dOr

    200 g

    4.20

    Gteau de Pques

    340 g

    6.90

    Slection PURE Chocolate

    Santo Domingo*

    surgel, 450 ml

    3.60

    Crme brle Slection

    2 x 100 g

    3.80

    Tiramis Slection

    90 g

    D

    U

    P

    R

    I

    N

    T

    E

    M

    P

    S

    .

  • 1.40 au lieu de 1.80

    Polenta bramata, TerraSuisse*

    500 g, 20% de rduction

    2.65 au lieu de 3.35

    Huile de colza, TerraSuisse

    50 cl, 20% de rduction

    2.

    Couronne croustillante, TerraSuisse

    300 g

    5.35

    Eminc de veau, TerraSuisse

    les 100 g

    2.90

    Pains Sarment, prcuits,

    non rfrigrs, TerraSuisse

    300 g

    Pains Sarment, prcuits,

    non rfrigrs, TerraSuisse

    2.55

    Lard griller, TerraSuisse

    les 100 g

    2.15

    Fromage dItalie, TerraSuisse

    finement prtranch, les 100 g

    L

    E

    M

    E

    I

    L

    L

    E

    U

    R

    D

    E

    S

    F

    E

    R

    M

    E

    S

    S

    U

    I

    S

    S

    E

    S

    .

    OFFRES VALABLES DU 18.3 AU 24.3.2014, JUSQU PUISEMENT DU STOCK

    *En vente dans les plus grands magasins Migros. Socit cooprative Migros Neuchtel/Fribourg

    L

    E

    M

    E

    I

    L

    L

    E

    U

    R

    D

    E

    S

    F

    E

    R

    M

    E

    S

    S

    U

    I

    S

    S

    E

    S

    .

  • Anticipe le futur,

    envoie ta candidature!

    Votre avenir au sein du Groupe Migros: des places dapprentissage dans plus de 40 professions. migros.ch/formation_professionnelle

    Publicit

    ENBREF

    6 | Les infos dumondeMigros.

    SOCIT

    10 | Urbanisme: les anecdotes de ceux

    qui ont bti la Suissemoderne.

    14 | Selfies: autoportraits aux bras longs.

    18 | Bisons: sa rintroduction est

    envisage dans le canton de Vaud.

    20 | Entretien: Jon Matonis au sujet

    de la monnaie virtuelle.

    CUISINEDESAISON

    64 | ThierryMeury et sa parmigiana

    aux poivrons.

    ENMAGASIN

    35 | Pques: tout en fleurs et en couleurs.

    39 | I am: protgez votre peau.

    44 | MaxHavelaar: curs dartichauts et

    de palmiers disponibles en bote.

    47 | ToastsBio:pourunpetit-djeuner

    tout aussi sain que savoureux.

    VOTRERGION

    71 | Votre cooprative rgionale.

    AUQUOTIDIEN

    76 | A votre service: rillettes de saumon

    + une 2

    e

    recette en vido sur le site!

    78| Vosquestions: les rponses dexperts.

    81 | Sant: la course pied bienmatrise.

    85 | Education: lheure du coucher.

    89| Multimdia: les smartphonesattaqus.

    90 | Voiture: la nouvelle Nissan Note.

    LEMONDEDE

    102 | Nadine Bender fait le clown et

    cela na rien danodin.

    RUBRIQUES

    8 | Actu:nos prisons sont bondes.

    79 | Saviez-vousque...Le pneu.

    93| Coupdechance:La reine des neiges.

    95 | Jeux: tentez votre chance!

    100 | Cumulus: les offres fidlit de Migros.

    DITORIAL

    Steve Gaspoz, rdacteur en chef

    Construire et

    reconstruire

    Il y a laSuissede lavant et celle de laprs.Nulle question

    de votations ici,mais de construction.Dans les annes 50 et

    60, le pays a connu une priode de trs fort dveloppement.

    A linstar des pays voisins, les trente glorieuses sont la priode

    o laConfdration helvtique est entre de plain-pied dans

    lamodernit avec la ralisation de lamajeure partie de ses

    infrastructures. Autoroutes, centrales hydrolectriques,

    barrages, tunnels...Des travaux de titans ont fleuri aux quatre

    coins du pays.

    Aujourdhuiencore,cesralisationsforcentladmiration.

    Dautantque,quandonvoit lesmultiplesobstacles techniques

    et imprvus rencontrs sur les chantiers en cours, on ose

    imaginer ce que devait tre le travail lpoque sans toutes

    les technologies ni les connaissances actuelles.Ce quoi il

    convient dajouter lemanque demain-duvre locale. Sans

    limmigrationmassive demilliers douvriers italiens chasss

    par les difficults de leur pays, nombre de projets seraient

    sans aucun doute rests dans les tiroirs.

    Transpos notre poque, tout cela relverait tout

    simplement de limpossible.Pensons seulement aux

    embches que rencontre dsormais lemoindre projet,

    linstallation dun parc olien par exemple. Entre divergences

    idologiques et oppositions en tout genre, les ngociations

    sternisent inluctablement, pour autant que les promoteurs

    ne finissent pas par jeter lponge.

    Etpourtant,nos infrastructures ont unurgent besoin

    dtre renouveles.Alors que la priode actuelle se

    prsente comme idale pour la ralisation dimportants

    projets, nous nous enfonons dans lattentisme.Avant

    lheure, ce nest pas lheure, aprs lheure, ce nest plus

    lheure. Esprons seulement que nous serons prts lorsque

    sonnera lheure pile.

    [email protected]@mediasmigros.ch

    M-Infoline:

    tl. 0848 84 0848* ou +41 44 444 72 85 (depuis ltranger).

    www.migros.ch/service-clientle; www.migros.ch

    Cumulus: tl. 0848 85 0848* ou +41 44 444 88 44 (depuis ltranger).

    [email protected]; www.migros.ch/cumulus

    Adresse de la rdaction: Limmatstrasse 152, case postale 1766,

    8031 Zurich, tl. 058 577 12 12, fax 058 577 12 09

    [email protected]; www.migrosmagazine.ch

    * tarif local

    Photo:Keystone/Photopress-Archiv

    www.twitter.com/

    MigrosMagazine

    facebook.com/

    MigrosMagazine

    RETROUVEZ-NOUSSUR:

    www.google.com/

    +migrosmagazine

    10 | URBANISME

    Le dveloppement

    de la Suisse a

    pris un tournant

    dcisif dans les

    annes 50.

    Tmoignages de

    ceux qui en taient

    les acteurs.

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    SOMMAIRE

    |

    5

  • M-ONLINE

    L

    es jardiniers du dimanche soucieux

    de lenvironnement trouveront une

    vaste palette de produits colo-

    giques dans lesmagasinsDo it +Garden

    Migros. Ces rfrences arborent le logo

    Migros Bio Garden.

    Les diffrents engrais permettent de

    fournir aux vgtaux tels que les rosiers,

    les lgumes ou les arbustes les subs-

    tancesnutritivesdont ils ontbesoin.Les

    fertilisants Bio, exempts dadditifs

    chimiques oude synthse, sont unique-

    ment composs de matires premires

    naturelles.

    Sept sortes de terreau ainsi quun

    substitut de tourbe et une varit de

    compost sont galement disponibles en

    qualit bio.

    Comme tous les terreaux vendus

    Migros, les articles pour le jardin arbo-

    rant le labelMigros BioGarden sont d-

    pourvus de tourbe.

    Gnration M symbolise

    lengagement de Migros

    en matire de dveloppement

    durable. www.generation-m.ch

    Une partie de

    NEWS

    Cest dans la bote!

    Les internautes lont

    dcid: la conserve

    Dner Bx vient

    dsormais enrichir les

    rayons Migros aux cts

    des raviolis en bote plus

    traditionnels. Tout a

    commenc il y a un an

    lorsque Migros a invit

    ses clients lui

    proposer une nouvelle

    recette de produit prt consommer. Plus de

    mille ides sont parvenues au distributeur.

    Huit dentre elles ont t testes et trois ont

    accd la finale avant que le consommateur

    ne tranche sur www.migipedia.ch. La Dner

    Bx, base de poulet suisse, est en vente dans

    les plus grands magasins Migros.

    Tentez de gagner une des cent Dner Bxmises

    en jeu sur www.migipedia.ch ou avec ce code QR.

    Total, la lessive n

    o

    1

    Dans le cadre de ltude

    Most Trusted Brands

    2014 de Readers

    Digest, la lessive Total

    de Migros sest hisse

    sur la premire marche

    des lessives prfres

    des Suisses, relguant

    ainsi ses concurrents

    comme Persil et Ariel au second plan. Chaque

    anne, ce sondage ralis dans plusieurs pays

    europens lit les marques les plus dignes

    de confiance. A noter que les sonds devaient

    citer eux-mmes des noms de produits.

    Et la gagnante

    est

    Dans le cadre du numro spcial consacr

    la M-Industrie, Migros Magazine

    avait organis un grand concours. Le nom

    du gagnant est dsormais connu: il sagit

    de Sandra Rubin, de Murgenthal (AG).

    Jai d relire plusieurs fois la lettre avant

    de raliser que javais gagn, se souvient

    la laurate. Et que fera-t-elle de ses bons

    dachat dune valeur totale de 10 000 francs?

    Ma famille a dj dress une liste de souhaits.

    Un ordinateur portable figure en bonne place,

    se rjouit lemploye de commerce.

    Lamain verte e

    Migros propose des engrais et terreaux cologiques pour

    Offrir ses points Cumulus

    Migros et Solikarte ont conclu un accord.

    Dsormais, cette association qui vient en aide

    aux rfugis vient sajouter la liste des

    organisations caritatives que Migros

    recommande dans son programme Cumulus.

    Lancien numro Cumulus qui permettait

    de faire des dons anonymes de points sera

    invalid. Les collecteurs Solikarte souhaitant

    poursuivre leur bonne action doivent donc

    demander leur propre numro Cumulus.

    Photos:MauritiusImages/CulturaBettinaMatthiessen,Keystone

    EN BREF

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    6

    |

  • Les machines soda sont disponibles chez Migros

    Notre eau du robinet - fracheur ptillante

    Leau ptillante sans

    contraintes!

    Publicit

    Artistes rcompenss

    Depuis 1969, le Pour-cent culturel Migros encourage les jeunes

    artistes suisses. Dans le cadre de concours de talents, il dcerne

    des prix dtudes et dencouragement dans le domaine du chant,

    de la musique ou de la danse par exemple. Rcemment, un jury

    international sest runi et a choisi de soutenir financirement, dans

    le cadre du concours de thtre demouvement 2014, cinq jeunes

    Suisses, hauteur de 14 400 francs par laurat. Cette somme

    doit avant tout leur permettre de se concentrer sur leur formation.

    LE PRODUIT FRAISDE LASEMAINE

    Une saveur

    unique

    Pauvre en calories, le poireau

    distille ses saveurs prononces

    dans de nombreux plats:

    velout, quiche, gratin, etc.

