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La scoliose idiopathique de l’enfant et de l’adulte© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Résumé
L’imagerie est un élément déterminant de la prise en charge des scolioses idiopathiques. Les radiographies sont utilisées pour détecter notamment une aggravation de la déformation durant la croissance. L’imagerie est également utile au dépistage des dif-férentes étiologies des scolioses secondaires. Enfin, l’imagerie est utile chez l’adolescent comme chez l’adulte au bilan préthérapeu-tique et au suivi postopératoire. Les différentes techniques d’ima-gerie utilisées doivent prendre en compte la réduction potentielle de la dose de rayonnement ionisant reçue par le patient, comme cela est le cas avec les techniques récentes de radiographie numérisée.
summaRy
Imaging in scoliosis is very important. Most cases of scolio-sis are idiopathic and imaging is used routinely in monitoring the changes of the deformity that take place during growth. Imaging is also crucial in determining the underlying etiology in non-idiopathic cases of scoliosis. Finally, imaging is used in pre- and postoperative monitoring. Radiographic techniques should be used to minimize radiation of sensitive organs as the introduction of digital radiography.
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Scoliosis imaging in adults
Imagerie de la scoliose de l’adulte
IntroductionLes troubles de la statique rachidienne sont surtout étudiés par les orthopédistes pédiatres, alors que les difficultés peuvent survenir à tout âge avec une continuité enfant–adulte. Le radiologue a une place importante dans la prise en charge de ces patients, quel que soit leur âge, au moment du diagnostic, au cours de la surveillance, et pour le bilan préopératoire lorsqu’une indication opératoire est posée [11].
La scoliose se définit, en opposition à l’attitude scoliotique (inclinaison dans le plan frontal qui se corrige lorsqu’on supprime la cause), par une déformation structurale dans les trois plans de l’espace. Elle apparaît dans 20 % des cas dans le cadre d’une maladie connue et, dans 80 % des cas, elle est idiopathique [12].
Quel que soit l’âge de découverte de la scoliose, une radiographie de l’ensemble du rachis de face et de profil est réalisée. Ce premier bilan radiologique, associé à l’examen clinique, va permettre d’identifier trois situations :
•lebilancliniqueet radiologiqueestnormalet toutlaisse à penser qu’il s’agit d’une scoliose idiopathique ;•le bilan radiologiquedépiste unemalformationoules signes d’une maladie osseuse constitutionnelle ;•lebilancliniqueorienteversunescoliosesecondaired’origine neurologique ou neuromusculaire.
DiagnosticIl est essentiellement fait par les radiographies standard.
TechniquesPour confirmer le diagnostic de scoliose chez l’enfant comme chez l’adulte, les radiographies du rachis en entier de face et de profil (de la base du crâne au sacrum avec visualisation des crêtes iliaques) sont indispensables [4,5]. Les radiographies sont aussi réalisées en première intention pour un bilan de scoliose chez l’adulte, avec utilisation fréquente des clichés segmentaires (figures 1 et 2). Ce bilan radiographique doit utiliser les techniques les moins irradiantes,
1Service de radiologie B, hôpital Cochin, 27, rue du FaubourgSaintJacques, 75679 Paris cedex 14, France
Mots clés : Scoliose de l’adulte. – Imagerie. – TDM. – IRM.
Keywords: Adult scoliosis. – Imaging. – CT-scan. – MRI.
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puisque les organes radiosensibles sont dans le champ d’exploration (seins, moelle osseuse, thyroïde, organes génitaux), et que les grands clichés seront répétés lors du suivi [4,7]. Ceci implique de limiter le nombre de clichés au strict minimum nécessaire et d’adopter une technique numérique avec réduction effective de la dose.
Les techniques de radiologie conventionnelle sur grande cassette sont encore utilisées mais ces clichés « grandeur nature » sont irradiants et leur qualité est variable, car ils nécessitent une grande rigueur technique. de plus, le matériel (surfaces sensibles) adéquat est en voie de disparition.
Les techniques numérisées classiques sont les solutions alternatives les plus largement disponibles.