    Ne poireautez donc plus:

    dgustez-le sans tarder, et ce,

    toutes les sauces!

    e et bio

    jardiner sans polluer.

    Cultiver la terre

    en harmonie

    avec la nature:

    une vidence pour

    beaucoup.

    Infos: www.pour-cent-culturel-migros.ch/

    concoursjeunestalents.

    |

    7

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    EN BREF

  • Punirmoins pour vider les pris

    Les conditions dincarcration dans des

    tablissements surpeupls sont rgulirement

    dnonces comme inhumaines. Lide avance de

    sanctionnermoins, pour sanctionnermieux.

    Que pensez-vous de lide de limiter les

    incarcrations pour faire face la surpopula-

    tion en prison?

    Gnralement, on pense que le nombre

    dedtenus est proportionnel aunombre

    de criminels, mais il nen est rien. On

    peut tout fait avoir peu de criminalit

    etquandmmebeaucoupdeprisonniers

    ou, linverse, beaucoup de criminali-

    t et peu de prisonniers. La population

    carcrale ne dpend pas du taux de cri-

    minalit, mais de dcisions purement

    politiques. Si les politiciens dcident

    de sanctionner svrement certains

    crimes, il y aura davantage de prison-

    niers que si ces mmes politiciens d-

    cident de les condamner moins sv-

    rement. Le paradoxe rside dans le fait

    que les Etats qui sanctionnent le plus

    svrement, tels que les Etats-Unis,

    ont davantage de criminalit que ceux

    qui sanctionnent moins svrement,

    comme les pays du nord de lEurope.

    Cette absence de lien de causalit entre

    criminalit et population carcrale peut

    galement tre illustre par les statis-

    tiques: les Etats-Unis recensent envi-

    ron9 fois plus de dtenus pour 1,5 fois le

    nombredecrimesquenousconnaissons

    en Suisse. La raison en est simplement

    que lespoliticiens amricainsontdcid

    de sanctionner plus svrement que les

    L

    e dbat a t relanc par la dcision

    du Tribunal fdral donnant raison

    deuxdtenusdeChamp-Dollon,

    Puplinge (GE), qui dnonaient des

    conditions dincarcration contraires

    au respect de la dignit humaine.

    Comment rsoudre leproblmedespri-

    sons surpeuples, lexemple cit tant

    un cas spectaculaire, mais pas une

    exception? Un Oskar Freysinger, en

    Valais, rclameainsi desmoyens suppl-

    mentaires, notamment en dotation de

    personnel.

    Alorsque lenouveaucodepnal trane

    la rputationdtre trop laxiste,certains

    osent aller contre-courant, tel lavocat

    pnaliste Robert Assal, qui plaide dans

    laTribunedeGenvepourunallgement

    des condamnations et une plus grande

    souplesse dans lexcution des peines.

    Meilleurmoyen, selon lui, de dsengor-

    ger les prisons: Entasser les dtenus

    comme du btail les dshumanise, cest

    nfaste pour la socit. Il faut cesser

    darrterdespersonnespourdes infrac-

    tions peu graves. Et de suggrer que

    soient utilises au maximum les possi-

    LesEtatssanctionnantavecsvrit ontda

    bilits damnagement des peines,

    comme le recours aux bracelets lectro-

    niques, chaque fois que la loi le permet.

    Et que soit vite aussi la dtention

    avant jugement, qui devrait rester une

    exception.

    En dcalage avec les hommes

    du terrain et lavis populaire

    En ce qui concerne Champ-Dollon,

    Robert Assal va jusqu suggrer quon

    librepurement et simplement lesdte-

    nus lesmoinsdangereux,dans lattente

    duneplace.Cette idedunedtention

    allgenenthousiasmevidemmentpas

    tout lemonde.Les tenants de la fermet

    rappellentque trop longtemps les forces

    de lordre se sont dcourages force de

    retrouver libres laprs-midi des mal-

    frats apprhends lematinmme.

    Cette politique de la main lgre a

    suscitdemaniregnrale lincompr-

    hensionet lindignationde lapopulation.

    Le caf du commerce nen dmord pas,

    restant persuad que lon ne sera jamais

    assez svre avec la dlinquance.

    Texte: Laurent Nicolet

    AndrKuhn,

    criminologue,

    professeurdedroit

    auxuniversits

    deNeuchtel et

    deLausanne.

    CETTE SEMAINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    8

    |

  • s prisons?

    politiciens suisses.Lidedediminuer la

    populationcarcralepar lintermdiaire

    dedcisionscaractrepolitiquemepa-

    rat ds lors excellente.

    Lenouveaudroitpnal tait cens justement

    limiter ces incarcrations. Peut-on donc

    considrer quil a chou?

    Bien avant son entre en vigueur,

    certains criminologues avaient prdit

    que lenouveaudroit des sanctionsaurait

    leffet pervers de rendre le systme plus

    punitif. Le paradoxe est quaujourdhui

    les gens sont persuads que le droit

    pnal est plus laxiste quavant la rvi-

    sion, alors que cest tout le contraire

    Partagez-vous lavisde lavocatRobertAssal

    quentasser les dtenus, terme, cela

    est nfaste pour la socit?

    Il va de soi quon ne lutte pas contre la

    violence par la violence. Traiter les

    dtenuscommecela se fait danscertains

    tablissements en Suisse aujourdhui

    revient crer les bases dune socit

    plus violente pour demain. Ce phno-

    mne est connu en criminologie sous le

    nomdebrutalisation. Si nous visons

    une socit avec moins de criminalit,

    il serait plus judicieux de nous inspirer

    dEtats qui y sont parvenus et dont

    certains, entre autres la Sude, ferment

    des prisons.

    ontdavantagedecriminalit

    I

    l

    f

    a

    u

    d

    r

    a

    i

    t

    p

    l

    u

    t

    t

    a

    g

    r

    a

    n

    d

    i

    r

    d

    e

    s

    p

    r

    i

    s

    o

    n

    s

    c

    o

    n

    u

    e

    s

    u

    n

    e

    p

    o

    q

    u

    e

    o

    l

    a

    S

    u

    i

    s

    s

    e

    t

    a

    i

    t

    p

    l

    u

    s

    t

    r

    a

    n

    q

    u

    i

    l

    l

    e

    .

    C

    e

    s

    t

    a

    b

    l

    i

    s

    s

    e

    m

    e

    n

    t

    s

    n

    e

    s

    o

    n

    t

    p

    l

    u

    s

    a

    d

    a

    p

    t

    s

    l

    a

    r

    a

    l

    i

    t

    a

    c

    t

    u

    e

    l

    l

    e

    .

    T

    i

    b

    o

    r

    M

    e

    n

    y

    h

    a

    r

    t

    ,

    5

    7

    a

    n

    s

    M

    i

    e

    u

    x

    v

    a

    u

    d

    r

    a

    i

    t

    a

    x

    e

    r

    l

    e

    s

    e

    f

    f

    o

    r

    t

    s

    s

    u

    r

    l

    a

    p

    r

    v

    e

    n

    t

    i

    o

    n

    e

    t

    l

    d

    u

    c

    a

    t

    i

    o

    n

    ,

    d

    e

    m

    a

    n

    i

    r

    e

    c

    e

    q

    u

    e

    d

    a

    n

    s

    l

    a

    v

    e

    n

    i

    r

    l

    a

    c

    r

    i

    m

    i

    n

    a

    l

    i

    t

    d

    i

    m

    i

    n

    u

    e

    .

    O

    l

    g

    a

    W

    a

    l

    t

    h

    e

    r

    ,

    5

    8

    a

    n

    s

    T

    o

    u

    t

    d

    p

    e

    n

    d

    d

    e

    s

    d

    l

    i

    t

    s

    .

    P

    o

    u

    r

    c

    e

    u

    x

    q

    u

    i

    n

    e

    p

    o

    r

    t

    e

    n

    t

    p

    a

    s

    a

    t

    t

    e

    i

    n

    t

    e

    l

    i

    n

    t

    g

    r

    i

    t

    p

    h

    y

    s

    i

    q

    u

    e

    d

    e

    s

    p

    e

    r

    s

    o

    n

    n

    e

    s

    ,

    o

    n

    p

    e

    u

    t

    e

    n

    v

    i

    s

    a

    g

    e

    r

    d

    e

    s

    c

    o

    n

    d

    a

    m

    n

    a

    t

    i

    o

    n

    s

    p

    l

    u

    s

    l

    g

    r

    e

    s

    .

    R

    i

    t

    a

    S

    c

    h

    n

    e

    n

    b

    e

    r

    g

    e

    r

    ,

    4

    2

    a

    n

    s

    L

    e

    s

    l

    o

    i

    s

    e

    x

    i

    s

    t

    e

    n

    t

    ,

    c

    h

    a

    c

    u

    n

    l

    e

    s

    c

    o

    n

    n

    a

    t

    ,

    c

    h

    a

    q

    u

    e

    f

    a

    u

    t

    e

    s

    a

    p

    e

    i

    n

    e

    p

    r

    c

    i

    s

    e

    .

    I

    l

    n

    y

    a

    a

    u

    c

    u

    n

    e

    r

    a

    i

    s

    o

    n

    d

    a

    l

    l

    g

    e

    r

    q

    u

    o

    i

    q

    u

    e

    c

    e

    s

    o

    i

    t

    .

    S

    u

    r

    t

    o

    u

    t

    q

    u

    e

    l

    e

    s

    r

    c

    i

    d

    i

    v

    e

    s

    s

    o

    n

    t

    n

    o

    m

    b

    r

    e

    u

    s

    e

    s

    .

    Y

    v

    e

    s

    N

    a

    n

    c

    h

    e

    n

    ,

    4

    5

    a

    n

    s

    Q

    u

    e

    l

    e

    s

    t

    v

    o

    t

    r

    e

    a

    v

    i

    s

    ?

    Photos:Keystone/MartialTrezzini,CharlyRappo/arkive.ch

    Votre avis compte!

    Chaque semaine, participez

    notre sondage sur un sujet

    dactualit sur la page daccueil

    demigrosmagazine.ch

    SONDAGE

    Faut-il incarcrermoinspour

    dsengorger lesprisons?

    Rsultats du sondage paru

    surmigrosmagazine.ch du

    lundi 10au jeudi 13mars2014.

    Le sondage reste ouvert

    dans larticle en ligne.

    Vous pouvez encore

    donner votre avis.

    81%

    Non

    19%

    Oui

    Les dlinquants en

    attente de leur

    jugement doivent-ils

    systmatiquement

    tre placs en

    dtention prventive?

    |

    9

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    CETTE SEMAINE

  • SOCIT

    |

    PORTRAITS

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    10

    |

    D

    ans le silence des montagnes

    abruptes, luvre insolite de

    lhomme se manifeste comme un

    dfi.Lavoixoffdunmmorabledocu-

    mentairedeClaudeGorettaconsacr la

    construction du barrage de la Grande-

    Dixencesuffirait le rappeler.Lesannes

    cinquante et soixante ont marqu la

    Suissede travauxde titansdont les rali-

    sations rythmentencorenotrequotidien

    undemi-sicle plus tard.

    Enmontagne,outre lrectiondesbar-

    rages,cesera lquipementdestationsde

    ski. En plaine, les tracs des premires

    autoroutes. Trois tmoins de ces temps

    glorieux rassemblent leurs souvenirs.

    Textes: Laurent Nicolet

    Les annes 50 et 60ont vu lamise en route de travaux de titans:

    barrages, autoroutes, stations de ski. Un ouvrier, un aumnier

    et une cantinire se souviennent.

    Quand la Suisse

    sebtonnait un

    avenir glorieux

  • L, torse nu, cest moi. Cristiano Colpo,

    75 ans, alias Beppino ou Pompon,montre la

    photo o on le dcouvre en jeune homme

    juch sur un bulldozer. Ctait lors de la

    construction de lA1 entre Genve et Lausanne.

    Arriv le 23 fvrier 1960 en fin daprs-midi

    Nyon, le 24 aumatin il tait au travail. Il a

    gard le bulletin de sa premire paie:

    2,67 francs de lheure.

    Cest un homme de son village, dans la province

    de Vicenza, employ dj dans une entreprise

    nyonnaise de travaux publics, qui lavait fait

    venir. Arriv en tant quemanuvre, Cristiano

    Colpo parvient immdiatement se faire enga-

    ger commemcanicien surmachines. Javais

    pas tout fait fini mon apprentissage en Italie,

    il memanquait deux ou trois mois,mais je

    men fichais pasmal. Malgr des dbuts diffi-

    ciles o il doit improviser face des engins de

    chantier quil na jamais vus, bientt aucune

    machine na de secret pour lui.Ds quil y

    avait unmalade sur le chantier de lA1, cest

    moi quon appelait pour le remplacer.

    Les conditions de travail dans les annes

    soixante ntaient videmment pas celles

    daujourdhui. Ceux qui travaillaient la pelle

    et la pioche, ctait vraiment la pelle et la

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    SOCIT

    PORTRAITS

    |

    11

    Cristiano Colpo,

    tout droite sur

    la photo, sur lune

    desmachines

    de chantier quil

    conduisait lors

    de la construction

    de lA1 Genve-

    Lausanne.

    CristianoColpo, 75 ans,mcanicien surmachines, chantier de lautorouteA1

    pioche. Aujourdhui les petites machines de

    chantier remplacent louvrier qui na plus gure

    qu nettoyer la route derrire.

    Prs de Chavannes, se souvient-il, il y avait les

    baraquements des ouvriers qui construisaient

    lautoroute. Un couple leur faisait la cuisine,

    ils avaient de leau chaude, des douches. Des

    conditions selon lui meilleures que celles quil a

    connues au dbut comme saisonnier en ap-

    partement.On sentassait, cinq lits par

    chambre, tte contre tte etmme un qui

    dormait dans la cuisine. Il ny avait que de

    leau froide. Et dans le btiment une seule toi-

    lette pour quinze. Il fallait faire la queue pour y

    aller. Pour cuisiner aussi: A 9 heures du soir,

    des fois, certains navaient pas encoremang.

    Dautres pourtant taient encore plus mal lo-

    tis.Nous aumoins on avait un potager,

    on pouvait se chauffer un peu. Cristiano

    Colpo se souvient de trois Siciliens qui, eux,

    habitaient dans le grenier, 50 degrs en t,

    -15 en hiver. Leau gelait.

    Personne ne se plaignait pourtant. Beppino, lui,

    ne sen sortait pas si mal dans cette vie pr-

    caire. On ntait que des garons la maison

    et mamre mavait appris tricoter, coudre,

    repasser, cuisiner. En Suisse, je repassais pour

    les copains de chantier, je me faisais payer

    bien sr. 50 centimes par chemise.

    Lun de ses raresmauvais souvenirs, cest larri-

    ve en train Brigue: L on tait traits

    comme du btail, on vous prenait le passeport,

    on devait passer la visite mdicale, prise de

    sang, avec une petite lame, et aprs tous poil,

    moi a allait je faisais du foot, javais lhabitude,

    mais certains ne voulaient pas se dshabiller,

    ils avaient honte ou je sais pas quoi, ctait sur-

    tout difficile pour les femmes, imaginez la ga-

    mine qui a 20 ans, la mm qui en a 60. Cer-

    tains taient refouls aprs lexamen du sang

    et des poumons: On en voyait qui pleuraient.

    Cristiano Colpo raconte encore que, comme la

    plupart des ouvriers de lautoroute, ceux de

    son village sont rentrs aussitt louvrage

    termin. Ils vivaient comme vivent lesmi-

    grants. Ils travaillaient jusqu ce quils pou-

    vaient se construire unemaison en Italie. Ils ne

    sortaient pas le soir, ils fumaient desmoitis

    de cigarettes pour les rallumer plus tard. Tan-

    dis lui, aprs une semaine et sans parler un

    mot, avait dj des amis suisses et une bonne

    amie et na pas laiss passer un samedi sans

    courir les bals: Avec largent des souliers que

    jai uss danser, je serais riche.

  • Actuellement chez SUN STORE

    PROMO -20%

    22.

    00

    27.

    50

    Valable dans tous les SUN STORE

    jusquau 5.4.2014. www.sunstore.ch

    +10% de rabais

    supplmentaire

    uniquement avec la SUNCARD

    S

    e

    lo

    n

    co

    n

    d

    it

    io

    n

    s

    g

    n

    ra

    le

    s

    100 g

    SOCIT

    |

    PORTRAITS

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    12

    |

    Publicit

    Esther Devaud:

    En vingt ans

    de bistrots, je

    nai pas eu besoin

    dappeler une fois

    la police.

    EstherDevaud, 96 ans,

    cantinire

    Je peux vous dire que tout le mondeme res-

    pectait. Je les tenais en laisse, comme les

    chiens! Lesprit aussi vif que le caractre,

    Esther Devaud, 96 ans, ne sen laisse pas

    conter. Lors de la construction de la nouvelle

    route de Verbier en 57 ou 58 puis du

  • |MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    SOCIT

    |

    PORTRAITS

    |

    13

    premier cinma, elle prparait les trois repas

    quotidiens dune centaine douvriers.Je nai

    jamais voulu daide, je faisais tout toute

    seule, les repas, la vaisselle et tout le baratin.

    Elle quon retrouvera ensuite sur le chantier

    de lautoroute Chernex, au-dessus de

    Montreux, puis qui tiendra dune main de fer

    divers tablissements publics, en Valais puis

    Payerne: En vingt ans de bistrots, je nai pas

    eu besoin dappeler une seule fois la police.

    On la croit sur parole.

    A Verbier, elle prparait mme les repas du

    dimanche. Elle se souvient dun groupe dou-

    vriers haut-valaisans qui avaient lhabitude ce

    jour-l daller prendre lapro ce qui tait

    bien normal mais se prsentaient souvent

    en retard pourmanger. Alors quEsther devait

    prendre le car de 13 h 30 pour aller retrouver ses

    enfants:Un jour, la rognema prise, jai dit,

    si vous arrivez midi, vous aurez du dner, sinon

    vous naurez rien. Je peux vous dire quils mont

    obi.

    Elle se souvient aussi des ouvriers italiens:

    Il y en avait beaucoup lpoque. Ils taient

    trs gentils, trs respectueux. Esther, il faut

    dire, savait sy prendre pour traiter les

    conflits la racine: Il y avait un type, de

    Saint-Maurice, il buvait un peu, il dormait dans

    la chambre des Italiens, un soir il vient se

    plaindre quils le laissaient pas entrer. Je

    monte, je tape, je dis: Il paie son lit comme les

    autres, laissez-le entrer et sil vous embte,

    cest facile, vous avez qu le foutre par la fe-

    ntre. Les ouvriers, qui travaillaient dix heures

    par jour et le samedi matin, soit des semaines

    de cinquante-cinq heures, payaient 6 francs

    par jour pour les trois repas et la couche.

    Et puis il y a eu la guerre des pommes de

    terre rondes. Ceux qui contestaient la pr-

    sence de cemets deux fois par semaine au

    menu lont perdue, eux qui promettaient

    denvoyer un de ces jours une secoue la

    cantinire. Esther a mis sa dmission dans la

    balance. Elle est reste, les rcalcitrants ont

    reu leur dcompte.

    Du chantier de lautoroute Chernex, elle

    raconte cette anecdote. Un type qui se

    saoulait ds quil touchait sa paie, un matin

    il tait encore fin noir, il embtait les Italiens

    au petit-djeuner, il leur disait quils navaient

    rien faire ici. Je lui ai envoy deux paires de

    baffes. Esther pouvait entretenir des rap-

    ports houleux avec les reprsentants syndi-

    caux. Un jour quelle en surprend jouer aux

    cartes largent, elle leur lance: Alors cest l

    que passe ce que les ouvriers se crvent la

    peau gagner? Ceux qui lui demandent de

    faire un peu de propagande sentendent r-

    pondre: Vous pouvez toujours vous la siffler.

    Quand dautres lui apprennent quelle effectue

    trop dheures, que ce nest pas lgal, elle

    rtorque:Pour rclamer quelque chose

    au patron, jai besoin de personne. Sur

    parole, on vous dit.

    Le barrage dEmosson a

    t construit entre 1967

    et 1975.

    Photos:LaurentdeSenarclens,Keystone/Photopress-Archiv

    Gabriel Pont, 97 ans, aumnier des chantiers

    Personnage de lgende en Valais, le chanoine

    Gabriel Pont, 97 ans, commence par voquer son

    enfance anniviarde sept frres et surs,

    quatre vaches. Jtais toujours lcurie.

    Cest sans prmditation quil deviendra

    aumnier de chantiers. Lors du percement

    du tunnel du Saint-Bernard, puis au barrage

    dEmosson: Jtais lhospice, au col, je me

    suis dit il faut aller dire bonjour aux ouvriers. Je

    suis descendu Bourg-Saint-Pierre. A lhospice,

    ils nemont plus revu.

    Aujourdhui, le tunnel travers lamontagne

    continue de limpressionner.Une grande

    uvre, ralise incognito par des ouvriers

    qui venaient de partout.Quand on lui

    demandait ce quil faisait l, il rpondait: Moi?

    Rien. Histoire de dcevoir ceux qui

    sattendaient des sermons et de lamorale.

    Alors que son travail consiste trs vite

    rsoudre les difficults concrtes qui peuvent

    se poser aux ouvriers. Des problmes avec

    leurs bonnes amies, leurs familles, leurs

    enfants, le travail, les directeurs, lEtat, les

    gendarmes

    Quand il sagissait dentreprendre une

    dmarche auprs de ladministration des

    chantiers, lecclsiastique ntait pas de trop.