Trois technologies différentes sont utilisées [4] : •leslogicielsdereconstruction2Dàpartird’acquisitions numériques séquentielles en sortie d’amplificateur de brillance ;
•l’assemblaged’imagesobtenuesaprèsacquisitionsurcassettes phospholuminescentes ;•les capteursplans intégrés aux tables télécommandées qui représentent une solution d’avenir, car la qualité d’image est très bonne avec une dose réduite.
Une autre alternative intéressante dans ce domaine est le système EOS™ (Biospace Med, Paris, France). Ses principaux avantages sont (figures 3 et 4) : 1. la réduction considérable des doses de rayons X (de
8 à 10 fois moins que pour la radiologie conventionnelle) ;
2. l’étude du patient en charge en position debout obtenant des clichés simultanés de face et de profil du sommet de la tête jusqu’à la plante des pieds ;
3. la possibilité de reconstruction en 3d de surface avec une excellente précision et le calcul automatique des paramètres 2d et 3d associés (rotations, longueurs, angles, etc.).
Figure 1. Scoliose majeure dans le cadre d’une maladie de Marfan.Fille, 20 ans. Radiographies du rachis entier de face.
Figure 2. Scoliose adulte. Radiographies segmentaires du rachis dorsal de face.
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Figure 3. Imagerie EOS™ d’une scoliose dégénérative chez un patient de 60 ans.Dislocation de la vertèbre L3. Appréciation des anomalies de la statique en position debout : inflexion latérale marquée dans le plan frontal et accentuation de la cyphose dans le plan sagittal.
Figure 4. Scoliose dégénérative.Suivi évolutif avec EOS™ 3D entre 2003 et 2007.
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Analyse des radiographiesCe premier bilan radiologique permet de diagnostiquer une éventuelle cause à la scoliose comme une malformation vertébrale (hémivertèbre), une lyse isthmique, ou de suspecter une maladie osseuse constitutionnelle.
Cette démarche étiologique implique une analyse rigoureuse de la morphologie de chaque vertèbre aussi bien sur le cliché de face que sur le profil. L’incidence de face permet d’analyser les courbures et de mesurer l’angle de Cobb. La vertèbre sommet est la plus éloignée de la ligne médiane, les vertèbres limites sont les plus inclinées à chaque extrémité de la courbure; ce sont elles qui permettent de mesurer l’angle de Cobb. Les vertèbres neutres, définies par l’absence de rotation de leur épineuse, sont situées de part et d’autre du sommet. Le sens de la courbure est celui de la convexité. En cas de courbures multiples, la courbure principale est celle qui a le plus de vertèbres incluses avec la rotation la plus importante. La courbure est dite de compensation lorsqu’elle ne comporte pas de rotation sur le cliché couché. L’angle de Cobb est construit par l’angle entre le plateau supérieur de la vertèbre limite supérieure et le plateau inférieur de la vertèbre limite inférieure (figure 5). Au cours du suivi, les mesures doivent être réalisées avec les mêmes repères anatomiques. C’est un indicateur partiel de la déformation, puisque la mesure s’effectue sur la projection 2d d’une
déformation 3d. La variabilité interobservateur est évaluée à 3–4°. La rotation vertébrale peut être évaluée par plusieurs méthodes [1,6] au niveau de la vertèbre sommet (figure 6) : •méthode de Cotrel : la vertèbre est divisée en sixparts égales; plus la rotation est importante, plus l’épineuse se rapproche du bord concave ;•méthodedeNashetMoe:l’éloignementdelaprojection du pédicule convexe par rapport au bord convexe de la vertèbre est le témoin de la rotation.
L’incidence de profil permet d’évaluer la cyphose dorsale et la lordose lombaire. La verticale tracée à partir des conduits auditifs externes doit normalement passer par C6, L3, le milieu de l’interligne L5/S1 et le centre des têtes fémorales. La cyphose dorsale est mesurée par l’angle formé entre la tangente de T4, et la tangente de T12.
Les clichés en inclinaison (« bending test ») : inclinaison latérale de face ou inclinaison vers l’avant ou l’arrière de profil permettent d’évaluer la réductibilité (souplesse) de la déformation, et donnent des informations sur le comportement des disques. Une courbure est souple si sa réductibilité atteint 50 %, et raide si sa réductibilité ne dépasse pas 30 %.