    Il y avait l des gens qui mprisaient les

    ouvriers.Moi jcoutais leurs histoires, je

    les accompagnais, sinon personne ne les

    aurait entendus.

    Pour un clandestin algrien, il inventeramme

    un nom, un ge, une origine et un tat civil

    fictifs sur la base desquels il obtiendra dune

    ambassade des papiers officiels.

    Gabriel Pont se souvient dun groupe particulier

    de travailleurs. Des prisonniers quonmettait

    l pour leur fin de peine. Un jour lun dentre

    eux sapproche du chanoine et lui dit. Toi, si

    tes pas un con, viens avecmoi. Il sagissait

    dobtenir un papier pour lassurancemaladie.

    Dans les bureaux du chantier, le rond-de-cuir

    ne veut rien savoir. Louvrier sempare alors de

    lamachine crire, une grosse Remington,

    et sapprte la fracasser sur le crne de son

    interlocuteur. Le chanoine parvient in extremis

    retenir son geste.

    Autre situation scabreuse: deux dames

    dbarquent sur le chantier, venant dItalie.

    Gabriel Pont les avertit que la direction a dj

    tlphon aux gendarmes. Les deux

    professionnelles sen vont aussitt. Peu aprs

    lecclsiastique se retrouve face un groupe de

    travailleurs pas franchement amicaux:Jai vu

    quelque chose briller, puis senti un

    frlement prs demon habit. Un poignard

    a t lanc qui vient se ficher contre la porte o

    se tenait la chanoine.

    Le chantier du Saint-Bernard termin, Gabriel

    Pont est nomm cur deMartigny-Bourg.Mais

    bientt un homme du chantier du barrage

    dEmosson vient le trouver, lui explique que leur

    aumnier a jet lponge. Le chanoine hsite,

    puis dcide de cumuler les fonctions: il multi

    -

    pliera les allers et retours entre sa paroisse et le

    barrage. Les dbuts sont chaotiques. Le premier

    jour, un dimanche, il improvise unemesse dans

    un baraquement. Pour un seul participant, qui

    sen va au bout de dixminutes. Laumnier se

    rend ensuite au rfectoire, salue un par un les

    ouvriers. Il naura droit qu une rponse: Fais

    pas le fou!Mais peu peu la confiance

    sinstalle. Ils ont vu que jtais acceptable,

    que je ne venais pas les embter. Cest a

    lemiracle. Ne rien faire, ne rien demander, tre

    l. Ce sont eux ensuite qui dcident.

  • LreNarcisse 2.0

    Les selfies, ces autoportraits bout de bras, sont partout, clbrant la preuve

    de linstant par limage et lamise en scne de soi. Dcryptage du phnomne.

    Photos:Dukas/Corbis,Keystone.

    SOCIT

    |

    TENDANCE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    14

    |

  • LOxford Dictionary, matre du vo-

    cableanglais, lapromumotde lan-

    ne 2013. Le selfie, art de retourner

    bras tendu lobjectif sur soi, envahit la

    Toile, ravit une foule grandissante de

    Narcisses numriques, people ou ano-

    nymes. Le phnomne prend des allures

    de tsunami visuel aumilieu des quelque

    550millions de photographies tlchar-

    ges toutes lesvingt-quatreheures,dont

    350millions pour le seul Facebook. Si le

    selfie sinscrit dansune longue tradition

    de lautoportrait aussi vieille que lapho-

    tographie (ou la peinture), la gnrali-

    sation de la tradition visuelle dun dis-

    cours sur soi est frappante.Cesdernires

    annes, elle sest tendue comme jamais

    auparavant,et le recoursaux rseauxso-

    ciaux ne reprsente que la pointe de

    liceberg,estimeAnnikDubied,socio-

    logue de la clbrit et directrice de

    lAcadmiedu journalismeetdesmdias

    lUniversit deNeuchtel.

    Car,selonGianniHaver,professeuren

    sociologie de limage lUniversit de

    Lausanne,ilsagitdaborddedirequelque

    chose lautre.Leselfieestcertes tour-

    n vers soi,mais produit pour les autres.

    Appartenant dsormais pleinement

    notreviesocialeen ligne,je levoiscomme

    uneproductiondune imagede soi com-

    muniquant quelque chose dans lins-

    tant.

    Vous tes sur une plage des Carabes

    alors que vos collgues soupirent au bu-

    reau?Hop, un clich ensoleill sur Face-

    book pour leur donner un petit got

    (amer) duparadis.Pas forcmentpour se

    la jouerstardailleurs,ainsique lexplique

    Annik Dubied: Plus quune tendance

    aspirer laclbrit,cestunevolontde

    fixer les instants de vie, de jalonner son

    Le selfie desOscars

    Baptise la meilleure photo de tous les temps par Ellen De Generes,

    le selfie que lanimatrice des Oscars a improvis lors de la crmonie a

    battu tous les records avec plus de 3millions de tweets. Un buzz

    savamment orchestr par la firme Samsung, sponsor de la

    manifestation, mais qui aura le mrite de finir dasseoir le phnomne.

    Comment faire mieux?

    Femmeet hommesde pouvoir

    Il a fait le tour dumonde, le selfie de Barack Obama pris en

    compagnie du premier ministre britannique David Cameron et de

    son homologue danoise Helle Thorning-Schmidt lors de la crmonie

    dhommage Mandela. Preuve quemme les hommes dEtat ont

    cd la dferlante.

    Le pape Franois

    Prsent en couverture dumagazine Rolling Stone et lu homme

    de lanne 2013 par Time, il ne manquait au pape Franois quun

    selfie pour faire dfinitivement partie des branchs de la plante. Cest

    dsormais chose faite grce ce clich pris avec un groupe

    dadolescents en visite au Vatican.

    Le selfie est certes

    tourn vers soi

    mais produit pour

    les autres.

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    SOCIT

    |

    TENDANCE

    |

    15

  • parcours de moments jugs suffisam-

    ment importants pour tre immorta-

    liss.

    Ladite importance dpend certes du

    degr dacceptation de chacun. Mais

    commeune image chasse lautre dansun

    flux permanent, ce nest pas bien grave.

    GianniHaver:Evidemment, lemessage

    que lon tente de transmettre ne fonc-

    tionne que dans limmdiatet. Mme

    si, peut-tre, certains selfies seront un

    jour pris comme le reflet dune poque.

    Car, comme tout contenu sur internet,

    ces autoportraits numriques sont la

    fois instantans et immanents puisque

    possdant une trace durable. Le droit

    loubli demeure tout relatif.Unparadoxe

    cher laToilemondialeque lonretrouve

    proposde lanotiondintimit,puisquil

    existe aussi le selfie coquin. Cela me

    semble typique du double registre du

    web, par essence public et global et en

    mme temps offrant une sensation de

    quasi-intimit lorsque lon surfe le soir

    seul dans sa chambre ou son salon.

    Unnouveau

    rapport limage

    Unautreparadoxeduselfie tiendrait, se-

    lon Annik Dubied, notre rapport

    contemporain limage (ou en tout cas

    au rapport quentretient avec elle la g-

    nration dite des digital natives):

    Alors que sa production na jamais t

    aussi massive et sa retouche voire sa

    complte reformulation si facile, tout

    se passe comme si la gnration ac-

    tuelle faisait jouer la photo le rle de

    preuve longtemps tenu par lcrit. Le

    selfie reprsenterait donc la ralit de la

    personne qui par ce biais indique ce

    quelle fait, voire qui elle est.

    Naturellement, qui dit mise en scne

    desoidit aussivalorisationdesoi.Mme

    si les smartphones et tablettes facilitent

    la prise du clich et sa transmission, la

    personne choisit la photo qui lui plat le

    plus, comme elle choisit la situation ou

    lair quelle adopte. On prend vritable-

    ment lapose,et encela on renoueavec la

    pratique de lautoportrait qui existe de-

    puis linvention de la photographie,

    note encoreGianniHaver.

    Apart les 3

    e

    et4

    e

    geset encorenul

    ne semble chapper cette formeultime

    denombrilismeplantaire,decetteex-

    trmit, cette intimit partage par

    tous. Les psychiatres le disent joliment:

    seportraiturer sur internet autorise lin-

    ventiondunmoiquinexistepas.Acha-

    cun de se fabriquer la vie qui va avec, et

    de profiter de canaux de diffusion qui

    nont jamais t aussi tendus.

    Textes: VivianeMentrey

    Des selfies, Debora en fait

    depuis une anne. Au

    dbut, ctait un peu pour

    accepter mon apparence,

    car javais pris presque

    40 kilos en deux ans et la

    seule chose que je trouvais

    jolie chezmoi ctait mon

    visage, confie-t-elle.

    Depuis deuxmois, ses

    autoportraits visent un

    autre but. La jeune femme

    de 25 ans a en effet subi

    une rduction de lestomac

    et perdu 20 kilos. Jai envie

    de montrer lvolution de

    mon corps et de tmoigner

    de ce que je vis. Prendre des

    selfies ma sincrement

    permis deme sentir mieux

    et je ralise que langle de

    mes photos sest largi:

    aujourdhui, jose montrer

    mon corps.

    Que font deux lus quand

    ils sigent Berne? Un

    selfie, pardi! Post sur

    Facebook, le selfie im

    Bundeshaus des

    conseillers nationaux

    genevois Hugues Hiltpold

    et Christian Lscher pris

    depuis leurs fauteuils a

    rcolt plus de 100 likes.

    Cest une faon de

    montrer nos lecteurs ce

    que nous faisons avec un

    ct sympa, explique

    Hugues Hiltpold,

    linstigateur du clich, tout

    en reconnaissant que la

    dmarche revt un petit

    ct narcissique. Les deux

    compres nen sont pas

    leur coup dessai. Et ne sont

    pas seuls. Selon Hugues

    Hiltpold, on voit de plus en

    plus de photos prises dans

    lhmicycle. A quand le

    selfie du Conseil national?

    Samarque de fabrique? Le

    sourcil gauche lev, (parce

    que je narrive pas lever le

    droit). Jorge Guerreiro,

    fondateur du blog et

    webzine jsbg.me, pratique

    lart du selfie depuis les

    annes 2000, lorsquil a

    acquis son premier appareil

    photo digital. Sur les

    rseaux sociaux o il poste

    rgulirement ses clichs,

    on le dcouvre avec des

    copains en soire, des

    people ou se mettant en

    scne dans son cadre

    professionnel. Cest une

    faon dinteragir avec sa

    communaut virtuelle et

    de se vendre sous son

    meilleur angle, car je

    retouche toujours mes

    photos avant de les

    poster. Narcissique? On

    ne peut pas le nier, mais

    cest surtout un clin dil

    humoristique.

    Jadore la mode et jaime

    bien prendre des photos de

    moi pourmontrer ce que je

    porte. Manuela, 23 ans

    et fashion addict, poste r-

    gulirement depuis trois

    ans ses selfies sur Ins-

    tagram. Elle en fait dans la

    rue, sur le chemin du travail,

    en allant au fitness, en

    mode grimace ou en

    faisant ma belle, question

    dhumeur. Ce que jaime

    avec les selfies, cest quon

    est seul face lobjectif,

    cela permet dtre plus d-

    tendu et dapparatre tel

    que lon veut tre.

    De Suisse romande...

    M

    m

    e

    le

    s

    lu

    s

    B

    e

    r

    n

    e

    H

    u

    g

    u

    e

    s

    H

    il

    t

    p

    o

    ld

    (

    g

    .)

    e

    t

    C

    h

    r

    is

    t

    ia

    n

    L

    s

    c

    h

    e

    r

    s

    u

    iv

    e

    n

    t

    la

    t

    e

    n

    d

    a

    n

    c

    e

    .

    J

    o

    r

    g

    e

    G

    u

    e

    r

    r

    e

    i

    r

    o

    s

    e

    p

    r

    e

    n

    d

    e

    n

    p

    h

    o

    t

    o

    d

    e

    p

    u

    i

    s

    l

    e

    s

    a

    n

    n

    e

    s

    2

    0

    0

    0

    .

    D

    e

    b

    o

    r

    a

    (

    e

    n

    h

    a

    u

    t

    )

    e

    t

    M

    a

    n

    u

    e

    l

    a

    o

    n

    t

    d

    e

    s

    d

    m

    a

    r

    c

    h

    e

    s

    d

    i

    f

    f

    r

    e

    n

    t

    e

    s

    .

    SOCIT

    |

    TENDANCE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    16

    |

    M

    m

    e

    l

    e

    s

    lu

    s

    B

    e

    r

    n

    e

    H

    u

    g

    u

    e

    s

    H

    il

    t

    p

    o

    ld

    (

    g

    .)

    e

    t

    C

    h

    r

    is

    t

    ia

    n

    L

    s

    c

    h

    e

    r

    s

    u

    iv

    e

    n

    t

    l

    a

    t

    e

    n

    d

    a

    n

    c

    e

    .

  • Ouest canadien

    Forts perte de vue, villes fascinantes, train jusqu

    la cte Pacifique, croisire dans le Passage Intrieur et

    itinraire First Passage to the West du Rocky Moun-

    taineer embarquez pour un superbe circuit dans les

    paysages sublims de lOuest canadien.

    02.0920.09.2014

    19 jours, ds CHF 8350.

    Glacier Express, Mstair & cols prestigieux

    Glacier Express et car postal dpoque vous emmnent au

    cur des Alpes, la dcouverte de Coire, du parc national

    et de Mstair, puis de nombreux cols de prestige cheval

    entre la Suisse, lItalie et lAutriche, comme lOfen, le Stelvio

    ou la haute-route de la Silvretta.

    21.0624.06.2014

    21.0924.09.2014

    4 jours, ds CHF 1065.

    Pays de Galles

    Le Pays de Galles, pays des chteaux et des dragons, nous

    rserve bien des surprises, entre plages perte de vue

    et pics montagneux tel le Mount Snowdon. Et dans ces

    ravissants paysages, une multitude de pittoresques trains

    vapeur ptaradent comme au bon vieux temps !

    03.0912.09.2014

    10 jours, ds CHF 3840.

    Rgion bloise & Flche Rouge

    Trs sympathique circuit dans le nord-ouest du pays, avec,

    au programme, le site romain dAugusta Raurica, une croi-

    sire jusqu Ble avec tour en vieux tram, une excursion

    en Fort-Noire et une balade au fil du Rhin bord de la

    lgendaire Flche Rouge.

    30.0603.07.2014

    03.0706.07.2014

    4 jours, ds CHF 960.

    De fantastiques circuits

    en train, par le spcialiste

    ZRT Zermatt Rail Travel SA

    Av. de Cour 74, 1007 Lausanne

    Tl. 021 622 00 60, [email protected]

    Nous vous envoyons volontiers nos programmes dtaills,

    consulter galement sur le site internet www.zrt.ch

    Cest la nouvelle folie des teen

    agers branchs. Exit Facebook

    tropmainstream, vive Instagram

    et surtout Snapchat, le phno

    mne dumoment: dj 150mil

    lions de photos et vidos parta

    ges tous les jours, lapplication

    caracolant en tte des tlchar

    gements aux cts deWhatsApp

    que vient de racheter Facebook.

    Le principe de Snapchat? Il sagit

    dune application demessagerie

    fonctionnant aussi bien sur

    Android que sur IOS autorisant

    lenvoi de photos, vidos voire

    dessins un ou plusieurs

    contacts. Particularit: ces der

    niers ne peuvent en visualiser le

    contenu que durant dix secondes

    maximum. Cet aspect phmre

    (en thorie, rien nest enregistr)

    autorise, on limagine, toutes

    les audaces et beaucoup daccros

    osent poster des selfies et

    autres dtails de leur anatomie

    bien plus facilement que sur

    des rseaux sociaux. Une image

    vaut sembletil mieux quemille

    mots et profiter de linstant pr

    sent srige en vritable doxa.

    Evidemment cet engouement

    ouvre un nouveaumarch aux

    dveloppeurs: certains pro

    grammes permettent de recoller

    les morceaux des clichs compro

    mettants se baladant dans la

    mmoire des smartphones, alors

    que dautres offrent aux selfieurs

    repentis de rcuprer des photos

    pas encore vues en contournant

    la limite de trente jours de

    Snapchat. Enfin, dautres applica

    tions imitant le principe demes

    sagerie phmre apparaissent,

    tel Facebook Poke (uniquement

    pour iPhone), mais aussi Wickr

    (toujours sur IOS) ou son quiva

    lent Android Gryphn.

    Denouvelles audaces

    On la vu avec le rcent selfie

    pris lors de la 86

    e

    crmonie des

    Oscars qui a fait le tour de la

    plante: les selfies sont en

    ralit de plus en plus souvent

    des portraits de groupe. Baptiss

    usies, ces clichs pris par lun

    des membres de la bande sont en

    passe de dtrner le phnomne

    trs solitaire de lautoportrait.

    Plus sympathique et rigolo, il offre

    souvent des visages hilares, loin

    des duck face ou autres moues

    gocentres. Mais quon ne sy

    trompe pas: seul ou plusieurs,

    ces portraits posts via les

    rseaux sociaux le sont dans un

    mme but: celui de la prsence

    connecte. Regardezmoi!

    Regardeznous! Enjoignentils

    leur public potentiel. Moi ou nous,

    mme combat.

    Les usies, lavenir du selfie

    Justin Bieber

    Serial selfier, Justin Bieber est un habitu des rseaux sociaux

    o il ne manque pas de poster ses derniers autoportraits. Pas toujours

    pour le meilleur.

    Photos:Keystone,DR.

    |

    17

    SOCIT

    |

    TENDANCES

  • Les artisansdu

    retourdubison

    A linitiative de deux passionns, le biologiste Alain

    Maibach et le garde forestierMichel Mercier,

    lemblmatique bovin sapprte faire son retour

    en Suisse.Aprs huit sicles dabsence et dans

    une fort duNord vaudois, Suchy.

    D

    es bisons dans les forts vau-

    doises? Cest pour bientt. Sur le

    territoirede la communedeSuchy

    trs prcisment, dans le cadre dun

    programme internationalde rintroduc-

    tion et grce lacharnement de deux

    professionnels passionns, le biologiste

    Alain Maibach et le garde forestier Mi-

    chelMercier.

    Lequel explique quaprs limpact de

    louraganLothar sur lesbois, laquestion

    dunediversificationde la fort sestpo-

    se. Et pour diversifier une fort, les

    solutions ne sont pas si nombreuses.

    Le choix du bison sest vite avr une

    vidence. Michel Mercier numre:

    Avec des animaux exotiques, on nau-

    rait pas t franchement dans lair du

    temps, et parmi les espces indignes, il

    fallait carter les prdateurs qui posent

    problme et celles dj prsentes en

    abondancecomme les chevreuils.Res-

    tait donc lebison,unanimal emblma-

    tique de Suisse et dEurope et qui a frl

    lextinction.

    A le chasser, vous ne couriez pas

    aprs une gazelle

    Prsent en Suisse, en effet, le bison,

    preuves lappui, jusquauXII

    e

    sicle.

    Ledfrichagedes forts a ensuite eu sa

    peau, explique Alain Maibach. On

    sest mis aussi le manger. Lavantage

    cest quil tait gros et que a restait un

    bovin: le chasser, vous ne couriez pas

    aprs une gazelle.

    Le problme avec le bison dEurope,

    cestmoins lenombredindividusque la

    consanguinit. Peu peu, ils se sont

    rfugis dans les grandes forts entre la

    Bilorussie et la Pologne. Ils ont ensuite

    priclit en raison du braconnage, au

    pointqu laveillede laPremireGuerre

    mondiale, il nen restait quune ving-

    taine.Avecuncontenugntique aus-

    si faible, vous avez beau croiser tout ce

    que vous voulez, vous restez dans la

    consanguinit. Ils sont tous cousins.

    SOCIT

    |

    ENVIRONNEMENT

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    18

    |

  • Une consanguinit qui favorise les ma-

    ladies:Si la fivreaphteuseparexemple

    se dclenche aumauvais endroit en Po-

    logne o sont les grands rservoirs, tous

    y passent.

    Cestpourquoi lUnion internationale

    pour la conservationde lanature (UICN)

    un peu lONU des animaux dont

    le sige est Gland, gre dsormais un

    programme de conservation des bisons,

    bas sur la dlocalisation des popula-

    tions. On crera ainsi des cellules de

    conservation.Nous sommescommedes

    hteliersqui seprparent accueillir des

    clients en loccurrence nos bisons

    quon ne choisira pas. Le groupe bison

    de lUICN a en effet cartographi gn-

    tiquement les 2000 individusqui restent

    dans le monde: Pour chacun nous sa-

    vons qui est sonpre, samre, ses frres

    et surs.

    Une fort qui prsente tous les

    avantages pour recevoir le bison

    Cest la responsable du groupe bison

    lUICN,unegnticiennepolonaise,qui

    organise les mlanges et choisira quels

    bisons viendront stablir dans les bois

    deSuchy.Une fortquiprsente tous les

    avantages pour recevoir le bison. Elle

    est dun seul tenant, traverse par au-

    cune route et borde uniquement dex-

    ploitations agricoles.

    Si le canton sest dabord montr r-

    ticent, avant de finir par donner son feu

    vert, le propritaire de la fort, la com-

    mune de Suchy, a t enthousiaste

    ds le dpart.

    Bien sr les gens nous posaient des

    questions.Est-cequonpourra encore se

    promener en fort?Cueillir des champi-

    gnons? Chasser? raconte Alain Mai-

    bach. Qui a tent de rassurer tout le

    monde en expliquant quau dpart les

    bisons de Suchy devraient tre entre six

    et huit, quils tourneront dans plu-

    sieurs parcs clturs en fonction de ce

    quils mangeront, une sorte de mini-

    transhumance. Des parcs que la faune

    locale pourra traverser grce des ou-

    vertures.