Intérêt de l’IRMAu moment du diagnostic, certaines caractéristiques cliniques imposent la réalisation d’une imagerie par résonance magnétique (IRM) [3]. La douleur dans une
Figure 5. Schéma de l’angle de Cobb.Figure 6. Schémas de mesure de la rotation vertébrale.a. Cotrel. b. Nash et Moe.
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scoliose est considérée comme un point d’appel même si l’étude de Ramirez et al. [10] a montré que ce symptôme était loin d’être exceptionnel dans une série de 2442 cas de scolioses idiopathiques.
Une raideur impose également la réalisation d’une IRM. Une anomalie de l’examen neurologique, une scoliose malformative ou tumorale, une courbure courte ou thoracique gauche sont aussi des indications à une IRM au moment du diagnostic. L’IRM permet de faire le bilan du contenant et du contenu, apprécie le calibre et le signal de la moelle sur toute sa hauteur. On recherche une éventuelle malformation de Chiari, une syringomyélie, une tumeur médullaire, une anomalie du signal de la moelle ou un dysraphisme.
Une IRM pour bilan de scoliose est en général plus longue à réaliser qu’une IRM standard du rachis. Les séquences utiles sont simples : T1, T2, STIR, T1 avec injection intraveineuse de gadolinium. Mais la déformation complique le positionnement des coupes, avec plusieurs segments et obliquités nécessaires pour une étude complète en 2d. Le plan frontal est souvent très utile en complément du plan sagittal et du plan axial. Certaines séquences volumiques 3d sont intéressantes pour l’étude médullaire et radiculaire.
Intérêt de la tomodensitométrieChez l’enfant, la tomodensitométrie (TdM) est surtout intéressante dans le bilan des malformations
vertébrales pour préciser l’existence ou non d’une barre interpédiculaire. Elle permet également de faire le bilan du retentissement de la scoliose sur l’arbre trachéobronchique. C’est un examen irradiant mais qui reste justifié dans les indications mentionnées [8].
Chez l’adulte et en particulier le sujet âgé, les indications de la TdM sont plus larges car c’est le meilleur examen d’imagerie pour le diagnostic précis des lésions osseuses (figure 7) et l’irradiation est moins problématique. La TdM est très souvent réalisée dans le bilan préopératoire d’une scoliose dégénérative du sujet âgé afin d’estimer au mieux le calibre du canal rachidien, l’état des articulations postérieures, l’aspect des pédicules.
Pour un bilan de scoliose, la TdM est réalisée selon un protocole permettant de reconstruire les données en 2d (axial, frontal, sagittal, obliques) et en 3d. L’acquisition volumique doit étudier la zone d’intérêt (rachis lombaire et sacrum, rachis dorsolombaire et sacrum, rachis cervicodorsal) avec un repérage précis du niveau des vertèbres.
Ce repérage est essentiel pour la planification de l’intervention par le chirurgien.
SuiviChez l’adulte, l’imagerie sera utilisée essentiellement pour surveiller l’évolution d’une scoliose quelle que soit sa cause, pour le diagnostic lésionnel précis en
Figure 7. Patiente de 24 ans, scoliose connue depuis l’adolescence.Apparition d’une symptomatologie douloureuse lombaire depuis 1 an. L’examen clinique retrouve une gibbosité modérée qui témoigne du caractère structural de la déformation rachidienne. Les radiographies simples (a) montrent une lésion ostéolytique de L3. Le scanner (b) précise l’atteinte pédiculaire et la rupture du mur postérieur. La biopsie percutanée permet le diagnostic histologique de chondro-blastome de L3. Patiente opérée avec exérèse complète de la lésion.
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cas de douleurs rachidiennes (figure 8) ou radiculaires, pour le bilan préopératoire, et en postopératoire (complications éventuelles) [2,9].