    MichelMercier, lui, sest inquit au-

    prs de la gnticienne polonaise de sa-

    voir si, avec des bisons, il serait encore

    possible dexploiter la fort, de couper

    du bois. A quoi il a t rpondu que cela

    ne poserait pas de problme, le bison

    tantunanimalqui abesoin la foisde

    milieux ferms et demilieux ouverts, de

    hautes futaies comme de buissonnants,

    de lieux secs commede lieuxmouills.

    Quant son alimentation, l aussi cela

    tombe bien: le bison est un animalop-

    portuniste qui pourra se nourrir aussi

    biendcorces, de ronces que dherbe,

    qui aura sa prfrence sil en trouve.

    Cest dailleurs en disposant des bottes

    de paille quon attirera les bisons lors-

    quil sagira deffectuer des contrles

    vtrinaires.

    Si lide dabord est de venir en aide

    aubisonen lui offrantune fort comme

    structure daccueil, sa prsence, as-

    surent les deux spcialistes, sera aussi

    bnfique pour lenvironnement. En

    ouvrant des espaces, en creusant des

    bauges, des passages, le bison va favori-

    ser la biodiversit. Cest en tout cas ce

    qui a t observ dans les Alpes-Mari-

    timesounesemblable expriencead-

    j tmene. Texte: Laurent Nicolet

    Photos: Laurent de Senarclens,Keystone

    Il ne faut pas simaginer que

    ce sera un zoo, prcise encore

    AlainMaibach. Les gens auront

    bien accs la fort,mais pas

    aux parcs lorsquils seront

    occups.Lesparcs seront

    situsenmargeet enboutde

    chemin, si bien quavec un peu

    de chance on pourra apercevoir

    un bison ou lautre.Michel

    Mercier rappelle que si la priorit

    cest dabord les besoins et la

    sant des bisons, il nest pas

    inenvisageable la longue de

    permettre au public dentrer dans

    les parcs sous la conduite dun

    guide.

    Les parcs tant tracs en fonc-

    tion des tangs que compte la fo-

    rt, cest peut-tre l, en am-

    nageant une passerelle ou une

    tour, quon pourra observer les bi-

    sons venant boire.

    Cesanimaux-l semontrent

    de toute faon trsdiscrets.

    Ce sont des grosses btesmais

    qui ne font aucun bruit en se d-

    plaant. Leurmorphologie troite

    leur permet de se faufiler. Alain

    Maibach raconte ainsi que lors de

    la visite dune fort polonaise,

    interdite au public, il leur avait

    fallu trois jours pour apercevoir

    un premier bison.

    Des animauxdune grande discrtion

    Les bisons vivront

    dans plusieurs

    parcs clturs de

    la fort et des

    tangs de Suchy.

    Il reste environ 2000 bisons dEurope

    dans lemonde.

    Lebison

    va favoriser

    la bio-

    diversit

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    SOCIT

    |

    ENVIRONNEMENT

    |

    19

  • Bio express

    Jon Matonis se

    dfinit comme

    un crypto-

    conomiste. Aprs

    avoir longtemps tra-

    vaill comme expert

    en devises auprs

    de diffrentes

    banques et socits

    de cartes de crdit,

    il est aujourdhui

    membre du conseil

    dadministration de

    la Bitcoin Foundation.

    Il crit dans plusieurs

    publications

    financires et signe

    une chronique

    rgulire dans le

    magazine cono-

    mique Forbes.

    Passionn par lesmonnaies, JonMatonis croit dur comme fer la prennit des bitcoins.

    ENTRETIEN

    |

    JONMATONIS

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    20

    |

  • De

    q

    u

    o

    i

    p

    a

    r

    l

    e

    -

    t

    -

    o

    n

    ?

    L

    e

    s

    s

    p

    c

    u

    l

    a

    t

    i

    o

    n

    s

    a

    u

    t

    o

    u

    r

    d

    u

    b

    i

    t

    c

    o

    i

    n

    n

    e

    c

    e

    s

    s

    e

    n

    t

    d

    a

    g

    i

    t

    e

    r

    l

    a

    p

    l

    a

    n

    t

    e

    .

    C

    e

    t

    t

    e

    m

    o

    n

    n

    a

    i

    e

    v

    i

    r

    t

    u

    e

    l

    l

    e

    r

    s

    i

    s

    t

    e

    r

    a

    -

    t

    -

    e

    l

    l

    e

    a

    u

    t

    e

    m

    p

    s

    ?

    R

    c

    e

    m

    m

    e

    n

    t

    ,

    s

    a

    r

    p

    u

    t

    a

    t

    i

    o

    n

    a

    t

    e

    n

    t

    a

    c

    h

    e

    p

    a

    r

    l

    a

    f

    a

    i

    l

    l

    i

    t

    e

    d

    e

    l

    a

    p

    l

    a

    t

    e

    f

    o

    r

    m

    e

    d

    c

    h

    a

    n

    g

    e

    M

    t

    G

    o

    x

    e

    t

    p

    a

    r

    l

    a

    p

    p

    a

    r

    e

    n

    t

    s

    u

    i

    c

    i

    d

    e

    d

    e

    l

    a

    c

    h

    e

    f

    f

    e

    d

    e

    F

    i

    r

    s

    t

    M

    e

    t

    a

    ,

    u

    n

    e

    a

    u

    t

    r

    e

    p

    l

    a

    t

    e

    f

    o

    r

    m

    e

    d

    c

    h

    a

    n

    g

    e

    .

    Lebitcoin est le pire

    ennemi de la corruption

    Lamonnaie virtuelle ne cesse de dfrayer la chronique. Ces derniers jours, elle a

    mauvaise presse. Pourquoi cet or numrique nous fascine-t-il autant? Est-ce

    vrai quil est surtout utilis par des criminels? Pionnier du bitcoin,

    JonMatonis remet les pendules lheure.

    internet hors circuit. Plutt irraliste,

    non?

    Peut-tre, mais les bitcoins sont constam-

    ment assimils la criminalit, notamment

    aux trafics de drogue et darmes.

    Croyez-moi: aujourdhui encore, on

    achte beaucoup plus de drogue et

    darmes enmonnaie sonnante et trbu-

    chante quavec des bitcoins. Toute de-

    vise est susceptible dtre dtourne

    des fins criminelles.

    Divers Etats ont engag une bataille contre

    les bitcoins. La Chine et la Russie les ont

    mme interdits. Pourquoi?

    Cestunebonnequestion,mais cest aux

    Chinois et aux Russes quil faudrait la

    poser

    Et vous, do vous vient cette fascination

    pour le bitcoin?

    Lorsque je travaillais enqualitdengo-

    ciant pour une socit de cartes de cr-

    dit, jchangeais chaque jour environ

    160 devises diffrentes. Jai aussi tudi

    desmoyens de paiement numriques et

    des devises locales parallles. Jai tou-

    jours t fascin par lesmonnaies.

    Quelle dfinitiondubitcoin donneriez-vous

    un profane?

    Il sagit dun moyen dchange non

    contrl par le gouvernement.

    Pourquoi est-il si important quil soit ind-

    pendant des autorits?

    Les rois, qui pouvaient battre monnaie,

    ont abus de ce privilge enmanipulant

    les cours. Et aujourdhui, les pouvoirs

    publics ont un comportement similaire:

    ils dvaluent largent par le biais de lin-

    flation,une formedimptparticulire-

    ment sournoise.Cest ainsi que le dollar

    a perdu97%de sa valeur tout au longdu

    sicle dernier.

    Les bitcoins ne sont quun algorithme abs-

    trait.Commentsont-ils censsnousprotger

    de linflation?

    Ils nepeuvent tremultiplis arbitraire-

    ment. Il ny aura jamais plus de 21 mil-

    lions de bitcoins en circulation.

    Qui sy intresse?

    Des gensde tous les horizons.Les parti-

    sansde ltalon-ory sont favorables,car

    leurquantit est limite,commecelledu

    mtal jaune, tandis qu gauche, on ac-

    corde une grande valeur la transpa-

    rencepromuepar cet outil: le bitcoin est

    en effet le pire ennemi de la corruption.

    Quels sont les avantages de ces deniers vir-

    tuels?

    La suppression des intermdiaires. D-

    sormais, il est possible deffectuer des

    transactionsenbitcoins auxquatre coins

    dumondesans redouter les frais trs le-

    vs qui grvent la conversion des francs

    en dollars ou en euros. En outre, vous

    pouvezparfaitementenstocker survotre

    ordinateur sans avoir de comptes

    rendre personne. Il sagit l dun atout

    non ngligeable aumoment omme le

    secret bancaire suisse est de facto sup-

    prim, ce que dailleurs je regrette

    amrement.

    En somme, les bitcoins permettent chacun

    de bnficier de son propre secret bancaire.

    Oui,onpeut le formuler ainsi.Etdansce

    domaine, nous avons tous droit au res-

    pect de notre vie prive.

    Laconversiondargentenbitcoinsestactuel-

    lement soumise de fortes fluctuations.

    Leprixde lor et surtout celui de largent

    sont aussi trs volatils. Les bitcoins

    nexistent que depuis cinq ans: je suis

    persuad que leur cours va se stabiliser.

    Pour linstant, ils subissent encore les

    attaques de certains gouvernements

    Pas un jour ne passe sans quun nouveau

    scandale li aubitcoinnesoit rvl.Pourquoi

    une telle crise?

    Ne vous laissez pas abuser: les bitcoins

    sont trs rsistants et le systme ne

    scroulera pas de sitt.

    Comment pouvez-vous en tre aussi sr?

    Cettedevise respecte les loisdumarch,

    tout simplement.

    Quid de la faillite potentiellement fraudu-

    leuse de la plateforme dchange de bitcoins

    MtGox?

    Ce cas dmontre justement quavec

    cette monnaie, le march fonctionne.

    Inutile de sauver quelque tablissement

    que ce soit au nomdu principe too big

    to fail. Ceux qui chouent dposent le

    bilan: aucun gouvernement ni aucune

    banque centrale ne doit leur prter

    main-forte.

    Laffaire MtGox ne risque-t-elle pas danan-

    tir la confiance des utilisateurs?

    Pas du tout. Le rseau bitcoin fonc-

    tionne. On peut comparer cette situa-

    tion celle du tlchargement de films

    etdemusique.Celui-ci nestpasprsde

    disparatre, nen dplaise aux industries

    du disque et du cinma. Le seul moyen

    dliminer les bitcoins serait de mettre

    Toute

    devise est

    susceptible

    dtre

    dtourne

    des

    fins crimi-

    nelles.

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    ENTRETIEN

    |

    JONMATONIS

    |

    21

  • Cette semaine chez Charles Vgele:

    Pantalon stretch de coupe Corinna,

    matire superstretch extensible 29.95

    Gilet en maille

    encolure ronde,

    pur coton

    39.95

    Shirts manches courtes et col

    en V arrondi, pur coton 14.95

    2 pour

    40.

    valable du 17.03. au

    23.03.2014

    2 pour

    20.