Les scolioses dégénératives, évolutives, ne doivent pas être négligées. Les clichés radiographiques segmentaires concernent d’abord l’étage lombaire et le bassin. Ils permettent une première analyse mais sont insuffisants pour orienter la thérapeutique. Après
plusieurs années d’évolution d’une scoliose, et en particulier chez le sujet âgé (figures 9 et 10), il existe en effet une intrication des conséquences de la déformation rachidienne et des lésions liées au vieillissement (arthrose, ostéopénie, déformations, tassements vertébraux). Une imagerie en coupes est alors nécessaire pour détecter les lésions articulaires et discales (figure 11) accessibles à un traitement local percutané (infiltrations cortisoniques).
L’IRM du rachis entier donne une vision globale du rachis et de la moelle avec les coupes sagittales et frontales. Les coupes axiales et axiales obliques permettent de chercher un conflit discoradiculaire, une arthrose postérieure. L’IRM détecte aussi une éventuelle myélopathie cervicarthrosique. La TdM volumique est une excellente méthode pour faire le point sur les lésions osseuses et articulaires chroniques : sclérose, érosion, hypertrophie, déformation vertébrale. Les TdM multicoupes actuelles sont très performantes et même en cas de matériel d’instrumentation métallique (scoliose opérée), les artéfacts sont limités, avec des images qui restent exploitables. Enfin, l’imagerie interventionnelle permet souvent de soulager de manière efficace certaines douleurs spécifiques : lombalgies postérieures, radiculalgies, pygalgies. Les infiltrations cortisoniques peuvent être réalisées sous guidage scopique ou TdM.
L’indication de ces infiltrations est à discuter au cas par cas et au mieux de manière multidisciplinaire (staff rachis).
Figure 8. Patiente suivie pour une scoliose ancienne avec anté-cédents chirurgicaux du rachis et nombreuses infiltrations.Admise en hospitalisation pour des douleurs du rachis et un syn-drome inflammatoire biologique. Les radiographies (a) montrent une déformation rachidienne marquée et un aspect élargi des interlignes des articulations sacro-iliaques. Le scanner (b) confirme les anomalies des articulations sacro-iliaques et montre un aspect condensé de l’os. Une IRM du rachis (c) et du bassin (d) montre un épanchement bilatéral des articulations sacro-iliaques et un abcès obturateur interne à droite. Une biopsie percutanée de l’ab-cès et des sacro-iliaques a été réalisée ensuite pour le diagnostic bactériologique (pyogène).
Figure 9. Lombalgies chez une femme de 67 ans.Les radiographies montrent une scoliose dégénérative avec rota-tion des dernières vertèbres lombaires. Tassements vertébraux étagés de la charnière thoracolombaire.
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ConclusionLe but de l’imagerie de la scoliose est de faire un diagnostic lésionnel et étiologique précis, mais aussi de
suivre le patient pendant plusieurs années et de prévoir un traitement adapté. À ce titre, les techniques modernes d’imagerie (scanner IRM, système EOS™) représentent un progrès technique majeur.
Figure 10. Lombalgies chez une femme de 67 ans.Les radiographies montrent une scoliose dégénérative avec dislocation lombaire. Lésions discales étagées.
Figure 11. Homme de 56 ans, suivi en rééducation pour des lombalgies basses et radiculalgies bilatérales en rapport avec une scoliose dégéné-rative.La radiographie du rachis lombaire de face (a) montre une déformation à convexité gauche et un déséquilibre du bassin. Lésions osseuses et articulaires en L5-S1 d’évaluation très difficile. Complément d’exploration avec un scan-ner volumique centré sur le rachis lombaire, images coronales passant par les corps vertébraux (b) et les articulaires postérieures. Le scanner permet de préciser les lésions osseuses, discales et articulaires avec une déformation et une perte de hauteur de L5, des érosions des plateaux vertébraux en L5-S1, et une décoaptation de l’articulaire gauche en L4-L5. Une IRM (c) du rachis entier en pondération T1 et STIR montre aussi les lésions discales majeures en L4-L5 et L5-S1 avec épanchement articulaire postérieur. Discopathie modérée en L3-L4. Les disques lombaires sus-jacents et les disques thoraciques sont normaux. Cervicarthrose étagée associée.
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