  • alorsquilsnen sontqu leursbalbutie-

    ments.

    Rendront-ils les banques superflues?

    Nous aurons encore besoin dtablisse-

    ments commerciaux, mais plus de

    banques centrales. Les institutions tra-

    ditionnelles continueront de recevoir

    lpargne des clients et doctroyer des

    crdits.

    Grce leurpolitiquemontaire, lesbanques

    centrales ontpermisdempcherque la crise

    conomiquenese transformeendpression.

    Serait-il vraiment judicieux de sen passer?

    Il sagit dun argument de propagande

    utilis par ces tablissements. Javance-

    rais au contraire que sil ny avait pas eu

    de banques centrales, nous naurions

    mme pas connu la crise. Ces dernires

    sont synonymesdeplanificationcentra-

    lise, et non dconomie de march, et

    constituentdonc leproblme,pas la so-

    lution. Si le libre march reprsente le

    systme le plus efficace pour le com-

    merce du dentifrice, pourquoi ne le se-

    rait-il pas pour le ngoce de devises?

    Les banques centrales ont t cres pour

    pallier les dfaillances des marchs. Quau-

    rions-nous fait sans elles en 2008?

    Il aurait tprfrabledassainir entire-

    ment le systmefinancier.Si lesbanques

    centrales navaient pas vol au secours

    des tablissements en droute, ces der-

    niers auraient t contraints dagir de

    manirebeaucoupplus responsable sous

    peinede faire faillite.Lesbitcoinsoffrent

    la possibilit de mettre sur pied un sys-

    tmefinancier internationalquineserait

    plus tributaire des banques centrales et

    permettrait de punir les irresponsables.

    Le systme repose sur un algorithme com-

    plexe un concept totalement hermtique

    pour la plupart des gens. Comment ces der-

    niers peuvent-ils sy fier?

    Parce quils ont foi dans le march. Les

    bitcoins sont comparables lor: les ci-

    toyenssenremettentaumtal jaunenon

    parce que leur gouvernement les y a in-

    cits,maisparceque,contrairement aux

    billetsdebanque, ilnepeuttremanipu-

    l. Le bitcoin, sorte dor numrique, est

    en passe de devenir une devisemondiale

    servant dtalon aux autresmonnaies.

    Pourquoi de nombreux conomistes re-

    jettent-ils les bitcoins? Dans le New York

    Times, le prix Nobel Paul Krugman amis en

    garde contre leur utilisation.

    Ce dernier est partisan dun Etat fort. Il

    croit aux banques centrales et ne peut

    pas concevoir unemonnaie libre fonde

    sur unmcanisme demarch.

    Unecoexistencepacifiquedesbitcoinsetdes

    banques centrales est-elle inenvisageable?

    Non, mais elle nest possible quau sein

    dun cadre concurrentiel. La lutte sera

    longue et pre.

    Comment les banques centrales peuvent-

    elles mettre en uvre leur politique mon-

    taire si ellesdoiventenparallle rivaliseravec

    les bitcoins?

    Ellesnepourrontplus contrlerque leur

    propre monnaie et perdront ainsi du

    pouvoir et de linfluence.

    Il existe dj plusieurs copies des bitcoins.

    Quen pensez-vous?

    On compte aujourdhui plus de cent

    monnaiesvirtuelles,cequi est sourcede

    confusion. Je pense qu terme, un sys-

    tme dual se mettra en place, limage

    des diverses units demesure telles que

    le kilomtre et lemile ou les degrsCel-

    sius et Fahrenheit.

    Lesbitcoinsont-ils vocationseprenniser?

    Oui. Ils survivront aux gouvernements

    successifs. Aujourdhui, les collection-

    neurs recherchent des billets de banque

    anciens et de vieilles pices sur lesmar-

    chs aux puces.On peut tout fait ima-

    giner quun jour on y dnichera gale-

    ment des euros et des dollars hors

    dusage.

    Quadviendra-t-il du franc suisse?

    Je lignore. Jaime beaucoup les francs

    suisses, en particulier le billet demille

    lemontant le plus lev.

    Peut-on prvoir lvolution des bitcoins au

    cours des dix prochaines annes?

    Ils serontdemieuxenmieuxaccepts,et

    leur utilisation, devenue trs simple, se

    banalisera. Ils simposeront avant tout

    sur les marchs noirs du monde entier,

    qui psent aujourdhui pas moins de

    10 billions de dollars et reprsentent

    donc la deuxime conomie nationale,

    derrire les Etats-Unis. Ils investiront

    galement lespays endveloppementet

    pourraientdevenir unemonnaiedepre-

    mire importance enAfrique.

    Pourquoidevrait-oncontinuerpayerdes im-

    pts si lon peut effectuer des transactions

    en bitcoins sur lesmarchs noirs?

    LesEtatsdevront faire la dmonstration

    de leur utilit et prouver aux citoyens

    quils ne sacquittent pas de toutes ces

    taxes en pure perte. Si lavenir le gou-

    vernementdesEtats-Unis entend finan-

    cer un conflit arm, il devra dabord de-

    mander sonaccord lapopulationam-

    ricaine. Actuellement, cette obligation

    nexiste pas. Les pouvoirs publics

    peuventdcider seulsdentrer enguerre:

    ils reoivent alorsdes fondsde labanque

    centrale.

    En dautres termes, la paix ternelle dpend

    du succs des bitcoins

    Exactement. Jene lauraispasmieuxdit!

    Texte: Philipp Lpfe

    Lebitcoin

    est en

    passede

    servir

    dtalon

    auxautres

    monnaies.

    De largent virtuel

    Les bitcoins, qui ressemblent un

    peu aux pices deuros, ne sont

    prcisment pas des pices au

    sens traditionnel,mais la reprsen-

    tation dune devise virtuelle.

    Quest-ce que cela veut dire?Un

    Japonais du nomde Satoshi Naka-

    mato il sagit sans doute du pseu-

    donymedun ou plusieurs individus

    a dvelopp un algorithme, une

    drivationmathmatique dans

    lesprit de si a=b et b=c, alors a=c,

    mais en beaucoup plus compli-

    que. Cet algorithmeproduit grce

    un programme trs complexe des

    bitcoins.

    Levolumedebitcoins est dfini

    par lalgorithme et limit en quanti-

    t et en temps. Il ny aura jamais

    plus de 21millions de bitcoins, li-

    mite qui devrait tre atteinte au-

    tour de 2140.Les bitcoins sont

    aussi appels or virtuel.

    Comme lor, ils peuvent tre chan-

    gs en francs ou dollars. Son cours

    est trs fluctuant.Quelques

    commerces en Suisse aussi

    acceptent les bitcoins

    commemonnaie dchange. La

    devise peut tre divise jusqu

    8 dcimales aprs la virgule. On

    pourrait payer 0,00000007.

    Photos:KaiJnemann,Keystone

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    ENTRETIEN

    |

    JONMATONIS

    |

    23

  • Pull graphique, coupe de cheveux

    savamment sculpte et pose ti-

    mide: Genve, Rootwords brise

    enuneseconde les clichsdu rappeur ri-

    chement bijout de toc tout droit sorti

    dun ghetto.

    Ma musique sinspire plutt des

    pres fondateurs du hip-hop qui pr-

    naient lamour, la paix et lunit, ex-

    plique dune douce voix Rootwords, de

    sonvrainomJulioMwansoNkowane.Le

    ct bling-bling et gangsta est venu par

    la suite lorsquedesproducteursontvou-

    lu rendre ce style plus commercial, plus

    accrocheur.

    A ce hip-hop underground, Root-

    words a ajout une touche de reggae, de

    soul et dlectropourun rsultat percu-

    tant, dcouvrir dans The Rush, son

    premier album dont la sortie est prvue

    le 28mars.

    Un citoyen dumonde qui se sent

    Genve lamaison

    Ct textes, le rappeur,dans le sillage de

    ses modles que sont Talib Kweli ou

    Common,par exemple, est rest fidle

    une ligne o les paroles claquent dans le

    flow du rappeur et o les jeux de mots

    voquent des images chres lauteur.

    Pour moi, les frontires alinent les

    peuples et crent des diffrences, alors

    que nous vivons tous ensemble sur la

    mme plante. Jaimerais que ma mu-

    sique ouvre les esprits.

    Sil est quelque peu idaliste, le dis-

    cours se base toutefois sur une exp-

    rience bien relle.N aux Etats-Unis o

    il a pass la premire partie de son en-

    fance, Rootwords a aussi longtemps v-

    cuenZambie,patriede sesdeuxparents,

    avant darriver Genve, o

    son pre est venu travailler

    lOrganisationmondiale de la

    sant. Par la suite, jai com-

    mencdes tudes en relations

    internationales Londres

    car dj je voulais changer le

    monde avant daller habiter

    en Australie.

    De retour au bout du lac

    Lmano il se sent lamai-

    son , Rootwords dcide de

    concrtiser une ide quil

    avait en tte depuis ses 16 ans: devenir

    rappeur.

    Mais la sageGenveest-elle vraiment

    la ville adquate pour dvelopper ce

    genre demusique? You know, certains

    crivains se rfugient dans des endroits

    reculs pour trouver linspiration. Pour

    moi,cestpareil. Jai justementbesoinde

    ce calme pour que ma crativit sex-

    prime.

    En 2012, aprs avoir peaufin ses

    titres, Rootwords prsente son travail

    un jury international valuant chaque

    anneprsdehuit centsmaquettesdans

    le cadrede laDemotapeClinicdu festival

    M4music.Les jurs ont t assez cash.

    Ilsmontpar exemple reproch labsence

    de vrai refrain. Recal.

    Une fois la dception passe,

    Rootwords se remet la tche et se re-

    prsente lanne suivantece

    mmeconcours.Le jury est

    toujours aussi direct, mais

    cette fois, lescritiquestaient

    positives.Onmadit quemes

    textes taientmieux poss et

    quema dmo avait un niveau

    international. Au final, jai

    gagn le premier prix dans la

    catgorie Urban.

    Lhistoire avec le festival

    ne sarrte pas l, puisque

    cette anne Rootwords y

    donnera deux concerts: lun Lausanne

    lors dun showcase dans les studios de

    Couleur 3 et lautre Zurich. Ce sont

    des rendez-vous importants pour moi,

    car toute laprofession sera l. Il est vrai

    que Rootwords na pas lintention de

    sarrter en si bon chemin. A suivre

    donc. Texte: PierreWuthrich

    Photos: Nicolas Righetti, Keystone

    www.rootwords.ch, www.m4music.ch.

    Gagnez des places pour des showcases exclusifs

    Conu et organis par le Pour-cent

    culturel Migros, le festival de musique

    pop M4music allie concerts,

    confrences, concours de la

    Demotape Clinic et remise dumeilleur

    clip vido de Suisse. Il se droulera

    cette anne Lausanne et Zurich du

    27 au 29mars. Pour la premire fois,

    des concerts (gratuits) seront

    organiss en plein air Zurich, et des

    showcases exclusifs se drouleront

    dans les studios de Couleur 3 de

    Lausanne le 27 mars avec les Blood

    Red Shoes, Rootwords,Wolfman et

    Nadine Carina.Pour ces quatre

    performances, Migros

    Magazinemet en jeu 3 x 2 billets.

    Tentez votre chance sur le site

    www.migrosmagazine.ch/

    coupdechance (dlai de participation:

    20mars 2014).

    Cest un rappeur

    pas comme les autres

    A la branche bling-bling et gangsta du hip-hop, le Genevois Rootwords prfre

    le courant pacifiste et unificateur de ce stylemusical. A entendre Lausanne et

    Zurich, dans le cadre du festival M4music.

    Jaimerais

    quema

    musique

    ouvre

    les esprits

    24

    |

    INFOS MIGROS

    |

    POUR-CENT CULTURELMIGROS

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

  • Du ct de chez

    Kermit

    Je suis fan du batteur

    du Muppet Show,

    Animal. Sa peluche

    est toujours avec moi.

    Ce musicien est libre desprit

    et vit comme il est. Animal

    ne fait que jouer et parle trs

    peu. De plus, cest le seul de

    la troupe dont on ne se

    moque pas. On rit avec lui mais pas de lui.

    Cest compltement diffrent.

    Du ct de chez

    Kermit

    est toujours avec moi.

    Ce musicien est libre desprit

    et vit comme il est. Animal

    ne fait que jouer et parle trs

    peu. De plus, cest le seul de

    Un passionn

    de cinma

    Jadore

    lesthtique des

    films des seventies

    avec les blacks

    qui ont de gros

    flingues. Pour

    tourner le clip

    Django, nous

    nous sommes

    beaucoup inspirs

    de cette ambiance

    ainsi que, bien sr,

    de la filmographie de Quentin Tarantino qui

    reprend aussi ces codes. Par ailleurs, jadore

    les films de zombies. Malgr le fait quau

    final lhistoire est toujours la mme (des

    gens se font mordre et deviennent morts-

    vivants), je pense sincrement avoir vu tout

    ce qui existe dans le monde ce sujet!

    Les sept vies selon

    Shakespeare

    Dans la pice

    de Shakespeare

    As You Like it

    (Comme il vous

    plaira, ndlr),

    jaime beaucoup

    le monologue

    commenant par:

    Le monde entier

    est un thtre,

    et les hommes et les femmes ne sont

    que des acteurs. Ensuite, lauteur

    dveloppe les sept rles dun homme:

    lenfant, lcolier, lamoureux, le soldat,

    le juge, le vieillard et le second enfant.

    Personnellement, je pense aujourdhui

    avoir termin le stade du guerrier.

    Rootwords,

    un look discret

    pour un hip-hop

    qui revient aux

    sources.

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    INFOSMIGROS

    POUR-CENTCULTURELMIGROS

    |

    25

  • 26

    |

    INFOS MIGROS

    |

    M-INDUSTRIE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    Composdedix-sept entreprises enSuisse

    et de trois socits ltranger, le groupe

    M-Industrie produit plus de20000articles

    allant de la confiture la lessive. Avec ses

    quelque 11 000collaborateurs,dont415 ap-

    prentis exerant plus de vingt mtiers,

    M-Industrie est lun des principaux em-

    ployeurs deSuisse et compteparmi les plus

    grands fabricants au monde de marques

    propres. Elle fournit Migros et exporte des

    produits suisses de qualit dans plus de

    cinquante pays. Migros Magazine lui

    consacre une srie de portraits.

    Informations: www.mindustry.com.

    D

    u bout de son doigt,MarkusGiger

    pointe la minuscule enveloppe

    dungrainde riz,doaffleureune

    petite tige verte.Avecun seul grain,on

    enproduit quarante soixantedeplus!

    Lavoixvibrantedenthousiasme, lagri-

    culteur smerveille toujours autant de

    cemiracle de lanature,bienquil cultive

    depuis 1981 dj les terres du domaine

    Terreni allaMaggia au Tessin.

    Fonde au dbut des annes 1930,

    cette exploitation agricole possde 150

    hectares de terrain. Depuis le dbut des

    annes2000,89sontdvolus laculture

    sche du riz.Le sol dudelta de laMag-

    gia, trs sableux,ne retientpas leau,ex-

    plique le paysan. Nous larrosons donc

    une foispar semaine.Eneffet, le riz se-

    mauprintempsnedoitpas scherpour

    pouvoir rsister aux maladies. Leau,

    cest facile,poursuitMarkusGiger,mais

    la chaleur, on ne peut pas la fabriquer!

    Heureusement, le soleil tessinois sen

    charge, lui qui,encet instantmme, joue

    dans les immenses jets deau qui

    abreuvent les jeunes pousses pour for-

    mer dinnombrables arcs-en-ciel.

    Ce qui ntait au dpart quune exp-

    rience sur deux hectares sest transfor-

    m en un projet phare. Les connais-

    sances thoriques ont t glanes sur

    des salons professionnels en Italie, le

    reste a t acquis avec la pratique. Car

    comme le dit le proverbe, cest en for-

    geant quon devient forgeron.

    Dans cette rgion, la moins leve de

    Suisse (198 mtres daltitude), le riz est

    sem une fois par an, au plus tard en

    avril, contredeux foispar anpour laplu-

    part des autres crales.

    Parmi toutes les varits existantes,

    cest celle du riz pour risotto loto qui a

    t choisie, car elle permet une rcolte

    enoctobre,cent cinquante jours aprs le

    Le grenier

    riz de la Suisse

    La socit Riseria Taverne SA,membre du groupe

    M-Industrie, traite non seulement les grains vendus

    Migros,mais aussi quelque 5000 tonnes servant

    alimenter les rserves de la Confdration.

    1

    12

    e

    PISODE: RISERIATAVERNESA, LARIZERIEMIGROS

  • |27

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    INFOS MIGROS

    |

    M-INDUSTRIE

    semis. Ce nest pas le cas du Carnaroli,

    trs apprci, mais qui ncessite cent

    nonante jours de maturation un dlai

    trop long compte tenu du climat tessi-

    nois.

    Prs de lamoiti de la production lo-

    cale est achete parMigros.Toutefois, il

    reste encore quelques tapes avant den

    arriver l.Lorsque lesgrains atteignent

    un tauxdhumiditde25%, le riz estbat-

    tu, nous apprend Markus Giger. Une

    fois schs, les grains sont dbarrasss

    de la fine enveloppequi les recouvre,ap-

    pele balle, et transforms en riz se-

    mi-brut (ou complet). Cest sous cette

    formequeTerreni allaMaggia et lespro-

    ducteurs du monde entier livrent la c-

    rale lentreprise Riseria, une entre-

    prise de la M-Industrie sise dans le vil-

    lage de Taverne (TI).

    Notre riz est certifi IP-Suisse, car,

    hormis le recours exceptionnel aux fon-

    SAVIEZ-VOUSQUE

    ... la culture du riz, vieille de plus

    de 6000 ans, est la plus ancienne

    dumonde?

    ... Riseria produit certaines varits

    de riz spcialement pour Migros?

    ... le riz est dpourvu de certains

    allergnes, comme le gluten?

    ... la population suisse consomme

    120 tonnes de riz par jour?

    1)Markus Giger,

    du domaine

    agricole Terreni

    allaMaggia,

    prpare le tracteur

    pour le semis.

    2) Prs dAscona

    (TI), les jeunes

    pousses zbrent

    les champs de vert

    tendre.

    3) Sous le soleil

    du Tessin pousse

    un riz idal pour le

    risotto.

    4) Un grain de

    riz donne 40

    60 rejetons.

    2

    3 4

  • 28

    |

    INFOS MIGROS

    |

    M-INDUSTRIE

    |

    N

    o

    12, 17 MARS 2014

    |

    MIGROSMAGAZINE

    |

    PROFIL PROFESSIONNEL

    Nunziante

    Montemarano,

    un fidle employ

    Voil plus de trente ans que

    NunzianteMontemarano

    travaille Riseria, Taverne.

    Cest en 1983 quil fait ses

    dbuts lusinage, en tant

    quemachiniste. Auparavant,

    il tait au service dun

    producteur dhuile de la rgion,

    souvent en horaires de nuit.

    Une contrainte que je nai plus

    Riseria, se rjouit-il. A partir

    de 1995, il dirige lquipe

    dusinage charge du contrle

    qualit des produits bruts et

    des marchandises arrivant la

    rizerie, avant dintgrer lunit

    de contrle qualit. L, outre

    la vrification la rception,

    Nunziante Montemarano doit

    grer la production des

    chantillons pour les clients

    de Riseria et lvaluation des

    livraisons des fournisseurs.

    Jobserve la teneur en eau,

    la part de brisures, les tailles,

    labsence de grains verts ou

    tachs. Ces responsabilits

    croissantes ne lempchent pas

    de continuer contrler les

    machines, son grand plaisir.

    Elles me fascinent, avoue-t-il.

    Mais sa vraie passion, ce sont

    lesmontagnes. Ce grimpeur

    chevronn sait dj ce quil fera

    de sa retraite: Jaimerais aller

    au Npal pour escalader les

    sommets. Pour le moment, la

    montagne la plus haute que jaie

    gravie reste la Pointe-Dufour,

    qui culmine 4634mtres.

    gicides, nous nutilisons ni engrais ni

    herbicidesdansnoscultures, fait valoir

    lagriculteur.

    Plus de 50% des crales que nous

    transformons proviennent dItalie,

    poursuit Daniel Feldmann, le directeur

    deRiseria. Ici, lonprocde lusinagede

    la plus vnrable graine du monde. La

    production mondiale atteint 600 mil-

    lions de tonnes, dont 90% en Asie et en

    Ocanie.Une infimeproportionprend le

    cheminde laSuisse: eneffet,avecseu-

    lementsixkilospar anetparpersonne,

    nous consommons vingt fois moins de

    riz que les Asiatiques.

    Tous les rsidus sont valoriss

    avec soin

    Riseriaproposevingt trente sortesde

    riz. Nous accordons une grande impor-

    tance la qualit de chacune delles,

    explique le dirigeant. Ce nest pas tou-

    jours facile: aujourdhui, un nombre

    croissantde terres cultivables sont acca-

    pares par dautres crales comme le

    mas, aux Etats-Unis notamment, mais

    aussi en Italie.

    Daniel Feldmann laisse errer son re-

    gard sur les imposants silos de la rizerie:

    quarante etunenacier chromet trente-

    deux en bton, tous remplis de riz se-

    mi-brut. Sur ce stock, 5000 tonnes

    constituent des rserves alimentaires

    une obligation fdrale pour parer aux

    pnuries, rvle-t-il. Cest pour cela

    quonnousappelleparfoi